Catholique et libéral : Les raisons morales d’une économie libre, de Robert Sirico

Aucun autre système économique que le capitalisme n’y a réussi de façon aussi éclatante à aider les plus démunis : tel est le message du livre du père Sirico traduit en Français.

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Catholique et libéral : Les raisons morales d’une économie libre, de Robert Sirico

Publié le 7 septembre 2018
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Par Thierry Godefridi.

Méfions-nous des idéologues, de leurs beaux discours et de leurs petites idées ! Ce serait en quelque sorte cette retranscription moderne du « Timeo Danaos et dona ferentes » de Virgile dans l’Iliade que l’on pourrait attribuer au père Robert Sirico à la lecture de son ouvrage Catholique et libéral qui a été publié en août aux Éditions Salvator à Paris. Prêtre, catholique et libéral ? Sous l’égide du Pape François ?

L’ouvrage est courageux, comme le parcours de Robert Sirico qui a délaissé l’Église catholique avant d’y revenir, a vécu les chimères de l’idéologie gauchiste californienne avant d’adhérer pleinement au libre marché et à la libre entreprise, réconciliant sa quête spirituelle avec la réalité du monde.

Trop d’entre nous ont perdu espoir, constate-t-il en substance. Ils ne se projettent plus dans un avenir qu’ils entrevoient prospère pour eux-mêmes et les générations futures, leur communauté et leur pays. Ce n’est pas l’affaire de quelques chiffres au budget, c’est une affaire de liberté. Un état de confusion de nature orwellienne s’est installé dans l’Occident, l’État-providence, qui a entraîné l’impossibilité de poser pour soi-même des choix d’ordre moral, économique, social et religieux et d’en assumer la responsabilité.

Un droit sacré

En ces matières, les droits (à distinguer des privilèges) se soutiennent les uns les autres et le premier d’entre eux, le droit de propriété, sans lequel aucune liberté n’est concevable, la liberté économique, la liberté d’expression ou la liberté religieuse, par exemple. Le droit de propriété doit être reconnu à l’être humain de même qu’il jouit d’autres droits fondamentaux de par le simple fait de son existence sans qu’il ne soit besoin que l’État ne les lui concède.

Le père Sirico ajoute que, d’un point de vue catholique, il s’agit d’un droit sacré car il est attaché à l’être humain créé par Dieu à son image et doté de discernement dans un contexte de rareté. En effet, il serait difficile d’expliquer le commandement « Tu ne voleras point » si la Bible ne reconnaissait pas la légitimité du droit de propriété.

Si des milliards de personnes se sont arrachées à la misère au cours des deux cents dernières années, ce n’est pas grâce à la charité, ni grâce aux aides d’État, c’est grâce au commerce, à l’entreprise et au marché. Cela se vérifie encore et encore. Quand les gens sont libres d’entreprendre et d’accéder aux marchés régionaux et mondiaux, l’économie se développe, un grand nombre de personnes sortent de la pauvreté et finissent par prospérer.

L’exemple de la Corée

Robert Sirico prend l’exemple éclairant de la Corée, un même pays divisé entre le Sud qui respecte les droits fondamentaux et la liberté d’entreprendre et où règne la prospérité et le Nord qui nie toute forme de liberté et où règne l’indigence. L’on doit à Marx le fait de considérer l’économie comme un jeu à somme nulle et les politiciens adhèrent à cette vision car la politique est un jeu à somme nulle. Le succès en politique n’est pas fondé sur la prouesse économique, la création de richesse, mais sur l’habilité tactique. L’idée d’une masse de travail fixe à partager est un leurre. (que l’on pense aux 35 heures instaurées en France pour réduire le chômage…)

L’économiste Hernando de Soto, auquel Robert Sirico se réfère, considère lui aussi que les pauvres n’ont pas besoin de l’aumône mais d’un cadre légal encourageant les aspirants entrepreneurs plutôt qu’il ne les étouffe et a assigné pour mission à l’Institut pour la liberté et la démocratie qu’il préside de promouvoir des réformes dans ce sens, en particulier en ce qui concerne la protection des droits de propriété, au Pérou et dans les pays en voie de développement.

Il suffit, pour se convaincre de la nécessité d’un tel cadre légal, de consulter la liste publiée par la Banque mondiale des pays les plus favorables (Singapour, Corée du Sud, Hong Kong, États-Unis, Royaume Uni…) et les moins favorables (Tchad, Haïti, Congo, Venezuela…) à l’entreprise. Ce n’est pas la charité qui aidera le second groupe à prospérer, c’est la liberté.

Aider les pays pauvres

Que peuvent donc faire les pays riches pour aider les pays pauvres ? Premièrement, ne pas attiser l’irresponsabilité gouvernementale et la corruption ; deuxièmement, ne pas miner l’économie locale en arrosant gratuitement les pays pauvres de marchandises que les entreprises locales produisent elles aussi ; troisièmement, leur ouvrir les marchés mondiaux.

C’est tout le contraire de ce que font les pays riches lorsque, d’un côté, ils instaurent des droits de douane pour protéger leur marché des économies émergentes et, d’un autre côté, ils dépensent des milliards prélevés sur l’argent de leurs contribuables en aides gouvernementales au développement.

Jack Ma, le CEO d’Alibaba, ne dit pas autre chose lorsqu’il inaugura à Melbourne le nouveau siège d’Alibaba pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande l’an dernier et lança cet avertissement à l’encontre du protectionnisme : « Quand le commerce s’arrête, la guerre commence. Le commerce aide les gens à communiquer. Le commerce est un échange de valeurs. Un échange de cultures. Le monde a besoin de la mondialisation, il a besoin de commercer. »

Les libertés pour les plus démunis

De même, Nassim Nicholas Taleb faisait-il remarquer dans son dernier ouvrage, Jouer sa peau  (Skin in the Game), que la paix ne résulte jamais d’un galimatias bureaucratique : « Si vous voulez la paix, faites en sorte que les gens commercent, comme ils le font depuis des millénaires. Ils finiront par s’arranger. »

En rendant leur liberté aux plus démunis, c’est-à-dire en leur donnant les moyens de s’en sortir seuls, on leur rend leur dignité. Aucun autre système économique que le capitalisme n’y a réussi de façon aussi éclatante. C’est, comme l’écrit Charles Gave dans sa préface, l’un des messages principaux de ce livre moral, lucide et lumineux, pastoral et captivant, de Robert Sirico, Catholique et libéral, sur d’autres aspects duquel cette chronique ne manquera pas de revenir dans un prochain article.

Catholique et libéral – Les raisons morales d’une économie libre (Robert Sirico), 288 pages, Éditions Salvator (Paris).

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  • Qu’en pense le pape, jésuite versus franciscain?

    • @ montesquieu
      Puisque, comme moi, vous n’aurez sans doute pas l’occasion de rencontrer ni l’un ni l’autre, fiez-vous à votre instinct: humilité d’un côté, star médiatique, de l’autre!
      L’auteur de l’article ne donne que son point de vue subjectif, même pas l’avis de l’Église qui, elle-même, n’est pas parole d’évangile!
      Où va-t-on chercher dans l’évangile, la priorité du droit de propriété alors que c’est un plaidoyer pour l’amour de son prochain, donc du partage? Bien sûr, logiquement, on ne partage que ce qu’on détient (plutôt que possède). Nous sommes nés, démunis de tout, jusqu’à ce que, mort, nous ne possédions plus rien! Notre « propriété » est donc reçue (la vie, l’éducation, les soins, l’alimentation, l’instruction) ou acquise, adulte (Dieu sait comment, personne d’autre).

  • « Le droit de propriété doit être reconnu à l’être humain de même qu’il jouit d’autres droits fondamentaux de par le simple fait de son existence sans qu’il NE soit besoin que l’État NE les lui concède. » Les deux « NE » sont superflus, et rendent la phrase incompréhensible. À ce détail près, excellent article.

    • @ Cremone
      Bon! J’avoue croire à moitié à la valeur du verbe par rapport à la valeur de la réalité que le verbe traduit et, immanquablement, trahit.
      Sur la forme, les deux « ne » ne s’annulent pas: dire « même sans l’autorisation de l’état » suffirait.
      Sauf qu’un nouveau né ne possède rien à sa naissance, que la vie (et 9 mois de vie in utero). Tout le reste est acquis!

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