Le « nouveau monde » de Macron est-il d’inspiration soviétique ?

Le nouveau monde a bon dos. Il ressemble plutôt à l’empire soviétique avec tous les dysfonctionnements dont nous connaissons l’issue.

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Soviet catch by Will (CC BY-NC-ND 2.0)

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Le « nouveau monde » de Macron est-il d’inspiration soviétique ?

Publié le 6 avril 2020
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Par Loïk Le Floch-Prigent.

On annonce maintenant la fabrication de masques en France ainsi que la création d’un consortium d’industriels nationaux visant à produire des respirateurs artificiels, au lieu de s’interroger sur les raisons qui ont conduit l’État et ses administrations à négliger depuis des semaines toutes les initiatives industrielles tandis que les Agences Régionales de Santé désorganisaient systématiquement toutes les tentatives de cycles courts de fournitures.

Le nouveau monde a bon dos. Il ressemble plutôt à l’empire soviétique avec tous les dysfonctionnements dont nous connaissons l’issue.

Laisser autant de personnes confinées pendant autant de temps va être un objet d’études pendant des dizaines d’années, car on ne peut pas en tirer des enseignements au bout d’une quinzaine de jours.

Cependant, il n’est pas inutile, dès maintenant de lire, écouter les commentaires et réfléchir aux actions de ceux se donnant pour ambition de nous éclairer à la fois sur l’actualité et notre futur.

Jamais sans doute il n’a paru aussi clair que dans une période de crise chacun réagit en privilégiant ses propres obsessions, c’est-à-dire qu’à cette occasion personne n’a vraiment envie de remettre en question ce qu’il pense depuis longtemps, ni prendre un peu de hauteur.

À quelques exceptions près, je suis très déçu par mes lectures comme par beaucoup de réactions des responsables en position d’orienter les actions publiques ou privées.

L’Homme a besoin d’agir

Le premier élément sautant aux yeux c’est que la population n’est pas préparée au désœuvrement, elle n’a pas non plus envie de s’occuper, elle a besoin d’agir et je dirai de produire.

Les initiatives qui fleurissent dans les quartiers ou sur les réseaux sociaux en France, mais aussi en Italie et en Espagne, montrent bien cette nécessité de faire. L’individu homo sapiens est un être social, ce n’est pas une nouveauté, mais il est aussi un être qui fait, crée, invente…

Le musicien joue pour lui, et pour les autres, dans le confinement il invente des actions qui diffusent son art. Nos smartphones regorgent de ces actions individuelles à portée collective, puis ces actions collectives à portée universelle.

En conséquence, l’idée d’une société qui laisserait à quelques spécialistes le soin de produire à travers des structures robotisées à outrance tout ce que la société pourrait désirer en donnant à tous les autres un revenu universel leur permettant de jouir de la vie se heurte donc à la réalité : homo sapiens a envie de faire, de produire. Cet avenir qu’on lui décrit et qu’il expérimente depuis quinze jours ne lui convient pas.

Le paradigme numérique tel que décrit par les uns et les autres n’est pas le bon, cela n’arrivera pas parce que la société dans son ensemble ne peut pas fonctionner comme cela. C’est toute l’idée du « nouveau monde » et de la « start up nation » qui s’effondre sous nos yeux ; certes, nous utilisons les nouvelles technologies, homo sapiens s’adapte, mais il reste celui qui transforme le monde, celui qui fait, qui produit et non celui qui subit.

Peurs d’hier, peurs d’aujourd’hui…

Le deuxième élément c’est que la peur qui l’habitait hier n’est plus celle d’aujourd’hui. Hier Greta Thunberg marchait vers le prix Nobel, aujourd’hui nous attendons le vaccin contre le Covid-19 : sic transit gloria !

La sauvegarde de la santé a remplacé le sauvetage de la planète, la priorité donnée à la banquise était un faux-semblant, une peur indicible, celle de la mort inéluctable était latente. L’image de l’ours blanc à la dérive a fait son temps, c’est une autre qui l’a remplacée, tout aussi impropre, mais qui risque de durer davantage car elle est au cœur de chaque humain.

Il faut donc balayer rapidement toute la politique liée à la mode ancienne, revenir aux réalités : au revoir les constructions artificielles du monde ancien annoncé comme nouveau, le marché de l’électricité, le marché des transports, le marché de la santé, les dettes abyssales, les normes et règlements, les technocrates, les bureaucrates…

Et l’on observe sur le terrain les nombreuses initiatives démontrant que la volonté première est celle de l’efficacité et non celle du respect des procédures. C’est ainsi que le régime soviétique a explosé, c’est ainsi que la technocratie européenne et française vit ses derniers mois ou années (selon que l’on est optimiste ou pessimiste).

C’est inéluctable car l’organisation mise en place n’a pas fonctionné alors qu’homo sapiens a besoin d’efficacité. La peur a changé de cible, ce n’est plus la planète qui est en jeu, c’est l’Homme.

Nouveau monde ou retour du monde perdu ?

Le troisième élément c’est que le monde critiqué hier pour son fonctionnement décadent, celui de sa production, de ses loisirs, de ses créations, celui que nos sociétés avaient élaboré cahin-caha au cours des siècles, est devenu en quinze jours un eldorado vers lequel nous souhaitons revenir.

La vision de rues désertes et d’aéroports inertes génère le désir d’un retour à la normale le plus rapidement possible. On n’aspire pas à la définition d’un « monde nouveau » comme ne cessent pas de le faire valoir les nouveaux prophètes, mais au contraire à la restauration du monde ancien où il faisait bon vivre : les bistrots, les restos, les copains… et le travail en usine, en atelier, et même dans les bureaux, n’en déplaise aux chantres du télétravail.

La demande essentielle est donc l’instauration d’un retour à la case départ, avec deux corollaires : revoir le fonctionnement de l’administration du pays qui a fortement ralenti ou même anéanti les initiatives de la population ; celui de la révision urgente des normes et règlements européens qui ont accéléré la chute de nos pays dans le chaos observable aujourd’hui.

Dans un « nouveau monde », la nécessité vitale de l’industrie

Enfin , puisque chacun y va de ses obsessions, je souhaite revenir sur la mienne qui est celle de la nécessité de l’industrie pour sauvegarder notre pays. Je vais traiter ce sujet par le petit bout de la lorgnette, celui de la perte de souveraineté de notre industrie dans le domaine de la santé.

Nous avons pu constater comment nous avons rapidement manqué de tout, masques, tests, médicaments, respirateurs tout autant que de personnel en quantités suffisantes. Il y a quelques mois déjà, il y avait eu une alerte sur l’indisponibilité d’un certain type de médicaments anti-cancéreux dont le principe actif était intégralement élaboré en Asie.

L’indignation n’a eu comme effet que l’inaction et même pas l’analyse des causes : information instantanée aux oubliettes dès le lendemain. Pourquoi, alors que l’industrie chimique nationale produisait l’intégralité de ses principes actifs dans les années 1980, est-elle est devenue importatrice intégrale en 40 ans ?

On me répond que c’est à cause du coût de la main-d’œuvre. Mensonge ! Si jamais il vient à l’esprit d’un analyste de visiter une usine, il verra que cet argument ne tient pas une minute. L’industrie chimique européenne dans son ensemble a été mise sous tutelle bureaucratique à partir de 2007 avec le dispositif REACH effectuant un contrôle strict et permanent de tous les produits.

La seule solution pour produire et innover était de délocaliser, ce qui a été fait par l’ensemble du secteur. Nous en connaissons le résultat aujourd’hui, nous sommes dépendants du monde entier, et en particulier de l’Inde et de la Chine, qui, heureusement pour elles, n’ont pas à obéir aux protocoles ahurissants mis au point par les protecteurs de l’humanité.

Cette contradiction entre la générosité bureaucratique (et la pureté espérée) et la nécessité de soigner, nous avons à l’affronter désormais. Notre Eldorado était un leurre, il n’existait qu’avec des comportements hypocrites et connus de tous, nous sommes au pied du mur.

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  • Nous savons comment tout cela va se terminer… les gilets jaunes c’était une revolution
    qu’on l’admette ou pas.. et dans les difficultés qui arrivent çà reprendra a la puissance mille

  •  » nous manquons de tout  » , mais surtout , nous manquons de politiciens compétents et prévoyants ; ceci expliquant sans doute cela….

    • Et qui ont tout sous-traité à des administrations remplis « d’experts » tous plus stupides et rigides les uns que les autres derrière lesquels ils s’abritent. Ils pourront désormais dire « Ni responsables ni coupables », nos experts nous ont dit…nos experts ce sont tompés, pas nous !

    • « » nous manquons de tout » La pénurie est la marque de fabrique, que dis-je l’engrais, du socialisme.

  • La référence des années 80 est intéressante, c’est le début du tiers-payant c’est-à-dire du contrôle total de la santé par la SS.
    Toutes les mesures d’économie sur la santé qui ont suivi, allant du contrôle drastique des remboursements jusqu’à celui de la liberté de prescription des médecins, en passant par la mise en place des génériques, ont abouti à la destruction totale de l’industrie pharmaceutique en France.

    • cachou42 : Oui mais pas que. Destruction totale de la médecine française où aucun diagnostic ne peut plus être évoqué sans le secours de l’informatique et où la démarche médicale, l’art médical, est ligoté et asphyxié par les protocoles.
      En fait le malade a perdu sa place centrale dans l’acte médical, remplacé par la norme administrative.

    • Oh que oui, et il va falloir s’intéresser à ces international socialistes qui s’amusent à shorter la dette mondiale tout en bouffant au râtelier…des meurtriers qui se croient plus intelligents que les autres. Une sociopathie d’état

  • Sans oublier que si le coût du travail est plus élevé en France c’est parce que l’état spolie les acteurs de plus de la moitié de ce coût : charges sociales, IRPP, TVA on approche les 2/3 qui disparaissent dans les poches de l’état ; pour en faire quoi?

  • L’homme a besoin d’agir, il a besoin d’efficacité… j’ajouterais bien qu’il a besoin de relations sociales. Et pas avec des robots et autres boîtes vocales!

  • Peurs d’hier, peurs d’aujourd’hui…
    Les conséquences du climatisme comme les ćonsequences due cette épidémie sont totalement disproportionnées par rapport au problème réel, quantifié et regardé objectivement.
    Quels sont les buts de ceux qui instrument les peurs, sacbant qu’une population apeurée n’a plus aucun moyen d’auto-défense?

    • oui, mais n’oublions pas que la population souhaite être apeurée. « Le peuple amoureux du fouet abrutissant », disait Baudelaire.

    • La petite bête : Leurs buts deviennent évidents quand on connaît les chiffres : en 2014, les investissements mondiaux de la « lutte contre le changement climatique » se sont montés à 714 milliards de dollars. Et ça n’a pas baissé, on peut penser qu’ils ont plus que doublé depuis.
      Et le meilleur moyen de faire casquer les incultes, qui vous remercieront en plus, c’est de leur faire peur.

  • Loïc Le Floch-Prigent met le doigt sur une réalité passée complètement inaperçue quand elle s’est mis en place : c’est le dispositif REACH qui a permis l’invention du « produit chimique » opposé au « produit naturel » dont nous faisons les frais aujourd’hui. Revenant sur deux siècles de science, REACH a en effet inventé une séparation qui n’a pas lieu d’être car un produit synthétisé par un être vivant est exactement le même que celui qui est synthétisé dans un réacteur chimique. (Un réacteur, en chimie, ce n’est pas un engin de propulsion, mais un récipient dans lequel on effectue une réaction). C’est précisément cette distinction entre « naturel » et « synthétique », aujourd’hui ancrée profondément dans les esprits, et que l’on peut voir à l’oeuvre partout, qui a tué l’industrie chimique chez nous, et l’a fait émigrer vers l’Asie, au prix de millions d’emplois perdus, et qui nous a fait perdre une indépendance que les esprits embrumés de nos dirigeants souhaitent maintenant rétablir… un peu tard.

    • Très juste. C’est l’idéologie de vouloir sur-protéger les français qui a conduit à tant de sottises. Avec au sommet l’imbécile « principe de précaution ».

  • Articles toujours intéressants. Pour moi, c’est toute la « technostructure » qui est à revoir, mais cela ne peut se faire rapidement car c’est elle-même qui doit proposer ses propres changements. Seul un vrai Président(e) de France pourra donner le LA, ce ne semble être celui d’aujourd’hui. D’ailleurs qui est-il ? Car en France la guerre peut-être commandée par De Gaulle mais aussi Pétain, d’autant qu’un certain ministre, fonction oblige, rappelle parfois, heureusement pas toujours, Laval. Qui est-il ? Les deux « en même temps » ? Attention danger.

  • Il suffit de comparer un article de Loïc Le Floch-Prigent et un discours de Macron pour comprendre qu’on ne pourra pas s’en sortir sans casse.

  • article très intéressant, mais il ne faut pas oublier que la « crise » actuelle correspond en fait à une épidémie sans gravité, montée « en épingle » par les pouvoirs publics.

    • Bernard Beauzamy : Pas montés en épingle, ils étaient simplement paniqués, et dans le monde entier. Pourquoi? Car une épidémie serait susceptible de les atteindre personnellement, alors que leur vie jusque là a consisté à se prémunir contre tout ce qui pourrait arriver au bon peuple.

  • Le fameux modèle social que le monde ne nous envie pas a été mis en place par … Pétain ce socialiste dit de droite et les technocrates pour faire barrage soit-disant au communisme. Il n’a jamais été remis en question par la gauche. Comme c’est curieux.

  • Bof. L’industrie, en soi, est une délocalisation. Et c’est une réponse à une crise d’un modèle de société précédent.
    Je ne sais pas si la délocalisation hors de France était vraiment la seule solution pour innover, et je me demande même si ce n’est pas la seule solution pour continuer à ne pas innover : il y a des gens qui travaillent en France, qui innovent sans demander d’aide de l’état… mais en effet elles font autre chose.
    De manière générale la valeur de la reproduction est devenue marginale et le capitalisme ne finance plus vraiment l’équipement en moyens de production. La bureaucratie, publique ou privée, est elle aussi historique. Pour continuer d’exister dans des modèles économiques anciens, il a fallu aller dans des pays qui étaient encore dans d’anciennes économies… à un moment ça va coincer.

    Il est vrai qu’il y a beaucoup de dynamiques dont il faudrait prendre conscience, et les réactions qui semblent se généraliser ne vont sans doute pas dans le bon sens. Mais bon, vouloir protéger l’industrie contre l’état, l’état contre le capitalisme, l’industrie contre le capitalisme… ou je ne sais quoi de ce genre, me semble y participer : il n’y a qu’une seule structure ici, elle est en crise, et le libéralisme permettrait à des structures alternatives d’émerger et peut-être de faire système. C’est plus facile à dire qu’à faire car il y a tout un tas de choses que nous prenons pour des invariants ou des évidences auxquelles nous tenons et que, relativement à une manifestation de leur obsolescence, nous ne sommes pas près d’abandonner et nous gardons nos vieux réflexes.
    Cet article me semble à la fois chercher des excuses pour ne pas s’adapter et demander de l’aide de l’état tout en faisant semblant du contraire… je me trompe peut-être.

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