Prendre la réduction des dépenses publiques au sérieux

Un objectif de 24,5 milliards de réduction par an est politiquement tenable.

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Prendre la réduction des dépenses publiques au sérieux

Publié le 10 novembre 2018
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Par Claude Sicard.
Un article d’Entrepreneurs pour la France

Le projet de loi de finances (PLF 2019) a été présenté au Conseil des ministres le 24 septembre, et l’Assemblée nationale devra voter le budget dans le cours du dernier trimestre 2018. Le problème de la réduction des dépenses publiques est posé, mais au niveau de l’État, il semblerait que nos dirigeants cafouillent. Dans l’opposition, ce n’est guère mieux. Les propositions des uns et des autres ne reposent manifestement sur aucune analyse sérieuse. Laurent Wauquiez, le président des Républicains (LR) a présenté début septembre ses propositions de réduction de la dépense publique : elles s’élèvent, pour la prochaine année, à 20 milliards d’euros. Il réclame « un vrai effort structurel de réduction du train de vie de l’État », ainsi qu’« une prestation sociale unique plafonnée à 75 % du SMIC ». Une autre piste consisterait à conditionner l’accès des étrangers au système de protection sociale de notre pays à trois années de cotisation au moins.

Les économies à réaliser pour redresser l’économie française sont considérables car la machine économique est étouffée par la pression fiscale. La France a un niveau de dépenses publiques record : 56,4 % du PIB, alors que la moyenne des pays de l’UE se situe à 47 %, ce qui engendre des prélèvements obligatoires extrêmement élevés, aujourd’hui les plus élevés d’Europe, et d’oblige l’État à s’endetter un peu plus chaque année. Il faut donc nécessairement faire des économies. Aussi, pendant la campagne présidentielle, les candidats se sont exprimés à ce sujet : Emmanuel Macron a promis 60 milliards d’économies durant son quinquennat, et son concurrent, François Fillon, 100 milliards. Antérieurement, François Hollande avait évoqué le chiffre de 50 milliards. Ces chiffres sont extrêmement éloignés de ce qu’il conviendrait de faire.

Le problème de la réduction des dépenses est extrêmement difficile à résoudre, pour deux raisons bien compréhensibles : il y aura un très grand nombre de mécontents, et il ne faut pas risquer de trop affecter la croissance du PIB.

 

Les dépenses excessives de l’État et des collectivités territoriales

Dans un article précédent, une approche économétrique a permis de chiffrer à 245 milliards d’euros l’excédent des dépenses publiques en France, le dépassement par rapport à « la normale » étant de de 19 %.

En 2017, les dépenses publiques étaient ventilées de la façon suivante :

Répartition des dépenses publiques
État 286,4
Collectivités territoriales 168,5
Dépenses sociales 759,5
Investissements 77,5
Total 1291,9
(milliards euros)

Les dépenses sociales représentent l’essentiel, soit 58,8 % du total. Elles sont, de très loin, le poste le plus important, ce que le public semble ignorer. On accuse, en effet, traditionnellement, avant tout, l’obésité de l’État.

Les dépenses sociales

Elles s’analysent comme suit :

Répartition des dépenses sociales
Santé 249,9
Emploi 44,8
Pauvreté, exclusion 21,3
Vieillesse 325,0
Logement 18,4
Famille 54,6
Frais de gestion 45,5
Total 759,5
(milliards euros)

Les deux postes les plus importants sont la santé et la vieillesse.

En matière de santé il est aisé d’établir des comparaisons avec l’étranger. Celles-ci montrent qu’elles sont de 12 % supérieures à « la normale », compte tenu du niveau de richesse des habitants. Mais c’est impossible pour le domaine de la vieillesse, les systèmes de retraites n’étant pas les mêmes dans tous les pays.

La BIRD donne, globalement, les dépenses sociales des différents pays du monde, en pourcentage des PIB. Elles varient beaucoup d’un pays à l’autre et sont d’autant plus importantes que les pays sont riches.

Dans le tableau ci-dessous, elles sont rapportées au nombre d’habitants, pour établir une corrélation avec les PIB par tête de ces différents pays :

Chiffres pour la corrélation entre dépenses sociales et PIB
Pays Dépenses sociales/habitant PIB/tête
Chili 4 986 15 346
Espagne 9 733 28 156
Corée du Sud 4 449 29 742
France 13 538 38 476
Grande Bretagne 11 712 39 720
Allemagne 11 112 44 469
Suède 12 416 53 442
Etats-Unis 10 738 59 531
Irlande 19 791 69 330
Norvège 21 200 75 304
Luxembourg 23 372 104 103
(US$)

Il existe une corrélation évidente entre les PIB/tête, pris comme variables explicatives, et les dépenses sociales par habitant, comme le montre le graphique ci après :

Corrélation PIB/tête – dépenses sociales/habitant
Source :
Dépense sociale/tête : calculées à partir du ratio depenses sociales/PlB
PIB/tête BIRD 2017

La droite de régression qui exprime cette relation indique que compte tenu du niveau de PIB/tête qui est le sien, la France devrait se situer à 10 000 dollars par habitant, et non pas à 13 538 comme c’est le cas. Cela signifie qu’il y a un excès très important de dépenses sociales dans notre pays, excès que l’on peut estimer, ainsi, à un peu plus de 25 %.

Il y aurait donc lieu de préconiser une diminution des dépenses sociales de ce pourcentage, soit la somme colossale de 197 milliards d’euros. Ce chiffre est considérable, et une telle économie est totalement impossible à réaliser en raison des dégâts qu’elle causerait à la population, notamment aux plus démunis. Et, au plan politique, aucun gouvernement n’y résisterait. Par prudence, durant sa campagne électorale, Emmanuel Macron a annoncé une réduction de 25 milliards des dépenses sociales, à réaliser en cinq ans, au cours de sa mandature.

 

Les effectifs de la fonction publique

Les effectifs de la fonction publique sont dans le viseur de tous les partis d’opposition. L’État est traditionnellement accusé d’obésité, et de gaspillage d’argent public. Par exemple, récemment, à la nouvelle vaisselle de l’Élysée, et à la piscine du fort de Brégançon.

Qu’en est-il, réellement ? Les effectifs de la fonction publique se décomposent de la façon suivante :

Répartition des effectifs de la fonction publique
Fonction Publique d’État 2 398 000
Fonction Publique Territoriale 1 889 000
Fonction Publique Hospitalière 1 163 000
Total 5 450 000

 

Nous avons, dans un article précédent, proposé une méthode pour évaluer correctement les sureffectifs de la fonction publique d’un pays, en tenant compte de son niveau de développement économique. Cette approche économétrique a conduit à chiffrer à 348 000 agents l’excédent des effectifs de la fonction publique en France, emplois aidés inclus. En dehors de ces emplois exceptionnels, le sureffectif se limite donc à 158 000 personnes, soit 3 % seulement, et au niveau des trois fonctions publiques. L’économie à réaliser serait de 8 milliards d’euros, et de 10 milliards avec la suppression des emplois aidés.

 

Le cadrage des économies à réaliser

Compte tenu des éléments précédents, on peut cadrer de la façon suivante les économies qui seraient à réaliser pour ramener l’économie française à une situation normale, et lui permettre de retrouver son dynamisme. Il y a 10 milliards d’économies à faire sur les effectifs de la fonction publique, à partager entre l’État et les collectivités locales, 38 milliards sur l’ensemble des dépenses de l’État, et 197 milliards sur toutes les dépenses sociales. Au rythme de 60 milliards par quinquennat, il faudrait 20 années.

Un programme étalé sur dix ans donnerait les résultats suivants :

Plan de redressement des dépenses publiques à 10 ans
Dépenses 2017 Économies Rythme annuel Objectif final
Dépenses sociales 759,5 197,0 19,7 562,5
Fonction publique 280,5 10,0 1,0 270,5
Investissements 77,5 77,5
Autres 174,4 38,0 3,8 136,4
Totaux 1 291,9 245,0 24,5 1 046,9

 

Un objectif de 24,5 milliards par an est politiquement tenable. Sur la durée d’une mandature présidentielle, il s’agirait de 122,5 milliards d’euros. Or, Emmanuel Macron a prévu seulement 60 milliards d’euros, soit deux fois moins.

Telle est la feuille de route qu’il conviendrait de communiquer au ministère de l’Économie.

Sur le web

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  • Le problème n’est pas seulement de faire des économies, c’es: où les faire et comment. Quand on voit oar exemple que le gouvernement, au lieu de faire une évaluation des missions de l’Etat, prône un plan de départs volontaires pour les fonctionnaires, on se dit que nous sommes vraiment gouvernés oar des incapables. Un tel plan, au coût prévu astronomique, verra partir les plus employables, donc les meilleurs éléments. C’est une autre version du saupoudrage de Sarkozy. Alors qu’il faudrait supprimer des pans administratifs ou des agences inutiles, voire nuisibles (comme l’ADEME, le CESE…)

  • L’analyse est intéressante mais pas tout à fait exacte. Il faudrait en effet comparer des choses comparables, notamment en matière de dépenses sociales où les monopoles étatiques français (sécu santé retraites) agrègent des sommes en partie seulement (quelle partie c’est justement la question ?) prises en compte chez nos voisins dans des organismes multiples, privés et volontaires, non totalisés dans les tableaux de l’article. Ce qui compte en réalité, ce ne sont pas les sommes brutes relatives à ces dépenses (un pays peut choisir une maxi politique de protection sociale par exemple), mais l’efficience des organismes gestionnaires. On peut probablement être certain que les organismes de gestion de la protection obligatoire et monopolistique en France sont inefficients vu leur nature non concurrentielle, mais de combien réellement ?

  • Limpide , mais si on y ajoute la portée politique , impossible a faire..
    Nous irons donc a l’effondrement a la grecque

    • @ claude henry de chasne
      Donc 66 millions de Français sont prêts à ne pas se redresser tout seuls en attendant que Bruxelles décide et organise votre pénurie?
      Ça risque d’être douloureux! Allez demander aux Grecs!

      • que voulez vous qu’on y fasse , ils votent père noël et râlent lorsque les aides ne suffisent pas a acheter un iPhone ou payer les vacances , la rentrée , la noël etc..
        le socialisme leur a vendu l’égalité, il seront donc égaux mais dans la misère

        • Ce sont surtout les médias qui continuent à les entretenir dans l’idée que le pire n’est pas d’être dans la misère, mais la plus grande richesse du voisin, que cette richesse est la preuve qu’ils sont spoliés, et que l’état est là pour rétablir la justice. Ne soyons pas si pessimistes pourtant : quand Macron a été interpellé chez Renault, le type a dit « Nous ne vous avons pas attendu pour réussir »… Imprimons donc quelques T-shirts : « Heureusement que nous n’avons pas attendu l’intervention étatique pour réussir ! ».

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