« Le déclin français est-il réversible ? » de Jacques de Larosière

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« Le déclin français est-il réversible ? » de Jacques de Larosière

Publié le 28 février 2025
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Un appel au sursaut face aux politiques du déni et de la facilité monétaire et budgétaire

Jacques de Larosière, ancien gouverneur de la Banque de France et ancien directeur général du FMI, nous alerte très régulièrement sur l’état de l’économie française et des égarements dont elle est l’objet depuis 40 ans, pour reprendre le thème d’un ouvrage de 2021 que nous avions présenté ici-même.

Un constat global accablant

Les constats sont, de fait, toujours les mêmes : endettement public incontrôlé et démesuré, appareil d’Etat tentaculaire, prélèvements obligatoires excessifs, désindustrialisation préoccupante liée aux excès en matière de fiscalité, déficit devenu permanent de la balance des paiements courants, fuite en avant monétaire, excès de centralisme et de bureaucratie, résistance aux réformes structurelles, aveuglement face aux évolutions démographiques.

Mais ce qui interpelle particulièrement l’auteur est la relative sérénité de l’opinion publique et la superficialité des analyses des médias au regard de la gravité de la situation. Sans même parler de nos politiques.

Pire, nous touchons-là au problème de la liberté d’expression. Dans la mesure où la nécessité des réformes est peu soulignée par des médias peu ouverts au pluralisme des opinions et au débat (ce ne sont pas les libéraux qui diront le contraire). Il en résulte une incapacité à se référer aux faits, puis à proposer de véritables réformes. Au profit du simple discours et des vues superficielles. Et au prix de la poursuite du déclin.

En ce qui concerne l’éducation, qui est à la base de tout, elle se porte de plus en plus mal, comme on le sait. C’est pourquoi Jacques de Larosière appelle de ses vœux notamment une plus grande autonomie des établissements et une amélioration du niveau des enseignants, donc une meilleure rémunération de ces derniers et un recours aux initiatives privées de proximité. Sans surcoût, puisqu’au contraire l’inefficience économique coûte 16 milliards d’euros par an à la France ( !), ainsi que le révèle une étude de l’Institut Molinari à laquelle il se réfère en citant une parution dans Contrepoints.

Même l’apprentissage, qui est une bonne idée, a été perverti par un financement public surdimensionné et une course quantitative nous ayant éloignés de ses objectifs initiaux, pour leur préférer une baisse artificielle des chiffres du chômage au prix d’un déficit budgétaire encore accru et d’un système surétatisé.

Une France qui recule

Qu’il s’agisse d’éducation, de tissu industriel, de Recherche & Développement, de finances publiques, de balance commerciale, de déficit colossal du système de retraites, ou encore de taux de pauvreté, la France s’inscrit en recul constant au cours des dernières décennies en comparaison avec ses voisins.

Le record mondial de dépenses sociales n’arrange pas vraiment les choses. Ce boulet supplémentaire en termes de financement pèse notamment sur la compétitivité de nos entreprises. Il reflète en outre les insuffisances structurelles de notre économie et l’incapacité de nos dirigeants à la réformer. Il en constitue pour ainsi dire le révélateur.

Une situation face à laquelle le débat parlementaire et le débat public de manière plus générale brillent par leur très faible acuité, pour ne pas dire leur immobilisme. Conduisant à entretenir chômage et pauvreté, les politiques de la demande continuant d’être préférées à celle de l’offre, au prix d’un endettement incontrôlé. Ce qui aboutit à compromettre gravement l‘avenir. D’autant que des politiques monétaires laxistes viennent aggraver encore cet état de fait. Avec la complicité passive de politiques mus par le court-terme et leur réélection, mais aussi de hauts fonctionnaires pas en reste sur la question et engagés politiquement, ainsi que de Français en partie hostiles à l’entreprise tout en étant fâchés avec l’économie.

Au détriment des fonctions essentielles qui doivent apporter une certaine stabilité et sécurité à notre pays et de la participation des électeurs aux différentes échéances politiques, découragés par la vacuité de leurs dirigeants.

Alors, que faire ?

Face à l’étendue du problème et du déclin français, Jacques de Larosière en appelle donc, non pas à se contenter de réformettes ou de « trajectoire de normalisation » des finances publiques, comme nos politiques en ont le secret, mais à véritablement « renverser la table ». En remettant en ordre les finances publiques de manière radicale, réaliste et crédible. Condition sine qua non du reflux des prélèvements obligatoires et du retour de nos entreprises à la compétitivité.

Pour cela, il préconise la réduction drastique nos dépenses publiques, afin de les ramener en dix ans au niveau de nos partenaires européens. Il suggère de les baisser d’environ 200 milliards d’euros. Perspective réaliste politiquement, à condition de bien l’expliquer aux Français. Il s’agirait avant tout d’améliorer l’efficacité des dépenses, sans nécessairement toucher aux allocations sociales. La méthode consiste à examiner les strates de dépenses qui se sont accumulées et ont été reconduites d’année en année sans remettre en cause leur légitimité.

Système de retraites, dépenses de fonctionnement hors salaires, effectifs de la fonction publique, surcoût lié à l’apprentissage, niches fiscales, Jacques de Larosière expose en détail ses propositions en les chiffrant. Il aboutit bien à un total de près de 200 milliards d’euros en dix ans.

Pour mieux nous en convaincre, l’ancien gouverneur de la Banque de France établit la comparaison avec les efforts encore plus importants réalisés par la Suède au cours des années 1992-2010, mais aussi ceux plus récents du Portugal, de l’Espagne, ou du Canada par exemple.

Il indique cependant que cette remise en ordre des finances publiques ne sera durable que dans la mesure où l’on mettra fin aux politiques de stimulation continuelle de la demande et de manipulation des taux d’intérêt.

La restauration de notre crédibilité et de notre compétitivité passera par des investissements dans l’innovation. Les technologies digitales dans lesquelles nous sommes en retard, ou les énergies (nucléaire notamment) doivent être privilégiés selon lui.

D’autres axes de réflexion jalonnent l’ouvrage. Ils portent sur la durée du travail, le taux d’emploi, la qualité des formations, l’inflation de textes réglementaires, ou encore les politiques de l’argent facile.

C’est aussi au niveau européen que Jacques de Larosière recommande de porter l’action. Se tourner davantage vers la concurrence que sur la gouvernance et l’endettement serait plus efficace à long terme. Aussi bien sur le plan économique que de la société en général.

Voir les commentaires (18)

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  • Nos hommes politiques comme nos médias ne font que brosser tous nos franchouillards dans le sens du poil avec de grosses couches de démagogues
    Nos gaulois sont dans le déni de réalité
    Soyons réaliste aucune force jnterne n est en mesure d infléchir cette désastreuse situation économique
    Seuls les marchés auront une force de rappels à la réalité avec des conséquences drastiques sur le idéaux de vie français
    La banqueroute grec a entraîne un moins 30% radical dont seulement 12 % a pu être reconquis 10 ans après

  • L Opium des intellectuels
    1 mars 2025 at 22 h 05 min

    Un point positif : contrairement à une idée-reçue, l’électorat RN ne me paraît pas “socialiste” au plan économique… cet électorat populaire est au contraire attaché à la liberté économique et à la dénonciation de l’assistanat. Ce sont les élites en place et les clientèles qui sont illibérales et attachées à l’étatisme français. En refusant de s’appuyer sur l’énergie populaire, les libéraux font une mauvaise opération. Il existe un “libéralisme populaire” en France, enraciné dans un vieil individualisme gaulois, réfractaire et républicain. Certes, son expression culturelle est parfois déroutante pour les élites raffinées. Mais c’est sur cette sociologie que Trump et Milei se font fait élire dans leurs propres pays. Les libéraux doivent opérer une révolution culturelle, rompre avec le “socialisme à l’eau-de-rose” des beaux quartiers et renouer avec ce peuple qui les appelle.

    • L électorat populaire du RN ( avec notamment d anciens communistes) demande toujours plus d état (voir les programmes électoraux de 2022 et de 2024….retraite à 60 ans baisse de TVA sur les énergies, nationalisation des autoroutes, hausses de tous les salaires de
      10%…).
      Les populistes souverainistes sont dans le déni de réalité comme leurs petits amis gochos

    • Un vrai libéral ne peut pas voter pour du totalitarisme, c’est idéologiquement incompatible. Une part importante de l’ancien électorat du RN souhaiterait toujours voter “Jean Marie” qui avait une position politique de centre droit nationaliste (on va dire l’aile extrême gauche des libéraux, mais qui semblait défendre le droit de propriété qui est un pilier de nos valeurs) alors que la fille se situe plutôt “National Socialism” donc nettement plus à gauche que le papa, certainement dans l’espoir de glaner des voix PS (et en fait ça marche un peu car les électeurs de gauche on une tolérance élevée au totalitarisme, voire une appétence pour les plus extrémistes) … Je pense que la plupart des électeurs RN historiques en sont conscients, mais au point ou on en est et, surtout en l’absence totale de quelque chose de sérieux du coté droit de l’échiquier politique Français, ils continuent à soutenir ce parti qui me parait moribond.

    • L Opium des intellectuels
      4 mars 2025 at 21 h 47 min

      Il est évident que si on a décidé que le RN c’est “totalitariste national-socialiste marxiste”, à la fin on finit avec Edouard Phillippe et Dominique de Villepin à la Fête de l’Humanité… Et on finit dans le barrage républicain à élire Mélenchon et Faure pour faire barrage à Eric Ciotti. C’est très cohérent comme raisonnement ! Je n’ai pas vu que l’électorat du RN demande un accroissement du périmètre de l’état, contrairement à la gauche et au centre européiste. Au contraire, il me semble exiger un rencentrement de l’état sur ses missions régaliennes et sur les 5 secteurs nationalisés depuis le néolibéralisme (santé, retraite, éducation, énergie, recherche fondamentale). Et avec cela un rejet viscéral de “l’assistanat” collectiviste. On peut certes toujours rêver mieux, mais on ne peut pas nier que cette sociologie est fondamentalement libérale. Mais les capitalistes-de-connivence européistes préfèrent la planche-à-billets que le libéralisme.

      • L électorat du RN veut très largement le retour de la retraite à 60 ans…..et vous considérez cette demande comme une mesure emblématique du libéralisme….?????……..😂😂😂😂😂

  • “sans nécessairement toucher aux allocations sociales”. Il ne faut pas rêver, ces allocations sont à la base des problèmes en France. De plus, même si l’on sait ce qu’il faudrait faire, cela ne sera pas fait, car il y a trop de forces contre.
    Il faut de plus remarquer que ce n’est pas seulement la France, mais toute l’UE qui sombre, on est juste en avance. La peur de l’avenir (par l’écologisme) et la baisse drastique du nombre de naissance montre que les français, et même les européens, n’ont pas une vision positive de l’avenir, et ne veulent pas créer de nouveaux humains pour y vivre.
    Historiquement, c’est le signe d’une civilisation en déclin. Les Etats Unis, bien que touchés, le sont nettement moins.
    La stagnation économique, le blocage démographique, la rigidification de la hiérarchie sociale, tout cela mettrait des décénnies à se résoudre. Et encore, si des personnes de bonne volonté s’y mettaient, alors qu’elles ont tout intérêt à partir. Je ne vois pas, sans un sursaut venu d’un bousculement extérieur, comment la trajectoire pourrait changer.

  • Merci pour cet article.
    Malheureusement, l’origine du mal est très profonde en France et je doute que la majorité adhère à changer le cap bien qu’il serait peut être encore possible d’inverser la vapeur.

    Tant que la majorité du pays croira au petit papa noël économique, on ne s’en sortira pas. Je crains qu’on soit obligé de passer par la case faillite et misère avant d’envisager un sursaut.

    Regardez l’offre politique: on a toutes les nuances de gauche (des coco extrémistes au national socialisme) qui se bousculent pour prendre le pouvoir, mais ou sont les candidats du vrai centre droit ?, ou sont les libéraux ? : il est inutile qu’ils se présentent: le peuple ne veut pas d’eux. Il a été abruti par l’éducation et les merdias pour voter à gauche, il ne sait faire que ça. On est très mal barré pour l’avenir…

    • Cette culture catho-marxiste française est très ancienne…..elle a conduit à de nombreux désastres : guerres de 70, 14-18, 39-45, puis décolonisation avec l Indochine, l Algérie et 58 avec le recours au GdG…..😁😁😁

      • L Opium des intellectuels
        4 mars 2025 at 22 h 08 min

        Frédéric Bastiat était très catholique et très peu marxiste… et l’église catholique a largement contribué à la lutte contre le socialisme depuis l’Amérique latine jusqu’à la Pologne. Donc, même s’il existe en effet un certain “catho-socialisme” insupportable, ne voyons pas tout en noir. On peut en revanche se demander ce que des journaux prétendument libéraux (Les Echos, Le Figaro, L’Opinion) font pour l’éducation économique populaire ? Quand on regarde leur traitement actuellement de Javier Milei, on se dit que le libéralisme a surtout déserté les hautes-sphères économiques de notre pays. Plutôt que de nous désespérer du peuple, il serait temps que nos médias libéraux se reprennent en main éveiller les consciences.

        • Plutôt que de faire l éloge du petit dictateur russe, il serait grand temps que nos souverainistes populistes sortent de leur puissant déni de réalité……. 🤣🤣🤣🤣🤣

          • L Opium des intellectuels
            7 mars 2025 at 21 h 46 min

            les capitalistes de connivence européistes, addicts à la planche à billets socialo-bruxelloise, devraient sortir de leur déni de réalité…

  • Nous savons tous que non et les derniers événements viennent de le démontrer de manière implacable, vu la conduite de nos politiciens inconscients. Nous sommes dans une situation dramatique et ils font tout pour saboter notre économie qui nous fournit de quoi vivre! Les français votent toujours pour que l’on augmente leurs impôts et le coût de la vie!

    • Les français votent pour que le gouvernement augmente les impôts des autres catégories sociales que la leur….l éternel passager clandestin….🤣🤣🤣

      • Ils oublient que toute augmentation des prélèvements nuit au pays et donc à eux mêmes! Les entreprises répercutent les augmentations de leurs impôts sur leur prix de vente, et donc ce sont eux qui payent en définitive. Mais ils sont trop bêtes pour le comprendre!

  • La majorité des Français ne sont malheureusement pas prêts à regarder la vérité en face, càd que leur futur est dans le travail qui n’est pas nécessairement aliénant. Ils sont soumis à des sirènes qui leur disent qu’ils peuvent gagner plus en travaillant moins, retraite à 60 ans, semaine de quatre jours, arrêts de travail à gogo, souvenons nous de cette députée EELV, par ailleurs vice-présidente d’université, qui faisait l’éloge du droit à la paresse. Comment financer, mais c’est très simple, à gauche on taxe ces salauds de riches et les “super-profits” de nos entreprises, à droite on renvoie tous les immigrés chez eux, comment n’y a-ton pas pensé plus tôt?

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