Les réformes de Mitterrand n’ont pas résisté au temps

Voyons ce que les réformes structurelles de François Mitterrand sont devenues 40 ans après.

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Les réformes de Mitterrand n’ont pas résisté au temps

Publié le 8 avril 2022
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Poser la question c’est y répondre : il n’en reste rien ou presque après 40 ans !

Mais quelles étaient ces grandes réformes structurelles du premier Président de gauche de la Ve République élu en 1981 ? Quatre réformes nous semblent emblématiques :

  1. Les nationalisations des entreprises et des banques
  2. La retraite à 60 ans
  3. La réduction du temps de travail
  4. L’impôt sur les grandes fortunes (IGF)

 

Nous passons volontairement sur les réformes économiques conjoncturelles comme l’augmentation du SMIC de 10 %, le premier blocage des prix à partir d’octobre 1981, l’emprunt d’État : dix milliards de francs à 16,2 % pour financer les réformes annoncées par le gouvernement, la première des quatre dévaluations du franc (les autres suivront en 1982, 1983 et 1986). Même si ces décisions économiques sont conjoncturelles elles traduisent néanmoins une vision de l’économie par le pouvoir socialiste qui doit se plier au politique. Après le plan de rigueur qui a suivi dans le troisième gouvernement de Pierre Mauroy et qui a entraîné la démission de Jean-Pierre Chevènement, la pause avec Laurent Fabius a montré les limites du volontarisme en matière d’économie.

Voyons ce que ces quatre réformes structurelles sont devenues 40 ans après.

 

Les nationalisations 

Par la loi de nationalisation du 13 février 1982 le pouvoir socialiste nationalisa les 36 premières banques de dépôt ainsi que les banques d’affaires Paribas et Suez. Un très grand nombre de grands groupes industriels comme CGEPUKRhône-PoulencSaint-Gobain, Thomson, etc. furent également nationalisés. L’engagement pris à l’égard du Parti communiste et scellé dans le programme commun de la gauche fut respecté.

Mais le gouvernement de Jacques Chirac qui arrive au pouvoir en 1986 après les élections législatives de 1986 engage alors une première vague de privatisations. Dans la période 1986-1988, le gouvernement Jacques Chirac aurait vendu pour 100 milliards de francs d’actifs publics. Parmi les entreprises les plus emblématiques citons :

  • Saint-Gobain1986 (8,4 milliards de francs) ;
  • Paribas23 janvier 1987, mise en bourse de 100 % du capital (OPV), (12,8 milliards de francs) ;
  • TF1, 16 avril 1987, Bouygues devient actionnaire de référence, (4,4 milliards de francs) ;
  • Crédit commercial de France, 7 mai 1987, mise en bourse de 100 % du capital, (2,2 milliards de francs) ;
  • Compagnie générale d’électricité (la CGE devient Alcatel-Alsthom puis Alcatel en 1998) 23 mai 1987, mise en bourse de 100 % du capital, 2,5 millions de souscripteurs, 5,4 milliards de francs) ;
  • Société générale, 27 juin 1987, mise en bourse de 100 % du capital, (17,2 milliards de francs) ;
  • Suez (groupe) (14,9 milliards de francs).

 

Sous le gouvernement d’Édouard Balladur l’ensemble des privatisations sur la période 1993-1995 aurait rapporté 114 milliards de francs en trois ans. Le gouvernement Juppé privatisa sur la période 1995-1997 pour environ 40 milliards de francs.

Mais c’est de loin le gouvernement socialiste de Lionel Jospin qui privatisa le plus. L’ensemble des privatisations sur la période 1997-2002 aurait rapporté 210 milliards de francs en cinq ans, soit 31 milliards d’euros. Parmi ces privatisations citons : Air FranceAutoroutes du sud de la France, Crédit lyonnais, France Télécom, Thomson Multimédia, CIC banque, CNP assurance, Aérospatiale (EADS), etc.

À la suite de toutes ces privatisations, on peut donc dire que la réforme structurelle voulue par le programme commun de la gauche a été effacée. Les privatisations ne sont du reste plus au programme des candidats à la présidentielle 2022.

 

La retraite à 60 ans

Cette réforme était attendue par les milieux populaires. Le président Mitterrand a respecté son programme et l’a mise en œuvre. S’il est bien un sujet sensible pour les Français, c’est bien la retraite et surtout l’âge du départ. En mettant l’âge légal de la retraite à 60 ans François Mitterrand répondait à une véritable aspiration populaire. Mais était-ce finançable avec l’allongement de la durée de vie ? La réponse est malheureusement non.

Depuis cette réforme, pratiquement tous les gouvernements ont été confrontés à l’équation impossible pour résoudre le financement de notre régime de retraite par répartition. Mais progressivement le dogme fut égratigné de toutes parts. Il est hors de propos de faire ici un rappel des différentes réformes.

Le fait nouveau est qu’après avoir cherché à faire une réforme systémique du système de retraite pendant son mandat actuel, le président Macron propose maintenant de faire travailler les Français jusqu’à 65 ans en prenant l’exemple des autres pays européens.

La candidate Valérie Pécresse propose aussi de porter l’âge du départ en retraite à 65 ans et Éric Zemmour à 64 ans. Il est donc fort probable que la retraite à 60 ans disparaisse également 40 ans après sa mise en œuvre par la gauche.

 

La réduction du temps de travail

François Mitterrand fut le premier à attaquer la problématique du temps de travail. Il institua la semaine de 39 heures (durée légale du travail) payée 40 heures, c’est-à-dire sans réduction de salaire. Elle sera portée à 35 heures par le gouvernement de Lionel Jospin.

Ces réformes qui ont coûté à la France une grande partie de sa compétitivité industrielle et favorisé le chômage ont eu beaucoup de mal à être corrigées. Certes il y eut beaucoup de petites réformes, mais pas vraiment de grand soir. De plus, les entreprises qui se sont progressivement adaptées aux 35 heures ne souhaitaient plus vraiment remettre le système en place. Il est vraisemblable que l’on se dirigera progressivement vers un système à la carte en fonction des contraintes de compétitivité des entreprises.

À terme, on peut raisonnablement envisager une disparition du carcan institué par la loi sur les 35 heures mise en œuvre par madame Martine Aubry.

 

L’impôt sur les grandes fortunes

C’est bien connu, la finance est l’ennemi à abattre et le mythe des grandes familles est toujours présent dans la vulgate populaire. En créant un impôt sur les grandes fortunes, François Mitterrand visait juste pour satisfaire les aspirations de justice sociale de la société française. Cet impôt fut supprimé par le second gouvernement de Jacques Chirac en 1987 et rétabli en 1988 sous le nom d’ISF, Impôt de solidarité sur la fortune, par le gouvernement de Michel Rocard.

L’ISF est un impôt progressif sur le capital qui concerne le patrimoine des personnes physiques. L’ISF est redevable chaque année civile, en fonction de la valeur du patrimoine des personnes concernées. En 2008, il avait rapporté 4,2 milliards d’euros, soit environ 1,5 % des recettes fiscales de l’État ou 0,5 % du total des prélèvements obligatoires.

C’est dire si sa contribution financière aux dépenses de l’État est faible. Mais là n’est pas la question. C’est son côté justice sociale qui prévaut même s’il fait fuir les riches Français et finalement nuit à l’économie française.

C’est au président Emmanuel Macron que l’on doit la première brèche dans cet impôt contreproductif et unique à ce point dans les pays occidentaux. Il transforma l’ISF en IFI (Impôt sur la fortune immobilière) exonérant par là même les patrimoines financiers détenus par les ménages. La réforme était habile et il y a de fortes chances qu’elle soit maintenue après les élections présidentielles de 2022. De fait, l’ISF, ex IGF, aura disparu. Reste bien sûr à terminer le travail, mais avec les problèmes financiers qui sont devant nous il y a peu de chances pour que l’IFI disparaisse totalement.

Ce bref tour d’horizon nous montre que les grandes réformes voulues par François Mitterrand n’ont pas résisté à l’épreuve du temps. Si elles lui ont permis d’accéder au pouvoir, elles sont loin d’être gravées dans le marbre. Certains diront qu’il a fallu 40 ans et que cela est bien long. Certes, mais jugé à l’aune de l’histoire, ce n’est pas grand-chose surtout si on considère la charge politique que portaient ces réformes socialistes issues du programme commun de la gauche de 1981.

 

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  • Je vais chipoter mais:
    – toutes les grandes entreprises françaises sont dirigées par d’anciens haut fonctionnaires qui ne voient pas la différence entre une banque, une entreprise de Télécom ou une compagnie aérienne
    – les 35 heures existent toujours et il y a une grande modulation du temps de travail
    – la retraite à 60 ans a disparu mais le système de retraite par répartition n’a pas bougé d’un iota. Le retraite a même été élargi aux étrangers.
    – Chirac et même Sarkozy ont essayé de supprimer l’ISF ou de l’aténuer via le bouclier fiscal et aux gouvernement suivant tout à été remis en cause

    Alors malheureusement rien n’a changé malgré des gouvernements majoritairement dits de « droite ».

  • Mitterrand avait instauré 15% de socialisme, nous en somme à 70% à vu de groin. C’est bien un « succès » des descendants de Mitterrand et les résultats attendus sont bien là:
    .
    « …Malheureusement pour l’oligarchie au pouvoir, les dites victimes viennent ensuite grossir la masse des assistés, ce qui oblige à de nouvelles spoliations exercées contre des catégories de moins en moins aisées. Quand il n’y a plus de gens à dépouiller, le socialisme redistributeur cesse et se fait violent afin d’étouffer le mécontentement général. » – Claude Reichman

  • Entre autres petites mesures mesquines, vous avez oublié :
    – Le contrôle des changes, avec l’instauration d’un carnet d’allocations de change,
    où vous pouviez changer pour 600 francs (91 Euros) par an en devises.
    – L’instauration d’une super redevance sur les magnétoscopes de 1500 francs,
    avec contrôle et visites domiciliaires (Avis à la population affiché sur chaque porte
    de Mairie dans toute la France).
    Les dits magnétoscopes dont l’importation a même été stoppée pendant un certain temps.
    Heureusement ces mesures « populaires » et « socialistes » n’ont duré qu’un ou deux ans.

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