Le suicide de la gauche

L’universalisme républicain est désormais mal porté à gauche car il sous-entend que la République offre à tous les mêmes opportunités.

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Anne Hidalgo en chat sur le site du PS by Parti socialiste(CC BY-NC-ND 2.0)

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Le suicide de la gauche

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 16 février 2022
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La gauche trottinait vers le gouffre depuis de nombreuses années. Elle a accéléré le pas. C’est désormais une course effrénée. Pourquoi cette irrésistible tentation suicidaire qui s’est emparée de la petite élite si sûre de la définition du bien et du mal, si sûre également de l’avenir souhaitable pour l’humanité entière. Les Mélenchon, Hidalgo, Jadot, Taubira ne semblent pas effleurés par le doute. Appartenant corps et âme à la politique-spectacle, ils jouent probablement la détestable comédie politicienne, si perceptible, si caricaturale qu’on hésite désormais à en être le spectateur.

Le coup d’après

Certes, la gauche a abandonné tout espoir présidentiel et joue déjà « le coup d’après », comme disent les journalistes. C’est-à-dire les élections législatives du printemps 2022, si importantes pour le financement des partis politiques.

C’est à cette occasion, en fonction des résultats obtenus et du nombre d’élus, que tombe de l’Olympe jupitérien la manne permettant de survivre. Les partis ne pouvant plus se financer que modestement par les dons des personnes physiques et les cotisations, les espèces sonnantes et trébuchantes versées par l’État, c’est-à-dire par nous tous, ont une importance vitale.

Des enfants de la bourgeoisie…

Comment expliquer la ruée vers le précipice, la rupture totale avec la population. Pourquoi cette gauche élitiste, woke, qui soliloque avec ses quelques militants ? Seul le candidat communiste Fabien Roussel a consenti à remettre les pieds sur Terre pour s’adresser au peuple de France. Le résultat a été immédiat : il devance Anne Hidalgo dans les sondages et il est le seul à gauche à progresser. L’homme est sympathique, charismatique même. Mais surtout, ce qu’il dit est frappé au coin du bon sens, ce bon sens qu’a toujours, depuis la nuit des temps, affectionné le peuple.

Médiocre, minable même, ce communisme à la Georges Marchais pour nos grands stratèges de la social-démocratie et de l’écologisme politique. Le dédain qu’affichent ces gens-là, leur superbe d’aristocrates de la bien-pensance permet de mesurer toute la distance qui les sépare de la population.

La gauche socialiste n’a jamais eu la fibre populaire et elle a toujours choisi ses leaders historiques dans la bourgeoisie : Jaurès, Blum, Mitterrand.

Ce sont les fils de bourgeois qui font gagner la gauche, qui n’a vraiment d’allure que lorsqu’elle est dirigée par ceux qui connaissent de l’intérieur et depuis l’enfance les petitesses des possédants. François Hollande, le dernier président socialiste, est lui-même issu de la bourgeoisie. Certains prétendent que son quinquennat a été un échec. Ils se trompent. Il a brillamment réussi à achever le Parti socialiste.

… Aux apparatchiks ayant quelque chose à prouver

Les leaders actuels n’ont pas une origine bourgeoise. Ils doivent tout aux partis politiques. Anne Hidalgo est une fille d’ouvrier, Jean-Luc Mélenchon le fils d’un receveur de postes et Yannick Jadot un fils d’enseignants. Doivent-ils alors prouver qu’ils sont vraiment de gauche idéologiquement ? Car la petite bourgeoisie et le monde ouvrier n’ont pas une sensibilité intellectuelle de gauche.

C’est la redistribution qui les intéresse, c’est-à-dire l’argent. Mais nous sommes au bout du bout des capacités redistributives : prélèvements colossaux, déficits abyssaux. Faut-il alors montrer son adhésion à un système de valeurs pour faire partie de l’élite de gauche ? Sans doute.

Dans cette optique, il ne s’agit plus de défendre le peuple de France contre la rapacité de la bourgeoisie française, position traditionnelle des leaders de gauche au XXe siècle dans les campagnes électorales. Il est nécessaire de voler au secours des damnés de la Terre, où qu’ils se trouvent. Mondialisation oblige. Puisque le capital fait fi des États-nations, le leader de gauche doit lui emboîter le pas.

Les droits de l’Homme sont ceux de tous les hommes, où qu’ils vivent sur notre petite planète. Les femmes voilées sont des victimes, il faut donc les défendre. Les immigrés clandestins sont de simples migrants qui cherchent une opportunité de vie meilleure. Le capital arbitre bien entre les opportunités financières et économiques mondiales. Il ne manquerait plus que les hommes, les femmes et les enfants aient des droits de circulation moindres que le capital !

Le monopole du cœur malgré les échecs historiques

Cette mission ambitieuse, historique, consistant à anticiper le futur et à prendre fait et cause pour les faibles contre les forts représente l’essence même de la philosophie de gauche. Les leaders de gauche parlent toujours avec une assurance sans faille car ils s’imaginent investis d’une mission : construire le futur souhaitable, nécessairement plus juste que le présent.

Dans leur esprit, il n’existe aucun doute : la générosité est de leur côté, ils ont le monopole du cœur face à une droite égoïste et froidement technocratique.

Ils se trompent toujours, dans 100 % des cas. Mais ils parviennent malgré tout à avoir une influence. Ainsi, les communistes ont totalement échoué, partout dans le monde. Les socialistes s’imaginaient à l’époque de Blum que la propriété privée des moyens de production disparaîtrait par des nationalisations progressives.

 

Il était entendu que la gestion publique serait nettement supérieure à la gestion privée. Échec, mais relatif : l’interventionnisme public n’a pas tout monopolisé et a montré les limites de son efficience, mais il a acquis une influence importante.

Aujourd’hui, on peut affirmer sans risque que les prévisions catastrophistes des socio-écologistes ne correspondront pas à la réalité future. Les énergies ne seront pas toutes renouvelables, les habitations ne seront pas toutes maladivement calfeutrées et l’énergie nucléaire, immense découverte du XXe siècle, jouera un rôle important dans les siècles des siècles.

Mais que proposer de plus que les lamentations écologistes ? Le marxisme n’existe plus, la social-démocratie ne rêve plus au tout-État édénique qu’elle prévoyait dans les années 1930. La redistribution atteint ses limites. Que faire ?

La stratégie du repli sur les minorités

Ils n’ont trouvé que l’agrégation de minorités jugées dominées. En cumulant les mécontentements des immigrés mal assimilés, des féministes radicales d’une partie de la jeunesse étudiante, des transgenres et tutti quanti, il est possible d’organiser de nombreuses manifestations publiques et de glaner ensuite suffisamment de voix pour faire vivre tant bien que mal quelques mouvements politiques.

Intersectionnalité, wokisme, appelez cela comme vous voudrez. Il s’agit tout simplement d’une position de repli qui permet d’abandonner le peuple des pays riches qui va désormais travailler en voiture et rêve de voyager sous les tropiques tout en demandant une protection contre le grand remplacement. La gauche ne peut pas défendre cela ! Le peuple du monde occidental est vraiment devenu infréquentable. D’ailleurs il vote à l’extrême droite, c’est tout dire.

L’universalisme républicain est désormais mal porté à gauche car il sous-entend que la République offre à tous les mêmes opportunités. Faux ! nous disent les bobos de gauche, vous êtes colour-blind (aveugle aux couleurs). L’Occident tout entier est structurellement raciste, colonialiste, machiste et économiquement dominateur.

Par grandeur d’âme, prenons un instant, un instant seulement, en pitié ceux qui adhérent sincèrement à ce galimatias venu de la déliquescence américaine. Par exemple Sandrine Rousseau, pourtant économiste. C’est précisément au moment du début du déclin de l’Occident qu’ils proposent de le déconstruire pierre par pierre. Leur aide n’était pas nécessaire. Nous sommes sur la pente descendante.

Ils prennent le train en marche en se donnant le beau rôle de la déconstruction nécessaire pour atteindre l’éden de la société juste et parfaite, celle qu’ils ont déjà construite sur le papier ou dans leurs cerveaux si puissants. Les gens de gauche sont incorrigibles.

Chacun sait en effet que depuis quelques décennies nous sommes déjà passés de la domination à la compétition. La compétition est rude et nous reculons d’année en année. Un seul exemple : selon la Banque mondiale, le PIB par habitant de la France était de 45 300 dollars en 2008 et de 39 000 dollars en 2020. Nous figurions jadis parmi les 10 premiers mondiaux, nous sommes désormais 27e.

Ils s’en sont parfaitement rendu compte. Mais la gauche veut achever le malade. Elle voue une haine sans limite aux valeurs portées par la civilisation occidentale depuis deux siècles : la liberté, le goût du progrès scientifique et technique. La gauche socio-écolo-woke s’allie à nos ennemis. Elle est notre ennemie.

 

 

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  • 45 300 dollars ( @ 1.6 $/€ ) en 2008 et de 39 000 dollars ( @ 1.07 $/€ ) en 2020

  • le problème vient des médias..

    jadot parle à des écologistes et est interviewé par des journalistes essentiellement écologistes..
    hidalgo laissé tomber le bas peuple raciste; polluant et diéselisé. pour lui préférer migrants et groupes opprimés divers et variés..et est interviewée.
    taubira est femme!!! et « noire »!! tout un programme..
    Le problème est que les médias ne font plus l’opinion..et ne la reflètent plus..

    ils ont choisi le narratif..et l’education des foules;.

    je ne sais pas si hidalgo ou jadot sont à ce point stupides pour ne pas s’enrendre compte..

  • « La gauche est notre ennemie. »
    Oui, mais pas tant par ses chances, désormais quasi nulles, d’accéder au pouvoir, que par sa réussite à imposer, au moins partiellement, son idéologie à ses adversaires. Lesquels ne peuvent évidemment pas rejeter en bloc la pensée « vertueuse » de gauche, n’est-ce pas ?
    N’oublions pas que le macronisme est un assemblage du « camp du bien » incarné auparavant par le PS mâtiné d’une bonne dose de pragmatisme économique façon UMP (LREM=UMPS, MLP voyait juste).

    • Retour aux fondamentaux.
       » GAUCHE + DROITE = RADSOCS ».
      Quoiqu’ils fassent, et quelque soit le camouflage politique adopté, ils sont désormais reconnus par tout le monde.
      Et le comble, est qu’on a envie de s’imaginer que ça été toujours comme ça, y compris à l’époque de Blum.
      Mon dieu, quelle époque !

  • Jean-Luc Mélenchon fils d’un receveur de postes: le métier peut être lucratif, cela dépend de l’activité du bureau, notamment de sa capacité à placer des produits financiers. Il se disait jadis du receveur de Paris-Louvre, le plus gros bureau de France, qu’il ne touchait pas son traitement, il se contentait des primes, soit la moitié de celles collectées par le bureau pour lui, le reste à partager par le personnel.

  • La gauche… A t elle vraiment existé?
    Non., il faut uniquement parler de gauche caviar et celle là est éternelle… Pas le parti socialiste…. Mais le communiste est vraiment un type intéressant… De gauche ?… Et pecresse…. La droite caviar…. En fait, la gauche ou la droite n’existe pas ou plus… Restent les bourgeois, ce sont tous des bourgeois…. Melenchon, itou….. Et en face, le peuple…. Opprimé, toujours car nécessaire, le caviar est cher.comme.les homards…

  • Les données du pays sont claires, avec un état à 62% du PIB, 10% de plus que la Suède, 20% de plus que l’Allemagne et 30% de plus que la Suisse, c’est une république socialiste qui plonge dans le même gouffre que les autres et qui devient de moins en moins démocratique et de plus en plus dictatoriale pour étouffer la contestation.
    Au pouvoir, les 50 nuances de rouge.
    La gauche n’a pas abandonné tout espoir pour la présidentielle, elle au pouvoir et ce sont tout au plus quelques miettes qui n’ont pas trouvé le chemin de la gamelle.

  • La posture de la gauche est celle des l’anges de lumière , def http://www.linternaute.fr/expression/langue-francaise/14974/anges-de-lumiere/ Elle est absolument évidente pour ceux qui ont encore un œil sur les textes fondateurs de notre civilisation à savoir la bible, évidemment , on comprend pourquoi cette même gauche s’est acharnée à détruire ces repères fondateurs : pour avoir les coudées franches . Mais bon , l’exercice a ses limites et les gens finissent par y voir clair , le bon sens et la vérité l’emportent toujours , c’est aussi ce que nous disent nos textes fondateurs .

  • J’ en dirai autant de la droite, qui ne sait plus où elle crèche, si elle l’ a su un jour.
    Et franchement en terme d’ opposition elle ne nous veut pas du bien non plus.

  • Excellente analyse.

  • En parlant de suicide de la gauche, si toutefois ce n’était pas déjà effectif, Hidalgo vient sûrement d’enterrer un peu plus sa « campagne » : https://www.europe1.fr/societe/chantier-de-notre-dame-de-paris-la-mairie-veut-facturer-loccupation-de-lespace-public-4094314
    Un joyau de notre patrimoine a failli partir en fumée et réclame des réparations financées exclusivement par des dons, mais la Mairie de Paris socialiste ne peut s’empêcher de réclamer… une taxe. Parce que vous comprenez, un chantier de rénovation, ça prend de la place !

  • « Mais la gauche veut achever le malade. »
    Vous, vous souhaitez achever la planète en ne faisant rien, en laissant libre court au marché tout puissant. Excusez-nous de souhaiter avoir de l’espoir dans ce monde, l’espoir de pouvoir être soignés quand on aura besoin, de pouvoir nourrir nos gosses, respirer de l’air pur.
    Votre monde est dépassé, il détruit tout et n’a pas d’avenir si ce n’est le chaos et le chacun pour soit.

  • Les commentaires sont fermés.

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