« L’Envie » d’Helmut Schoeck, un ouvrage majeur

Présentation d’un ouvrage très instructif de 1966 qui est resté une référence dans le monde entier, y compris en France, où il a été traduit bien plus tardivement qu’ailleurs.

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« L’Envie » d’Helmut Schoeck, un ouvrage majeur

Publié le 8 septembre 2023
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Voici un ouvrage que j’ai acheté à sa sortie en France en 1995, et vers lequel je renvoie depuis longtemps au fil de mes articles. Il était temps que je me décide à en faire une présentation, comme il le mérite.

L’envie est un sentiment éprouvé par de nombreuses espèces vivantes, mais particulièrement marqué chez l’être humain. Présent à la fois dans la littérature, la philosophie, la psychologie, la religion, et beaucoup d’autres domaines qui ne font que retranscrire un phénomène ancré dans toutes les civilisations et époques de l’humanité, il manquait une somme sur le sujet.

C’est ce que propose le sociologue Helmut Schoeck (1922 – 1993), de manière particulièrement brillante.

 

L’envie, un sentiment universel

La thèse d’Helmut Schoeck s’articule autour de l’idée que, loin d’être purement conjoncturelle et susceptible d’être supprimée, en particulier dans des situations où règnent de vives inégalités, l’envie est un sentiment consubstantiel à l’être humain. Il est donc naïf de prétendre l’éradiquer, à l’image de ce que les théories marxistes visant un égalitarisme intégral prétendaient accomplir (on en trouvera d’ailleurs une illustration dans le roman Kallocaïne, présenté récemment).

Il s’agit d’un processus psychologique qui exige un cadre social, donc l’existence de deux ou plusieurs individus. Et qui explique beaucoup de choses dans la vie humaine, celle des sociétés, et dans l’histoire des civilisations.

Contrairement à l’amour, l’amitié ou l’admiration, par exemple, qui supposent l’attente d’une réciprocité, l’envieux ne souhaite rien de tel, écrit Helmut Schoeck. Il ne souhaite d’ailleurs pas spontanément entrer en relation avec la personne qu’il envie. Et plus intensément il concentre sa pensée sur l’Autre, plus il est renvoyé à lui-même.

L’envie ne consiste, en effet, pas à vouloir accaparer un avantage appartenant à l’Autre, mais en ce que l’envieux « souhaite le voir volé, dépossédé, dépouillé, humilié, mis à mal ».

 

L’envieux de type pur n’est ni un voleur ni un escroc travaillant pour son propre bénéfice. Et lorsque l’envie porte sur les qualités personnelles, ou le savoir, ou la réputation d’un autre homme, il serait impossible en tout état de cause de l’en dépouiller. Mais il est toujours loisible de souhaiter que l’Autre perde sa belle voix, sa virtuosité, sa prestance ou sa vertu.

 

On en trouvera, là encore, une illustration dans le film Amadeus de Milos Forman… Mais de manière plus générale, c’est surtout « la distance sociale séparant l’envieux de la personne enviée » qui prédomine, même si les motifs peuvent varier selon les sociétés et les civilisations. Envier et être envié peuvent coexister chez un même individu.

C’est aussi la raison pour laquelle, par exemple, la religion tente de mettre à disposition des croyants « des images mentales qui libèrent l’envieux de son envie et l’envié de son sentiment de culpabilité et de sa crainte des envieux ».

Mais les idées ne sont pas seules à exercer une influence sur le rôle que peut jouer l’envie. Les structures et les processus de la vie sociale, engendrés eux-mêmes par des idées, entrent également en ligne de compte, nous dit Schoeck.

Pour autant, on ne peut réduire cette pulsion à des stéréotypes. Et c’est tout l’intérêt de l’ouvrage que d’entrer dans des analyses très fines mettant en cause les idées reçues.

La santé, la jeunesse, la beauté, le pouvoir, la richesse, sont ainsi susceptibles de susciter l’envie. Et celle-ci est présente chez l’humain plus que chez n’importe quelle espèce du fait de la longueur de l’enfance (où ce sentiment apparaît entre frères et sœurs). Mais si cela fluctue d’une société ou d’une culture à une autre, l’ethnographie montre en revanche sans équivoque que cette notion est sans doute la mieux comprise et partagée, y compris des tribus primitives, bien davantage que des concepts que l’on ne retrouve pas forcément dans toutes les cultures, tels que l’espoir, l’amour, la justice ou le progrès.

Elle est d’ailleurs, écrit Helmut Schoeck, bien plus facile à différencier que d’autres processus psychiques trop souvent apparentés dans la littérature notamment, comme l’agression, l’inimitié, le conflit, la frustration, la privation, la tension ou encore la friction.

Elle caractérise clairement le fait de « ne pas supporter qu’un autre soit, ou puisse, ou vaille, ou possède une chose dont lui-même est privé et qui éprouve, pour cette raison, un plaisir particulier à voir cette chose détruite chez l’autre sans que pour autant elle lui revienne à lui ».

Ce qui s’applique d’ailleurs aussi à l’économie :

 

Il serait aisé de démontrer qu’un impôt fortement progressif sur le revenu, une taxation de l’héritage équivalant à une confiscation pure et simple (les coutumes correspondantes chez les primitifs, l’agression muru des Maoris, par exemple) constituent une objectivisation de l’envie.

 

Un concept refoulé ?

Or, ce qui retient particulièrement l’attention de l’auteur est la quasi-absence de ce concept depuis le XXe siècle en littérature, et en particulier dans le champ des sciences sociales et de la philosophie traitant de la morale. Semblant nier ou minorer, de la sorte, l’importance fondamentale qu’elle a toujours eue en tant que réalité sociale.

Son aspect négatif et dévastateur comme fin en soi n’avait jamais cessé d’être décrit et blâmé depuis des millénaires. Pour autant, l’anthropologie montre aussi que « sans l’envie, l’être humain ne peut pas trouver sa vraie place dans la société ». Prétendre l’annihiler relève de l’utopie. Seule sa forme pathologique étouffant tout autre sentiment chez un individu, ou celle d’une société exclusivement préoccupée d’apaiser ces envieux supposés ou provoqués, relèvent de l’absurdité.

Plus encore, relève le sociologue, personne ne mettra ouvertement en garde quelqu’un contre l’envie qu’il risque de provoquer chez lui. Il s’agit d’un tabou. On préférera se taire, ou qualifier la chose d’intolérable ou de pas équitable.

La thèse fondamentale qu’Helmut Schoeck défend ainsi est que plus il est possible, dans une société donnée, d’agir comme si l’envie n’existait pas, plus l’activité économique et le nombre des innovations iront croissants. Oblitérer les différences susceptibles d’être observées entre individus permettrait ainsi « au législateur et au pouvoir politique de protéger, en respectant les formes de l’égalité, les acquis inégaux des membres de la communauté, quitte le cas échéant, à favoriser leur progression de manière inégalitaire ».

Il ajoute ceci :

 

En réalité, cet état d’équilibre demeure un but idéal jamais atteint. Nombre de propositions bien intentionnées visant à l’édification d’une « société meilleure », d’une « société juste » s’égarent dès le départ dans une pétition de principe : il s’agit pour elles d’une société dans laquelle il ne subsiste plus rien qui puisse donner naissance à l’envie. Pareille situation ne se présentera jamais, car on peut prouver que l’homme inventera en cas de besoin un objet d’envie à son usage.

Dans l’utopie d’une société où non seulement nous porterions tous les mêmes vêtements, mais où nous aurions aussi les mêmes visages, chacun envierait encore à l’autre la force d’âme supposée qui permettrait à cet autre de nourrir des sentiments et des pensées personnelles sous le masque de l’égalitarisme.

 

Envie et langage

Helmut Schoeck revient sur le sens historique du mot « envie ».

Doté au départ de quelques attributs positifs, il revêt aujourd’hui un sens pleinement négatif, proche de la haine, de la malice et de la malveillance, d’un sentiment qui ronge l’âme ; on apprend au passage que dans certains cas, le désir de se supprimer de l’envieux peut s’accompagner du sentiment de ne pas supporter « que d’autres, avides de vivre ou à tout le moins courageux, lui survivent » – phénomène que je n’ai jamais compris, le rencontrant régulièrement dans des faits divers.

Il est bien distinct du mot « jalousie », auquel il est trop souvent apparenté à tort, vue comme la crainte de perdre l’affection, la fidélité de l’autre, ou la volonté exacerbée de conserver ce qui nous appartient de droit, et méfiance que l’on peut éprouver à l’égard de celui que l’on soupçonne de vouloir nous le ravir, qui peut d’ailleurs être dans certains cas l’envieux…

La jalousie n’est pas forcément négative (à l’instar de l’émulation, qui ne peut en aucun cas non plus être confondue avec l’envie). Des expressions du type « je vous envie » sont ainsi utilisées à tort, là où nous devrions dire « Je suis jaloux de vous ». Ce qui est bien symptomatique de la quasi-disparition de l’idée d’envie dans les discours et la littérature depuis le XXe siècle, si ce n’est sous une forme fautive, là où on n’ose plus se définir comme tout simplement jaloux, ce qui n’a rien de répréhensible, la jalousie induisant au pire une rivalité loyale et sans ressentiment ou désir de destruction par méchanceté.

Quant à l’envie, sa nature est bien plus complexe, relevant à la fois de l’égocentrisme, de l’agressivité et du déplaisir, de penchants ou prédispositions qui rendent vaines par exemple les théories égalitaristes, qui commettent l’erreur de croire que l’on peut agir sur une cause, alors que les mécanismes déclencheurs de l’envie sont bien plus complexes et difficiles à identifier.

Bien au contraire, l’envieux étant plus désireux de détruire (par exemple par des incendies) que de posséder les biens matériels ou moraux de l’envié, dont il se dit qu’il doit être épuisant de les posséder, les politiciens savent pertinemment, et tiennent compte du fait que « un revenu national minime est mieux accepté par tout le monde qu’un revenu plus important au sein duquel émergent de grandes fortunes ». On comprend, là encore, bien des choses…

L’analyse des proverbes en la matière permet à l’auteur de compléter le panorama.

Ils sont nombreux, et très évocateurs d’un certain état d’esprit qui consiste pour l’envieux à ne voir que ce qu’il veut voir, et à l’envié à tenter d’amoindrir ou de cacher un gain ou un plaisir dont il aurait bénéficié (quelqu’un qui obtient une promotion, le gagnant à une loterie, etc.).

L’envie est d’ailleurs impossible à apaiser. Et on observe que « plus on fait de bien à l’envieux, plus il devient mauvais » ; c’est-à-dire qu’au lieu de lui enlever ses motifs supposés d’envie, et de le rendre plus heureux, quels que soient les cadeaux et bienfaits que pourra lui faire son bienfaiteur, plus l’envié œuvra en ce sens, « plus on lui montre à quel point on lui est supérieur et combien facilement on peut se passer de ce qu’on lui donne » (ce qui, là encore, à un niveau collectif, pourrait expliquer un constat que nous faisions encore récemment sur l’ingratitude que peuvent éprouver les Français qui bénéficient d’aides étatiques dispendieuses sans forcément en avoir conscience, ou les jugeant toujours insuffisantes, rendant ces aides, sinon dangereuses, souvent inutiles et stériles – dans le sens où les gouvernants s’en servent souvent (un peu naïvement, de fait) dans un but généralement intéressé…).

Dans certains cas, l’envieux sera même prêt à se saborder lui-même, à souffrir, voire à mourir, du moment que celui qu’il envie porte lui aussi un fardeau. Les proverbes sont tous d’accord sur le point que c’est à lui-même que l’envieux cause le plus grand mal. Il s’agit d’une attitude stérile, le plus souvent pathologique, conte laquelle il n’existe pas de remède.

Convoitise et malignité s’accompagnent par ailleurs d’un sentiment d’infériorité et d’impuissance vis-à-vis de la personne enviée, qui provoque l’irritation et la haine de l’envieux. Qui, de ce fait, se réjouit de manière diabolique des malheurs ou déceptions que peut connaître la personne enviée. Seule la raison, selon Adam Smith, est à même de venir réfréner et étouffer les manifestations de l’envie que chacun éprouve à l’égard de chacun. C’est la base de la civilisation. Car, quelle que soit la culture ou le type de société, l’envie se rencontre partout inéluctablement. C’est aussi ce qu’Helmut Schoeck nous montre à travers de nombreux exemples et développements.

 

L’envie, un obstacle au développement

L’étude des peuples primitifs révèle particulièrement bien l’importance que peut prendre l’envie dans les rapports humains.

Polygamie, sorcellerie, magie noire, peur de la concurrence et obstacles à toute forme de progrès, nombreux sont les exemples développés qui permettent de montrer la diversité des situations à travers lesquelles on perçoit la complexité du phénomène.

Attitudes que l’on retrouve, dans certains cas et sous d’autres formes, dans les sociétés modernes, y compris parmi des personnes cultivées. Notamment parmi ceux qui se disent obsédés par les inégalités.

 

L’homme politique dont le projet de loi prévoyant une taxe spéciale sur certains produits de luxe ou sur des sources de revenus susceptibles d’exciter l’envie est acceptée par le Parlement croit peut-être en toute bonne foi à la rationalité de son initiative en termes de politique économique […] Il existe encore, hélas ! des économistes modernes capables de faire le raisonnement erroné selon lequel l’avantage acquis par l’un doit nécessairement entraîner une perte pour l’autre ; certes, ils ne recourent pas à une magie malfaisante, mais ils prennent parfois des mesures à peine moins absurdes, une forme particulière d’impôt, par exemple qui, en dernière analyse, fait du tort à ceux-là même qu’elle prétend aider.

 

C’est vrai aussi de tous ceux, même ayant aujourd’hui une bonne situation qui, voulant apaiser le souvenir d’une peine ou d’un travail rebutant qu’ils ont connu, s’efforcent avec une joie mauvaise de faire subir les mêmes ennuis à une personne plus jeune, faisant fi des progrès qui permettent désormais de rendre la tâche et la vue bien plus faciles. Ce qui est parfois l’objet de conflits de générations.

 

Les craintes liées à l’envie

L’avenir et le progrès social dépendent du progrès économique, qui lui-même repose sur la confiance.

L’envie, surtout lorsqu’elle est institutionnalisée, suscite la méfiance, et donc la réticence à entreprendre (on peut se demander d’ailleurs si les excès liés à l’écologisme ne peuvent pas engendrer ce type de frein). Ceci est historiquement avéré dans le cas de certaines sociétés, où les méthodes agricoles sont restées traditionnelles et primitives, de peur de se heurter aux barrières de l’envie.

De même, il existe de multiples observations de communautés au sein desquelles l’envie de tout le monde envers tout le monde conduit à une activité humaine qui vise la diminution des ressources. Surtout lorsqu’une dimension magique intervient dans les esprits et que l’on craint le mauvais œil.

Cela peut aller jusqu’à couper la communication entre les gens, qui ont tout intérêt à se montrer d’une discrétion extrême. Ou bien à ne partager que les mauvaises nouvelles, surtout pas les bonnes. On voit par là que l’envie peut conduire en certains endroits à une vie en société fort peu stimulante, où l’entraide peut même être fuie, celui qui aide l’autre pouvant devenir son ennemi. Ce qui s’applique aussi régulièrement, à un point que l’on n’estime pas, dans le domaine de l’aide au développement.

Et lorsqu’il n’y a plus de biens matériels susceptibles de provoquer l’envie, alors la haine peut se retourner vers la personne physique elle-même.

 

Nous découvrons ici un effet bénéfique de la propriété privée qu’on met rarement en relief. Elle n’est pas, comme ne cessent de nous le répéter les apôtres de l’égalitarisme, un motif d’envie destructrice, mais au contraire un mur protecteur nécessaire dressé entre les individus.

 

C’est aussi par cette raison que l’on peut expliquer la crainte proverbiale chinoise de « perdre la face ». L’auteur explique qu’il s’agit en réalité de l’un des moyens d’échapper à l’envie. Et donc d’éviter de courir le danger de faire un faux pas, préjudiciable notamment à l’initiative et à l’innovation. Il ne s’agit donc pas d’hypocrisie, comme l’interprètent les Occidentaux.

De nombreux travaux d’ethnologie tous plus passionnants que les autres, que je ne peux bien évidemment tous passer en revue ici, enrichissent d’anecdotes passionnantes cet ouvrage très dense, dont la portée est très étendue et souvent assez complexe (je ne parle pas de l’ouvrage, qui lui est fluide et se lit bien). Ils expliquent assez bien, par exemple, l’existence de ghettos, parfois dus simplement, non au fait de ceux qui accueillent, mais à des formes d’inhibition liées à la haine et à l’envie suscitées parmi les migrants à l’égard de ceux qui parviennent à s’assimiler de manière exemplaire dans une ville, une région ou un pays. Ou encore la difficulté particulière, en de nombreux lieux, à devenir chef ou à assumer des responsabilités au service des autres ou d’une collectivité.

 

Psychologie de l’envie

En définitive, insiste l’auteur, l’envie serait souvent attachée à des choses qui peuvent sembler la plupart du temps tout à fait dérisoires, mais qui ne le sont pas tant que cela aux yeux de l’envieux.

Il souligne d’ailleurs un paradoxe frappant :

 

Une inégalité écrasante, provoquant l’étonnement, surtout si elle comporte un élément tout à fait inaccessible au commun, suscite bien moins l’envie qu’une inégalité minime devant laquelle l’envieux doit se dire : il s’en faut de peu pour que moi aussi j’en sois capable.

 

De fait, il s’agit d’un sentiment qui remonte très souvent à l’enfance, très présent dans les rapports entre frères et sœurs, et qui provient d’un ressentiment exacerbé par l’imagination. Mais il serait absolument simplificateur de s’en tenir là, et de réduire ce sentiment, plus proche d’ailleurs la plupart du temps de la jalousie en l’occurrence, à ce simple facteur temporel.

Helmut Schoeck pousse l’analyse beaucoup plus loin, tellement que je préfère renvoyer ceux que cela intéresse à la lecture du livre. Je m’en suis tenu ici à une simple présentation rapide des cent premières pages, essentiellement les cinq premiers chapitres, alors qu’il en comporte vingt-deux. Il serait naturellement trop long de poursuivre ainsi, à moins d’envisager de nombreux volets…

La suite de l’ouvrage aborde, entre autres, les aspects de la question liés aux sciences sociales, ceux du crime inspiré par l’envie, la notion de destin, la place occupée par ce sentiment dans la littérature, dans la philosophie, ou encore la politique, mais aussi les liens avec l’éloge de la pauvreté, le sens de la justice et l’idée d’égalité, la crainte d’être différent des autres, la notion de propriété, d’imposition, de révolutions sociales, d’indignation, et plus généralement de la place des théories de l’envie dans l’existence humaine, ou de l’utopie d’une société exempte d’envie.

Autant de chapitres qui vous permettent de mesurer la richesse particulière de cette lecture, qui permet clairement de l’identifier comme un monument du savoir et de la réflexion.

 

Helmut Schoeck, L’Envie – Une histoire du mal, Les Belles lettres, novembre 1995, 532 pages.

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  • Beaucoup à dire sur ce sujet . Le volet religieux n’est pas abordé , la raison seule évoquée comme remède, de mon point de vue bien pauvre pour réguler les passions humaines. Les commandements posent clairement l’interdit : « Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain. Tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne, rien de ce qui est à ton prochain (Exode 20,17 » . Ca a le mérite d’appeler un chat un chat , si difficile dans notre société post « interdit d’interdire » et à l’auto creation triomphante. Autre remarque , souvent , les théories marxistes , rousseauistes nient le mal au sein de nous mêmes , pour eux il est exterieur : la fameuse société , d’où leur frénésie à réformer le monde , croyant ainsi modifier l’homme . L’approche chrétienne est inverse : réforme toi toi même et tu feras le bien . Deux chansons maintenant pour illustrer , « l’envie » de Johnny et « qu’est ce qui pourra sauver l’amour » de Balavoine , la lecture des paroles donne l’ampleur du problème .

  • Voilà un teasing efficace. Le propos de l’ouvrage semble passionnant et je n’en avais jamais entendu parler. Merci pour cette recension stimulante !

  • Tjrs le même déni de René Girard, comme s’il n’existait pas, il faudrait faire un jour la liste de tous ces pseudos sociologues qui ont copié Girard tout en l’ignorant ostensiblement : l’envie intellectuelle par excellence : alors que l’envie s’explique rationnellement bien mieux par le désir mimétique et la victime émissaire : aussi l’affirmation incroyable : « la quasi-absence de ce concept depuis le XXe siècle en littérature, et en particulier dans le champ des sciences sociales et de la philosophie traitant de la morale » : pour les ignorants, c’est leur nature d’ignorer et de se goberger.
    Aussi : Platon parle de l’envie bien mieux qu’Aristote : il l’analyse dans le Philèbe à partir de la Comédie, et non de la Tragédie : envie : c’est tout simplement l’inverse du « connais toi toi même » : illusion de possession d’un bien de l’envieur et de l’envié et son mécanisme de rivalité : son exutoire est le rire, le ridicule, un plaisir opposé à une peine qu’est l’envie, à ne pas confondre avec le mépris : Plaisir de soulagement de l’amoindrissement d’un danger : on envie quand on ne peut se venger.
    Tous les grands maitres de l’envie : Shakespeare, Stendhal, Flaubert, Dostoïevski : et le plus grand au 20e : Marcel Proust

  • j’ai googolisé Girard – Schoeck, et voici le meilleur, tiré de l’Emissaire, excellent blog en ligne de critique littéraire : « Il existe cependant une différence de taille entre les deux penseurs. René Girard a dévoilé la circularité du désir mimétique, cette contamination mutuelle qui conduit à l’indifférenciation des rivaux. Helmut Schoeck en reste à la distinction de nature entre envieux et enviés. Pourtant, il passe tout près de la circularité dans son chapitre sur Kierkegard : il s’y étonne que le philosophe danois nomme également « envieux » ceux qui suscitent l’envie. Mais il ne prend pas la piste désigné par cet indice… »
    En bref. Shoeck reste un aristotélicien, un structuraliste, il établit des listes, des définitions, mais ne remonte pas à leur corrélation

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