Usage du 49.3 : peut-on encore croire en la parole gouvernementale ?

Avec le 49.3, la confiance envers le gouvernement s’étiole. C’est l’ensemble de l’élite française qui est en cause. La séquence politique actuelle est dramatique pour notre démocratie.

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Elisabeth Borne By: Jacques Paquier - CC BY 2.0

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Usage du 49.3 : peut-on encore croire en la parole gouvernementale ?

Publié le 29 mars 2023
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Alors que le recours à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution pour faire adopter la réforme des retraites a attisé la contestation, Élisabeth Borne a déclaré dimanche, dans un entretien à l’AFP :

« L’objectif que je fixe pour l’avenir, c’est pas de 49.3 en dehors des textes financiers […] Depuis le début de la législature, 11 projets de loi ont été définitivement adoptés et 12 propositions de loi. Il y a eu un recours au 49.3 sur trois textes uniquement »

Or, ces trois textes sont justement des textes financiers pour lequel le chef du gouvernement a fait usage onze fois de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution : le projet de loi de finances pour 2023 (cinq fois) ; le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2023 (cinq fois) ; le projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale 2023 (une fois).

« Le président nous a demandé de construire un agenda qui nous garantisse de bâtir des majorités avec la droite ou avec la gauche pour que nous n’ayons même pas à nous poser la question du 49.3 », a avancé Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement ce lundi matin sur BFMTV.

Olivier Dussopt, le ministre du Travail, a cependant avancé dans un entretien à Têtu que le gouvernement pourrait avoir à nouveau recours au 49.3 afin de faire passer d’autres lois. Olivier Véran a précisé : « Ce qu’on veut maintenant, vraiment pour apaiser, c’est de construire une majorité texte par texte »..

Depuis la révision constitutionnelle de 2008, l’usage du 49 alinéa 3 est limité à un seul texte de loi par session parlementaire (d’octobre à juin pour la session ordinaire), à l’exception des textes financiers – projets de loi de finances, de financement de la Sécurité sociale ou les budgets rectificatifs -, pour lesquels son usage n’est pas restreint.

En inscrivant dans un projet de loi de finances rectificatif de la Sécurité sociale la réforme des retraites – qui aurait pu faire l’objet d’un projet de loi ordinaire – le gouvernement a pu utiliser l’article 49 alinéa 3. Il se garde ainsi la possibilité d’user de cette procédure pour un autre projet de loi sensible sur l’immigration, bien qu’Élisabeth Borne a indiqué ainsi vouloir renoncer à cette dernière option.

« Les gens ne veulent plus de 49.3, donc elle répond aux gens. Elle a manifesté sa volonté de renouer et de parler avec tout le monde », a déclaré auprès de Public Sénat François Patriat, le patron des sénateurs macronistes. « C’est un signe de bonne volonté, d’apaisement », a-t-il ajouté.

« Je ne me réjouis pas de cette annonce car elle semble donner raison, a posteriori, a ceux qui lui reprochent d’avoir utilisé le 49.3 », déplore quant à lui Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat. « Comme gaulliste, je pense que l’usage du 49.3 est parfaitement constitutionnel et démocratique. Politiquement, il faut en faire un usage, je dirais ajusté. C’est un instrument à la main du gouvernement. Et c’est assez audacieux pour un gouvernement de déclarer qu’il s’en privera de façon systématique, si ce n’est qu’elle a écarté le champ des textes budgétaires ».

Alors, pour répondre précisément tel que posé en titre de notre article, non on ne peut croire en la parole de la cheffe du gouvernement, d’une part parce qu’elle s’engage à n’utiliser cette procédure constitutionnelle que sur le domaine budgétaire, or c’est le domaine de prédilection de celle-ci ; et d’autre part, parce que sa parole n’engage pas celle du président de la République, qui imposera à sa Première ministre (ou son successeur) l’engagement de la responsabilité de son gouvernement.

Depuis les mesures liberticides de l’Absurdistan sanitaire tel le passe vaccinal ; après avoir saccagé, pourri, détruit, la filière nucléaire ; la confiance envers le gouvernement s’étiole. C’est l’ensemble de l’élite française qui est en cause. La séquence politique actuelle est dramatique pour notre démocratie.

 

 

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Créer un compte Tous les commentaires (13)
  • Avec le 49-3, les projets de lois sont « adoptés sans vote », dit-on. Pourtant, il appartient aux Députés, lors des débats sur la motion de censure qui suit, normalement, de ne parler que du projet de loi qui fait problème, et, pour ceux qui veulent le repousser, de transformer leur vote contre en vote pour la censure. Ils en sont totalement libres.

    Les Constitutions avant celle de 1958 n’avaient pas l’équivalent du 49-3. Quand ils constataient avant le vote qu’un projet de loi jugé par eux très important risquait de ne pas être adopté du fait de la réticence d’une partie de leur Majorité, les Présidents du Conseil menaçaient de démissionner. Le risque de devoir le faire était plus élevé que suite à une motion de censure, mais je pense que c’est cette solution que Mme Borne aurait dû appliquer. On ne lui aurait pas reproché d’avoir accordé beaucoup d’importance à la réforme des retraites, et on lui aurait reconnu un certain courage. Cela aurait été mieux accepté que le 49-3.
    Qui sait si certains députés ont voté la censure pour protester contre l’application du 49-3, alors qu’ils n’étaient pas opposés à la réforme ? Peut-être celle-ci aurait-elle été adoptée sans le 49-3?

  • Je ne suis pas macroniste et loin de là. Je ne suis pas pour cette réforme des systèmes des retraites en France. Macron avait dit qu’il réformerait le système, il a tenu sa promesse. Maintenant, si la réforme ne plaît pas, ce n’est qu’une loi, il suffit que l’un des braillards qui est dans la rue, propose une loi qui va plaire à tous les Français et il se fera élire. Et dans deux ans il y aura un nouveau système. Ça me fait marrer de voir les jeunes, manipulés par Melenchon et consorts, dans la rue à cause d’une loi qui va impacter leur retraite dans 40 ans alors que d’ici là il aura coulé de l’eau sous les ponts, et que bien d’autres lois auront été votées sur le sujet.

  • Le 49-3 est une pilule anti-obstruction.
    C’est un moyen raisonnable de s’immuniser contre l’invasion de faux débats qui ridiculisent le parlement.
    Un raccourci qui permet de voter tout-ou-rien sur un texte définitif, bon ou mauvais. Où est le problème ?

    • Et une grenade est un moyen efficace de se débarrasser d’un cancer.
      Le problème tient plutôt aux conséquences non-législatives de l’usage de cette pilule. Ici par exemple des émeutes et un gouvernement qui a perdu sa légitimité. La moitié de tous les députés élus l’an dernier moins neuf était prête à retourner aux urnes pour faire sauter Borne, les autres ont eu la trouille ou font partie de sa clique. Dans la situation actuelle je peine à imaginer un texte sous l’impulsion de Macron qui ferait effectivement sauter le gouvernement, aussi barbare soit ce texte. Du coup Macron dispose d’un pouvoir presque illimité de faire de la loi sa simple volonté, même si Borne promet de moins utiliser le 49-3 (ils avancent de toute façon à chaque itération que c’est « nécessaire » et que la « situation les y contraint »).

      -1
      • Si une grenade judicieusement lancée était un moyen de faire disparaître le cancer, où serait le problème ?

        • Il n’y aurait pas de problème si elle était judicieusement placée, mais « judicieux » n’est pas vraiment le premier terme qui me vient quant à la stratégie politique de ce gouvernement… (j’aurais navrant à l’esprit éventuellement)

  • La gauche de M. Rocard a utilisé le 49.3 sans modération. Résultat : depuis cette époque, nos politiciens ont tous viré à gauche. Alors, pourquoi aujourd’hui, E. Borne, gradé adepte de la gauche caviar comme Rocard, ne suivrait-elle pas son Mentor ?

  • Ce n’est pas une question de 49-3. Au-delà de cette réforme, c’est la crédibilité du système France qui est en jeu.
    « Au travail, dit-il. Nous devons faire une histoire du futur, pas une chronique du temps perdu. » U. Eco

  • Oui, elle respectera sa parole : tous projets de lois seront financiers 😉

  • Il n’y aura pas de sortie par le haut tant que la France sera une monarchie élective. Il faut revenir à un vrai régime parlementaire.

    • Si l’électorat est idiot, le parlement sera à son image.
      Il faut commencer par rallumer les lumières.

    • Et qui est le Roi ? Macron ou Larcher ? Et Robin des Bois ? Mélanchon ou Martinez ? Avec un raisonnement comme celui-ci, il se pourrait que la future Reine soit Le Pen.

  • Avatar
    jacques lemiere
    4 avril 2023 at 7 h 47 min

    « Usage du 49.3 : peut-on encore croire en la parole gouvernementale ? »

    parce que vous croyez la parole gouvernementale?

    donc un président change de premier ministre et hop…

    ce n’est qu’un titre certes…

    mais le pose comme un fait q’un élu n’est pas tenu de respecter sa parole..et que la sanction vient de l’élection…

  • Les commentaires sont fermés.

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