Covid : recul de l’invidividu, avancée de l’étatisme

La pandémie de Covid-19 semble bien marquer une nouvelle étape du recul de l’individu face à l’État-nation.

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Covid-19 by Terence Faircloth (CC BY-NC-ND 2.0)

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Covid : recul de l’invidividu, avancée de l’étatisme

Publié le 28 novembre 2020
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Par Patrick Aulnas.

L’évolution historique du siècle passé ne laisse aucun doute sur un double mouvement de l’Histoire. D’une part, l’emprise des États sur l’individu ne cesse de croître. D’autre part, l’État-nation est fragilisé par la globalisation planétaire et l’apparition d’entités collectives puissantes et dynamiques : entreprises multinationales, organisations non gouvernementales…

La pandémie de Covid-19 semble bien marquer une nouvelle étape du recul de l’individu face à l’État-nation, mais elle a également montré l’absence totale de coopération entre États face à un danger planétaire.

Recul de l’individu et coercition étatique : on n’arrête pas le monstre

Chacun a pu l’observer. Dans de nombreux pays une réglementation d’exception a été adoptée pour assurer la distanciation sociale. Des libertés publiques fondamentales ont été restreintes : liberté d’aller et venir, liberté du travail, liberté du commerce. Seules les périodes de guerre entraînaient jusqu’à présent de telles limitations des libertés publiques dans les démocraties.

Ne nous leurrons pas, il s’agit d’un pas supplémentaire de l’interventionnisme public. Quel que soit le jugement que l’on porte sur l’opportunité des mesures coercitives étatiques qui ont été adoptées, un constat peut être partagé par tous : pour la première fois, une limitation majeure des libertés a été imposée pour des raisons sanitaires dans de très nombreuses démocraties.

Ainsi, après l’interventionnisme fiscal qui débute au moment de la Première Guerre mondiale, l’interventionnisme social qui se construit peu à peu après la Seconde Guerre mondiale, l’interventionnisme écologiste qui se développe depuis le début du XXIe siècle, apparaît un interventionnisme sanitaire très contraignant. Cette quatrième étape laisse à tous ceux qui la vivent une impression d’ensemble : Big Brother ou Léviathan, puissance protectrice et monstre destructeur à la fois, poursuit son chemin.

Démocratie ou pas, nous ne sommes plus que les éléments d’un tout social qui configure notre destin historique. La liberté est devenue une variable d’ajustement dont le périmètre peut être redéfini pour des raisons d’opportunité. Elle n’est plus le fondement même de notre société, auquel il serait impossible de toucher.

La démocratie occidentale a définitivement quitté le libéralisme pour explorer des contrées dans lesquelles domine le souci omniprésent de l’alignement collectif.

Pandémie et endettement public : toujours plus

Les États déjà lourdement endettés avant la pandémie ont dû financer des mesures exceptionnelles (aides aux entreprises, chômage partiel, dépenses de santé, etc.) par de nouveaux emprunts.

Citons seulement deux exemples chiffrés.

Fin 2019, la dette publique française s’élevait à environ 2400 milliards d’euros, soit 98 % du PIB. Fin 2020, elle devrait représenter environ 120 % d’un PIB, lui-même en chute de 10 %.

Aux États-Unis, la dette publique de 22 700 milliards de dollars représentait 106 % du PIB fin 2019. Elle grimpait déjà à 26 950 milliards en septembre 2020, soit nettement plus de 120 % du PIB.

Seuls quelques États occidentaux particulièrement vertueux dans la gestion des finances publiques maintiennent une situation saine. Ainsi, la dette publique allemande était de 60 % du PIB fin 2019 et de 67 % du PIB début juillet 2020.

Il est évident qu’en s’endettant toujours davantage depuis des décennies, les États occidentaux s’affaiblissent peu à peu. L’action publique est contrainte par l’accroissement de la charge de la dette. Les taux d’intérêt historiquement très faibles ne doivent pas faire illusion. Il est toujours pénalisant de faire peser sur les générations futures un énorme encours de dette. Il faut rembourser le capital, même si les intérêts sont nuls.

Historiquement, on observe une issue principale aux dettes publiques excessives : l’inflation. Une inflation, forte supérieure à 5 % par an, fait fondre rapidement les montants à rembourser. Ainsi, avec une inflation moyenne de 5 % par an, le poids d’une dette non indexée diminue de moitié en quinze ans par le miracle de la dépréciation monétaire. Au fil des ans, le remboursement se fait de plus en plus en monnaie de singe. Mais pas d’inflation à l’horizon aujourd’hui…

L’autre issue est la faillite d’un État, c’est-à-dire la cessation du remboursement de la dette et donc la spoliation des épargnants. Un État se plaçant dans cette situation est évidemment dramatiquement affaibli. À quand la faillite d’un grand État occidental ?

Pandémie et coopération entre États : échec

Malgré le multilatéralisme (organisations et conventions internationales), le chacun pour soi a prévalu dès l’apparition de l’épidémie début 2020. Extrême prudence initiale de l’OMS qui ne semblait pas voir le danger, suivie d’une alerte générale en mars 2020.

Après quelques hésitations, les gouvernants des États ont adopté des mesures plus ou moins coercitives afin de limiter la circulation du virus : confinement, couvre-feu, conseils de distanciation sociale, etc. La coopération inter-étatique s’est limitée à quelques transferts de malades gravement atteints vers des services de réanimation étrangers, par exemple de la France vers l’Allemagne.

La pandémie a donc mis en évidence la fragilité de la coopération internationale en période de crise. Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, l’a lui-même constaté en déclarant en septembre 2020 devant le Conseil de sécurité que la pandémie de Covid-19 « met manifestement à l’épreuve la coopération internationale – épreuve à laquelle nous avons échoué. »

Il a poursuivi en préconisant « un multilatéralisme en réseau, fondé sur des liens et une coopération solides entre les organisations internationales et régionales, les institutions financières internationales et autres alliances et institutions mondiales ».

Ce pur verbiage d’un grand responsable montre le fossé entre les aspirations et la réalité géopolitique mondiale. Les ambitions étatiques dominent encore largement et ont été placées au premier plan par Donald Trump qui a maladroitement entretenu un conflit avec la Chine, sous couvert de résistance purement verbale et vaguement protectionniste. En réalité, les démocraties occidentales ont montré leurs faiblesses et la Chine a poursuivi son ascension.

Persévérance

Sombre panorama. Le Léviathan étatique nous écrase, les dettes publiques s’envolent, la coopération internationale est impuissante. Le présent prédispose au pessimisme et l’avenir paraît plus incertain que jamais.

Mais ne l’a-t-il pas toujours été ? Les difficultés étant faites pour être surmontées, le courage et de la ténacité des hommes ont toujours été au rendez-vous de l’Histoire. « C’est seulement pour ceux qui persévèrent après que tout semble perdu que l’espoir luit à nouveau. » – Gilbert Keith Chesterton

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  • Dictature à prétexte sanitaire…pas une dictature sanitaire..
    La santé c’est pas avoir ou pas le covid…la santé, c’est respirer vivre bouger manger être heureux..
    on va voir une dent dans l’espérance de vie.. mais on ne verra pas ou verra mal l’impact sur cette même espérance de vie à long terme et diffuse..
    Le terme dictature sanitaire plait, mais justement non ..

    est ce que nous vivons dans une dictature généreuse en « redistribuant » la richesse?
    est ce que nous vivons dans une dictature environnementale car nous fermons des centrales nucléaires?

    dictature à prétexte …

    • A noter que toute dictature doit trouver un bon prétexte pour s’instaurer… sinon, ça ne marcherait pas!

      • Certes mais si les opposants utilisent le terme « dictature sanitaire » autrement que pour la moquerie, vous ne réveillez pas tout ceux qui acceptent sur le principe de restreindre les libertés pour des raisons sanitaires or on va le répéter, on le dit depuis le début, le bilan sanitaire est loin d’etre fait… comprenez vous le danger?

        dictature covidienne à la rigueur……

        on va se farcir une dictature à prétexte environnemental… qui va se farcir lemur de la réalité.. elle ne sera pas « humaniste »…

  • Paradoxalement, c’est l’individualisme qui a aussi fait prospérer l’Etat qui devient maintenant clairement totalitaire. A savoir que c’est la poursuite par chacun de ses petits intérêts immédiats qui permet au socialisme d’avancer. Diviser pour régner, piquer aux uns pour donner aux autres, spolier une catégorie à la fois etc…
    Par exemple, les restaurateurs et autres commerces se sont pliés à des injonctions inacceptables dans l’espoir d’étre mieux traités par la suite et par peur des amendes. Il aurait fallu que, collectivement, ils s’opposent au gouvernement. Idem pour les citoyens soumis derrière leur masque, par peur d’une amende.
    Faute d’opposition collective en temps voulu, le pire est à venir.

    • je dirais l’egoîsme et non l’individualisme…
      c’est le fait que les individus se sentent UNIQUEMENT limités par la légalité et non leur sens moral… c’est mon droit , je le fais.. je ne suis pas obligé..je ne le fais pas…
      crise morale à mon opinion..

    • « Par exemple, les restaurateurs et autres commerces se sont pliés à des injonctions inacceptables dans l’espoir d’étre mieux traités par la suite »

      Le totalitarisme n’arrive pas faute de résistance mais à cause de la violence d’état qui empêche toute résistance et de ce coté l’état français est parfaitement armé et organisé.
      Les médias et la justice ce seraient acharnés et ils n’auraient rien obtenu, c’est le drame des entrepreneurs et des privés: ils n’ont pas une rente et une situation de parasite garantie à vie et peuvent tout perdre contrairement aux professionnels du chantage bi-annuel.

  • La nouveauté de cette pandémie, c’est d’avoir changé le statut du malade en celui de délinquant potentiel.
    Il y a quelques années, vous alliez au boulot avec une petite grippe et personne ne s’en inquiétait : vous pouviez même l’avouer à vos collègues qui se désolaient pour vous. Vous gardiez simplement vos distances. Depuis, la propagande de peur du gouvernement et de ses « experts » fait des malades ou des asymptomatiques des quasi assassins en puissance, du moins des proscrits qui devraient être enfermés. Le vivre-ensemble en prend un sacré coup, ainsi que les relations entre les personnes. C’est bien du socialisme chimiquement pur qui collective la société tout en atomisant les individus.

  • Il faut aussi bien rappeler que la grosse pandémie du scenario du film d’horreur mediatico-omsesque, c’est pas un covid..qui n’est encore en l’état qu’une très méchante grippe contagieuse à létalité » faible »..

    ebola fait peur..car ça vous tue..mais c’est « peu » contagieux. le covid est terrible. … .pour les personnes âgées..
    l’exemple de la suède est là pour nous rappeler que l’impact sanitaire du covid , bien que sensible et réel, n’est pas une catastrophe sociétale..la société continue de tourner..avec un covid « libre »…

    La réaction politique forte est un choix parce que on a choisi d’accorder de l’importance au bilan brut..  » le nombre de morts du covid »..en ignorant les autres.. c’est pour ça que les controverses si pénibles et vaines ( en gros c’est grave! non c’est pas grave!) qu’lles soient sont foncièrement légitimes, il n’est pas immoral de discuter les mesures! c’st le moins que l’on puisse dire et dire qu’on se fout du covid est « acceptable »..
    il faudra regarder ce que ça fait terme d’espérance de vie, métrique qui, à mon avis, est meilleure pour qualifier une événement sanitaire de « grave ».

    Parce que sinon, réfléchissez un peu…combien de morts sont attribuées à la pollution en terme brut…? est ce que ça ne « justifierait pas » des restrictions de libertés du même ordre que pour le covid alors….

    tiens… digression
    regardez l’epidémie en allemagne https://www.worldometers.info/coronavirus/country/germany/
    et regardez les éléments de mortalité pour ce pays, est ce que quelque chose ne vous intrigue pas?
    https://www.euromomo.eu/graphs-and-maps/

  • Une question me taraude. Si tout le monde, tout les pays sont endettés, qui c’est le préteur ? Il ne dit rien, il n’est pas inquiet. C’est bizarre non ? !

    • La planche à billet?
      En faite tout détenteur d’Euros est prêteur. Tant que les états et la population auront intérêt à ce jeu de dupe, mais quand un état voudra sortir..

    • La dette est le meilleur moyen de faire chanter les dirigeants d’un pays…

      • les dirigeants? mais les dirigeants changent..

        faut pas inverser les responsabilités non plus..

        demander de rembourser n’est pas faire chanter..

        le secteur privé doit composer avec les lubies des politiques. que je sache le privé n’edicte pas de lois..

    • Les prêteurs c’est nous. Enfin, le prêteur direct est la BCE qui imprime des billets, et qui lorsqu’elle les donne met une note « attention il va falloir les rendre ». Mais pendant ce temps (qui dure en pratique infiniment), cet argent supplémentaire circule et donc dévalorise la valeur de l’argent des possédants, et donc in fine ce sont les non endettés qui prêtent.

  • Il y a à la fois dans cet article une critique bien vue de l’étatisme sous ses différentes formes (dont désormais sanitaire), et une demande finale d’étatisme supplémentaire censé régler la question grâce à la « coopération internationale ». On sait ce que valent ces grands raouts mondiaux et organisations bidons ajoutant une couche de bureaucratie , de fonctionnaires et d’inefficacité sur un paysage déjà largement fourni en la matière. Or c’est bien le bi (ou tri ou quadri) latéralisme « en réseau » qui est le système le plus proche du libéralisme qui serait aussi le plus efficace en l’espèce; D’ailleurs c’est dans ce cadre qu’on a fini par trouver des masques, du gel, et le vaccin.

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