Covid-19 : comment le marché a accéléré la découverte d’un vaccin

Il est intéressant qu’un vaccin soit développé en 12 mois lorsque le délai habituel est de 78 mois en moyenne. Quelle est l’explication ?

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Covid-19 : comment le marché a accéléré la découverte d’un vaccin

Publié le 26 novembre 2020
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Par Marius-Joseph Marchetti.

Ce lundi 23 novembre, j’ai eu l’occasion de lire l’article de Philippe Lacoude, « Les vaccins de Trump contre le Covid-19. » Je ne reviendrai pas sur les détails techniques, ayant une connaissance limitée du sujet, et n’étant ni financé par les laboratoires, ni par les créateurs du documentaire Hold-Up.

Au cas où l’humour de certains ne se serait pas développé durant leur croissance, ceci est bien évidemment une boutade.

Je souhaiterai cependant aborder un point très intéressant : le fait qu’un vaccin soit développé en 12 mois lorsque le délai habituel est de 78 mois en moyenne. Qu’est-ce qui peut expliquer cela, si l’on n’adhère pas à la thèse d’un grand complot visant à engendrer des profits pour Big Pharma ?

Je pense que le point de vue économique, et notamment dans une optique de processus de marché, peut être utile.

La liberté d’entrer sur le marché accélère le développement du vaccin

Dans The Perils of Regulation : A Market-Process Approach, Israel Kirzner fait un parallèle entre l’interventionnisme et le socialisme. Si une économie réglementée possède des prix de marché, contrairement à une économie socialiste où il n’existe pas de propriété privée et de prix, la critique des régimes collectivistes par Mises et Hayek nous fournit cependant des arguments critiques contre la réglementation. Cet argument majeur réside dans le développement de la notion de processus de marché. Celle-ci est développée :

  • Par Mises, qui caractérise l’entrepreneur comme individu découvrant des erreurs dans un monde d’incertitude radicale ; ou Knightienne, c’est-à-dire une incertitude qui est non probabilisable.
  • Par Hayek, dans ces nombreux papiers sur le rôle de la connaissance, qui caractérise la concurrence comme un processus de découverte et non pas par la présence d’un nombre atomistique de consommateurs et de producteurs.

Qu’est-ce qui permet à cette rivalité concurrentielle d’exister ?

Non pas un certain nombre de producteurs et de consommateurs, comme le supposent les théoriciens de la concurrence pure et parfaite, mais simplement la liberté d’entrer sur le marché, comme le rappelle à juste titre Israel Kirzner ; et comme d’autres le rappellent également, comme Murray Rothbard ou Pascal Salin.

D’un point du vue du processus de marché, et comme dit précédemment, le monde est caractérisé par une incertitude radicale. La connaissance étant limitée et disséminée, les gens peuvent faire des erreurs. Les agents de l’État souffrent de cette même limite, il est donc déjà inutile de faire appel au scientisme des hauts conseils (Knowledge Problem, ou problème de la connaissance). Ce serait même plutôt l’inverse.

Réguler inhibe la découverte

L’activité des agents de l’État, ou des agences régulatrices, dans notre cas, souffre du fait que son existence même est antinomique à un processus de découverte. L’activité régulatrice est une activité fondamentalement monopoliste, et contraire à un processus concurrentiel de découverte. Elle inhibe donc la découverte de connaissance au lieu de la stimuler.

De plus, elle ne peut s’appuyer sur les outils du calcul économique (Calculation Problem, ou problème de calcul)1.

La demande de réglementation part du principe que le marché (comprendre les individus, entrepreneurs, voire organisations) ne peut résoudre les problèmes qui le caractérisent. On appelle cela en général des inefficiences, ou des faillites de marché, selon les cas. C’est oublier que le phénomène de déséquilibre, l’existence d’erreurs, contient son propre antidote, à savoir l’existence d’opportunités de profits qui ne demandent qu’à être découvertes.

« Rien au cours du processus régulateur ne suggère une tendance à la découverte d’opportunités non encore perçues d’amélioration de l’allocation des ressources. Rien ne garantit que les fonctionnaires de l’État qui pourraient percevoir les conditions du marché avec plus de précision que d’autres auront tendance à remplacer systématiquement les régulateurs moins compétents. Il n’y a pas de profit ou de perte entrepreneuriale qui pourrait facilement indiquer où les erreurs ont été commises et comment elles devraient être corrigées. Ce que les régulateurs savent (ou croient savoir) à un moment donné ne reste vraisemblablement que partiellement correct. Il ne semble pas y avoir de processus systématique par lequel les autorités régulatrices pourraient découvrir ce qu’elles ne savent pas, d’autant plus qu’elles ne savent pas qu’elles ne sont pas totalement conscientes d’une situation particulière. » Israel Kirzner 2

Que se passe-t-il si l’État et les agences liées mettent des obstacles à la résolution de ces erreurs ? Les incitations naturelles qui caractérisent le marché sont donc affaiblies, et le processus de découverte sera moins à même de corriger des erreurs qui peuvent être objectives (un changement dans les données qui caractérisent le monde, comme un nouveau virus) ou subjectives (mauvaise interprétation des individus).

Bien entendu, la réglementation peut avoir d’autres effets délétères, comme ceux soulevés par l’École du choix public ou l’économie des coûts de transactions : effectivement, la réglementation peut être capturée par certaines entreprises afin qu’elle leur soit bénéfique, forcer les entreprises à modifier leur organisation et, in fine, être moins efficiente, ou elle peut simplement réduire la rentabilité des firmes. Et assurément, la réduction de ces effets a également pu être bénéfique. J’ai cependant préféré me concentrer sur la classe d’effets relevée par les économistes de l’École autrichienne. Toute personne ayant lu l’article de Philippe Lacoude comprendra comment la levée de certaines des réglementations de la FDA a pu contribuer à rendre ce processus de marché plus efficient, c’est-à-dire plus à même de découvrir la connaissance nécessaire à l’heure d’aujourd’hui.

L’entrepreneur est fondamentalement une figure qui supporte l’incertitude caractéristique de notre monde. Celui-ci, par des actes créateurs, peut déstabiliser les plans de certains individus de par son industrie et son imagination. Mais il a surtout une fonction équilibrante : il permet aux individus d’avoir une vision du futur qui correspond plus ou moins à ce qu’elle sera. À condition qu’on le laisse faire. Si le futur est inconnaissable, il n’est pas inimaginable.

« L’incertitude est responsable de ce qui serait, en l’absence d’esprit d’entreprise, une incapacité à percevoir l’avenir d’une manière suffisamment réaliste pour permettre d’agir. L’esprit d’entreprise, pour ainsi dire, écarte dans une certaine mesure les brouillards tourbillonnants de l’incertitude, ce qui permet d’agir de manière significative. C’est cette fonction de l’esprit d’entreprise qu’il faut garder à l’esprit lorsque nous étudions le processus du marché. L’incertitude qui caractérise l’environnement dans lequel l’esprit d’entreprise de marché joue son rôle de coordination doit être pleinement reconnue ; sans elle, il n’y aurait ni besoin ni possibilité d’esprit d’entreprise. Mais pour comprendre ce que l’esprit d’entreprise accomplit, nous devons reconnaître non pas tant la mesure dans laquelle l’incertitude est la caractéristique irréductible de l’existence humaine, mais plutôt la mesure dans laquelle l’action individuelle et la coordination sociale par le marché peuvent toutes deux se produire de manière significative malgré l’incertitude de l’avenir.” Israel Kirzner 3

  1. J’emprunte cette dichotomie Knowledge Problem/Calculation Problem à Joseph T. Salerno.
  2. Israel Kirzner, The Perils of Regulation : A Market-Process Approach, dans Reflections on Ethics, Freedom, Welfare Economics, Policy, and The Legacy of Austrian Economics : « Nothing in the course of the regulatory process suggests a tendency for as yet unperceived opportunities of ressource allocation improvement to be discovered. Nothing ensures that governement officials who might perceive market conditions more accurately than others will tend systematically to replace less competent regulators. There is no entrepreneurial profit or loss that easily might indicate where errors have been made and how they should be corrected. What regulators know (or believe they know) at a given moment presumably remains only partly correct. No systematic process seems at work through which regulators might come to discover what they have not known, especially since they have not known that they enjoy less than complete awareness of a particular situation. »
  3. Israel Kirzner, Uncertainty, Discovery and Human Action, dans Method, Process, and Austrian Economics : « Uncertainty is responsible for what would, in the absence of entrepreneurship, be a failure to perceive the future in a manner sufficiently realistic to permit action. Entrepreneurship, so to speak, pushes aside to some extent the swirling fogs of uncertainty, permitting meaningful action. It is this function of entrepreneurship that must be kept in view when we study the market process. The uncertainty that characterizes the environment within which market entrepreneurship plays its coordinative role must be fully recognized ; without it there would be no need and no scope for entrepreneurship. But an understanding of what entrepreneurship accomplishes requires us to recognize not so much the extent to which uncertainty is the ineradicable feature of human existence but rather the extent to which both individual action and social coordination through the market can occur significantly despite the uncertainty of the future (and in spite also of the uncertainty-analogue that would, in the absence of the arbitrageur, fog up even the single-period market). » Pages 155-156
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  • Merci à Marius-Joseph pour ce texte. Je suis bien sûr d’accord avec lui mais je vais ajouter un point sur lequel j’aurais dû insister lundi : la réduction du temps de développement est obtenue par un réagencement des tâches à accomplir dans le temps. En quelque sorte, exactement ce que ferait n’importe quel gestionnaire de projet en entreprise : toute tâche qui peut être accomplie en parallèle d’une autre tâche peut être commencée avant que cette dernière ne complète. Et l’approche ressemble aux processus agiles plutôt que le modèle en cascade utilisé normalement par la FDA.

    Comme l’explique cette vidéo (https://youtu.be/dxgqjJXnvLM) du COVID-19 Prevention Network (CoVPN) qui est un service du National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID), un organisme du gouvernement fédéral américain, au final, tous les tests habituels sont effectués, juste dans un ordre différent, et comme l’expliquent les auteurs de la vidéo, ***la sûreté des vaccins est la même***.

    En fait, parce que les tests, le nombre de « cobayes », les seuils statistiques sont les mêmes pour tous les vaccins de l’« Operation Warp Speed ». On obtient même une possibilité de comparaison fiable des taux d’efficacité et d’effets secondaires des 9 différents vaccins. (Les données sont publiques et en ligne.)

    En dernière analyse, tout ceci montre que les coûts de financement énormes que supportent les labos de recherche médicale sont en très grande partie due à la gestion archaïque des agences étatiques de santé.

    ModeRNA a dépensé un milliard de dollars juste pour faire les tests cliniques de phase 1, 2 et 3. Si on doit mettre un tel montant sur la table et attendre 78 mois avant de pouvoir vendre le produit, on a limité grandement le nombre d’acteurs qui peuvent rentrer sur le marché. Or, comme le souligne Marius-Joseph, c’est la possibilité d’entrer sur un marché qui garantit que celui-ci est concurrentiel.

    Dès que la FDA traine les pieds 78 mois pour faire une série de tâches qui pourraient en prendre 12, elle a créé une barrière insurmontable pour les nouveaux entrants. Qui va attendre 78 mois pour (peut-être) rentabiliser un milliard de dollars ? On se retrouve alors avec non seulement avec de multiples monopoles pharmaceutiques pour de nombreux médicaments destinés à de nombreuses maladies mais, en plus, on se retrouve avec un plus faible nombre de médicaments au total. Les maladies rares ne trouvent jamais « preneur ».

    L’« Operation Warp Speed » va avoir radicalement changé la donne en matière politique. Elle met le CDC, NIAID, BARDA, NIH, et, surtout, la FDA au pied du mur.

    • Je pense au’eddectivement trop de bureaucratie peut ralentir le progrès
      et qu’innover dans l’agencement des tâches est très bien . Cependant comment obtient-on en quelques mois les effets à moyen et long terme d’un mèdicament? La technique très novatrice utilisée par Pfizer-BioNTech et Moderna n’a jamais été utilisée sur l’homme et ses conséquences sont inconnues. Elle est basée sur l’ARN messager et comme l’indiquait un mèdecin, certaines personnes ont de retro-transcriptase ( par exemlle les personnes positives au VIH) d’où un risque de modification de l’ADN. Ce risque est également présent suite à un dèfaut de fabrication du vaccin. D’autres risques tels celui des maladies auto-immunes et des cancers ne peuvent se voir sur des essais effectués sur de si courtes périodes.

    • Merci pour ce commentaire plein de bon sens.
      En complément

      La santé est sans doute le secteur où la corruption sévit le plus.

    • 1/ Les labos n’ont pas attendu la COVID19 pour faire de la parallélisation en R&D. Avant, on estimait juste qu’il était complètement inconscient (sentiment qui est toujours le mien aujourd’hui) de lancer des essais cliniques de différentes phases sans attendre les résultats définitifs des précédents.

      2/ La R&D d’un médicament en médecine humaine, c’est de l’ordre de 2-3 milliards de dollars. Cela n’a jamais empêché une concurrence énorme des différents labos sur les traitements pour « pathologies rentables » (CV, Onco, etc.).

      3/ Le niveau de sécurité (et non de « sureté ») n’est pas du tout le même puisqu’on n’a du tout le même recul (follow-up). Je l’ai déjà dit : c’est absolument inconscient comme méthode (surtout concernant un virus dont l’IFR ne dépasse pas 0.4% dans la population générale). On a fait sauter toutes les barrières de sécurité. Sachant que la plupart d’entre elles ont été mises en place à la suite de scandales sanitaires.

      4/ Fait intéressant les labos vendent leurs vaccins mais la laissent la responsabilité pénale et civile des effets indésirables aux gouvernements qui les achètent … En France, ces vaccins n’auront pas d’AMM mais une ATU …

      5/ Quand à dire que la FDA est « archaïque » … C’est du grand n’importe quoi. Les coûts explosent parce que les labos n’ont pas envie de se prendre des procès civils et ont donc des seuils de tolérance beaucoup plus bas qu’avant. Ici, c’est l’État qui paiera et qui met la pression … Sachant cela, ils ne vont pas faire de zèle.

      6/ Quand à la vidéo que vous citez en « source », c’est une sacrée blague que de baser une réflexion scientifique dessus …

      Je ne suis pas docteur en économie mais docteur en pharmacie (entre autre). Aussi, je comprends peut-être mieux que ces deux messieurs les tenants et les aboutissants de ces méthodes « cut corners ».

  • ah le vaccin n’etait l’idée associée à celle de faire du covid un truc qui fait peut pour vendre aux foules des médocs au profit de big pharma?

  • J’avais plutôt l’impression que c’était du au fait que c’est un vaccin utilisant la technique ARNm, et non la technique standard.
    Certes, le fait que les validations ont été faites de manière plus rapide (bien ou pas je ne sais pas), ça joue.

    • A priori,, tout va mal , un vaccin semble déjà avoir été testé en depis du bon sens, Astra zenica mais avec Oxford, ça semble être normal, leur intégrité…… Semble plus que compromise.

  • Peut-on encore parler de marché quand des torrents de subventions et d’injections monétaires l’alimentent ? Pour le reste, d’accord avec le fond de l’article, notamment l’abaissement nécessaire des barrières réglementaires excessives pour revitaliser la concurrence.

    Trop de taxes.
    Trop de normes.
    Trop d’Etat obèse.

  • Le progrès c’est bien ,le progrès sans bureaucratie et normes c’est encore mieux et là ils vont tellement vite que les Etats achètent le vaccin quoiqu’il en coûte et sans en connaître les résultats ,les labos sont payés d’avance, et que quoiqu’il en coûte ces mêmes Etats prendront tout le juridique à leur charge en cas de problèmes et les dédommagements en cas d’effets secondaires ….
    Pour un virus qui chez nous a une létalité de 2,28% et une mortalité de 0.06%,comme en Suède d’ailleurs sans confinement.
    Virus qui a disparu ou est totalement inactif en Chine, avec ses 4800 décès vs nos 50 000(il est vrai que chez eux ils n’ont de problème de densité de population…), qui l’a jugulée en 4 mois ,mais chez nous un malade refuse de s’isoler 7 jours au nom de la lberté,c’est vrai que d’habitude les arrêts maladies c’est la fête du slip et cela permet d’aller se balader pour décompresser un peu ou refaire la chambre du petit dernier ,on ne va quand même pas faire ça sur ses congés,merde on est en France.

  • Je ne suis pas vraiment aligné sur cet article. Pour moi on est en plein dans le capitalisme de connivence. Les labos profitent du climat de peur et savent très bien que les gouvernements vont promouvoir la vaccination en masse voire y contraindre les population. L’OMS nous a déjà fait le coup avec la grippe H1N1 et on se rappelle des vaccins de Bachelot.
    L’affaires du remdesivir montre que dans la précipitation on prends les dire des labos pour argent comptant sur l’efficacité et la sureté des médicaments. Sans le remboursement du traitement vous seriez prêt à dépenser 10 000€ pour un traitement potentiellement efficace sur une maladie qui a une chance sur 100 de vous emporter si vous avez moins de 60 ans?
    Personnellement je n’ai pas hyper confiance dans ces vaccins sortis en urgence. Efficacité et dangers à moyen terme ne sont pas encore clairs. Une chose est sure je résisterai au maximum si l’on veut vacciner mes jeunes enfants.

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