Taxation des sociétés d’autoroutes, attention au retour de bâton

L’introduction d’une nouvelle taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance, pour financer la transition écologique du secteur, pourrait se révéler contre-productive. Une analyse de Victor Fouquet.

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Autoroute A2 - Barrière de péage de Hordain

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Taxation des sociétés d’autoroutes, attention au retour de bâton

Publié le 2 janvier 2024
- A +

Un article de l’IREF.

L’article 15 du projet de loi de finances pour 2024 prévoit l’instauration d’une nouvelle taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance affectée à l’Agence de financement des infrastructures de transport (AFIT) de France.

Cette taxe vise les exploitants qui affichent une rentabilité supérieure à 10 %, et son montant est déterminé par l’application d’un taux de 4,6 % aux revenus d’exploitation qui excèdent 120 millions d’euros. Le produit annuel prévisionnel de la taxe serait de 600 millions d’euros, réparti entre les sociétés concessionnaires d’autoroutes (pour environ 450 millions d’euros) et les principaux aéroports (pour environ 150 millions d’euros).

L’objectif affiché ? Participer au financement de la transition écologique du secteur des transports. Initialement, seules les sociétés d’autoroutes devaient être mises à contribution. Mais l’État avait alors oublié que la création d’une taxation spécifique aux sociétés autoroutières l’obligerait à compenser les conséquences financières, au titre de la clause de stabilité fiscale prévue par les contrats de concessions autoroutières. Pour éviter d’être soumis à cette obligation, les aéroports ont, dans un second temps, été placés dans le champ d’application de la taxe.

Cela sera-t-il suffisant pour éviter une longue et coûteuse procédure contentieuse avec, à la clef, une issue défavorable à l’État, c’est-à-dire aux contribuables ?

Rien n’est moins sûr. Dans un avis rendu le 8 juin 2023, le Conseil d’État a en effet précisé :

« Toute nouvelle contribution qui, sans viser explicitement les sociétés concessionnaires d’autoroutes, aurait pour effet pratique, compte tenu de ses modalités, de peser exclusivement ou quasi exclusivement sur elles pourrait […] ouvrir à ces sociétés un droit à compensation ».

Au regard des intentions initiales du gouvernement, il n’est pas exclu que la juridiction administrative considère que cet « effet pratique » est ici caractérisé. De son côté, le juge constitutionnel estime que le législateur ne saurait porter aux contrats légalement conclus une atteinte qui ne soit pas justifiée par un motif d’intérêt général suffisant. Or, d’après l’avis rendu par le Conseil d’État, les différents motifs invoqués par le gouvernement ne permettraient pas d’éviter une censure par le Conseil constitutionnel…

 

La hausse des tarifs dans les ports (Le Havre et Marseille) et aéroports (ADP notamment) visés par cette taxe aura pour effet de les rendre moins compétitifs

Si cette compensation financière venait à être obtenue des juridictions saisies, elle se traduirait sans doute par une autorisation donnée aux concessionnaires  de répercuter cette taxe nouvelle dans les tarifs des péages, pénalisant ainsi les usagers du réseau autoroutier.

De la même manière, la hausse des tarifs dans les ports (Le Havre et Marseille) et aéroports (ADP notamment) visés par cette taxe aura pour effet de les rendre moins compétitifs, en un mot de les affaiblir.

Cédant à un réflexe taxateur, les décideurs publics semblent de surcroît oublier que, concomitamment aux investissements publics, la transition écologique du secteur des transports appelle des investissements privés qu’un cadre juridique instable et peu prévisible n’est pas de nature à favoriser…

Sur le web.

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  • Rappel.
    La tristement célèbre écotaxe avait déjà pour but réel de financer l’AFITF. Son principal effet visible fut cependant la création des Bonnets rouges.
    L’affaire s’est soldée par la mort des portiques écotaxe et l’augmentation uniforme des taxes sur les carburants, pour environ 1 milliard par an.
    On dirait bien que l’AFITF – ce machin qui sert en réalité à financer le rail et le tram tout en contournant les règles de la comptabilité publique – n’en a pas fini avec son besoin de sang frais.
    Si l’Etat n’avait pas “vendu” les autoroutes, on n’en serait pas là aujourd’hui.

    • L’Etat perçoit 40% des recettes des sociétés d’autoroute via la TVA et d’autres taxes. Sans compter la taxe sur les carburants qui sont consommés pour rouler sur les autoroutes.

      • entreprise privée … oui privée de concurrence ce qui lui enlève tout caractère d’entreprise pour la ramener à un statut de monopole pur et simple.
        La vraie privatisation aurait consisté à installer, en sortie de péages, différents portiques dont la gestion serait assurée par différentes entreprises … avec les tarifs concurrentiels qui vont avec😉

        • Une infrastructure ne peut pas être gérée par plusieurs sociétés ( un aéroport, une voie d autoroute, ferrée, ou de distribution de l eau…..)
          C est pourquoi la délégation de service publique est la seule solution pertinente dans ces cas de figure

          • Quel est le service public assuré par un port, une autoroute, un réseau ferré, une distribution d’eau, qui requiert que ce soit l’Etat qui le gère ? Une CCI ou une entreprise privée devrait pouvoir les gérer à sa guise, l’Etat n’intervenant que pour éviter les abus de position monopolistique.

            • Aucune entreprise privée ne va investir dans des infrastructures lourdes sans avoir un retour plancher garanti…….voir les investissements dans le nucléaire par exemple au RU ou l état assure un revenu minimum aux actionnaires
              Le tout état comme le zéro état ne sont que des vues de l esprit……

              -1
              • Un retour garanti, ça n’a pas besoin de l’être par l’Etat. Une infrastructure utile suffit à attirer les investisseurs comme des mouches, le principal risque qu’ils y voient est au contraire que l’Etat vienne s’en mêler en changeant les règles du jeu !

                • Une infrastructure utile n a aucun sens…ce que veut l investisseur c est un large retour……
                  Extraordinaire, le francais adore se noyer dans les mots bien loin du pragmatisme entrepreneurial

                  -3
                  • Les investisseurs se sont précipités sur les actions de Suez, Panama, ou des chemins de fer au point de créer des bulles. Ce qu’ils voyaient, c’est l’utilité de ces investissements, utilité qui ne pouvait dans leur idée qu’être suivie de profits. Jamais ils n’y ont vu de retour, à leur grand dam parfois…

                    • On peut aussi noter les emprunts russes qui ont eu beaucoup de succès mais sans lendemain
                      Les bulles mobilières comme immobilières font parties des excès irrationnels du marché aucun rapport avec les infrastructures

    • L etat n avait plus les moyens d investir dans les autoroutes…
      D de Villepin et T Breton ont réagi brillament en continuant d ouvrir l exploitation des concessions à des entreprises privées
      Cette action est typiquement libérale mais nos souverainistes nationalistes s’en offusquent !!!!

  • Aucune taxe n’a jamais été payée par une entreprise. Seul le consommateur final paye les taxes. Mais les benêts ne croient que ce que le gouvernement et la presse qu’il subventionne : la taxe sur les profits. Merci à notre éducation nationale de fabriquer des sots qui acceptent d’être tondus par des impôts indirects une fois les impôts directs épuisés. Si encore cela servait à désendetter les générations futures. Mais non, cela va encore servir à s’acheter des électeurs.
    À quand le prochain impôts ?

  • Bercy, temple obèse de la goinfrocratie.

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