Vers une pause réglementaire : l’UE répond à la pression des États membres

Alors que le Green Deal européen impose de lourdes réglementations, la Commission européenne semble reconnaître le besoin de légèreté. Un pas dans la bonne direction ?

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Screenshot 2023-09-19 at 12-58-11 (17) Discours sur l'état de l'Union européenne Von der Leyen défend son bilan • FRANCE 24 - YouTube https://www.youtube.com/watch?v=pN2Hxn5rKec

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Vers une pause réglementaire : l’UE répond à la pression des États membres

Publié le 22 septembre 2023
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Dans son discours sur l’état de l’Union, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé qu’elle allait « présenter les premières propositions législatives visant à réduire de 25% les obligations de déclaration au niveau européen ».

Il s’agit d’une annonce bienvenue, et c’est la première fois que la Commission européenne parle à nouveau d’une « meilleure réglementation » depuis que ce programme n’a pas réussi à se concrétiser après avoir été promu par le commissaire européen néerlandais Frans Timmermans au cours du mandat précédent, entre 2014 et 2019.

Ironiquement, le principal responsable de cet échec est Timmermans lui-même, qui s’est transformé sans transition en un véritable fanatique de la réglementation, avec son zèle pour toujours plus de réglementation verte dans le contexte du Green Deal européen, lancé par la Commission von der Leyen à partir de 2020. Avec le départ de Timmermans, qui se présente aux élections néerlandaises de novembre, Mme von der Leyen reprend du poil de la bête.

Et ce, même si, comme le souligne Dave Keating, « bien qu’il ait été chargé de la mise en œuvre du Green Deal européen, M. Timmermans n’en est pas l’auteur et ne l’a pas non plus fait avaler à Mme von der Leyen. C’est son bébé, et pour son parti, suggérer que la petite Ursula était impuissante face au gros barbu Timmermans est franchement insultant ».

Alors, comme on dit, « il y a plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de se repentir ». Il est bon de voir Mme von der Leyen changer quelque peu son fusil d’épaule.

Il est important de noter que cette évolution est également le résultat de la pression exercée par les États membres de l’UE.

En mars 2023, les dirigeants de la France, de l’Allemagne, de la Belgique et du Parti libéral européen (PPE) ont appelé à une « pause réglementaire » sur le Green Deal. À la fin du mois d’août, les gouvernements français et allemand ont lancé un appel commun pour réduire les obligations européennes en matière de reporting, à la suite de plaintes de plus en plus nombreuses de la part des fédérations d’entreprises allemandes et françaises.

Un autre signe d’espoir est peut-être que le commissaire européen slovaque Šefčovič, plus pragmatique que Timmermans, sera responsable du Green Deal européen. Il s’est déjà engagé à mettre l’accent sur les entreprises lors de la mise en œuvre du marché vert européen.

 

Une avalanche réglementaire verte

En tout état de cause, la situation est désastreuse.

Au cours des cinq dernières années, 850 nouvelles obligations, représentant plus de 5000 pages de législation, ont été introduites. Cette inflation réglementaire inquiète profondément les fabricants européens, car elle s’ajoute à la forte augmentation du coût de l’énergie en Europe.

Les PME se sont également plaintes que ces obligations leur imposent des coûts de mise en conformité considérables. Elles s’inquiètent notamment des obligations de reporting qui devraient s’appliquer aux PME dans le cadre de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) et de la CSDD (Corporate Sustainability Due Diligence Directive).

Commentant la nouvelle de Greenpeace accusant Rabobank d’avoir causé des milliards d’euros de dommages à la nature au Brésil, en raison de son financement de certaines entreprises, le professeur d’économie néerlandais Lex Hoogduin prévient :

« Nous pourrions être inondés d’affaires de ce type, en raison des nouvelles exigences de reporting de la CSRD. Que faisons-nous ? Nous détruisons notre économie et notre prospérité, je le crains ».

 

La réglementation n’est pas gratuite

Les PME européennes ne sont pas les seules à souffrir de l’inflation réglementaire de l’UE.

Au fil des ans, l’Union européenne en est venue à intégrer de plus en plus de réglementations dans sa politique commerciale, suscitant ainsi la colère des producteurs non européens. C’est notamment le cas de ses nouvelles règles en matière de déforestation, qui imposent toute une série de nouvelles formalités administratives aux producteurs d’huile de palme indonésiens et malaisiens, alors que de grands progrès ont été réalisés dans la réduction de la déforestation dans ces pays, selon Global Forest Watch.

Ces progrès sont dus non seulement aux nouvelles politiques de lutte contre l’exploitation illégale des forêts, mais aussi aux systèmes de certification nationaux, comme le Malaysia Sustainable Palm Oil (MSPO) Board. L’Union européenne refuse toutefois de reconnaître ce système et tente d’imposer ses propres exigences bureaucratiques, contrairement au Royaume-Uni, qui a compris que le commerce est une question de confiance. Cet épisode a conduit les deux pays d’Asie du Sud-Est à geler les négociations commerciales avec l’Union européenne. Il n’y a pas de repas gratuit en matière de réglementation.

Pamela Coke-Hamilton, directrice exécutive de l’ITC, une agence conjointe des Nations unies et de l’Organisation mondiale du commerce, a même averti que les nouvelles règles de l’Union européenne en matière de déforestation risquaient d’avoir un impact catastrophique sur le commerce mondial, car les petits fournisseurs en particulier risquaient d’être coupés des flux commerciaux.

Mon ancien groupe de réflexion, Open Europe, a estimé par le passé que le coût cumulé des réglementations européennes introduites entre 1998 et 2018 pour l’ensemble des 27 États membres de l’Union européenne s’élevait à la somme colossale de 928 milliards d’euros. La principale conclusion était que le niveau politique de l’UE était responsable de 66 % du coût de 1,4 trillion d’euros de toutes les réglementations nationales et européennes introduites au cours de cette période.

Il existe déjà de nouvelles estimations concernant les nouveaux développements depuis 2019, qui incluent le nouveau cycle de réglementation verte de l’Union européenne sous la direction de Mme von der Leyen. Le Conseil allemand de contrôle réglementaire a conclu que ses nouvelles réglementations émises pendant la pandémie ont, à elles seules, ajouté une charge de conformité annuelle de 550 millions d’euros pour les entreprises.

Au début de l’année, une enquête pour BusinessEurope, menée dans 35 pays auprès d’entreprises internationales, a conclu que 90 % d’entre elles estiment que l’Union européenne est devenue un lieu d’investissement moins attrayant qu’il y a trois ans. Les prix élevés de l’énergie et l’augmentation de la réglementation en sont les principaux responsables.

Dans un monde idéal, la Commission européenne s’efforcerait de remettre en cause les barrières commerciales nationales et d’encourager les États membres de l’Union européenne à reconnaître leurs normes respectives, au lieu d’élaborer des réglementations européennes « uniques » toujours plus harmonisées. Une telle approche ne serait toutefois pas compatible avec le désir de l’eurocratie d’exercer toujours plus de contrôle, et encore moins avec la vision du monde gaucho-verte d’Ursula von der Leyen.

Pour l’instant, il semble que la promesse d’Ursula von der Leyen de réduire de 25 % les obligations d’information de l’Union européenne ne vise qu’à répondre du bout des lèvres à l’insatisfaction croissante que suscite l’action de la Commission européenne. Aucun engagement concret n’a été pris pour abandonner purement et simplement certaines propositions réglementaires. Ce sera peut-être le cas avec la rénovation obligatoire des bâtiments proposée par l’UE, mais on s’attend à ce qu’un signal fort de la part des électeurs soit encore nécessaire avant de changer de cap. Peut-être en juin 2024 ?

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  • Vivement la mise en place de l’identité numérique européenne, et du crédit carbone/social en UERSS.

    A partir de là, tout le monde sera obligé d’être d’accord avec les décisions de la Obergrup… heu cheffe de la comission.
    Sinon, hop, crédit à 0

  • Avec l’interdiction des voitures thermiques en 2035, l’Allemagne a sonné la fin de la récréation à Ursula. C’est ça la vraie réalité. Car toute l’industrie allemande est très polluante et anti écologiste (charbon, aciéries, chimie, automobile). On rappellera par ailleurs que si L’Allemagne a renoncé au gaz russe, c’est uniquement parce que les ukrainiens ont fait sauter les pipelines.
    L’écologie devient une religion extrémiste en Europe avec ses propres terroristes qui apparaissent lors des manifestations et restent impunis en France. Le niveau de vie de tous ses habitants européens baisse par l’inflation écologiste. Quand l’Europe arrivera à 0 pollution et que l’Afrique, l’Arabie, l’Asie, la Chine, etc auront doublé leur niveau, que feront nos prêtres de l’écologie ? Déjà, on ne voit pas beaucoup les ONG comme Greenpeace en Chine ou au Nigéria ; la pétoche des geôles de ces pays a raison de leurs convictions de façade.
    L’éducation des jeunes n’est plus objective et ne leur permet pas de juger la pertinence ou les conséquences d’une décision écologique. Ils sont endoctrinés comme dans une secte. Et ceci n’est propre qu’à l’Europe : si la Chine + l’Amérique = 80% du CO2 émis, alors, aura-t-on sauvé la planète lorsque la France sera passée de 0,9% à 0% ? Nos écolos en sont sans doute convaincus, dommage qu’ils ne sachent pas compter.

    • La Chine et d’autres semblent très bien distinguer dans la pratique pollution et CO2, lutter contre la première et laisser pisser le second. N’y a-t-il pas là une piste pour qui souhaiterait succéder à Ursula après les élections ?

  • Enfin des chiffres sur le coût de la sur – réglementation . 880 nouvelles obligations, etc…..!!!!!!Quel est le retour sur investissement de cette énorme couche supplémentaire de réglementation européenne..? Les écolos diront que c’est le prix pour sauver la planète….!!!!! Si on continue à laisser agir les bureaucraties et les idéologues totalitaires qui ne visent qu’à établir leur pouvoir pour consolider leurs prébendes ( cf loi naturelle de Parkinson bien connue), nous finirons par être ruinés avec une planète «  saine et sauvée »….. mais vide de ses habitants morts et disparus. Nous mourrons guéris.
    Aldous Huxley au secours !!!!!!!!!!!!
    L’europe oui,….mais pas pour nous asservir. L’Etat oui ….mais pas pour nous sucer le sang.
    Des fonctions exclusivement régaliennes bien gérées oui… mais pour nous aider à mieux vivre ensemble avec des résultats mesurés et tangibles, au service du pays.
    Ursula et ses homologues de tout poil et de tous pays commenceraient ils à prendre peur de leurs excès et à penser à s’auto- réguler pour survivre demain, dès lors que les politiciens démagogues et complices les ont poussé à exister et à enfler?
    Un autre signal faible à connaître : les jeunes ne veulent plus aller dans la fonction publique et les concours peinent à recruter….
    C’est le citoyen qui doit réagir à la base et élire des représentants clairvoyants et porteurs d’àvenir, de paix, de prospérité, de culture et non pas de peurs mortifères.
    Avec les politiciens médiocres du moment, les fourches et les piques de 1789 vont resurgir !!!!!! Quand? La faim, la peur et la misère enragent le peuple.

  • Paroles, paroles, paroles, …. Je n’y croirai que lorsqu’il y aura des actes.
    En plus tous ces reportings passent directement à la case archives, même avec le big data (aussi appelée IA) cette masse d’information ne peut déboucher sur rien car impossible d’assurer un suivi. C’est vrai pour tous les reportings demandés aux entreprises de divers secteurs

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