LR : la droite française a-t-elle encore un avenir ?

Alors que les Français attendent des dirigeants courageux capables de redresser le pays, LR doit trouver un modus vivendi avec le pouvoir actuel.

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Eric Ciotti crédits UMP photos (CC BY-NC-ND 2.0)

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LR : la droite française a-t-elle encore un avenir ?

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 27 mars 2023
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Commençons par dissiper toute illusion : non, les partis ne sont pas éternels. Oui, les lignes de fracture tectoniques sur l’échiquier politique (même si elles se déplacent, comme dans l’analyse des clivages politiques chez l’historien Philippe Fabry, et ce mouvement est toujours sinistrogyre) perdurent en traversant des recombinaisons et reconfigurations. Le centrisme politique français est peut-être la famille politique qui a le plus traversé de telles vicissitudes. Le parti gaulliste, lui, a connu jusqu’il y a peu une trajectoire plus stable, mais incapable d’arriver au pouvoir sans la droite orléaniste et la droite conservatrice, il a lui aussi dû composer avec la réalité.

S’interroger sur l’avenir des Républicains, parti qui ne regroupe que des reliquats des droites orléanistes (passées chez Macron) et conservatrices (ayant fait défection là aussi chez d’autres forces politiques), c’est in fine se poser la question de la place de la droite sur l’échiquier politique actuel, déstabilisée par les extrêmes (de gauche, de droite et du centre devenu autoritaire).

 

LR divisés sur les retraites

La question de la réforme des retraites a légitimement fracturé les Républicains (et le Président en était conscient, sans avoir anticipé qu’il avait en réalité ouvert la boîte de Pandore…). En effet, faire une réformes des retraites (laquelle ? c’est là où l’on entre dans les considérations d’économiste qui ont été les miennes durant ce débat) est historiquement un marqueur programmatique de la droite, repris à son compte par Macron (qui a toujours savamment distillé des signes vers les deux électorats, de droite et de gauche).

Si elle voulait rester une droite de gouvernement, LR n’avait pas d’autres choix que de proposer une réforme des retraites : c’était le cas dans le programme de Valérie Pécresse et cela le sera dans le prochain programme LR. Le piège pour LR consistait à accepter en bloc la réforme. Il eut fallu, comme je l’ai fait dans de nombreux médias (à l’instar de mes amis économistes Marc Touati et Christian Saint Étienne), expliquer que si cette réforme était nécessaire d’un point de vue comptable et financier, elle était cependant insuffisante et non structurante ; et proposer dans la foulée de nouvelles idées, comme un pilier de capitalisation collective obligatoire.

Au lieu de cela, LR s’est empressé de soutenir d’abord en bloc la réforme, laissant le champ libre à ceux qui par opportunisme, ont voulu déborder Macron par sa gauche ; tantôt mus par de justes arguments sociaux (il y avait dans ce texte des injustices à corriger, elles le furent grâce aux LR), tantôt soumis à la pression du RN et de la Nupes dans leurs circonscriptions, ces députés ont fragilisé la possibilité pour LR de redevenir un parti de gouvernement.

 

La place des idées

La première feuille de route pour LR a d’abord trait aux idées : ces oppositions lors du débat sur la réforme des retraites trouvent leur genèse dans l’absence de magistère interne sur le logiciel idéologique. L’existence d’une direction des études, par exemple, part de l’idée fallacieuse qu’un parti peut lui-même secréter des idées. Or, un parti est avant tout une machine électorale et partisane : pour les idées, il doit se reposer sur un tissu granulaire de think tank, associations et intellectuels.

Quitte, officieusement si ce n’est officiellement, à établir un partenariat avec un think tank en première ligne, auquel revient la charge d’établir un consensus sur les grands sujets (s’il y a une base scientifique au moins sur le constat, les dissensions sont moins fréquentes dans le parti), de recruter les membres et experts des futurs cabinets, et éventuellement d’amener au parti quelques nouvelles personnalités issues de la société civile (ce que Macron a su faire avec l’Institut Montaigne).

Sociologiquement, LR n’a pas d’autre voie que de redevenir le parti des classes moyennes et populaires. Cela suppose une défense plus claire de la liberté économique, des petits entrepreneurs, la prise en compte des intérêts de la classe moyenne plutôt que celle de la France assistée ou du CAC40, un engagement sans faille au rétablissement de l’ordre et à la défense des intérêts souverains du pays et des citoyens. Cela veut dire aussi, et plus encore avec la crise de gouvernance que nous traversons, abandonner le sacro-saint respect de la verticalité politique et de la monarchie présidentielle. Il est dans l’intérêt des élus LR de défendre un régime parlementaire, décentralisé, plus proche de celui de nos voisins européens, plus respectueux du rythme démocratique à l’ère d’internet, avec un retour à la pratique gaulliste du référendum.

Une fois ce travail accompli, il ne faut pas croire un seul instant qu’éructer au Parlement ou dans les médias pendant quatre ans aux côtés des extrêmes politiques rapprochera la droite du pouvoir : après 15 ans sans ministres, LR n’aura plus aucune crédibilité comme parti de gouvernement. Alors que les Français attendent des dirigeants courageux capables de redresser le pays et alors que nous traversons une grave crise politique et demain des difficultés économiques et sociales, LR doit trouver un modus vivendi avec le pouvoir actuel.

Non pas un contrat ou des débauchages individuels mais une forme de cohabitation sur un programme précis au service des classes populaires et moyennes, et mettant un terme aux dérives actuelles du pouvoir (wokisme, laxisme régalien, manque de réalisme économique). C’est le minimum que la famille gaulliste doit aux Français.

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  • Depuis quand les LR est un parti de la droite ?
    Hausse des impôts, distribution à tout va et déficits publics sont ses moyens de gouverner ; comme la gauche caviar.
    D’ailleurs ses membres se sont vite précipités chez Macron.
    Il n’y a aucun parti à droite en France et encore moins de parti responsable.

  • « la prise en compte des intérêts de la classe moyenne plutôt que celle de la France assistée ou du CAC40 »
    Voilà la raison de l’échec prévisible. Là encore, on imagine que les classes existent et prospèrent les unes au détriment des autres, et que la classe à laquelle on appartient le jour J restera la nôtre jusqu’à la mort. Si la droite veut exister et réussir, elle doit mettre fin au concept de parts d’un gâteau immuable et à celui de classes plutôt que l’avenir d’individus et d’opportunités que le gouvernement se devrait d’offrir. Il lui faut proposer des systèmes faciles et attrayants pour que chaque individu puisse améliorer sa condition, sortir de l’assistanat, s’intégrer au monde des plus riches que ce qu’il est aujourd’hui. Il lui faut ignorer les désirs que beaucoup présentent comme des besoins vitaux, et laisser les mérites gagner, apparemment égoïstement mais en pratique au bénéfice de tous, leurs récompenses naturelles. Son slogan ne doit plus être « Les riches peuvent payer » mais « Vous serez payés en devenant riches vous-aussi ».

  • Quand vous écoutez Fabien Roussel défendre la « valeur travail » qui part en biberine, vous pouvez vous demandez surtout si la droite existe.

  • Le problème des Républicains – et ce n’est pas nouveau – c’est qu’ils ne travaillent pas ! Plus de 10 ans dans l’opposition et incapables de définir une ligne claire, c’est quand même aberrant. C’est selon moi la première cause de la déroute de VP aux Présidentielles.
    Avec Macron, on retombe sur le même problème. Il n’a aucune ligne claire (si ce n’est une adoration de l’Europe et un mépris assumé pour son propre pays) et se complaît dans son embrouillamini du « en même temps ». Dans ces conditions, comment définir un modus vivendi ?

  • Sans préjuger de ce que peut être la Droite, elle est la seule a avoir un avenir, même s’il est encore bien flou. La Gauche patine depuis trop longtemps dans son idéologie, et elle se disperse en multiples factions. Son destin s’arrêtera avec la fin de son progressisme qui ne lui sert plus que de fuite en avant.

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