Retraites : l’inconscience des opposants

Le refus des Français de travailler plus longtemps résulte de l’ignorance des enjeux.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Manifestation du 23 septembre pour les retraites à Brest By: jyc1 - CC BY 2.0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Retraites : l’inconscience des opposants

Publié le 9 mars 2023
- A +

L’agitation autour de la réforme des retraites est surtout politique. Son aspect essentiel est le refus de regarder en face la réalité économique et démographique. Les militants politiques ou syndicaux brandissent le chiffre des deux-tiers d’opposants à la réforme parmi les personnes interrogées par les sondeurs. C’est de bonne guerre mais sans signification réelle. Se prononcer contre deux années supplémentaires de travail sans avantage corrélatif est assez naturel. Il est donc nécessaire de rappeler de temps à autre les fondamentaux, noyés sous le verbiage politicien.

 

Impitoyable démographie

Première évidence : le vieillissement accéléré de la population au XXIe siècle. Un consensus existe sur le sujet. Et puisqu’il s’agit de retraites par répartition, les actifs doivent prendre en charge les retraités. Les pensions sont payées par les cotisations des actifs.

Le montant global des pensions à verser résulte de deux facteurs.

Le premier est la durée totale de versement, qui dépend de l’âge de départ à la retraite et de l’espérance de vie. L’espérance de vie augmentant, il faut nécessairement agir sur l’âge de départ.

Le deuxième facteur déterminant la charge globale de financement des pensions est évidemment le montant des retraites versées. Plus elles sont élevées, plus le prélèvement sur les actifs est important.

Le refus des Français d’augmenter l’âge de départ aura donc une conséquence inéluctable : une forte baisse du niveau des pensions. En 2020, selon l’INSEE, le rapport démographique était déjà de 1,67 cotisant par retraité. Chaque cotisant pourra-t-il supporter la charge complète d’un ou deux retraités en 2040 ou 2050 ? Avec le montant actuel des retraites, la réponse est non. Il faudra donc le baisser sévèrement.

 

Cruelles réalités économiques

À cet aspect démographique, il convient d’ajouter une évolution économique défavorable.

La croissance ne retrouvera pas ses niveaux de l’après-guerre (6 % par an en moyenne). Le dynamisme est désormais en Asie : Inde, Chine, Taïwan, Corée du Sud.

L’énorme dette publique accumulée rendra tout retour à la compétitivité très difficile. La France a vécu très au-dessus de ses moyens en s’endettant depuis quatre décennies pour financer des dépenses courantes et non des investissements. L’addition va lui être présentée dans les dix ou vingt ans qui viennent.

Il faut se réveiller au lieu de revendiquer des avantages nouveaux comme la retraite à 60 ans (RN et LFI).

 

Les politiciens surfent sur l’ignorance

Le refus des Français de travailler plus longtemps résulte de l’ignorance des enjeux.

La situation décrite précédemment est parfaitement connue des dirigeants mais l’opportunité politique est telle qu’il faut absolument qu’ils la saisissent. Il est élémentaire de tromper le plus grand nombre en masquant les concepts fondamentaux et en agitant quelques promesses démagogiques.

La gauche espère ainsi retrouver un souffle qui lui manque depuis de nombreuses années. Pure illusion.

La droite de gouvernement (LR) se divise sur une réforme qu’elle réclame depuis des lustres. Piteuse politique.

 

On ne réclame rien à ses enfants

Ajoutons un dernier élément, jamais évoqué. Il est bien clair que dans l’esprit des manifestants et opposants le rêve d’une retraite par répartition d’un montant satisfaisant s’ajoute au refus de travailler un peu plus longtemps. Autrement dit, ils revendiquent une charge nettement plus importante à supporter par leurs enfants ou petits-enfants. Sur ce point, seuls les leaders sont des hypocrites. Les pauvres bougres qui défilent n’ont même pas conscience qu’ils veulent infliger à leurs enfants devenus actifs une charge financière insupportable.

Le vieux Mélenchon, usé par des décennies de militantisme et des échecs répétés à l’élection présidentielle, sombre dans le cynisme avec un slogan adressé aux étudiants et lycéens : « Bloquez tout ».

Quel manque de noblesse ! Exiger de ses enfants une prise en charge financière future encore plus lourde après leur avoir laissé une dette abyssale ! Les plus ingénus évoqueront la solidarité intergénérationnelle. J’ai vraiment envie de leur demander si l’État-providence leur a fait perdre à ce point toute clairvoyance. On ne réclame rien à ses enfants, on les éduque de son mieux puis on leur transmet ce qu’on peut, matériellement, culturellement, spirituellement. On accepte ce qu’ils ont la générosité de nous accorder. Ensuite, on s’efface avec autant de dignité que possible.

Voir les commentaires (24)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (24)
  • « Les pauvres bougres qui défilent n’ont même pas conscience qu’ils veulent infliger à leurs enfants devenus actifs une charge financière insupportable. »

    L’analphabétisme économique est à la base de tous les maux qui rongent la France. Ici, bien souvent, les enfants des pauvres bougres en question manifestent aux côtés de leurs parents ou grands-parents. Comment voulez vous discuter intelligemment avec ces gens là après? Et quand je parle d’analphabétisme, je ne parle pas forcément de gens sortis de l’école à 12 ans, mais aussi de gens qui ont un niveau bac+ 5 ou 10. Comme quoi l’école n’apprends aucunement à mieux comprendre les réalités de la vie.

    • @alain et que dire de la perversion de ceux qui ont bâti ce système honteux , totalement inéquitable ? C’est un peu facile de s’en prendre à ceux qui défilent .

      • Oui, sans doute, mais personne ne les oblige à défiler, et ils ne défileraient certainement pas s’ils comprenaient les enjeux de cette réforme ( qui j’en convient est mal foutue, inaboutie et certainement inefficace à résoudre le problème auquel elle prétend s’attaquer!)

      • Il ne s’agit pas de s’en prendre aux manifestants. Il s’agit de comprendre ce qui a pu se passer pour en arriver là. Celui à qui on a toujours expliqué que le gouvernement est là pour s’occuper de tout, et qui y a cru, va logiquement penser que le gouvernement n’a qu’à prendre aux riches pour payer sa retraite à 60 ans. C’est tout un système d’éducation qui est à revoir de fond en comble.

      • Et du coup, combien de ces manifestants ont voté aux dernières élections et surtout ont voté CONTRE Macron ?

    • L’école leur a bourré le crâne de socialisme et d’écologie woke : que les riches paient !
      Mais les riches sont partis et il ne restera bientôt que des pauvres. Merci Mitterrand, merci l’éducation nationale et vive la pauvreté.

  • Article qui fleure bon la raison et le raisonnable mais qui oublie une chose inacceptable : l’iniquité des régimes de retraite : fr.irefeurope.org/featured/article/les-salaries-du-prive-paient-les-retraites-des-fonctionnaires/ , alors une fois ceci constaté , tout effort demandé sera rejeté , massivement , inéluctablement , et nous y viendrons : avec haine et colère . Parce que le côté déficitaire , il n’est jamais, jamais brandi pour réviser celui de la FP , pour ce régime , c’est « circulez il n »y a rien à voir  » « c’est pas cher , c’est l’Etat qui paye » . Par ailleurs et surtout , il est absolument tordant que l’auteur fasse appel à la raison , alors que ce système de retraite est un Ponzi et comme dans tout bon Ponzi : on recrute des nouveaux entrants à tour de bras (immigration) et on refuse aux gens de sortir (allongement des cotisations ) . Ce qui n’est pas raisonnable , c’est d’avoir basé notre système de retraites sur ce Ponzi . Cessez de hurler sur les victimes Mr Aulnas et prenez vous en aux vrais coupables .

    • Remarquez qu’en matière de slogan, « les salariés du privé paient les retraites des fonctionnaires », c’est du même niveau que « c’est pas cher, c’est l’Etat qui paye ».
      Ceux qui paient ce sont les consommateurs, qu’ils soient fonctionnaires ou non.

      • Hélas non. Les consommateurs ne paient que pour une bien petite part. Ceux qui paient sont d’abord les épargnants et les investisseurs/entrepreneurs, ceux qui ont le désir de ne pas consommer tout tout de suite et de construire quelque chose pour le futur. Un investissement régulier sur les 40 dernières années dans un support qui se contente de suivre l’inflation et de conserver la valeur investie, vous posséderiez en valeur faciale plus de 100 fois votre investissement annuel. Vous devriez donc payer 30% de 108-40=20% de votre capital en seul impôt sur les « plus-values », comme on appelle l’impôt sur l’inflation. Pour le simple fait d’avoir reporté à plus tard votre consommation (qui sera taxée tout autant)… Si vous avez investi dans le CAC40, votre investissement apparaîtra multiplié par 19, donc 30% de 19-1, 5.4 devront aller au fisc pour payer les retraites de ceux qui n’ont pas été aussi prévoyants que vous. En euros constants, ça fait entre 1.8 et 2 fois le montant que vous avez investi dans les grandes sociétés françaises pour votre retraite qui part en impôts (alors que ces sociétés paient, elles-aussi leur part d’impôt avant de partager le reste avec vous).
        Donc ce sont bien épargnants et investisseurs qui paient.

        • Les sociétés n’étant qu’un écran juridique pour les propriétaires personnes physiques qui paient l’impôt de production et l’impôt sur les sociétés avant de percevoir des dividendes qui sont aussi taxés etc

    • « comme dans tout bon Ponzi : on recrute des nouveaux entrants à tour de bras (immigration) »
      Pas tout à fait car les nouveaux entrants ne viennent pas forcément grossir les rangs des cotisants (souvent plutôt les rangs des assistés) aussi vite que grossit le nombre des pensionnés! Et un Ponzi s’effondre automatiquement dans ces conditions ( c’est d’ailleurs en cours depuis des années, bien qu’alimenté sous perfusion par les chèques sans provision de l’Etat).

  • 1) La question préalable est : peut on faire confiance à ce gouvernement ? Je laisse le lecteur répondre
    2) La deuxième est: au lieu d’agiter le chiffon rouge de l’âge de départ, ne peut on parler plutôt de durée de cotisation ?
    3) On parle de capitalisation, il en faudrait, mais pas n’importe laquelle . Celle des fonds de pension américains (Blackrock, Rothschild) qui guettent l’opportunité ? ou plutôt une capitalisation qui financerait l’économie française, le secteur énergétique , nucléaire, par exemple ?

    • Oui, à condition que cette capitalisation soit libre de financer les projets de son choix et pas les lubies d’un gouvernement aveuglé par des idéologies hors sol!

    • Les fonds de pension américains guettent toutes les opportunités favorables à leurs clients. Vouloir des fonds « à la française » qui ne le feraient pas ? Et qui financeraient les projets français parce qu’ils sont français, conformes aux désirs du gouvernement, … et évidemment pas tournés vers la rentabilité ? Vouloir l’enrichissement de ses clients est sain, offrir de prétendues garanties de moralité labellisées par l’Etat est malsain. Mais que chacun puisse choisir, et que ceux qui jugent l’argent sale, ceux qui le gèrent comme des bandits, et l’Etat comme un garant de vertu, constatent sur leurs placements à quoi cela conduit.

  • Le premier paramètre évoqué est l’espérance de vie dont l’allongement implique quelques ajustements paramétriques du système par répartition.
    Très cyniquement cette évidence suggère une autre approche fructueuse: détériorer le système de santé que le monde entier nous envie. Tout indique que sur ce plan cet objectif progresse à merveille.

  • Cette réforme ne répond pas au problème fondamental qui est la non viabilité de la répartition.
    quant à travailler plus, les français le voudront quand ils pourront conserver le fruit de leur travail (et donc l’arrêt de la spoliation actuelle).

  • La justification au « travailler plus longtemps » est de satisfaire aux exigences de la répartition. Il est donc urgent de ramener cette répartition à portion congrue, sa juste place, afin que la durée de travail puisse s’ajuster en simple proportion des gains de productivité et non en application de slogans gauchistes de redistribution.
    Promouvoir le « travailler plus longtemps » a un côté malsain, car seule la pérennité du système par répartition que nul n’accepte de remettre en cause et que le monde se garde bien d’imiter permet de le justifier arithmétiquement. Et surtout, cela ne règle rien, puisque tous les deux ou trois ans, il faudra de nouveau, avec la répartition, travailler encore un peu plus longtemps. Le contrat intergénérationnel de la répartition n’est pas tenable, reconnaissons-le et cherchons des solutions pour que ceux qui l’ont observé pendant une grande partie de leur carrière ne soient pas les dindons de la farce.

  • « pour que ceux qui l’ont observé pendant une grande partie de leur carrière ne soient pas les dindons de la farce. »
    Et pourtant, ici, certains commentateurs de CP s’accommoderaient parfaitement de la spoliation des retraités actuels qui n’ont malheureusement pas eu le choix de leur système de retraite obligatoire!!!!
    Vous avez raison de le souligner!

    Billet d’humeur
    Migrations et frontières : une brève histoire du passeport

    Analyse

  • Le premier des coupables est ce président, dont j’ai oublié le nom, qui en 1981 à fait croire qu’on pouvait brutalement abaisser l’age de la retraite à 65 ans, alors que la démographie et l’espérance de vie démontraient le contraire. Les seconds coupables sont ceux qui l’ont cru et mis en oeuvre cette politique. Les troisièmes coupables sont ceux qui ont fait croire qu’on pouvait diminuer et partager lec temps de travail dans perte de salaire. Toutes ces mesures étant financées non pas par des économies ou de la croissance, mais par de l’endettement magique, ou par « faire payer les riches » sans même s’apercevoir que si on connaissait tout l’argent de ces riches on ne financerait que moins de 5 ans de ce système, et ensuite plus rien.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

« L’État ayant dépensé Tout l’été Se trouva fort dépourvu Quand il fallut financer ses agents,

Plus d’argent.

Il alla crier famine Chez l’Argirc-Arrco sa voisine, La priant de lui donner Quelques sous pour financer son déficit,

« C’est pour la solidarité », lui dit-il.

L’Agirc-Arrco n’est pas prêteuse ; C’est là son moindre défaut.

« Que faisiez-vous au temps faste ? » Dit-elle à ce quémandeur. « Je dépensais à tout venant, pour de bonnes causes » « Vous dépensiez ! J’en suis fort aise. Eh bien ! empruntez... Poursuivre la lecture

"Il a mis une cible dans mon dos » dixit Yaël-Braun Pivet au sujet d’un tweet récent de Mélenchon dans lequel il écrivait qu’elle était partie « camper à Tel-Aviv ». La poésie made in Jean-Luc.

C’est un classique, la gauche se déchire. Au siècle dernier, le rapport de force se jouait entre gauche socialiste et communiste. La première voulait asphyxier la seconde, qui voulait garder une place chèrement acquise après la Seconde Guerre mondiale. Après le congrès d’Épinay, coup de maître de François Mitterrand, la gauche s’est unie jusqu’à... Poursuivre la lecture

On écoute enfin les démographes !

Depuis longtemps ils annoncent la diminution prochaine de la population de nombreux pays, puis de l'ensemble de la planète, alors que la mode était plutôt à la crainte de la surpopulation, crainte qui a été relayée et amplifiée, notamment par une partie de l'écologie politique.

Depuis, la mode a changé. On a remarqué la baisse de la population chinoise, qui devrait s'accélérer, et celle de nombreux autres pays.

En France, nous n’en sommes pas là, mais la baisse de la fécondité va nous rap... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles