Maroc : la liberté d’expression malmenée

Au Maroc, comme dans plusieurs pays arabes ou du tiers monde, les individus sont confrontés à des atteintes à leur liberté d’expression.

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Maroc : la liberté d’expression malmenée

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 7 février 2023
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Toute société démocratique se fonde sur un pilier fondamental et indispensable : la liberté d’expression. C’est le droit propre à chaque individu qui lui permet de rendre publics ses émotions, ses sentiments et ses opinions. La participation des citoyens à la vie politique garantit le fonctionnement démocratique de l’État.

Cette participation peut prendre différentes formes mais elles relèvent toutes du droit à la liberté d’expression : critiquer le pouvoir en place, révéler des vérités, exprimer son refus des politiques instaurées, etc. La garantie de ce droit requiert des institutions répondant aux normes démocratiques, soit un ensemble de règles et de principes encadrant leur fonctionnement transparent, responsable, équitable et indépendant.

Dans les régimes autoritaires le pouvoir doit être nécessairement centralisé autour d’une seule personne ou un petit nombre de personnes ayant le pouvoir de contrôle et de manipulation des institutions de l’État. Les règles démocratiques qui assureraient leur bon fonctionnement doivent être brisées par le recours à des restrictions de la liberté d’expression afin de limiter la capacité des individus à observer, réfléchir, critiquer et remettre en question le contrat établi.

Même les démocraties avancées peuvent recourir à des restrictions de la liberté d’expression mais pas de façon fréquente et structurelle comme celle des pays où règne l’autoritarisme, où le pouvoir politique réprime et censure dès qu’il se sent en danger.

Au Maroc, comme dans plusieurs pays arabes ou du tiers monde, les individus sont confrontés à des atteintes à leur liberté d’expression, des journalistes aux activistes et jusqu’au citoyen lambda.

La répression n’est pas un intrus dans la vie politique du Maroc, elle en est un élément crucial qui fait partie de l’ADN marocain. Des professeurs à l’université ou à l’école ont cette relation autoritaire répressive avec les étudiants, des parents avec leurs enfants, des responsables des administrations publiques, et toute personne pouvant jouir d’un tout petit pouvoir supplémentaire sur une autre pourra appliquer son autoritarisme. Pas seulement le régime.

 

Depuis 2017, la répression a explosé

Le nombre de détenus politiques et d’expression est allé crescendo. Depuis la crise du covid la limitation du droit de réunion et de manifestation s’est accrue grâce notamment à la promulgation de l’état d’urgence sanitaire toujours d’actualité. Les arrestations arbitraires des activistes rifains du Hirak en 2017 et les peines de prison surréalistes par rapport aux présumés crimes, les procès se caractérisant par la non-équité des journalistes et des activistes des droits humains, et les détentions des blogueurs des réseaux sociaux à cause de leurs opinions.

De nombreuses fondations et associations de défense des droits de l’Homme tant marocaines qu’étrangères ont critiqué ces atteintes à la liberté des citoyens et ont plusieurs fois demandé des procès équitables pour tous les détenus, la libération de certains d’entre eux et la fin de ces pratiques qui nuisent à l’image du pays et provoquent des dégâts multidimensionnels sur les individus de cette génération et la suivante. La résolution adoptée par le Parlement européen sur la dégradation de la situation de la liberté d’expression n’a rien apporté de nouveau mais a appuyé les affirmations et les dénonciations des activistes et des victimes qui n’ont pas de crédibilité pour l’opinion publique marocaine. Mais pour beaucoup, même la majorité du Parlement européen ayant voté pour l’adoption de la résolution manque de crédibilité et d’objectivité, et considèrent qu’il s’agit d’un complot contre le Maroc et sa politique étrangère avec les États-Unis, Israël et les pays d’Afrique.

L’expansion des discours médiatiques influencés par le régime ont renforcé la polarisation sociale ainsi que l’extension des faux comptes de réseaux sociaux pour influencer l’opinion publique et diffuser les campagnes de diffamation contre les « ennemis du régime » et leur entourage.

Cependant, il semble que le régime néglige les effets de la propagation de la désinformation et des discours de haine, lui qui réprime et justifie ses comportements et politiques autoritaires par la garantie de la stabilité et la paix et la lutte contre la discorde qui sème la zizanie et se retrouvera in fine comme la Syrie. Cet exemple de la Syrie diffusé largement par les discours politiques et médiatiques, continue d’être évoqué par un nombre non négligeable de Marocains comme une forte motivation de leur silence : « on accepte les atteintes à notre égard pour éviter la situation actuelle de la Syrie » ; « On peut vivre sans liberté mais pas sans pain » ; « ils l’ont arrêté parce qu’il ne se mêle pas de ses affaires » ; « vous voulez revenir à l’ère du siba (l’anarchie) ? Alors taisez-vous et foutez la paix au Makhzen » etc. Les manifestations et les révolutions ont été largement associées au chaos et aux guerres civiles déclenchées après les mouvements du Printemps des peuples en 2011, les gens ont cru en ces idées et les ont adoptées.

Cette polarisation accrue a biaisé les visions et les opinions vis-à-vis des opposants aux politiques émanant du pouvoir et toute personne qui ose exprimer un avis contraire ou révéler des vérités en relation avec ce pouvoir. Accepter un certain statu quo consiste en fait à se rebeller contre les lois de la nature à caractère dynamique fondamentalement. L’univers s’inscrit dans une continuité de mutations et de changements infinis, le soleil, les planètes, les étoiles et les galaxies se déplacent constamment, les espèces naturelles et les races humaines depuis leur création sont en évolution constante et les régimes politiques à leur tour ne sont pas rigides, sont soumis aux transformations et n’échappent pas à la loi du dynamisme.

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  • Par définition, l’islam n’est pas une religion qui accepte la liberté d’expression. Dans les pays musulmans, être non musulman signifie l’interdiction d’être fonctionnaire, de participer à un gouvernement, d’être écouté, voir même d’avoir l’école gratuite comme au Pakistan. De plus, dans ces pays, les règles de vie sont édictées au nom de la religion et donc de Dieu. Quel humain, à part un mécréant, peut revendiquer une liberté d’expression que Dieu lui interdit au travers de ses lois que les élites traduisent en texte ?
    L’Iran est un cas d’école : au nom de quoi une femme peut elle se révolter contre la loi de Dieu qui lui impose le voile ? Aucun humain, même un mollah
    Ne pourra lui donner satisfaction.
    Pour conclure, s’il n’y a pas de pain, c’est la volonté de Dieu, si tu es pauvre, c’est la volonté de Dieu, etc. Exactement ce que racontait l’église catholique il y a 200 ans.

    • aucun rapport entre l’islam et l’Eglise catholique il y a 200 ans : en Occident, la loi, les lois, ont toujours été édictées par les souverains, jamais par l’Église. Dans l’islam, toutes les lois, l’équivalent de notre code civil et de notre code pénal, se trouvent dans le coran. Il n’y a pas de distinction entre le temporel et le spirituel. C’est une des raisons pour lesquelles l’islam est incompatible avec la Constitution française.

      • Il y a 200 ans en France, c’était la volonté de Dieu si votre enfant mourrait de maladie, ou d’accident. La religion a toujours une explication pour ce qu’elle ne comprend pas.
        Rappelons que jusqu’à la Révolution, l’église faisait partie des plus hauts sommets de l’État.

        • En France, depuis la Renaissance s’est instauré le gallicanisme. Il y a toujours eu un bras de fer depuis les débuts de la royauté entre les rois de France et les institutions ecclésiales. Si le sentiment religieux a parfois influencé certaines décisions des souverains ou gouvernements, il venait de l’individu ou d’une collectivité complice. Vous confondez les titres nobiliaires (Richelieu et autres n’étaient pas ordonnés prêtres) et la hiérarchie de l’Église qui demeure une organisation temporelle qui a pour but de préserver la spiritualité et elle a dû officier avec plus ou moins de bonheur. Il n’y a pas non plus à confondre le christianisme, qui ne l’enseigne pas, avec les crédulités populaires et les croyances de divinités suprêmes ou autres que l’on trouve dans toutes les sociétés et tous les continents. C’est un phénomène humain.

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