Tour de France des immobilités : découverte d’un écomusée

Récit d’une traversée effarante qui livre un pays sombrant dans une politique d’enclavement des territoires, de naphtalinisation du patrimoine et de paupérisation des populations.

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Tour de France des immobilités : découverte d’un écomusée

Publié le 30 juillet 2020
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Par Yannick Harrel.

Le présent texte raconte un périple de près de 2000 kilomètres parcourus en France. Une traversée effarante qui livre un pays sombrant inexorablement dans une politique d’enclavement des territoires, de naphtalinisation du patrimoine et de paupérisation des populations.

De l’Alsace à la Vendée, une France qui se vide

Prenant pour point de départ l’Alsace et pour point d’arrivée la Vendée avec un crochet par l’Auvergne, ce périple en automobile (et rendu uniquement possible par ce moyen de transport) permet de prendre conscience d’un pays qui se meurt, qui se vend et qui se vide. Mais aussi des poches de résistance locales où le volontarisme politique et entrepreneurial sert à revigorer tout un tissu local de bonnes volontés.

En exergue, il est surprenant qu’en une période où l’on vante le décloisonnement des territoires on puisse se trouver embarqué dans des localités où les entraves artificielles les plus retorses vous font rapidement regretter de ne pas disposer d’un véhicule de rallye-raid.

L’inventaire à la Prévert donne le vertige quant à l’inventivité, hélas mal placée, de certains élus locaux et de leurs se(r)vices techniques.

Feux tricolores en enfilade sur des lignes droites où des cédez-le-passage voire des stops seraient autrement plus justifiés ; ronds-points de toutes les dimensions et de tous les styles (mention spéciale à ceux de Challans qui remportent la palme des plus originaux) ; travaux fantômes sur des distances dilatées où quelques cônes de chantier disposés demeurent la seule illusion d’activité néanmoins secondés par de vrais radars autonomes bien camouflés derrière les ponts afin de sanctionner le malheureux qui après 20 bornes de ce régime en viendrait à transgresser l’allure d’escargot imposée ; ralentisseurs en tous genres, aux formats généralement illégaux, afin de rapprocher les conducteurs et passagers actuels de la condition des usagers des diligences des XVIII et XIXe siècles (à se demander pourquoi avoir terrassé et asphalté toutes ces voies ?) ; multiplication effrénée des changements de limitation de vitesse sur des portions de route n’excédant pas quelques kilomètres où notre mémoire visuelle est mise au défi de retenir la dernière indication, le tout dans une chorégraphie des chiffres devenant chaotique dans la tête (bien évidemment au mépris de l’attention portée à l’environnement de conduite) ; aménagements de chicanes, de séparateurs de voie surélevés et de rétrécissements artificiels de chaussée rendant la traversée de nombreuses agglomérations non seulement pénible mais hautement dangereuse en cas d’éblouissement ou de précipitations de pluie/neige (ce qui incidemment autorise tout usager de la route victime de l’un de ces ouvrages à ester en justice contre la localité et son représentant 1) ; et pour couronner le tout, la torture de la limitation à 80 km/h sur de longs, très longs, horriblement longs axes bien rectilignes où la lutte contre l’ennui et la perte d’attention est permanente : cadeau empoisonné d’un ancien Premier ministre trouvant encore de solides relais au sein de l’administration2.

Tous ces artifices ont pour effets collatéraux :

— De renforcer les pollutions sonores et atmosphériques pour les riverains, car un véhicule thermique émet bien plus de particules fines s’il fonctionne de façon saccadée et à basse vitesse.

— D’user prématurément les mécaniques des véhicules, engendrant davantage d’insécurité pour le conducteur et les autres usagers de la route en plus de surcoûts financiers à longue échéance.

— De congestionner des axes routiers alors que leur fluidification devrait être le principal objectif.

— D’obérer l’avenir financier de ces collectivités puisque ces ouvrages d’art dispendieux (la création d’un rond-point coûte 100 000 euros au minimum, et il s’agit bien pour ce prix d’une version de base et de dimension réduite) s’érodent et mobilisent des sommes conséquentes pour leur entretien voire leur réparation, soustrayant en toute logique des fonds pour l’investissement.

Libérer les territoires de France

Ce cheminement dans les territoires de France a aussi été l’opportunité de constater combien chaque petite curiosité naturelle ou issue de la main de l’Homme sait être mise en valeur par les associations et collectivités locales, au prix parfois d’une surenchère assez comique et touchante.

Cependant, ce même parcours m’a obligé à traverser des déserts industriels, des villages abandonnés à leur sort et des bourgs prêts à baisser le rideau (Saint-Maixent-L’école en est un parfait exemple).

Un panorama d’autant plus saisissant que l’ouvrage de Laurent Izard, La France vendue à la découpe, a été mon livre de chevet durant ce road-movie, ce qui mériterait une fiche de lecture.

Ces lieux de désespoir aux façades décaties sont éloignés des grandes métropoles vaquant à leurs obsessions écolo-sociétales : la fermeture d’une entreprise pour inactivité ou refus de ligne de crédit, la vente forcée d’une exploitation agricole ou l’arrêt arbitraire d’un service public sont ressentis immédiatement. Et ce au grand dam d’élus locaux obligés de réclamer l’aumône aux plus riches communes limitrophes, voire à Paris : situation héritée d’un double assujettissement, l’un aux communautés de communes et l’autre à la centralisation parisienne.

Il m’est ainsi arrivé au fil de ma pérégrination d’avoir une bouffée nostalgique d’un temps où un homme comme Jean-Luc Lagardère pouvait incarner l’audace et l’innovation et, le plus important, la foi en l’avenir ; ou encore me remémorer le génie d’un Albert Caquot, considéré comme le plus grand ingénieur de son temps qui bâtissait pour l’avenir et non emmurait l’existant.

À défaut de grands hommes, nous héritons d’un pays se morfondant dans une culpabilité malvenue et intellectuellement injustifiée et célébrant un patrimoine qui lui appartient de moins en moins. Tant par sa vente en coupe réglée à des parvenus de l’étranger mais aussi par la falsification de son histoire par des groupes professionnels opérant un travail de sape continu et ciblé, avec en guise d’accélérateur des apôtres de la décroissance visant à imposer aux forceps un état de déclassement et de restrictions (ce que je nomme les forces idéologiques, opposées aux forces productives).

Et malgré tout, la volonté de changement et de libération est présente, elle se manifeste ici et là dans les territoires que l’on traverse : la Vendée, la Haute-Saône, le Puy-de-Dôme ou encore la Vienne donnent des signes de dynamisme économique qui ne doivent rien au hasard.

C’est là que se trouve la solution : la décentralisation et l’autonomisation de jure ou de facto des territoires qui est seule garante pour l’heure d’une meilleure gestion des ressources et des mobilités. Il est temps que les territoires de France s’offrent les moyens de libérer ou d’attirer les éléments productifs en facilitant leurs envies de création, de production, d’exploitation et d’innovation.

Célébrer et monétiser le passé est louable mais le risque déjà bien avancé est de transformer tous ces territoires riches de promesses en écomusées à ciel ouvert.

Libéralisation des axes de circulation et relance de la filière extractive

Cela passe inéluctablement par une libéralisation des axes de circulation, afin de redonner à ceux-ci leur fonction première qui est de se mouvoir librement et à vitesse constante et lisible. Car les mobilités sont aussi la clef du dynamisme territorial.

Ce n’est pas du « yakafokon », c’est de la philosophie, un courant de pensée de libération qui doit irriguer nos actions. Qu’un maire souhaite préserver le bien-être de ses administrés en prônant une politique de restrictions est tout à fait louable mais il ne peut dans le même temps reprocher à des commerçants, des entrepreneurs ou des habitants industrieux de partir ou de refuser de s’installer en raison de cette philosophie.

Lorsqu’un élu local ou un président de conseil départemental se lamente sur l’état de sa collectivité, qu’il observe donc bien ce qu’il a pu faire dans le domaine des mobilités avant d’incriminer des facteurs extérieurs.

Et incidemment, perdre cette habitude de tout attendre de Paris en favorisant les synergies avec les collectivités voisines, y compris transfrontalières : penser écosystème nodal et non pyramidal. Fort heureusement, nombre d’élus locaux, départementaux et régionaux ont déjà compris que cette nouvelle donne est la solution, avec des résultats d’attractivité qui sont rapidement à la mesure de leur courage.

Pour en terminer, et alors que je me trouvais sur le plateau de Gergovie du fait de ma virée par le Massif Central, je me suis souvenu combien notre sous-sol était riche de ressources minérales, et qu’il suffirait de relancer la filière extractive pour alimenter de nouvelles industries compatibles avec le respect de l’environnement, bien plus que certains pays nous alimentant en métaux stratégiques, et la notion de souveraineté, qui passe en amont par la maîtrise d’un certain nombre d’approvisionnements notamment en matières premières.

Là encore, comme dans les mobilités qui seront nécessaires à ce développement en France, tout est question de philosophie comme route et de courage comme carburant.

  1. En novembre 2017, un conducteur de Ferrari a obtenu réparation de son véhicule endommagé par le chevauchement d’un ralentisseur ainsi que la destruction de l’ouvrage d’art par la justice. D’autres actions sont en cours, notamment par l’association Pour une Mobilité Sereine et Durable, qui recense un nombre incalculable de dispositifs contraires à la loi.
  2. Sur la récente étude du CEREMA attestant que la mesure du 80 km/h aurait permis de sauver 349 vies, permettons-nous de rappeler qu’officiellement le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement est un établissement public placé sous la double tutelle du ministère de la Transition écologique et du ministère de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. En clair : il ne saurait être considéré comme un organisme indépendant, quelle que soit la qualité de ses experts.
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  • « sa vente en coupe réglée à des parvenus de l’étranger »… eh ben… Qui pour faire un petit rappel à l’auteur des principes du libéralisme ? Qui emporte le fait que tout propriétaire est libre de disposer (et donc de vendre) son bien à qui il l’entend ?
    Bien sûr, si l’auteur souhaite que dans les communes rurales, le Soviet doive approuver la vente d’un terrain appartenant à un individu, c’est différent.
    Sinon, dans l’ensemble, il a fort raison… La France s’est toujours centrée sur Paris. Les « villes de province » (Lille fait la taille de Bruxelles…., Lyon, Bordeaux, etc…) remisées au second rang…

    • dans les communes rurales, le Soviet doive approuver la vente d’un terrain appartenant à un individu

      C’est déjà le cas pour les terres agricoles. Le « soviet » en question se nomme SAFER.

    • Pas faux. Mais on est en droit de considérer que c’est l’appauvrissement artificiel de la France, son manque de compétitivité créé et soigneusement entretenu par l' »occupant intérieur » cher à h16, qui crée un effet d’aubaine au dépens des locaux.
      Par contre, agir contre ledit dépeçage (symptôme) sans agir sur les causes du mal, serait un cautère sur une jambe de bois…

  • Merci pour ce constat, et la solution simple et économique que vous donnez mais que nos bobotyrans tiennent à ignorer : « se mouvoir librement et à vitesse constante ». C’est également la clé de la sécurité, mais nul doute que nos dirigeants évitent soigneusement de demander au CEREMA l’étude qui le confirmerait.

  • Déjà que malgré cela ils nous enfoncent, ne leur donnez pas l’idée de s’en affranchir !

  • La seule et unique possibilité pour croire le Cerema à propos des 349 vies sauvées par les 80km/h serait que soient publiés les vrais chiffres de l’accidentologie par type de route et le nombre de kilomètres parcourus sur la période par type de route.

  • Si vous n’aimez pas nos petites routes de grandes randonnées n’en dégoutez pas les autres. Tout ces petits tracas vous permettent de rester bien éveillés à bord de vos suv moelleux luxueux dans lesquels vous vous endormez comme des bebes. Rouler en France et un vrai plaisir pas comme chez nos voisins !

    • Plus depuis le déconfinement 😉

      • Adepte du désert ? Non c’est cool la route si il y a des blaireaux devant soi, on se défoule grave, on insulte on s’exprime…. J’ai roulé en Espagne, quelle monotonie sous le soleil sur leurs autoroutes vides, même pas un radar pour vous distraire.

    • Et je vous signale que je vous ai mis un plus un,histoire de mettre votre compteur à zéro, je ne supporte pas cette notation sur le site, il faut qu’ ils arrêtent ce système de jugement débile du niveau de l’ école des fans.

  • Vu un reportage sur Manille dans les quartiers pauvres : quelle dynamisme et créativité pourtant la vie n’est pas facile ! Chez nous les pauvres (individus, élus et communes) se laissent mourir, sédatés aux subventions et interdiction de faire !

  • « Et incidemment, perdre cette habitude de tout attendre de Paris. »
    Le système est bloqué dans cette position. Si l’édile veut une subvention, il doit passer par le préfet et se soumettre à ses volontés, qui reflètent exactement celles du ministre de l’intérieur.

  • En France, l’ expression  » l’ enfer est pavé de bonnes intentions » prend tout son sens avec magnificence.

  • J’applaudis votre observation et votre analyse.

  • Pour sillonner la France assez souvent, je confirme.
    Le pire, à mon avis est à mettre au crédit de la région haut de France, qui a laissé s’implanter un nombre invraissemblable d’éoliennes. On a l’impression de traverser des zones industielles en pleine campagne. Déjà que le paysage était assez peu attirant, c’est désormais un repoussoir. Qui peut désormais s’y installer?

    • Je me demande de quel coin vous parlez. Connaissant un peu tout l’axe Lille-Saint-Omer-Béthune-Douai, ya pas des masses d’éoliennes.
      (Et les Hauts de France sont magnifiques).
      Dans le Grand-Est, j’ai fait Chalon-en-Champange jusque Troyes à vélo, (sur des chemins libres d’accès car non privés), ya rien.. c’est mort et vide, sauf des éoliennes : ben elles ne dérangent personne.

  • Suppression des limitations de vitesse.
    Généralisation des vitesses conseillées.

    • où routes privées non? et « contrat »

      • Routes privées = capitalo-féodalisme totalement liberticide.

      • Le problème n’est pas que les utilitaires soient publics ou privés mais que l’Etat les transforme en barrières de péage, les factures des clients devenant de véritables feuilles d’impôts sur les revenus, sans plus aucun rapport avec le service consommé. Il y a plus de 200% de taxes sur l’essence par exemple, rapportant plus de 40 milliards de recettes alors que l’entretien des routes représente un coût de l’ordre de 10 milliards.

  • Je pense que l’auteur n’a pas mis ses pieds en Alsace… l’Alsace se vide dit le titre. Elle se vide de quoi ? De sa population… il doit confondre avec le grand est….
    J’ai beau lire l’article hormis un inventaire de Prevert qui pourrait être celui de Goethe ou de Johanna Spyri, ou le miens je ne le comprends pas bien.
    Le fait est que l’état centralisé en France tue les initiatives des régions n’est pas nouveau.
    Les allemands appelle un article de ce type : Ein Sommerloch Artikel… littéralement un article du trou de l’été… en fait c’est fait pour meubler.

    • Et votre commentaire est fait pour laisser entendre que ça n’est pas si grave, que finalement tout va pour le pas trop mal dans le pas pire des mondes ?

      • Relisez le jusqu’à la fin

        • J’ai relu jusqu’à la fin, maintenant, répondez donc à ma question. Pour moi, ce qui est « fait pour meubler » ne se rapporte pas à des questions importantes, dont l’effet sur l’économie et la vie quotidienne de tout un chacun serait considérable. Si ça n’est pas ce que vous sous-entendez, merci d’être moins subtil et plus direct.

          • Dans mon commentaire j’écris : l’état tu les initiatives des régions.
            Vous entendez ça comment ?

            Par ailleurs quand j’écris que l’article meuble, c’est qu’il est trop généraliste et peu argumenté. L’auteur y va d’un grand fourre-tout laissant sous entendre que les régions sont léthargique vis à vis de l’état. Dire que l’Alsace se désertifie alors que la croissance de sa population est de 0.4 % n’est pas crédible, par ailleurs le président du département de bat pour faire revenir en arrière une annexion de force au grand est.
            Il est suivi par 80% de la population.
            Alors non je ne pense pas que tout va bien quand je constate que l’ARS a planté l’Alsace durant le COVID et que les décisions prises loin des réalités de terrain ont augmenté le nombre de morts.
            Je confirme que cet article est un « bouche trou de l’été qui ne sert à rien puisqu’il n’est pas argumenté et partiellement faux…. Sommerloch donc

            • Les initiatives des régions ne valent pas mieux que ce que l’Etat leur impose. Ce sont, comme le dénonce l’article, des gâchis splendides d’argent public, qui rendent la vie quotidienne plus compliquée pour tous ceux qui voudraient se lancer dans des initiatives individuelles, des hymnes à l’immobilité. N’ayant pas été en Alsace depuis longtemps, je ne peux pas dire pour cette région, mais toutes celles de l’ouest où je me suis rendu récemment sont bien en voie de désertification (tous les enfants actifs de proches sont en Orient ou ailleurs, pas dans les régions françaises) et de sclérose (tous les déplacements d’affaires ou de travail prennent plus longtemps, fatiguent plus, et cumulent coûts et retards par rapport à il y a 30 ans). L’article est peut-être peu précis, mais j’y entends un « Laissez les vivre, créer, se déplacer, et piétiner joyeusement les contraintes réglemento-stupido-administratives » qui s’adresse autant aux régions qu’à l’état et qui n’a pas assez d’écho.

            •  » Wenn mina Generation verschwunda ìsch, isch s’Elsàss tot !

              As gìbt nur zwai Méglichkaita, entweder bikummsch s’Gald vu Pàris, oder spìnnsch ?

              Mina Grossmuater hàt ìmmer g’sait : d’franzosa kàsch fìr nit brücha… »

            • Bonjour,
              Je suis l’auteur de ce texte et j’entends clarifier certains points que vous soulevez.

              Le premier est qu’il y a des règles rédactionnelles auxquelles il faut se soumettre afin de faciliter la publication d’un article et le rendre ainsi lisible comme agréable pour les lecteurs.
              Contrepoints m’autorise effectivement à m’épancher sur ce sujet des mobilités qui me tient à coeur. En contrepartie, je dois m’astreindre à respecter des obligations dont le nombre de caractères.
              Or initialement je désirais coupler mon périple d’anecdotes et de passages du livre de Laurent Izard (que je recommande toujours aussi vivement) mais cela m’est apparu infaisable car le plafond autorisé aurait été largement crevé. J’ai procédé par conséquent à du rabotage en règle qui fait que le propos peut paraître elliptique. Point de carnet de bord malheureusement mais au moins le propos est synthétisé et de ce fait, moins noyé dans un «billet de voyage d’été».

              Le second est que je pars certes d’Alsace mais je ne prétends aucunement que celle-ci se vide, c’est une appréciation générale puisque le trajet, je le rappelle, se déroule d’Alsace vers la Vendée en «plongeant» vers l’Auvergne. Je connais fort bien cette région, et surtout le département du Bas-Rhin et je n’irai jamais prétendre que celle-ci se dépeuple, bien au contraire. En revanche, partir de cette région densément occupée et active donne un contraste très net avec les autres territoires traversés (comme la Nièvre par exemple). Tel est le sens de mon propos. J’ajoute d’ailleurs que j’évoque des territoires qui se vident et qui se vendent (là c’était rapport au livre d’Izard).

              Le troisième et dernier point est la résultante de ce cheminement : la centralisation est en train d’étouffer nos collectivités. Le phénomène de métropolisation, à commencer par Paris, donnant le LA pour ses consoeurs, où siègent l’intégralité de nos ministères et des principaux médias nationaux, opacifie totalement la réalité des territoires de France. Les politiques de mobilités sont un exemple criant de ce que l’État central peut prendre comme décision hautement attentoire au dynamisme local par pur dogmatisme : rien que le 80 km/h est symptomatique, surtout que le retour au 90 km/h est freiné par les préfets qui reçoivent des ordres en ce sens (on admirera d’ailleurs le non-parallèlisme des formes, le 80 km/h fut imposé arbitrairement aux forceps et le retour au 90 km/h doit respecter un cahier des charges délirant). Je n’idéalise pas toutes les collectivités locales mais j’insiste sur le fait qu’il est plus facile de demander des comptes à leurs représentants qu’à l’État, ne serait-ce qu’en raison de la distance entre son propre domicile et les instances de décision.

              J’en conclus qu’il faut libérer les territoires pour libérer les énergies en commençant par libérer les déplacements (hors contraintes spécifiques liées à une situation d’urgence). Cela ne rendra pas toutes les collectivités territoriales attractives (certaines ne le désirent pas et d’autres ont des responsables incompétents ou dogmatiques) mais cela constitue un point de départ car difficile de s’installer dans un endroit où la vitesse est très limitée, les voies artificiellement entravées et les axes mal entretenus. Vous ne pouvez pas vous imaginer quel plaisir ce fut de se déplacer dans le Puy de Dôme car pendant ce temps, à Strasbourg, on va faire passer l’A35 de statut d’autoroute à celui de parc urbain avec zone à 50 km/h (!!!) : c’est du délire mais c’est notre futur.

              En espérant avoir été plus éclairant sur ces points.

              Bien cordialement

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