Dépendance : la Sécu paiera encore une fois

On peut craindre que, comme pour la santé, la dépendance coûte encore plus cher à la collectivité, même si, une fois de plus, on fait payer les entreprises pour faire passer la pilule à l’assuré.

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Dépendance : la Sécu paiera encore une fois

Publié le 18 juin 2020
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Par Thierry Foucart.

Dans un article précédent, j’ai détaillé le financement des complémentaires santé par les assurés : des frais élevés (droits d’entrée, frais de gestion) dans les assurances privées, une cotisation proportionnelle aux salaires dans la plupart des mutuelles. Dans les deux cas, une taxe d’environ 14 %. La gratuité des lunettes et des prothèses auditives est une fumisterie : quoiqu’on dise, c’est l’assuré qui paie, qu’il en ait besoin ou non. Il paie aussi deux fois s’il achète des prothèses non remboursables à 100 % !

La prise en charge de la moitié de la cotisation par les entreprises fait croire aux salariés qu’ils paient moins cher leur santé : ils ne pensent pas qu’elle devrait leur revenir. Pourtant, ils paient l’impôt sur cette part patronale puisqu’elle est réintégrée dans leur revenu. Le régime obligatoire est scandaleux : l’État oblige les salariés à payer pour leur santé, mais ne peut les obliger à se soigner. C’est comme si on obligeait les gens à payer la redevance audiovisuelle même s’ils n’ont pas la télévision.

Il faut avoir à l’esprit que le prix payé par chacun pour sa santé est proportionnel à son revenu ; le prix de la consultation, des soins et des médicaments n’a rien à voir avec le coût de sa santé personnelle. Tout est prépayé par les cotisations et les prélèvements sociaux. Le prix du pain sera peut-être fixé dans quelques années en fonction des revenus déclarés.

Maintenant, c’est au tour de la dépendance

Que son financement par les particuliers pose problème est une évidence. Chacun, dans sa famille, dans son entourage, connaît des situations difficiles. Une dépendance peut durer plusieurs dizaines d’années, et ruiner une famille, ou au contraire quelques mois, au grand soulagement des héritiers.

Mais l’État, dans sa grande générosité qui consiste à ponctionner les contribuables, a décidé d’organiser le financement de la dépendance par une cinquième branche de la sécurité sociale. On peut craindre que, comme pour la santé, la dépendance coûte encore plus cher à la collectivité, même si, une fois de plus, on fait payer les entreprises pour faire passer la pilule à l’assuré.

D’autres moyens pour financer la dépendance

Le premier est le recours à l’assurance privée ou mutuelle, qui n’échappe pas aux droits d’entrée ni aux frais de gestion, mais qui est adaptée à la situation de chacun, en fonction du montant de sa retraite, de ses revenus, de son patrimoine et dont le coût est relativement faible.

Le second est la location du patrimoine immobilier.

Le troisième est la vente, en viager éventuellement, du patrimoine de la personne dépendante.

La difficulté est que les biens des personnes en EHPAD sont gérés souvent par les ayants droit. Dans le contexte actuel favorable à l’euthanasie, le régime alimentaire baptisé bouillon de onze heures n’est pas loin. D’autres, qui ont les dents longues, préfèrent que la dépendance de leurs parents soit financée par la collectivité, c’est-à-dire par les autres, par « solidarité ».

Le système actuel met la dépendance à la charge des descendants en ligne directe lorsque les ressources de la personne sont insuffisantes pour couvrir les frais. Cela pose des difficultés, parce que les enfants et petits-enfants ont d’autres charges familiales, ont des revenus juste suffisants pour eux, ou encore, plus fréquemment qu’on ne le croie, rechignent à payer. C’est là le problème : l’absence de solidarité familiale – qui n’est pas toujours due au comportement des enfants – et le manque des ressources des uns et des autres.

Une solution à tous ces problèmes

On peut imaginer une solution qui permettrait de régler tous les problèmes :

  • la prise en charge de la dépendance par la collectivité en cas de défaut des ayants droit ;
  • son remboursement systématique par le prélèvement des dépenses sur les successions ;
  • la mise sous tutelle des personnes prises en charge.

La partie des frais engagés par la collectivité supérieure à l’actif successoral serait prise en charge par la collectivité, assurant ainsi une fin de vie acceptable à tous.

C’est déjà le cas : pourquoi inventer un autre système, au lieu de le corriger ? De nombreuses dérogations permettent en effet d’échapper à ce remboursement, en particulier les donations et les contrats d’assurance-vie qu’il faudrait donc réintégrer dans l’actif successoral. L’assurance dépendance présente alors l’avantage de préserver le capital destiné aux héritiers.

Un autre problème est l’efficacité de la gestion des biens sous tutelle. C’est un problème récurrent des administrations, souvent incitées à investir en toute sécurité et donc avec un rendement faible.

La création d’un fonds rassemblant tous les biens sous tutelle pourrait optimiser la gestion que rien n’empêche de confier à des organismes privés rémunérés suivant des règles à préciser.

En attribuant des points en fonction de l’évaluation du patrimoine de chacun, il est possible de préserver les intérêts des ayants droit au cas où l’actif successoral dépasserait le montant des frais engagés, et de leur reverser le surplus.

Mais on peut craindre que ce genre de solution ne soit pas retenu : l’État n’y gagne rien s’il ne prélève pas de taxe au passage pour combler le puits sans fond des systèmes sociaux.

Vraisemblablement, la solution choisie sera une nouvelle cotisation sociale sur les salaires et les retraites, faisant payer proportionnellement à leur revenu, un hébergement en EHPAD à ceux qui n’en ont pas besoin ou qui en ont les moyens, puisque la solidarité est l’alpha et l’omega de toute politique sociale.

Une taxe sur les cotisations viendra compléter celles qui existent déjà pour combler le déficit abyssal de la Sécurité sociale, en ajoutant une pierre de plus à la prison dorée dans laquelle l’État-providence enferme de plus en plus de monde.

 

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  • je pense pas qu ici la motivation principale soit de creer une nouvelle taxe. l idee de faire financer la dépendance par le contribuable etait deja dans l air sous Sarkozy.
    Nos boomers approchant de l age de l EPAD, ils se sont dit que ca serait bien de refiler l addition a d autres. Et electoralement, nos dirigenats ont tout interet a suivre cette demande

    Sinon comme l ecrit l auteur, il y a d autres solutions que de plomber encore plus les actifs francais : la vente de l habitation principale suffira dans l immense majorite des cas a couvrir les frais (ah c est sur qu apres il n y a plus d heritage mais on peut pas avoir le beurre et l argent du beurre)

    • Il existe déjà des assurances dépendances.. Elles seront obligatoires, ce n’est pas une taxe mais une cotisation et privée .. La secu ne sera pas éternelle sous la forme actuelle, un jour, elle disparaîtra.

    • Autant cette histoire de boomers est pénible par certains aspects, autant la synchronicité de cette annonce avec les besoins spécifiques de cette génération née de 1945 à 1964 laisse pantois.

      C’est incroyable d’observer comment l’Etat obèse semble réglé comme une horloge à leur service exclusif, les besoins des générations d’avant ayant été superbement ignorés (cf l’état des Ehpad encore aujourd’hui), sans compter leur épargne qui fut spoliée autant que nécessaire pour amorcer la pompe des institutions collectivistes, les générations d’après (les « jeunes » de 55 ans et moins) conviées à financer toute leur vie les montagnes de dettes apportant le confort sans limite réservé spécifiquement aux boomers, confort qu’elles-mêmes n’auront plus quand les caisses seront vides d’ici 20 ans.

      Stupéfiant d’observer l’égoïsme compulsif, maladif, obsessionnel, de cette génération en particulier qui aura tout voulu et tout obtenu exclusivement pour elle-même, aux dépens à la fois de ses ascendants et de ses descendants, cordialement méprisés.

  • Avec 230 milliard de dette + 51 milliard cette année la sécu va disparaitre peut être plus rapidement que prévu .
    Mais franchement qu’elle plaie ce truc.
    Les 68tard vont bien nous pondre une ptite taxe pour financer tous ca qui sera intégrer au travail encore et toujours.
    Plus de taxe et d’impots vont permettre de repartir plus vite.
    Donc je vote pour une taxe en plus et un impot en plus, plus vite on y va plus vite on a des chances de traverser le mur.

  • Il est déjà demandé le détail des contrats d’assurances vie et épargne disponible lors du dossier de demande APA pour le résident en EHPAD . L’etat doit se rendre compte que l’appauvrissement de la classe moyenne par le chômage de masse va créer d’énormes problèmes pour financer les rest à charges des familles . D’où l’intérêt de cette ponction généralisée pour les finances publiques.

  • Et on se pose la question de la décadence de notre économie. Comme si les entreprises n’étaient pas déjà surchargés de prélèvements, le führer en rajoute encore pour qu’elles soient encore moins compétitives face à nos concurrents, et que les français payent l’addition puisque ils sont répercutés sur les prix de vente!

  • « Le régime obligatoire est scandaleux : l’État oblige les salariés à payer pour leur santé, mais ne peut les obliger à se soigner »

    Ben, c’est un peu le principe de l’assurance : vous payez mais vous n’êtes pas obligé d’avoir un accident…

  • Le choix du financement par la collectivité est ancien. Cf APA : allocation personnalisée d’autonomie. En gros, on finance le maintien à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie le plus longtemps possible. Ca évite d’encombrer les EPAHD, coûteux pour les personnes et l’Etat.
    La suite est donc logique : pour financer l’APA ou les EPAHD, il faut du pognon issu de la solidarité nationale.
    L’hypothèse selon laquelle on pourrait se payer sur les successions est irréaliste. Qui accepterait qu’on retienne, par exemple, les coûts d’un traitement anti-cancer sur l’argent qui revient aux héritiers ?
    Ou puisque la Sécu finance les allocations familiales, qui ira proposer sérieusement que les héritiers remboursent celles-ci sur l’actif successoral ?

  •  » Faire payer les entreprises pour faire passer la pilule à l’assuré  » ??? En dehors de plomber un peu plus les dites entreprises , dans les faits ce sont les consommateurs qui paieront car ce sera répercuté dans les prix !!!! RAPPEL quand on taxe le lait ce ne sont pas les vaches qui paient !!!!!

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