Par Patrick Coquart.
Début septembre, comme chaque année, il est arrivé au retour des vacances. On ne s’y attend pas vraiment. On a encore l’esprit ailleurs. On essaie de se remettre dans le bain du boulot. Et là , sans crier gare, il surgit quand on ouvre la boîte aux lettres.
Je veux parler de l’avis 2018 des taxes foncières sur les propriétés bâties. Cette année, à Paris, les taux n’ont pas augmenté. Celui des taxes spéciales a même baissé de 0,77 %. Chouette, se dit-on, une bonne nouvelle. Mais la bonne surprise ne dure pas. Le montant à payer a augmenté de 1,20 %.
J’avoue être quelque peu désorienté. Les taux baissent et le montant à payer augmente. Par quel tour de passe-passe cela est-il possible ? Je décide donc d’y regarder de plus près et de me plonger dans les avis d’imposition des 10 dernières années.
Des taux stables depuis 2011
Ce n’est pas vrai dans toutes les communes, mais à Paris les taux étaient relativement stables ces dernières années. Mais si on examine leur évolution depuis 10 ans, ce n’est plus le cas, comme le montre le tableau ci-dessous :
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On remarquera que le taux communal est le même (8,37 %) depuis 2010. En 2009, il avait augmenté de 9 % passant de 7,11 % à 7,75 %. Et, en 2010, l’augmentation avait été de 8 %.
Avant 2009, il n’y avait pas de taxe foncière départementale, du moins à Paris. À vrai dire, c’est un peu normal, la Ville de Paris étant aussi un département. S’il y a désormais deux taux, il ne faut pas se leurrer : les décideurs sont les mêmes pour la part communale et la part départementale. Ce taux, qui était donc de 3 à sa création en 2009, est passé à 3,24 en 2010 (soit une augmentation de 8 % également), puis à 5,13 en 2011. L’augmentation était alors de plus de 58 % ! Depuis 2011, le taux départemental est resté inchangé.
Quant à la part régionale, existante en 2008, elle a disparu en 2011 pour l’ensemble des régions. Mais, comme nous l’avons vu, la part départementale a plus que largement pris le relais.
Ensuite viennent les taxes spéciales d’équipement. Elles sont perçues au profit des établissements publics fonciers locaux (EPFL), des établissements publics fonciers d’État (EPFE), d’établissements publics particuliers et de l’établissement public Société du Grand Paris.
Le Grand Paris, on voit à peu près de quoi il s’agit. Mais que sont les EPFL et les EPFE ?
Les 23 EPFL sont des structures à la main des collectivités locales pour constituer des réserves foncières et réaliser des actions ou opérations d’aménagement. Les EPFE, au nombre de 12, ont les mêmes missions, mais sont pilotés par l’administration centrale. Bref, ce sont des « machins » dont l’efficacité de l’action serait à étudier de près. Mais ce n’est pas notre propos.
Comme le montre le tableau ci-dessus, les taxes spéciales fluctuent chaque année. Parfois à la baisse, comme en 2018 (-0,77 %), mais le plus souvent à la hausse. Lorsqu’elles sont apparues sur l’avis d’impôt en 2008, le taux n’était que de 0,165.
Enfin, la dernière : la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM), celle dont le taux est le plus élevé. À Paris, en 2018, 6,21 %. Un taux stable depuis 2010, année où il avait augmenté de 8 %.
En 10 ans, tous les taux ont augmenté. Et pas qu’un peu, comme le dévoile le tableau ci-dessous :
Pour mémoire, l’inflation entre le 1er janvier 2008 et le 1er septembre 2018 a été d’environ 13 %. Quant à l’indice de référence des loyers (IRL), il a progressé entre le premier trimestre 2008 et le premier trimestre 2018, de 10,5 %.
Et encore, les Parisiens n’ont pas trop à se plaindre. Même s’ils ont la taxe Grand Paris, ils n’ont pas de taxes pour les syndicats de commune, ni pour l’intercommunalité. Ils ne payent pas non plus la taxe GEMAPI, qui est la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations. Mais cela viendra peut-être un jour. Selon votre commune, vous pouvez aussi être redevable d’une taxe de balayage. Si le logement est inoccupé, vous paierez aussi la taxe annuelle sur les logements vacants.
En revanche, à Paris, nous sommes redevables de la TASA, la taxe additionnelle spéciale annuelle de la région Ile-de-France. Elle n’apparaît pas sur l’avis d’imposition et on ne sait pas très bien où elle est cachée.
En résumé, les taux sont stables à Paris depuis 2011, sauf pour les taxes spéciales qui ont progressé de près de 58 % sur la période.
Des frais de gestion indécents
Sur l’avis d’imposition, avant le montant total à régler, figure un chiffre correspondant aux « frais de gestion de la fiscalité directe locale ». Que se cache-t-il derrière cet intitulé à rallonge ?
Si les taxes foncières sont destinées aux collectivités locales et aux structures qui leur sont assimilées, elles sont perçues par l’État. Pour ce « travail » réalisé à la place des collectivités, il se fait payer. Bien sûr, c’est vous qui payez.
Ces frais de gestion sont calculés de la façon suivante :
- 3 % du montant de la taxe foncière (hors part syndicale) ;
- 8 % de la part syndicale + TEOMÂ ;
- 9 % des taxes spéciales d’équipement.
Le montant prélevé dépend donc directement du montant de votre impôt. On aurait pu penser, naïvement, que ces frais soient fixes. Après tout, quel que soit le montant des taxes foncières, le travail de calcul et de recouvrement est toujours, peu ou prou, le même. Mais ce n’est pas le cas. Par conséquent ces frais de gestion augmentent comme vos taxes foncières. C’est la double peine en quelque sorte.
En ce qui me concerne, les frais de gestion se sont élevés à 46 € en 2018, en hausse de 4,55 % par rapport à 2017. Curieusement, l’évolution est la même sur 10 ans : 4,55 %.
Comme le montre le tableau ci-dessous, ces frais de gestion ont considérablement crû en 2009 et 2010, puis ont brutalement baissé en 2011. Depuis, ils augmentent régulièrement de 1 € à 2 € par an.
Il est intéressant de comparer ces frais à ce que coûte une facture émise par une entreprise. Une étude de 2001, réalisée par Arthur D. Little pour Deskom, détaille le coût standard d’une facture émise et l’estime entre 8 € et 9,5 € :
Il est probable que ces coûts ont évolué depuis 2001. En 2012, Qweeby l’estimait entre 10 € et 12 €. Mais nous ne disposons pas d’étude précise plus récente. Le coût a évolué à la hausse, car le coût de la main-d’oeuvre a augmenté ainsi que le prix de l’affranchissement. Pour compenser, les entreprises dématérialisent de plus en plus souvent leurs factures. Quoi qu’il en soit, on est loin, dans les entreprises du secteur privé, des 46 € de frais de gestion que l’État me prend.
Certains esprits chagrins me rétorqueront que la feuille d’impôt est bien plus compliquée à élaborer qu’une simple facture. Comparons alors avec ce monument de complexité qu’est la feuille de paie. Gilles Masson, auteur de La paie, ça s’apprend, indiquait dans Le Parisien du 30 mai 2014, qu’un bulletin de paie coûtait entre 18 € et 35 € à l’employeur. Moins cher, donc, que l’établissement d’un avis de taxes foncières. Mais cela, c’était avant le prélèvement à la source. Nul doute que l’établissement d’un bulletin de salaire va très prochainement coûter beaucoup plus cher !
Le montant à payer s’envole
Soyons maintenant concret. Quel est le montant de mon impôt foncier (hors frais de gestion), et quelle est son évolution sur 10 ans ? Le tableau ci-dessous parle de lui-même :
Je dois payer cette année 1 % de plus qu’en 2017. Mais sur 10 ans, l’augmentation atteint le chiffre ahurissant de 62,7 %. Comment expliquer ce phénomène ? Car, comme nous l’avons vu plus haut, les taux sont stables à Paris depuis 2011 (excepté pour les taxes spéciales). Or, depuis 2011, le montant de mes taxes foncières a tout de même augmenté de plus de 9 %.
Pour paraphraser Martine Aubry, c’est si flou qu’il y a forcément un loup.
La valeur locative en progression constante
Ce loup est caché dans la valeur locative du logement. Celle-ci sert d’assiette d’imposition, c’est-à -dire que les différents taux évoqués dans cet article lui sont appliqués pour trouver le montant de l’impôt.
Cette valeur locative est déterminée, comme l’indique la brochure de l’administration fiscale, « par comparaison aux locaux de référence choisis dans la commune. Chaque local est classé dans une catégorie de local d’habitation, puis sa surface réelle est pondérée en fonction de ladite catégorie, de l’état d’entretien du bien, de sa situation générale et particulière, des éléments de confort dont il dispose. La surface pondérée définitive obtenue est multipliée par le tarif au mètre carré de la catégorie pour obtenir la valeur locative du bien ».
Cette valeur locative est donc en grande partie subjective puisqu’elle est établie « par comparaison aux locaux de référence choisis dans la commune ». Quels sont ces locaux de référence ? Par qui ont-ils été choisis ? Sur quels critères ?
Et ne parlons pas des éléments de confort qui comptent dans l’appréciation du bien et qui sont d’un autre âge.
Cette valeur locative augmente chaque année. Pour mon appartement, l’augmentation annuelle est comprise entre 0,4 % et 2,5 %. Au total, entre 2008 et 2018, la progression est tout de même de 14,5 % :
Résistez à la spoliation
Ne buvez pas les paroles de vos élus qui prétendent que les impôts locaux n’augmentent pas. Regardez votre avis d’imposition dans le détail, et vous verrez que la base d’imposition augmente régulièrement et que, finalement, le montant de vos taxes foncières augmente.
À l’approche des élections municipales de 2020, exiger des taux d’imposition moins élevés n’est pas suffisant. Il convient aussi d’être particulièrement vigilant sur la révision des valeurs locatives réclamée à grands cris par les élus locaux.
La révision des valeurs locatives des locaux professionnels laisse craindre le pire. L’administration estime, en effet, que 85 % des commerçants subiront une hausse des impôts locaux à cause de cette révision.
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Pour plus d’informations, c’est ici.
c’est tout simple , diminution des impôts locaux , automatiquement il y aura une augmentation de taxes foncieres !!! et en plus lorsque vous demandez une expliquation aux impôts de la hausse de la taxe , il m’a été répondu, que ma déclaration n’étais pas la même ( sic ) une augmentation de 10% quand même !!! et pas qu’à moi !!..
Instructif mais le Français ” monsieur tout le monde ” fait plus simple . Il n’a pas besoin de longs calculs pour s’apercevoir qu’il lui en manque toujours plus à chaque fin de mois . Et dire qu’on croyait avoir tout vu avec Hollande !
Sans compter le bon prévisible avec la disparition de la TH.
Pourtant la logique (rationnelle pas politique) aurait voulu que l’on supprime la TF et non la TH. Cette dernière est vraiment liée a la présence humaine, donc à la consommation de services municipaux. La TF n’est qu’un impôt sur le capital.
La somme taxe foncière taxe d’habitation représente pour moi plus que l’impôt sur le revenu. Tel qu’organisé, cela se succède en septembre/ octobre/ novembre entrainant une baisse de consommation très forte ces mois et pénalisant décembre par ricochet, affectant les ventes de Noël. Quant à la disparition de la TH, il ne faut pas rêver. A la rigueur, elle va disparaitre et un taxe “d’occupation” va apparaitre.
la prochaine réforme de la taxe foncière. L’ÉTAT vous fera payé un loyer du terrain que vous occuper tous les mois ,avec un bail de 90 ans , une belle opportunité !!!
Macron, plus personne n’y croit ! à part ceux qui ont voté pour lui et qui ont peur du ridicule s’ils en viennent à renier ce en quoi ils ont cru ! Macron n’est que le fils de “Hollande” !
Je note que vous avez soigneusement évité de qualifier ce fils de “spirituel” 🙂
La réforme de la taxe foncière a été fait pour les locaux professionnels elle est basée théoriquement sur 50 % du montant du loyer annuel dans un secteur donné mais curieusement concernant la taxe reçue la base commune (50 % du loyer annuel) est différente du département 14 239. C’est sur cette base que les coefficients sont appliqués et le département dirigé par les Socialistes “se goinfre” TF 2016= 1677 € TF 2017= 2316 € TF 2018 = 3232 €. Le département du 35 gaspille l’argent. Exemple “Le Grand Soufflet” des groupes de musique viennent d’Amérique du Sud. Subvention cent mille euros. Il faut que le Département ne prennent en charge que le Social financé directement par l’Etat et contrôlé par les préfets. Et la Taxe foncière doit revenir entièrement à la commune.
Petit coucou du val d’oise, le département le plus endetté de France…
l’intercommunalité passe de 2.11% 2017 à 2.36% 2018
la taxe foncière chez moi a été multipliée par 3 en 10 ans, et cerise sur le gâteau évoquée dans l’article : Les bureaux (400 m² environ) feront l’objet d’un lissage supplémentaire de 1000 euros par an sur 10 ans pour ne pas me prendre par traitrise à la gorge…
j’ai décidé de partir, ou disons j’ai l’impression qu’on me force à fuir, ou encore qu’on me vire avec un coup de pied bien senti…
taxe foncière pour un bâtiment industriel : 2010 12759.00 ,2018 17062.00. L’intercommunalité et GEMAPI sont venus chercher leur part du gâteau .
et les fameux frais de gestion 384.00en 2010 ,522 en 2018.
Les contribuables soumis à la taxe d’habitation bénéficient d’abattements qui réduisent le montant de la contribution payée. Ces abattements sont des pourcentages de la Valeur Locative Moyenne (VLM) calculée pour chaque collectivité.
En vérifiant le calcul de la VLM de certaines communes, CANOL s’est rendu compte en 2017 que la Direction Régionale des Finances Publiques (DRFIP) se trompait dans ses calculs en ne respectant pas la loi.
En effet, l’article 1409 du CGI précise dans son paragraphe II.4, que « la valeur locative moyenne est déterminée en divisant le total des valeurs locatives d’habitation de la commune, abstraction faite des locaux exceptionnels, par le nombre des locaux correspondants ». Or la DRFiP, au lieu de tenir seulement compte du nombre de logements, y ajoute à tort le nombre de dépendances (terrains, parkings, garages,…) qui ont une valeur bien plus faible que celle des logements. Il en résulte que la VLM des collectivités est sous-évaluée.
Cette « erreur » de la DRFIP se répète chaque année depuis plus de 20 ans et rien ne dit qu’elle n’est pas aussi commise dans les autres départements français.
Quel est l’effet de cette « erreur » ?
Elle diminue « l’abattement général à la base » pour tous les foyers et l’abattement supplémentaire pour les foyers qui ont des personnes à charge, enfants, parents, personnes handicapées.
CANOL a calculé son impact sur la taxe d’habitation 2017 pour les habitants de certaines communes. Voici quelques exemples :
• Pour Lyon, le trop-perçu va de 22 € pour un foyer sans personne à charge à 149 € pour un foyer qui en a 4.
• Pour Villeurbanne, le trop-perçu va de 49 € pour un foyer sans personne à charge à 221 € pour un foyer qui en a 4.
Avec pour conséquence un « trop-perçu » par les collectivités :
• Pour Lyon, il est de 6,3 millions d’euros, les abattements étant minorés de 13,7%,
• Pour Villeurbanne, il est de 4 M€, les abattements étant minorés de 24,4%,
• Pour la Métropole de Lyon, il est de 5,8 M€, les abattements étant minorés de 13,3%.
• Toutes les communes et intercommunalités du Rhône sont concernées et vraisemblablement toutes les communes de France !
L’action de CANOL :
Les contribuables du Rhône sont ainsi spoliés depuis de nombreuses années, mais les contestations des avis d’imposition ne sont recevables que pour l’année en cours et l’année précédente. CANOL a donc déposé la semaine dernière une « action en reconnaissance de droits » pour l’ensemble des contribuables du Rhône pour l’année 2017, demandant le remboursement du « trop perçu ». Elle le fera également pour 2018 dès réception des avis d’impositions de taxe d’habitation pour 2018, à moins que la DRFiP corrige ses calculs d’ici-là .
Comme pour la TEOM, une fois le jugement obtenu, tous les foyers ayant payé leur taxe d’habitation en 2017 et 2018 pourront bénéficier de la décision du tribunal administratif.
Contribuables Actifs du lyonnais – http://www.canol.fr/
La loi du prince…
Les fameux “frais de gestion” ne sont sans doute pas compris dans le chiffre officiel des prélèvements obligatoires…
je dois être l’exception qui confirme la règle …ma TH n’a pas augmenté cette année (maine-et-loire)
pardon : ma TF..