Commerce international : Donald Trump se tire une balle dans le pied

Alors même que Donald Trump justifie sa politique économique par la défense des intérêts des travailleurs américains, ces mesures pourraient au contraire fragiliser l’emploi aux États-Unis.

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Trump septembre 2015 by Michael Vadon(CC BY-SA 2.0)

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Commerce international : Donald Trump se tire une balle dans le pied

Publié le 14 juin 2018
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Par Jean-Marc Siroen.
Un article de The Conversation

Hausse des droits de douane, abandon du traité trans-Pacifique et du traité transatlantique, renégociation de l’ALENA, sanctions contre l’Iran, extra-territorialité… Alors même que Donald Trump justifie sa politique économique par la défense des intérêts des travailleurs américains, ces mesures pourraient au contraire fragiliser l’emploi aux États-Unis. Pour le comprendre, il faut se pencher sur les processus de productions et leur intégration au sein de chaînes de valeurs internationalisées.

Des réseaux de production mondiaux complexes et interdépendants

Dans les années 1990 et 2000, la croissance du commerce international a été tirée par la fragmentation des processus de production entre de nombreux pays partout sur la planète. Ce déploiement mondial de la chaîne de valeur a été favorisé par la libéralisation du commerce et des investissements. Les pays industriels ont délocalisé dans les pays à bas salaires les tâches les plus intensives en main-d’œuvre. En conséquence, les pays émergents se sont spécialisés dans l’assemblage de composants importés en franchise de droits de douane et transformés dans des zones franches d’exportation (ou export processing zones).

Les entreprises, associées dans des réseaux mondiaux complexes de filiales et de sous-traitants, sont ainsi devenues plus interdépendantes. Puisque les différents composants et biens intermédiaires traversent les frontières à chaque étape du processus de production, toute initiative protectionniste d’un pays se répercute sur toute la chaîne de production. Les effets sont amplifiés.

Donald Trump ouvre la boîte de Pandore du protectionnisme

La crise de 2008 a vu l’effondrement du commerce mondial, mais elle n’a pas ravivé les tensions protectionnistes : celles-ci auraient en effet risqué d’aggraver la crise, en démantelant les chaînes de valeur. Mais aujourd’hui, Donald Trump, qui bénéficie pourtant d’une conjoncture économique favorable (et peut-être à cause d’elle), oriente sa politique commerciale sans tenir compte de ces préoccupations lorsque, consciemment ou non, il vise par ses mesures à désintégrer la chaîne de valeur pour la réintégrer aux États-Unis.

À cette fin, Robert Lighthizer, le représentant américain au commerce, renégocie l’ALENA (accord de libre-échange entre les États-Unis, le Canada et le Mexique), afin notamment de mieux protéger l’industrie automobile américaine : les voitures produites sous la bannière étoilée devront demain être plus américaines qu’elles ne le sont aujourd’hui. Suivant la même logique, il lève des droits sur les importations de machines à laver. Mais, dans le même temps, l’effet de ces mesures est réduit par la taxation des importations d’acier, ce qui augmente paradoxalement les coûts de production de General Motors et de Whirlpool et abaisse leur compétitivité…

Le solde commercial bilatéral, un argument fallacieux

Le Président Trump persiste à envisager des sanctions contre la Chine au nom de son déficit commercial colossal (environ 300 milliards de dollars). Pourtant, prendre le solde commercial bilatéral comme une preuve de déloyauté n’a aucun sens. Seul compte le déficit avec le reste du monde, et celui-ci est avant tout imputable à l’excès de consommation des ménages américains, qui accroît les importations. Au niveau macro-économique, la balance courante d’un pays est en effet mécaniquement déficitaire lorsque l’épargne nationale ne suffit pas à couvrir à la fois l’investissement et le déficit budgétaire. Quelles que soient les mesures protectionnistes qui seront prises, ce déficit devrait s’aggraver avec le creusement attendu de son « jumeau », le déficit budgétaire.

Le déficit avec la Chine ne se convertit ni en PIB ni en emplois perdus. La valeur ajoutée des exportations chinoises n’est pas uniquement d’origine chinoise. Elle intègre des composants et des biens intermédiaires non seulement américains, mais aussi japonais, coréens, allemands… Un solde commercial qui serait calculé à partir de l’origine de la valeur ajoutée, et non de la valeur « brute » des exportations, diminuerait fortement le déficit bilatéral avec la Chine, grand importateur des biens intermédiaires (disques durs, circuits électroniques…) qu’elle assemble puis exporte. Le projet de taxer 50 milliards d’importations chinoises revient donc à taxer des produits intermédiaires originaires du monde entier (et même des États-Unis !) et pas seulement la production chinoise.

Ré-américaniser les chaînes de valeur

Les États-Unis veulent durcir les règles d’origine de l’ALENA, que les exportateurs doivent respecter pour bénéficier des exonérations tarifaires (62,5 % de la valeur du bien finale produite dans la zone pour l’automobile). Des exigences plus fortes favoriseraient la relocalisation de la production de composants aux États-Unis. Les coûts de production augmenteraient, mais la chaîne de valeur serait ré-américanisée.

Le retrait des États-Unis des méga-accords comme le Traité transatlantique (TTIP) ou le Traité Trans-Pacifique (TPP) vise aussi à « casser » l’approfondissement d’une chaîne de valeur régionale. Le TPP contenait en effet des règles d’origine relativement peu contraignantes et sa couverture géographique incluait des pays très impliqués dans les réseaux de production comme le Japon, la Malaisie, le Mexique ou Singapour.

De la même façon, le retrait des États-Unis de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien et la réintroduction des sanctions contre l’Iran vise un objectif similaire. En effet, au nom de l’extra-territorialité (qui permet à la justice américaine de poursuivre les entreprises étrangères pour des faits commis hors des États-Unis), le bannissement des exportations américaines vers l’Iran s’applique aux composants américains incorporés dans les exportations des pays tiers vers le pays sanctionné.

C’est ainsi que le fabricant chinois de téléphone mobile ZTE s’est récemment vu menacé d’interdiction d’importation de composants et de matériels américains pendant sept ans, ce qui a suspendu l’activité des 75 000 employés de l’entreprise. Un avertissement fort est ainsi lancé aux firmes étrangères. Elles devront renoncer à exporter vers l’Iran, ou trouver à se fournir ailleurs.

The ConversationLe cas ZTE met en évidence les contradictions de la politique de Donald Trump, dont il peine à s’échapper. En sanctionnant cette entreprise qui s’était affranchie de l’embargo américain, les États-Unis pénalisent les firmes américaines exportatrices de composants électroniques. Ce qui va contre l’objectif affiché, puisque cette mesure creuse encore davantage le déficit des États-Unis avec la Chine !

Jean-Marc Siroen, Professeur d’économie internationale, Université Paris Dauphine – PSL

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

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  • Je ne suis pas d’accord avec l’article, je vis en Chine depuis 23 ans, et l’article ne décrit pas ce que je vois.

    Pour chaque importation, la chine crée une concurrence, dans 5 ans, les puces de tel ou ordinateur seront 100% chinoise.
    La Chine produit des millions de stylo, mais pas la pointe qui vient d’Allemagne ou du Japon, c’est maintenant fini, une entreprise chinoise a réussi a crée une pointe 100% made in China.
    En Chine, il n’existais aucunes cultures d’avocat, ils étaient tous importés du Chili ou d’Israël, c’est en cours d’être fini, la Chine dans une région ou les avocats peuvent pousser, aide les paysans pendant 3 ans le temps que les premiers avocats sortent de terre et puissent être vendues.

    Et pour n’importe qu’elle industrie la Chine fait pareil, cela ne fait qu’un petit article dans la presse internet chinoise puis disparait, comme s’il fallait pas que cela se sache. Je fais depuis 1 an des captures d’écrans pour sauvegarder ces articles, c’est impressionnant que les occidentaux se font avoir. (sauf Donald Trump)

    • Quelques cas particuliers ne font pas une généralité, même à la loupe de vos obsessions…

      • il ne s’agit pas de quelques cas particuliers mais de tout, le solaire, l’Éolien, le nucléaire, les TGV, les avions, l’Électronique. Il y a moins d’un mois, le 1er moteur d’avion 100% chinois est sortis, les nouveaux TGV sont 100% chinois. Hier le président chinois annonce que la Chine sera une puissance maritime, et le tout pas dans 20 ans, mais dans 5 ans.

  • L’anti Trump international est vraiment une maladie grave. Cet homme est un businessman avant d’être un politicien ce qui le rend particulièrement apte a gérer des affaires. Pendant que le micron français se démène pour importer encore plus « d’ingenieurs de médecins ou d’architectes » Trump essaie de mettre fin a l’escalade du prix pétrolier manipulé par l’arabie saoudite.

    • En tant que businessman, Trump est l’incarnation du « capitalisme de copinage » que combattent les libéraux.
      En tant que politicien, Trump est l’incarnation des politiques de droite que combattent les libéraux : politiques néoconservatrices, protectionnistes, clientélistes, interventionnistes et nationalistes.

      • peut être que si le roi macron que vous semblez vénérer et qui est en position de couler le bateau France , avait la carrure d’un trump les maux dont souffre notre pays iraient en diminuant .
        je puis vous dire que ce sont les politiques que les socialistes nomment de » droite et conservatrices » qui font la grandeur et la richesse d’un pays . avec notre libéralisme de gauche nous en sommes ou ?
        la misère augmente en France. toutes nos grades fortunes sont allées ou on les plumerait moins , nous exportons des bacs +7 pour importer des bac -10. voila notre performance celle des médiocres, celle de ceux pour qui droit passe avant devoir !
        le fils d’un homme que je ne citerai pas , brillantes etudes major de sa promo avait une place importante a la direction d’un grand groupe a Paris il a préféré s’expatrier ses raison: quand il a payé toutes ses charges , ses taxes diverses, tout ce qui lui sert dans la vie courante , en fin d’année il lui reste plus de trois fois ce qui lui serait resté en France; j’oubliais il ne bosse pas 33 ou 35 heures mais entre 44 et 50 h par semaine , mais c’est son choix de vie celui d’un battant !

      • Trump est l’incarnation du capitalisme de rapport de forces, vous avez une drôle de conception du copinage !

  • entierement en accord avec marc22
    « Jean-Marc Siroen, Professeur d’économie internationale, Université Paris Dauphine  »
    encore un prof de gauche qui ne peut qu’écrire un article n’ayant aucun rapport avec le réalité , le chomage baisse de maniére importante aux USA , les americains « républicains » et la partie de la droite des démocrates (gauche US) est favorables aux decisions de Trump , et a son refus de voir l’Amérique noyée par des produits qu’elle est a meme de fabriquer ses decisions commencent à avoir un impact non négligeable.
    quand a la balle dans le pied ce professeur doit avoir les yeux sur l’élysée pour affirmer telle chose !

    • Avez vous lu l’article?
      « Au niveau macro-économique, la balance courante d’un pays est en effet mécaniquement déficitaire lorsque l’épargne nationale ne suffit pas à couvrir à la fois l’investissement et le déficit budgétaire. »
      Trump a quelques problèmes avec la macro économie. L’auteur insiste bien sur le fait du déficit abyssal avec la Chine vient avant tout de la (sur) consommation des ménages US, alimentée par une politique de crédit accommodante. Pareil avec l’Allemagne: si les voitures allemandes se vendent bien, c’est que les américains les apprécient.
      Il est amusant qu’en France, à notre petit niveau, certains, pourtant pas du tout Trumpodolâtres, veulent favoriser la consommation « locale » en tordant les mécanismes du marché, tout comme Trump.

      • l’auteur ferait bien d’insister sur le deficit abyssal de la France au regard de ses performances industrielles !

      • veuillez m’excuser mais une fausse manip a abreger mon commentaire.
        les voitures allemandes appréciée par les americains quelle affirmation :le marché US au 01/06/2018
        ford 20%
        chrysler 20%
        G motor 14%
        toyota 11 %
        hyundai 7 %
        Nissan 8 %
        Bmv 5 %
        mercédés 4 %
        le restes marques diverses .
        l’achat de berline allemande aux usa est comme en France le signe extérieur de je ne sais trop quoi , de supériorité peut être une c6 ou c5 vaut bien une allemande pourtant .
        si Trump parle de taxe sur les véhicule etrangers taxer seulement le allemandes n’emmenerait pas un grand boom dans le marché auto mais toutes les étrangères peu être ! le marché Francais est quasi inexistant aux USA vous n’avez qu’ a aller y faire un tour vous verrez .
        bonne journée

        • Pour info, en France, BMW, Audi et Mercedès, leur part de marché , c’est 3 %, soit moins qu’aux US. Par contre, leur valeur ajoutée pour ces constructeurs, c’est beaucoup plus élevé qu’un véhicule de moyenne gamme.

      • @nevez
        Les arguments macro-économiques, je les entends depuis plus de 40 ans, et je constate depuis exactement le même temps qu’ils n’ont aucun effet nouveau : les USA oscillent autour d’une position dont presque tous les économistes nous assurent qu’elle ne peut perdurer, les rares autres auxquels je fais confiance préférant admettre qu’il y a des exceptions et que d’autres facteurs sont à l’oeuvre que ceux qui prédisent des mouvements qui ne se produisent pas, sans qu’on sache très bien les quantifier ni les modéliser ce qui les discrédite à tort auprès des universitaires.
        Trump a certainement de gros défauts, mais on ne devient pas milliardaire et Président en étant l’imbécile que les médias français se plaisent à décrire.
        Comme vous le dites très bien, les politiciens français et les médias qui les soutiennent se livrent sans le dire aux mêmes « erreurs » que Trump. La principale différence est qu’eux n’ont jamais fait la preuve de leur capacité à s’enrichir préalablement à la carrière politique…

        • @ MichelO
          Il est vrai qu’on peut trouver D.Trump étonnant et déroutant, pas classique!
          Il est sans doute bien trop tôt pour déjà en tirer des conclusions.
          Il est probable que sa forme douce de repli national actuel corresponde à son programme America First, en essayant de mieux rééquilibrer la balance commerciale (face à la Chine, entre autres).

  • La prospérité a toujours été obtenue par la division du travail et la liberté des échanges. Mettre des barrières à l’une ou à l’autre ne peut que réduire la prospérité générale d’un peuple.
    Si Trump veut limiter les importations de Chine en les taxant, cela revient à punir les consommateurs américains qui devront payer les droits de douane ou acheter une production locale par définition plus chère.
    En quoi un déficit commercial avec la Chine est-il néfaste? Les Chinois sont bien obligés d’utilisé les dollars gagnés par leurs ventes aux US et les réinvestissent donc dans ce pays. Le déficit se transforme en investissements. Quelle calamité; on comprend la colère de Trump!

  • « Seul compte le déficit avec le reste du monde, et celui-ci est avant tout imputable à l’excès de consommation des ménages américains, qui accroît les importations. »
    Il n’y a donc rien d’illogique de chercher à réduire les importations. A moins de taxer un peu plus les citoyens pour réduire leur pouvoir d’achat !
    En France, nous avons l’inverse de la politique Trump. Résultat : 6 millions de chômeurs « seulement » car ils seraient encore beaucoup lus nombreux sans les emplois aidés et les fonctionnaires en surnombre.
    La mondialisation c’est super ! Mais cocorico dans les médias lorsque des emplois sont relocalisés sur notre territoire avec des subventions accordées aux entreprises !

  • Il y a une méthode simple pour reconnaître une dictature : regarder si les mots « démocratique » et « populaire » figurent dans son intitulé. La même méthode fonctionne très bien pour les unions douanières avec les mots « libre-échange ».

  • Étonnant : Les analystes économiques se succèdent et critiquent Trump sur des arguments contradictoires !
    L’un parle de son mercantilisme (alors qu’il fait une relance), un autre de protectionnisme (quand Trump propose au G7 d’annuler toutes les mesures restrictives !), et enfin, le dernier parle des surcouts des tarifs pour les clients, en oubliant l’avantage accordé par les monnaies dévaluées de l’€ pour l’Allemagne, et de la Chine !

    Et que vient faire l’extraterritorialité avec Trump ? Que diable, allez regarder l’enquête sur la vente d’Alstom, qui s’est réalisé sous l’ère d’Obama !

  • Pas très honnête votre article ! Je ne suis pas un partisan de Trump mais vous oubliez juste de dire 2 choses importantes : 1_ L’Europe (la France aussi bien sûr) taxe plus les produits US que les US ne le font avec les nôtres et 2_ Trump a proposé de supprimer toutes les taxes à l’importation dans tous les pays ; ce que les protectionnistes européens ont refusé, évidemment. Alors êtes vous malhonnête ou mal informé ou intoxiqué par la Presse ??

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