Éducation : l’argent public n’améliore pas les résultats

En France, ce sont les écoles indépendantes qui voient leur nombre augmenter. Puisque l’État ne parait pas vouloir agir concrètement pour redresser la trajectoire inquiétante que suit l’instruction scolaire, l’initiative privée prend le relais.

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Éducation : l’argent public n’améliore pas les résultats

Publié le 13 septembre 2017
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Par Jean-Baptiste Boone.
Un article de l’Iref-Europe

Alors que le gouvernement prétend peiner à établir un budget ne dépassant pas les 3% de déficit, il annonce encore une fois de nouvelles dépenses. Le ministère de l’Éducation profitera de 1,2 milliard d’euros supplémentaires, soit 2,5% d’augmentation avant inflation.

Ceci dans le but de privilégier un domaine clé. Pourtant, en matière d’éducation il n’y a pas de lien majeur entre dépenses publiques et réussite scolaire, comme le montrent les études PISA réalisée dans 75 pays et auprès de 540 000 élèves. Qu’il semble difficile de changer les vieux réflexes français !

Taux de variations des scores PISA et des dépenses gouvernementales pour l’éducation 2009 – 2015

Le programme PISA (programme international pour le suivi des acquis des élèves) évalue les élèves selon trois disciplines : sciences, lecture et mathématiques. Nous en avons fait la moyenne pour établir des comparaisons générales ici.

Source : OCDE Classements PISA – EUROSTAT – Traitement IREF

Dans le classement PISA 2015, la France est 25ème en moyenne et ne progresse pas. Elle se caractérise par un système inéquitable, c’est-à-dire, au sens de l’OCDE, peu performant et inégalitaire. En France, il y a légèrement plus d’élèves performants que dans la moyenne des pays de l’OCDE (21% contre 19%) mais il en est de même pour ceux en difficulté (22% contre 21%).

La France se montre incapable de travailler efficacement à développer les facteurs de réussite identifiés grâce à ces études. Des données recueillies, plusieurs recommandations sont tirées.

Il est fait mention, par exemple, du fait que « tous les élèves, qu’ils soient issus de l’immigration ou non, qu’ils soient favorisés ou défavorisés, bénéficieraient de politiques publiques moins sélectives, en particulier lorsque ces politiques qui visent à répartir les élèves dans différents programmes d’enseignement ou différents établissements sont appliquées durant les premières années de l’enseignement secondaire ».

Le système français, avec la carte scolaire, ne provoque-t-il pas fortuitement cette sélection précoce qui semble facteur d’iniquité ?

Un des facteurs souvent capital est le milieu socio-économique de la famille. Ce critère est plus prégnant en France encore. Il expliquerait plus de 20 % de la performance obtenue par les élèves de 15 ans (contre seulement 13 % pour la moyenne des pays de l’OCDE). Or, ce n’est pas l’augmentation du budget du ministère de l’Éducation qui pourra changer le milieu socio-économique de la famille des élèves.

L’autonomie, la clef de la réussite

Et les rédacteurs du rapport PISA de poursuivre : « Les élèves affichent un score plus élevé en sciences dans les systèmes d’éducation où les chefs d’établissement disposent d’une plus grande autonomie en matière de ressources, de programmes scolaires et d’autres politiques scolaires ». C’est ce qu’a mis en évidence, par d’autres biais, l’étude de l’IREF sur les systèmes éducatifs.

Corrélation entre les responsabilités en matière de gouvernance des établissements et la performance en sciences (Résultats fondés sur des analyses de niveau Système)

Malgré ces aspects basés sur des faits enregistrés dans de nombreux pays, le gouvernement persiste à utiliser ses vieilles méthodes, même si le ministre Jean-Michel Blanquer a parlé de plus d’autonomie. Il n’y a cependant pour l’heure pas de mesures concrètes accompagnant ses dires mais bien un allongement des crédits qui correspond à ce qui a été fait depuis des années, en vain.

Le Royaume-Uni nous donne un bon exemple de ce qui peut être réalisé. Confronté à la relative médiocrité des écoles publiques, il a permis l’émergence d’un nouveau type d’établissement, les académies, indépendantes mais subventionnées.

En mai 2016, ces nouveaux établissements représentaient 26% des établissements financés par l’État. Dans le même temps, le Royaume-Uni a amélioré de 9 points son classement PISA (moyenne des trois disciplines) tandis que le budget alloué à l’éducation par rapport au PIB diminuait de 21,54% selon EUROSTAT.

France vs Royaume-Uni, de 2009 à 2015

Source : Eurostat et PISA OCDE – traitement IREF

Pendant ce temps, en France, ce sont les écoles indépendantes qui voient leur nombre augmenter : il y en aurait plus de 800 selon la fondation pour l’école. Puisque l’État ne parait pas vouloir agir concrètement pour redresser la trajectoire inquiétante que suit l’instruction scolaire, l’initiative privée prend le relais.

Mais ce n’est pas sans difficultés pour les parents qui en supportent l’intégralité des coûts. Seule l’institution du bon scolaire ou un système équivalent au système des académies anglaises permettrait d’ouvrir les écoles à la concurrence sans discrimination entre privé et public.

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  • 100% d’accord avec l’idée de décrasser l’enseignement et de le libérer, d’expérimenter des alternatives.
    La « carte scolaire » est rien moins qu’une mesure d’apartheid que beaucoup s’emploient à contourner en domiciliant leurs enfants chez leurs grands parents, oncles, etc.

    « Un des facteurs souvent capital est le milieu socio-économique de la famille. Ce critère est plus prégnant en France encore. »
    En France où naître dans un milieu défavorisé constitue une véritable malédiction lorsqu’un gamin, un jeune présente des dispositions, des potentiels – et c’est pire lorsqu’il a le malheur d’habiter un quartier stigmatisé.
    Loin de favoriser le développement des potentiels de chacun, d’où qu’il vienne, le système éducatif « à la française » est là pour que les uns et les autres tiennent la place qui leur est assignée de par leur naissance. C’est criminel.

    • Vous avez tout à fait raison et les statistiques le prouvent. De 30% les élèves modestes sont passés à 9% dans les grandes écoles. Tout est fait pour maintenir les pauvres dans leur état, en abandonnant tout simplement l’enseignement de la culture, ce qui constitue un handicap irrémédiable pour suivre des études supérieures, car leurs parents ne peuvent leur apporter cette culture que les enfants des familles cultivées apprennent auprès de leurs parents!

  • Le schéma est grotesque puisque la France y est un des pays qui dépense le moins en PIB, – de 5%.
    Or on est le pays qui dépense le plus!

  • Je trouve dingue comme certains politiciens (qu’ils soient au pouvoir ou non) refuse de voir les faits en face. Pourquoi la France refuse-t-elle de suivre l’exemple d’autres pays et d’appliquer des méthodes qui ont marché dans ceux-ci ?

    (PS : c’était une question rhétorique, hein)

    • @ jujubibi
      Oui, c’est une constatation qui m’a frappée pendant les 16 années travaillées en France: à titre personnel et sans en faire une théorie prouvée, la France est « auto-centrée », plutôt chauvine avec une tendance au complexe de supériorité, un peu méprisante, donc pas loin de la xénophobie! (voyez le nombre de commentaires sur les articles parlant de l’étranger, sur ce site qui pourtant persévère!). Et internet n’a pas changé la donne! Il est pourtant clair que les idées de la « bonne » solution du problème français ont déjà été testées, ailleurs dans le monde! Et la France, pays béni des dieux, n’a aucune d’excuse pour expliquer son « pétrin » actuel!

  • Je vois de plus en plus de parents qui inscrivent leurs enfants dans des écoles privée. .
    Et l’éducation nationale ,son budget augmente,
    donc moins d’élèves. ..
    il y a un malaise….

  • Pas besoin de statistiques pointues pour mesurer la débâcle scolaire, un coup d’oeil au tableau ci-dessus suffit:
    « Les dépenses ont diminués » (sic!) ,
    Ce n’est évidemment pas en doublant le budget de l’EN qu’on rendra aux Français la maîtrise de leur langue. C’est en expédiant au diable ( ou en rouvrant l’île éponyme) tous ces fadas pédagauchistes, qui l’ont assassinée. Ils excluent, entre autres, le passé simple ou les accords de participes passés, des apprentissages fondamentaux. Rétablir cet enseignement ne coutera pas un kopek. En attendant la France restera le cancre de l’Europe.

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Les auteurs : Nathalie Sayac est Professeure des universités en didactique des mathématiques, directrice de l’Inspe de Normandie Rouen-Le Havre, Université de Rouen Normandie. Eric Mounier est Maitre de Conférences en didactique des mathématiques, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC).

 

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