Énergie : produire des KWh sur un marché faussé

Les KWh de toute nature ne s’achètent que sur des marchés aux formes administrées ou privées plus ou moins travesties.

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Énergie : produire des KWh sur un marché faussé

Publié le 1 mars 2023
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Un livre vert publié par la Direction Générale de l’Énergie et des Transports de la Commission UE sur l’efficacité énergétique titrait ceci en juin 2005 : « 20 % d’économies d’énergie d’ici 2020. » Ses auteurs y traduisaient synthétiquement comme suit les dispositions d’un lot de directives UE dont la plus connue est la 2002/91/CE et dont la transposition figurait au Journal Officiel du 4 janvier 2003.

Le marché seul ne permettant pas de réaliser les économies d’énergie qui s’imposent, les pouvoirs publics doivent agir pour influencer les comportements et inciter à isoler les maisons, à acheter des voitures moins polluantes et à utiliser les transports publics. Jugeant intenable que l’UE importe 50 % de besoins en énergie croissant de 1 à 2 % par an, pour quelque 240 milliards d’euros, quand les sources d’énergie sont réputées se raréfier, ladite direction estimait que les prix de l’électricité ou de l’essence – certes chers pour une partie de la population – ne reflétaient pas les véritables coûts sociaux et n’incitaient pas suffisamment les consommateurs à faire des économies.

Le rôle de l’UE

Elle jugeait donc nécessaire de réduire de 20 % la consommation énergétique européenne au plus tard en 2020, économisant ainsi 60 milliards d’euros par an à l’UE. Selon elle, un ménage moyen devait pouvoir facilement économiser de 200 à 1000 euros annuels de consommation, l’industrie tirer de ses 20 % d’économies une compétitivité renforcée et la création d’un million d’emplois en Europe.

Le secteur des bâtiments représente à lui seul 40 % de l’énergie consommée dans l’Union et trop d’énergie est censée être gaspillée dans ce secteur, en raison de systèmes de chauffage et d’éclairage inefficaces.

Aussi, en 2003, l’Union s’est-elle dotée d’une législation clé permettant d’améliorer les performances énergétiques de l’immobilier par l’application de normes plus strictes aux bâtiments neufs. L’impact de cette législation ne peut évidemment que dépendre de sa bonne application par des États membres tenus de la transposer dans le droit national avant janvier 2006. De plus, la Commission propose d’en étendre le champ d’application à tous les bâtiments rénovés ou à rénover.

En prenant quelques mesures élémentaires d’isolation, un ménage moyen doit pouvoir facilement économiser 200 euros sur sa facture annuelle de consommation énergétique.

L’industrie doit par ailleurs donner l’exemple en investissant dans les technologies efficaces permettant de consommer moins. Pour l’y aider, les pouvoirs publics doivent mettre en place un cadre plus propice aux investissements (exonérations ou réductions fiscales, aides à l’investissement, instruments de financement innovants pour les projets à petite échelle, etc.). L’Union européenne est durablement décidée à développer des instruments de marché et à encourager les accords avec l’industrie, mais elle sera peut-être dans l’obligation de recourir à des mesures réglementaires pour pallier les insuffisances du marché.

Les efforts consentis par l’industrie pour consommer moins d’énergie permettront à terme de réduire les coûts de production et d’accroître la compétitivité des entreprises. De plus l’industrie européenne doit y voir une opportunité de développement de nouvelles technologies qui s’exporteront dans le monde entier…

Mais c’est bien sûr ! Que les uns et les autres n’y ont-ils pas pensé avant ?!

Résumons la transcendante logique de ce qui précède, que tous les gouvernements français ont adopté – que dis-je ? – surtransposée avec enthousiasme : le citoyen et l’industriel n’étant pas raisonnables, voire masochistes, au point d’être insensibles jusqu’au gaspillage à la pression croissante des prix de l’énergie sur leurs budgets et au point de n’avoir ni vu ni compris ce qui est dans leurs intérêts personnel, professionnel et autre communautaire, l’État se doit de prendre forfaitairement les commandes de leurs finances individuelles, sachant mieux qu’eux combien, comment et dans quoi les dilapider.

Examinons donc ce qu’ont donné 15 années de transposition de la 2002/91/CE.

En 2005, la consommation totale d’énergie primaire française fut de 276,5 Mtep, la consommation d’énergie finale de 44 Mtep pour le seul résidentiel. En 2020, ces consommations étaient respectivement 2572 TWh, soit 221 Mtep et 38 Mtep. Ainsi, alors que notre consommation d’énergie primaire avait chuté de 20 % en 15 ans, celle de l’énergie finale n’avait-elle reculé que d’un peu plus de 13 % dans le résidentiel.

Est particulièrement sagace celui qui peut dégager de performances aussi peu exaltantes le résultat d’un volontarisme gouvernemental de celui d’un affaiblissement économique du pays, le PIB français/habitant étant passé de 34 768 dollars à 39 055 dollars sur la période, une progression moyenne de 0,8 % par an à comparer à celle des Allemands de 2,4 % par an !

Mais l’important n’est pas là. L’important est de savoir combien économiser 3 à 4 misérables Mtep dans le résidentiel, combien ce dernier se dispose à payer les rares Mtep suivants et la probable récession économique en découlant… avec un besoin d’énergie primaire toujours plus faibles.

Le journal Les Échos répond ainsi à la première question :

« Entre 2005 et 2019, la dépense a fluctué entre 600 millions d’euros et 2,8 milliards selon les années, pour un montant cumulé supérieur à 20 milliards d’euros. »

Effy magazine, quant à lui, apporte la réponse suivante à la seconde :

« Le plan du gouvernement baptisé France Relance prévoit d’allouer 7 milliards d’euros à la rénovation énergétique des bâtiments – en subventions publiques – et 2 milliards pour la rénovation des logements individuels, sur les 30 milliards consacrés à la relance verte. »

Et la France entière se demande avec inquiétude où ses gouvernants vont-ils bien pouvoir trouver les quelques 55 milliards d’euros nécessaires à la construction à perte de vue de six EPR2, les 65 milliards d’euros de dettes de l’opérateur appelé à les construire… et les 10 milliards d’euros qu’il va falloir préalablement débourser pour son rachat…

Ainsi, non seulement le pouvoir ne se pose même plus la question de savoir s’il ne serait pas plus rationnel et plus profitable, sur tous les plans, à la communauté nationale de trouver le moyen de produire sur son sol une énergie dont la croissance vertigineuse de la demande est appelée à rendre indiscernable toute notion de gaspillage, mais sa récente législation se lance dans une implacable guerre contre les passoires thermiques, dont les nombreuses victimes ne tomberont sûrement pas sans combattre.

D’une part, le concept de gaspillage fallacieusement manipulé par les pouvoirs publics n’a pour objectif que de gruger contribuables et consommateurs d’un produit commercial – qu’on le veuille ou non, partout dans le monde, les KWh de toute nature ne s’achètent que sur des marchés aux formes administrée ou privée plus ou moins travesties, plus ou moins dévoyées, des KWh produits à perte n’existant nulle part – dont chaque client est à même d’optimiser sa facture, sans qu’on prenne prétexte de le faire pour lui, à l’aide d’une collectivisation de sa contribution forfaitaire forcée.

D’autre part, la guerre déclarée aux passoires thermiques par les émules de Cécile Duflot semble avoir pour devise « plutôt loger les humbles dans la rue qu’à l’intérieur de passoires thermiques ». Ce n’est pas par hasard que Philippe Mabille, le directeur de la rédaction de La Tribune, vient d’appeler « Macron à entendre le cri des futurs gilets jaunes du logement », se référant au cri d’alarme récemment lancée par celle qui a failli être Premier ministre, Véronique Bédague de Nexity.

Quant à la spéculation induite sur le prix de vente des passoires thermiques , elle ne peut qu’aggraver le caractère mortifère d’une politique énergétique dont le caractère irresponsable est toléré depuis trop longtemps.

La mission première d’un État qui se respecte n’est-elle pas de favoriser les conditions donnant à la population le meilleur accès possible aux éléments vitaux de son existence ? Or, après l’eau, la nourriture et la protection sanitaire, quel autre élément vital vient-il aujourd’hui à l’esprit d’un contemporain, sinon l’énergie ? Dans ces conditions, comment se fait-il que dans un pays aussi développé que le nôtre ne s’est encore trouvé aucune voix pour s’insurger contre la sournoise défausse du gouvernement de sa mission essentielle, au moyen de cette dilatoire rénovation immobilière ?

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  • Avatar
    jacques lemiere
    1 mars 2023 at 6 h 42 min

    « qui s’imposent » les mesures s’imposent toutes seules c’est comme on va être obligés de confiner..il existe une force qui impose les choses à not’ pauv ‘gouvernement..

    Et toujours pas de contre proposition politique.. imaginez un Amedé Trompette qui dise non avec moi pas d’interdiction des voitures thermiques..

    Il y AURAIT un débat à avoir sur l’ue..vous vous souvenez pas de distorsion de concurrence toussa… ce qui normalement devrait conduire à une libéralisation VRAIE du marché de l’électricté;.. A u lieu de cela on a un rêve de bureaucrate..un paradis pour connivent.. un écheveau de règles et d’accords..

    AH non que suis bête, comme dit jeancovici le nucleaire relève du régalien..

    Rappel, la lutte contre le changement climatique ,qui inclut toute mesure prise par un gouvernement pour peu qu’il la qualifie de mesure pour lutter contre le changement climatique, (de mémoire ou dans un cauchemar , il y a même eu une proposition je ne sais où pour essayer d’interdire de mettre ce genre de chose en question) est dans votre intérêt meme si vous ne vous en rendez pas compte..

    On serait tenté d’uitilser l’expression ditature climatique comme d’autres ont utilisé le terme de ditature sanitaire;.. sauf que…justement non… un bon climat ou une bonne santé c’est subjectif..

    • Ces français, toujours bon à passer leurs vacances aux Seychelles (comme Duflot) plutôt que d’isoler leur passoires thermiques ! Heureusement que l’État donne l’exemple en baissant le chauffage à l’Assemblée et au Sénat et en isolant ces bâtiments de l’extérieur !
      Pour ceux qui ne sauraient pas, les Immeubles hausmanniens dont les appartements sont achetés par nos élites sont exclus de l’obligation E, F, G. Raison : faut pas dénaturer la capitale en les rendant moches par l’isolation extérieure. Mais pour les autres, les gueux n’ont qu’à payer.

  • Les chiffres donnés sont ils bruts ou corrigés de l’augmentation en 15 ans du parc immobilier?

  • Les Français occupent entre 33 et 45 m2 en moyenne par individu, l’isolation coûte en moyenne entre 60 et 160€ par m2, donc entre 4000 et 14000€ par ménage. A 200€ économisés par an, ça fait entre 20 et 70 ans pour l’amortissement des travaux…

    • Avatar
      jacques lemiere
      5 mars 2023 at 10 h 44 min

      pas tout à fait…pour un individu…on doit spéculer sur le prix de l’ énergie , le rendement d’investissements concurrentiel.. …sur le temps d’occupation de la maison , ( j’ai 90 ans pas de gamins..) donc le marché de l’immobilier.. voire sa capacité à supporter un confort moindre..car on est supposé raisonner à « confort thermique constant »… .etc etc..et SURTOUT on doit ajouter spéculer sur la fiscalité…et la politique…
      hem…

  • Avatar
    jacques lemiere
    5 mars 2023 at 10 h 46 min

    il faut changer de politique , structurante, forcémenent structurante!!!!

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