Retraites : non, les syndicats n’ont pas gagné la bataille de l’opinion

Le soutien à la réforme souffre simplement de l’impopularité générale d’Emmanuel Macron, à un sommet depuis trois ans.

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Retraites : non, les syndicats n’ont pas gagné la bataille de l’opinion

Publié le 26 février 2023
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« Aujourd’hui, les syndicats ont gagné la bataille de l’opinion car ils ont montré une certaine responsabilité, par rapport au Parlement », a déclaré Renaud Muselier sur Public Sénat. Et pour cause, « à partir du moment où vous posez une question à celui qui est pour la réforme des retraites, il est absolument incapable de vous expliquer pourquoi, comment et qu’est-ce qu’il y a dedans », a ajouté le président de PACA.

Sans polémiquer sur ces propos par trop simplistes, il faut faire fi des raccourcis fallacieux et savoir raison garder sur l’état de l’opinion. Non seulement la plupart des Français ont fini par se pencher sur le contenu de la réforme -en dépit de sa technicité, ou d’une communication trop axée sur le totem de l’âge de départ alors qu’il aurait fallu parler d’années de cotisations-, mais les syndicats n’ont pas remporté la bataille de l’opinion sur les retraites, tant s’en faut.

Les Français sont conscients des évolutions démographiques et budgétaires du pays et de l’impasse dans laquelle nous nous trouvons pour financer l’État-providence comme lors des Trente Glorieuses. En 1979, quatre actifs finançaient une retraite, nous en sommes à 1,5 ; et demain il n’y aura plus assez d’actifs pour financer les retraites du moment même si la disparition des baby boomers, un jour, apportera quelques années de répit sur ce front financier.

Les Français ne sont pas massivement derrière les syndicats même si les concessions et tergiversations gouvernementales ont clairement retourné une partie de l’opinion initialement favorable au principe de la réforme. Le soutien à celle-ci souffre simplement de l’impopularité générale d’Emmanuel Macron, à un sommet depuis trois ans.

Cette réforme, nécessaire d’un point de vue budgétaire et comptable, mais insuffisante (il faudra de nouveaux ajustements d’ici trois ans) et non structurante (il eut fallu introduire un volet capitalisation collective obligatoire, sur le modèle de l’ ERAFP ou de la Caisse nationale des pharmaciens), aura in fine pâtit simplement de la convergence des anti-Macron et de la tradition bien française qui consiste à attaquer tout message uniquement pour s’en prendre au messager. En cette version nouvelle du mythe d’Hermès, tout ce qui émane du pouvoir actuel est nécessairement néfaste et le porteur du message est plus important que le contenant.

Pour les libéraux, le dilemme est d’autant plus redoutable qu’ils ne peuvent bien sûr soutenir l’approche collectiviste et marxiste des syndicats : il leur faut donc inlassablement asséner -ce que j’ai fait dans de nombreux médias depuis trois mois- que cette réforme, imparfaite tout autant qu’elle soit, doit être votée avant de préparer l’introduction d’un système plus diversifié entre répartition et capitalisation comme partout ailleurs en Europe. Peut-être faut-il être aussi plus fin dans la critique  légitime de la politique économique du pouvoir actuel : associer sa voix à celle des syndicats les plus extrémistes ou à la NUPES n’est pas le meilleur moyen de faire avancer notre pays.

Dans une de ses guerres picrocholines dont la France a le rabelaisien secret, la réforme des retraites a déjà été dénaturée, vidée de sa substance. La fin des régimes spéciaux n’est pas entière, les 13 milliards d’euros d’économie par an ne seront pas au rendez-vous (les mesures additionnelles coûteront au moins sept milliards par an), et il faudra attendre 2030 pour un plein effet de ces mesures : d’ici là, soit par symbolique politique (tourner la page Macron) soit par conviction et courage, une autre équipe devra de toute façon proposer une nouvelle réforme des retraites.

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  • Je ne comprends pas pourquoi les médias n’insistent pas sur le financement des syndicats sur les cotisations retraite et d’assurance maladie. Ces pourcentages prélevés sur de l’argent qui devrait servir à payer les retraites et à soigner les Français. C’est sûr que pour leur intérêt personnel, les syndicats ne veulent pas voir disparaître le régime actuel. Il suffirait de bien l’expliquer pour que les Français n’écoutent plus les syndicats. Mais je pense que les journalistes ont interdiction d’en parler.

    • Il me semble qu’ ils se l’ interdisent eux-mêmes, comme à propos de nombreux sujets.
      De toute manière les français n’ écoutent et ne lisent plus rien, ils n’ ont jamais été aussi peu mûrs pour la démocratie.

      • en effet force de l’habitude, confort intellectuel, biais intéressé.. si on ajoute dans le cas des retraites une façon de « syndrome de ponzi ».. je sais que ça va se casser la gueule mais après moi svp..

    • Les journalistes reçoivent tous des subventions et des avantages de la part du gouvernement.
      Parler du financement des syndicats attirerait trop l’attention sur les médias eux-mêmes…

  • on vient de cramer 800 milliards en 2 ans pour arriver a 3000 milliards de dette . charge sur la dette 35 milliards en 2021 et 50 milliards en 2022 . on se dirige vers 70 milliards pour cette année . mon opinion ? tout ce pataqués pour provisionner 15 malheureux milliards d ici 2035 ? non il faut absolument envoyer un signal positif aux marchés financiers pour continuer de beneficier des taux d interets « bas » comme celui de l allemagne . 160 milliards de cadeaux aux entreprises qui reversent 80 milliards de dividendes. je verrais bien une petite reforme de ce coté la….. en attendant les retraités ont bon dos

    -1
    • Le signal à envoyer aux marchés serait que la France sait établir un budget, sait ce que sont des entreprises privées et comment elles peuvent prospérer, sait ce que sont des dividendes et des plus-values, et que les condamner conduit aux misères à la soviétique, sait ce qu’est un système de Ponzi, sait que chaque euro compte et chaque milliard encore plus. Mais manifestement, ça n’est pas son peuple qui la soutiendrait sur ces points. Alors, elle va d’expédient en expédient, en bricolant des solutions comme Noé bricolait son arche : pour sauver quelques élus quand le déluge surviendra. Vous devriez vous former en finance, vous seriez moins facile à manipuler par les politiciens et les syndicalistes.

  • Un mythe chasse l’autre. Mais ça reste un mythe.
    Si demain Macron dégaine une loi anti-immigration, peu se souviendront qu’ils le détestent.
    Les Français ne sont pas plus derrière les syndicats qu’ils ne sont face à Macron.
    Ne leur déniez ni le droit ni l’intelligence de penser par eux-mêmes. Ils ne veulent pas des 64 ans. Depuis le début et dans les mêmes proportions.
    Ne les prenez donc pas pour des gamins. L’intelligence des Français est au contraire la base sur laquelle bâtir la pédagogie sur la capitalisation.
    Si vous n’y arrivez pas, deux hypothèses. Non excluantes. Vous n’êtes pas connu. Vous êtes mauvais pédagogue.

  • Vous avez parfaitement raison de présenter le problème ainsi . Le gouvernement n’aurait probablement pas soulevé pareil tôlé s’il s’était appliqué à défendre 44 années de cotisations pour tout le monde sans définition de point de départ et une harmonisation progressive des taux de cotisations du public sur le privé . Et en disant progressive je ne vise pas 10 ans mais 4 à 5 ans . Dans ces conditions nous n’aurions plus à rougir de cette maxime qui orne le fronton de nos écoles et de nos mairies ; Liberté , Egalité, Fraternité .

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