Renationalisation d’EDF : la Macronie prise au piège du climat social

Alors que l’État vient de franchir le seuil des 90 % du capital d’EDF fin janvier, le sujet aura été le théâtre de fortes crispations à l’Assemblée nationale.

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Renationalisation d’EDF : la Macronie prise au piège du climat social

Publié le 17 février 2023
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La majorité présidentielle a t-elle trouvé sa parade à l’obstruction parlementaire ? Alors que l’État vient de franchir le seuil des 90 % du capital d’EDF fin janvier, le sujet aura été le théâtre de fortes crispations à l’Assemblée nationale.

Le jeudi 9 février, les députés Renaissance, pourtant relativement majoritaires, ont purement et simplement quitté l’hémicycle du palais Bourbon en plein vote d’une proposition socialiste visant à refuser le démantèlement d’EDF et à étendre le bouclier tarifaire énergétique aux artisans et notamment aux boulangers.

 

EDF renationalisé

Après le Modem en octobre, LFI en novembre, Les Républicains en décembre et le RN début janvier, c’était désormais au tour des socialistes de voir leur niche parlementaire étudiée dans l’hémicycle.

C’est dans ce cadre qu’a été présentée une proposition visant à renationaliser EDF, une proposition qui a provoqué des remous dans les rangs majoritaires. Il faut dire qu’elle a reçu l’appui d’une bonne partie de l’opposition, de LFI au RN en passant par LR. La proposition a ainsi été adoptée par 205 voix contre une, celle du député Modem de Haute-Garonne Laurent Esquenet-Goxes. Le refus du groupe macroniste s’appuyait sur le fait que le texte aurait constitué un cavalier parlementaire, soit un texte sans lien avec la proposition initiale de la nationalisation d’EDF mais aussi et surtout un texte inconstitutionnel.

 

Une niche consensuelle

Conscients des difficultés posées par leur niche, les socialistes avaient préalablement accepté de mettre au placard une proposition inique sur la taxation des bénéfices exceptionnels des grandes entreprises, une proposition qui sera toutefois l’objet d’un amendement dans le cadre du vote sur les retraites. Que voulez-vous, quand un socialiste a une idée fixe…

Après être parvenus à faire voter une proposition de loi renforçant la protection des victimes de violences intrafamiliales et, à l’unanimité, la création d’une commission d’enquête parlementaire sur la vie chère dans les collectivités ultramarines, les choses se sont rapidement tendues s’agissant des repas à un euro pour tous les étudiants, qui échoua d’une seule voix avec le renfort de LR.

Cette tension est donc montée d’un cran lorsqu’il s’est agi de la proposition relative à EDF, dont la privatisation, comme celles des autoroutes ou de grandes entreprises comme La Poste ou la SNCF, n’en sont pas vraiment dans la mesure où il ne s’agit généralement que de concessions ou de transformations en sociétés à capitaux toujours publics et donc toujours détenues par l’État.

 

Une pratique récurrente

La pratique consistant à quitter l’hémicycle est quasiment devenue une coutume parlementaire tant elle est récurrente et participe de la grandiloquence parlementaire. On peut évoquer les différents incidents de séance qui agrémentent l’hémicycle, des invectives aux interprétations larges du règlement en passant par l’intrusion en 2009 de militants écologistes dans l’enceinte du palais Bourbon.

Contrairement aux idées reçues, ces départs ne sont pas davantage le fait de l’opposition que de la majorité.

La pertinence de la manœuvre est également quelque peu relative, comme en témoigne le cas du vote de la renationalisation d’EDF, pourtant adoptée. Alors pourquoi ?

 

Des députés sous pression

Les députés PS ont leur explication : celle de ne pas avoir à justifier auprès de leurs électeurs du refus de soutien aux professions artisanales par une mesure gourmande en argent public.

Une explication qui apparaît cohérente et qui révèle davantage encore la situation des députés Renaissance. Ces derniers sont déjà mis sous pression dans leur circonscription s’agissant d’un projet de réforme des retraites rejeté par 7 Français sur 10.

L’échec du réformisme social-démocrate

La révolution promise par Emmanuel Macron en 2016 montre une nouvelle fois ses faiblesses. Ce qui se voulait être une disruption de l’action publique s’est révélé être un jacobinisme technocratique alimentant un consensus loin de révolutionner quoi que ce soit.

La crise des Gilets jaunes et les différents mouvements sociaux ont déjà mis à mal les tentatives de réforme, parfois ambitieuses, d’un gouvernement qui est désormais pieds et poings liés par un climat social alimenté par l’inflation.

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  • Avec la renationalisation d’EDF, l’état renoue avec l’époque Mitterrand. Cela envoie un signal très fort aux investisseurs pour la réindustrialisation : venez investir chez nous et vous serez nationalisé. Rappelons juste que la désindustrialisation en France a commencé avec cette sombre période socialo-communiste.
    Ça va se bousculer au portillon pour investir, c’est sûr.

  • Je n’ai pas compris l’opposition. Ils veulent tous nationaliser EDF de toute façon? C’est juste une question de nomenclature, c’est ça?
    LREM: Entreprise privée à capitaux publics
    LFI RN: Entreprise publique

    • C’est sans doute de décider si les gaziers et électriciens sont fonctionnels fonctionnaires ou non. (Pour barrer « fonctionnels », on utilise la balise « strike » 🙂 )

    • Les mauvaises langues prétendent que le mot magique dans cette affaire, c’est démantèlement (risque de).
      Tout le monde veut bien « renationaliser » EDF – précisément capital détenu à 100 % par l’Etat. Mais certains soupçonnent un coup fourré du gouvernement : le retour d’Hercule !
      D’où l’amendement « nationalisation sans démantèlement ».
      Officiellement, le gouvernement s’est opposé à l’autre point : le bouclier tarifaire étendu – 18 milliards ?
      Un peu de patience et nous saurons. Comme dit Bouddha, le pied ne devient pied que lorsqu’il touche le sol.

  • Pourtant un député LFI dont j’ai oublié le nom avait tweeté que EDF engraisse ses actionnaires au détriment des conditions de travail de ses employés. Dans la même ligne que le tweet de Clémentine Autain, arrivée avec deux heures de retard et qui se plaignait que rien ne va plus depuis que la SNCF a été privatisée et terminait par « Comme en Angleterre renationalisons ». Une telle ignorance crasse, une telle inculture abyssale des thèmes économiques fait frémir chez des gens qui nous représentent et votent les lois.

    • Raoul Volfoni
      Parmi les absentionistes du mois de juin 2022 il y avait peut-être des gens avec une culture économique de bon niveau. Les Français ont les politiciens qu’ils méritent
      EDF verse des dividendes à l’Etat son principal fossoyeur

      -1
  • Nationaliser EDF n’a aucun sens si l’on n’en indique ni la raison, ni le statut de la nouvelle entreprise.
    Si la raison est d’en poursuivre le démantèlement en séparant le nucléaire, l’hydraulique, les EnR et le commercial, c’est aller tout droit à l’échec.
    Si le statut de l’entreprise est celui d’un EPIC, ce qui était le cas avant le passage en SA, c’est une bonne chose car ce statut laisse à l’entreprise sa liberté de gestion. Si c’est un service de l’Etat avec un budget voté année par année dans la loi de finances, c’est une catastrophe.

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