Malgré une économie performante qui lui a permis d’intégrer l’OCDE, le club des pays riches, la Colombie risque fort d’élire un président de gauche, Gustavo Petro, pour la première fois de son histoire. Il est vrai que la droite traditionnellement au pouvoir a échoué sur le plan de la lutte contre la corruption, la pauvreté et la violence.
Les socialistes ont décidément le vent en poupe en Amérique latine. La Colombie, dont l’économie est sans doute la moins étatisée du continent, est pour la première fois de son histoire, en passe d’élire un président de gauche, Gustavo Petro.
Un ex-guérillero rhabillé, pour ne pas effrayer le bourgeois, en social-démocrate opposé aux expropriations, sans trop convaincre, mais dont la plateforme qui lui a permis de remporter aisément le premier tour de la présidentielle, fin mai, est gratinée sur le plan économique : redistribution massive, dépenses publiques et impôts à foison, réforme agraire à marche forcée.
Il est vrai que Gustavo Petro a surfé sur le mécontentement massif des Colombiens en raison du bilan médiocre du régime en matière de lutte contre la corruption dans un contexte d’inégalités record et de confinement anti-Covid aux effets économiques et sociaux redoutables. Sans oublier une réforme fiscale mal ficelée, critiquée même par les libéraux et qui n’a été retirée il y a un an qu’après des semaines de contestations réprimées dans le sang. La droite est aussi discréditée par l’affaire dite des “faux positifs”, 4600 civils innocents exécutés en 2000-2008 par les forces de l’ordre et milices paramilitaires qui voulaient “faire du chiffre” dans leur lutte contre les diverses guérillas.
Bref, l’échec historique de la droite au premier tour de la présidentielle, où son candidat a obtenu à peine 23 % des voix, illustre une fois de plus qu’il ne suffit pas d’une classe d’entrepreneurs dynamiques et d’un cadre juridique et fiscal motivant, sur le papier, pour que l’économie de marché prodigue tous ses bienfaits. Sécurité pour les biens et personnes et lutte contre la pauvreté manquaient clairement à l’appel dans ce qui est pourtant la quatrième économie du continent et, avec le Chili, le seul pays d’Amérique du sud membre du club des pays libéraux, l’OCDE.
Le Trump colombien brouille les cartes
Le deuxième tour de la présidentielle, le 19 juin, est toutefois incertain contrairement aux pronostics initiaux, puisque Gustavo Petro devra affronter Rodolfo Hernandez, un candidat dont personne n’avait prédit l’ascension fulgurante ces deux derniers mois : un milliardaire que la presse surnomme “le Trump colombien”, mais inclassable politiquement au vu de son programme, mélange baroque de propositions “progressistes” et réactionnaires sur le plan sociétal, ou libérales sur le plan économique… mâtinées d’argent public infini et gratuit.
Mais il a bénéficié du ralliement de la plupart des autres candidats, notamment de la droite traditionnelle. Cette dernière, au pouvoir sous diverses incarnations depuis presque un siècle, a subi une défaite historique avec au premier tour 23 % pour son candidat. Ces ralliements en disent long sur la peur que suscite dans la classe moyenne le programme de Gustavo Petro.
Une tendance dans tout le sous-continent
S’il gagne malgré tout, la Colombie rejoindrait la cohorte des pays de la région dont l’exécutif est à gauche (sans que ceux à droite suivent pour autant une politique économique nettement moins étatiste pour autant).
Alors que la gauche n’était presque plus aux affaires ces dernières années, hormis dans les trois dictatures (donc avec peu de chances d’alternative lors d’un scrutin honnête et transparent) Nicaragua, Cuba, Venezuela, elle compte désormais un exécutif classé à gauche en Bolivie, Pérou, Chili, et Argentine. Seuls l’Équateur, le Paraguay et l’Uruguay n’ont pas de chef d’État se réclamant du socialisme ou de la social-démocratie, en sus d’un Brésil où le président d’extrême droite, Bolsonaro, est menacé par le revenant et ex-guérillero Lula pour le scrutin de cet automne. Tout cela a de quoi faire frémir le Prix Nobel et grand écrivain libéral du sous-continent, Mario Vargas Llosa.
Je vais prendre l’argent de ceux qui en ont pour vous le donner, élisez moi…
C’est une recette qui marchera dans tous les pays du monde.
Ça se termine quand le pays est complètement desindustrialisé et ruiné.
À ce moment-là les socialistes peuvent rester au pouvoir en instaurant une dictature.
Et pour ces pays la corruption ne disparaît pas quelque soit le régime.
Question corruption; on est mal. Mais on le voit pas, on est trop avachis.
La Colombie tentée : oui tentation est le bon mot . Et comme dans les bonnes histoires (paraboles pour les intimes) , ça comment dans l exaltation et ça finit dans le cauchemar .
« ça commence dans l exaltation et ça finit dans le cauchemar »
Ça me rappelé des trucs de ma vie mais vous n’y faites certainement pas allusion.
Je n’ai pas compris votre commentaire ( je passe à côté de la référence que je soupçonne d’être biblique )
@aero oui désolée… en fait c est l histoire du serpent qui propose une belle pomme et ça se termine boutés hors du paradis. En fait pour faire rapide : le truc qui paraît hyper séduisant de prime abord conduit à la cata alors que le truc qui semble difficile impossible et casse-tête peut être la meilleure décision à prendre. Pour citer qqn ce n est pas le chemin qui est difficile mais difficile qui est le chemin.
Merci pour cet article. Oui, voir la Colombie attirée par le socialisme a quelque chose de désespérant (car Gustavo Petro, c’est carrément du mélanchonisme hardcore et non de la “social-démocratie”), car ce pays a toujours démocratiquement rejeté le marxisme, les crimes des FARC et autres guerilleros n’ayant pas contribué à en donner une bonne image auprès des habitants (euphémisme).
Ceci dit, contrairement à la France, les élections en Colombie se font dans le bon ordre : les législatives ont eu lieu avant la présidentielle. La gauche n’a pas la majorité au Parlement. S’il arrive au pouvoir, Gustavo Petro devra composer avec les partis de centre et de droite…
Lula n’a pas été guérillero mais syndicaliste.
J’ai oublié d’ajouter que la confusion vient surement que c’est Dilma Rousseff qui a été guérillera.