Marine Le Pen sur l’Union européenne : l’isolationnisme qui vient

La politique européenne et russe de Marine Le Pen va se heurter à des problèmes diplomatiques qui vont bloquer ses projets.

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Marine Le Pen sur l’Union européenne : l’isolationnisme qui vient

Publié le 20 avril 2022
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Marine Le Pen n’a pas caché sa volonté de créer une Europe des nations qui reposerait sur les États membres de l’Union européenne (UE), une politique générale proche de la ligne directrice du groupe européen CRE (conservateurs et réformateurs européens) qui regroupe un certain nombre de partis eurosceptiques comme les conservateurs de Droit et Justice polonais ou les libéraux conservateurs tchèques de l’ODS tous deux au pouvoir. Cette conception de l’Europe repose sur la coopération entre États plutôt que sur une approche plus fédérale.

Néanmoins quand on regarde le détail du programme de Marine Le Pen, on se rend compte qu’elle va plus loin. Sur un certain nombre de points, elle risque de s’isoler et de se priver d’alliés potentiels.

Le rejet des partenariats avec les alliés européens traditionnels

L’un des éléments clés du programme de Le Pen est la sortie du commandement intégré de l’OTAN. La logique voudrait que cette sortie se fasse en faveur du développement d’une défense en Europe. Sauf que Le Pen met en avant que : « Paris mettra fin aux coopérations structurantes engagées depuis 2017 qui ne correspondent pas à sa vision d’une défense souveraine et retirera son soutien à la revendication allemande d’un siège permanent au Conseil de Sécurité des Nations-Unies. »

De même : « L’Italie, enfin, est un acteur stratégique dynamique, tour à tour partenaire et concurrent avec qui la relation actuelle n’est pas satisfaisante. »

C’est ainsi une méfiance envers les partenaires européens qui domine, une politique qui contredit la volonté affichée de développer des partenariats stratégiques.

Ainsi en rejetant l’atlantisme, mais en étant méfiante des partenaires militaires et industriels, Le Pen va avoir du mal à impulser l’Europe des nations.

On pourrait penser qu’elle pourrait compter sur les pays comme la Pologne ou de la Hongrie. Rien n’est moins sûr.

La question de la Russie chez Le Pen : tensions à venir avec l’Europe centrale

S’il y a un point sur lequel le gouvernement polonais et la majorité des partis du CRE sont intransigeants, c’est la position vis-à-vis de la Russie. Pour des raisons à la fois historiques et politiques, le gouvernement polonais mène une ligne dure (pour ne pas dire la plus dure d’Europe) contre la Russie. Cette posture a conduit à l’annulation d’un sommet du groupe de Visegrad avec la Hongrie d’Orban (portant l’un de ses principaux alliés politiques en Europe) à cause de la position trop modérée de ce dernier vis-à-vis de Moscou.

Nul doute que les relations seront encore plus tendues avec le RN sur ce point-là, Le Pen souhaitant un rapprochement avec Moscou une fois la guerre en Ukraine finie. Cette position n’est pas une spécificité de la candidate du RN, les dirigeants français (y compris Macron) ayant démontré une volonté d’avoir, a minima, un partenariat avec la Russie.

Mais les présidents français ont cherché à maintenir de bonnes relations avec l’OTAN (Nicolas Sarkozy) ou l’UE (Emmanuel Macron et Jacques Chirac) pour équilibrer leurs relations avec la Russie. Là où Marine Le Pen semble montrer un intérêt vis-à-vis de Moscou qui semble moins s’inscrire dans le soutien du reste de l’Europe.

On remarquera que la Hongrie de Viktor Orban, même si critique envers certaines sanctions ou mesures, refuse de mettre en cause sa loyauté envers l’OTAN. Elle a accepté le déploiement de forces de l’Alliance sur son territoire en mars.

Marine Le Pen affirme dans son programme de défense prôner la realpolitik. Si elle veut vraiment suivre cette logique, elle va devoir revoir un certain nombre d’éléments pour y parvenir.

On ne peut toutefois que déplorer que les deux candidats du second tour aient une position plus que critiquable vis-à-vis de l’UE. Macron souhaite renforcer l’interventionnisme économique européen, risquant d’enfermer encore plus l’Union dans la bureaucratie. Le Pen choisit une approche isolationniste. Aucun des deux candidats ne semble prendre en compte les avis des autres États membres. Il faut espérer que ces programmes restent du discours électoraliste.

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    Esprit critique
    20 avril 2022 at 9 h 35 min

    « … La logique voudrait que cette sortie se fasse en faveur du développement d’une défense en Europe. ….. »
    Les fantasmes de chacun ne sont pas « LA » logique.
    L’Ukraine et la Russie ne sont ni dans l’UE, ni dans L’OTAN, Nous n’avons pas d’accord militaire d’asistance avec l’un ou l’autre. La France est le seul pays de L4UE qui possede une force de disuasion nucléaire. Partons de ces faits et de ces réalités, pour reflechir au sujet.
    Tout raisonnement sur des prémices fausses conduit a des absurdités.

  • L’UE est devenue une bureaucratie de type soviétoïde qui légifère sur le moindre boulon et est infestée de pastèques qui veulent continuer de tuer l’économie de marché libre par la déplétion énergétique « verte ».
    Il n’y aura jamais d’UE au sens USA, tout ce qu’on aura c’est une UErss, soit 01% de technocrates non élus qui ajoutent textes absurdes sur textes absurdes.
    En aucun cas il ne peut y avoir de défense « européenne » non plus, même dans les années 80 les coopérations ont aboutit à des canards boiteux (eurofighter) et les compétences et le savoir-faire militaire se sont perdus depuis.
    .
    Le gros problème de la France, c’est son oligarchie socialio-pastèque qui a tué l’économie à coup de taxes et régulation. Pour commercer avec les autres, il faut commencer par avoir quelque chose à donner en échange et si les Polonais et les autres continuent dans cette hystérie guerrière ils n’auront bientôt plus d’énergie, donc d’économie, et possiblement la guerre sur leur territoire.
    Anyway, Macron va très probablement être élus et nous allons continuer à descendre et l’UE aussi. L’heure est très grave, la « construction européenne », n’est plus qu’une machine devenue aussi folle que la bobocratie qui est aux manettes.

  • Quand on voit comment l’Italie nous a piqué des marchés, juste à cause d’une mauvaise gestion de notre service public, ou comment l’Allemagne (Pro Poutine mais chuuuut, faut pas dire que Merkel ou Schroder sont des anciens agents kgb) souhaite avoir un impact au niveau mondial… On se dit que peut-être, elle n’a pas si tort que ça… 😉

  • Les commentaires sont fermés.

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Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

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Aurélien Duchêne est consultant géopolitique et défense et chroniqueur pour la chaîne LCI, et chargé d'études pour Euro Créative. Auteur de Russie : la prochaine surprise stratégique ? (2021, rééd. Librinova, 2022), il a précocement développé l’hypothèse d’une prochaine invasion de l’Ukraine par la Russie, à une période où ce risque n’était pas encore pris au sérieux dans le débat public. Grand entretien pour Contrepoints par Loup Viallet, rédacteur en chef.

 

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