Huitième frein à l’entreprise : une éducation inadaptée

L’éducation française est en effet totalement inadaptée aux besoins d’une économie moderne

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Huitième frein à l’entreprise : une éducation inadaptée

Publié le 31 mars 2021
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Par Claude Goudron.

Elle sera certainement la réforme qui prendra le plus de temps. L’éducation française est en effet totalement inadaptée aux besoins d’une économie moderne et présente  deux problématiques : l’Éducation nationale et la formation professionnelle.

L’Éducation nationale

Faible niveau

Le dernier classement Pisa publié fin 2019 n’est pas bon. Il place la France entre le vingtième et le vingt-sixième rang des 79 pays présents aux enquêtes et ce malgré des sommes colossales englouties. Le pays est par ailleurs reconnu comme étant l’un des moins égalitaires !

Jusqu’au collège ce n’est pas l’adéquation aux besoins de l’entreprise qui pose problème mais la baisse régulière du niveau de connaissances de base qui va handicaper la suite du cursus éducatif de nos enfants.

À partir du lycée, les résultats sont encore pire. En effet, l’étudiant est supposé alors se préparer à définir son plan de carrière et là c’est souvent n’importe quoi.

Les besoins de l’entreprise ne sont jamais pris en considération et l’Éducation nationale oriente sa jeunesse vers des filières fermées : sur 1 380 000 étudiants inscrits à l’université en 2019, 37% l’ont été en Lettres et sciences humaines là où il n’y a plus de débouchés, contre 25 % pour les Sciences où il y a pénurie !

Le nombre d’écoles d’ingénieurs ne cesse de diminuer. Elles sont aujourd’hui 201 qui forment 37000 ingénieurs ce qui classe le pays en nombre/habitant au-delà de la dixième place en Europe. Pire, dans le classement par performance on trouve seulement deux écoles d’ingénieurs sur cinquante, la première étant à la 17ème place, contre dix pour l’Allemagne et 17 pour la Grande-Bretagne qui truste les trois premières places !

Selon l’OCDE la France est également très mal placée en termes de compétences techniques : elle se situe à la 21ème place sur 24 et à la 22ème place en niveau linguistique.

Le budget de l’Éducation nationale s’élève à 53 milliards d’euros. Les Français peuvent dire qu’ils n’en ont pas pour leur argent, et comme toujours c’est le mammouth administratif qui pose problème.

En dépit d’un encadrement par l’État, les écoles privées sont plus performantes du primaire à l’université. D’ailleurs les défenseurs de l’école publique envoient très souvent leurs propres enfants dans le privé où les résultats sont incontestablement meilleurs.

Politisation omniprésente et retour d’expérience

Moins flagrante dans les petites classes, la politisation de l’Éducation nationale est malheureusement une réalité qui remonte à l’après-guerre avec la soviétisation prônée par une soi-disant élite intellectuelle.

J’avais 18 ans. Nous avions un professeur de Français qui ne cachait pas son adhésion au communisme : chaque texte étudié faisait soit l’apologie du communisme soviétique, soit une critique systématique du capitalisme et donc des État-Unis.

Dans le programme il était prévu que chaque étudiant propose un thème, prépare un exposé sur le sujet choisi et le présente devant la classe entière.

Lorsque vint mon tour, un peu provocateur je l’admets, j’annonce mon thème : « comparaison du niveau de vie URSS/USA ». L’enseignant l’a refusé au motif que ses convictions lui intimaient de ne pas accepter un tel sujet. J’ai refusé d’en changer puisqu’il était convenu que nous étions libres du choix, et ajouté qu’il pouvait me coller un zéro. Finalement et par obligation, il accepta ce sujet. Je n’ai jamais mis autant de détermination pour préparer mon dossier, il est vrai avec le soutien de mon père. En appui de mes arguments, j’avais apporté tous les articles de presse de l’époque qui confirmaient une évidence souvent occultée en France.

Le professeur a reconnu le travail que j’avais fourni mais a refusé de le noter en raison de ses convictions, et a demandé alors à la classe de le faire. Il a été surpris de mon excellente note. Mon seul regret est que j’aurais dû exiger qu’il me note lui-même.

De nos jours, l’affaire de Sciences Po Grenoble confirme que c’est toujours le cas !

Des programmes d’un autre âge

Cette politisation ne peut donc que se retrouver dans l’élaboration des programmes scolaires. L’entreprise est considérée comme l’exploitation ultime de l’Homme par l’Homme. L’économie n’est quasiment pas enseignée jusqu’au Baccalauréat et lorsque c’est le cas, c’est pour faire de Piketty une idole et de Jean Tirole un libéral infréquentable.

Il ne faut donc pas s’étonner que nos responsables politiques, issus pour la plupart de l’ENA, aient mis la France dans une situation de quasi faillite.

Ignorance des besoins de l’entreprise

Entre un décret pro-entreprise et un décret pro-social, la décision va toujours tendre vers davantage de social même au risque de tuer l’entreprise.

L’industrie française est dans un état lamentable. Depuis François Mitterrand, chaque président, poussé par une population abreuvée de fake news économiques, a considéré l’entreprise comme source principale de financement de cette dérive sociale de du pays.

La formation professionnelle à la dérive

Avec un budget de 35 milliards d’euros, soit les deux-tiers de celui de l’Éducation nationale qui gère 16 000 000 d’élèves et étudiants, la formation professionnelle en France est un véritable fiasco.

Les personnes concernées par la formation professionnelle entrent dans deux catégories :

  • Environ 460 000 apprentis en quasi temps plein.
  • 32 % des salariés pour un temps partiel (donnée OCDE) et une moyenne annuelle de 50 heures, soit un équivalent temps plein d’environ 240 000 personnes.

Ce sont donc 700 000 personnes pour un budget extravagant financé par l’entreprise, soit 50000 euros par an par participant… Et pour quel résultat ?

Pour comprendre cette situation il faut lire le rapport Perruchot sur l’argent des syndicats, tellement explosif qu’il a été interdit de publication sous peine de 15 000 euros d’amende et un an de prison. C’était une fabuleuse façon de financer syndicats ouvriers et patronaux, c’est d’ailleurs lorsque je l’ai appris que j’ai donné ma démission de la présidence de la CPME.

Conclusion

Il est indispensable de favoriser davantage l’enseignement privé et retirer aux seuls professeurs la mainmise sur les programmes d’éducation en y faisant participer les entrepreneurs.

Comme en Allemagne, il convient d’interdire toute propagande politique au sein de l’Éducation nationale sous peine de licenciement.

La formation professionnelle doit être optimisée et son budget réduit à un maximum de dix milliards par an.

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  • Fuite des cerveaux ? Normal car l’Éducation Nationale s’évertue à former dans toutes les régions dans des spécialités dont ON n’a pas besoin d’autant de diplômes. Ces têtes bien faites ont deux choix : partir à l’étranger ou, après une période chez Pôle-Emploi, subir une formation, dans une autre spécialité (et démarrer en bas de l’échelle).

  • Vu le sujet, c’était forcément avant 1989. Pour ma part, j’ai connu ces ignominies bien plus tôt : j’ai quitté le lycée en 1981 et sans en arriver aux extrémités décrites dans l’article (on n’a jamais refusé de noter mes provocations), les cours qui ne relevaient pas de disciplines mathématiques ou scientifiques étaient une propagande anti-occidentale éhontée.

    • Précision : ce n’était pas en France mais en Belgique, mais les maux décrits sont similaires à part qu’il existe ici une liberté de choix plus grande. Et ce n’était pas dans l’enseignement d’état mais dans ce qu’on appelle le libre subventionné, c’est dire la profondeur du problème.

    • Maintenant même les cours de sciences de 6ème sont de la propagande écolo, c’est ce qui me convainct de quitter l’Europe.

  • Comme pour les hôpitaux on le dit, on le crie depuis des années et au lieu d essayer d’améliorer les choses nos politiques diviseurs ne font rien d autre que de continuer à laisser dégrader nos systèmes de santé et d ‘éducation tout en continuant à vivre confortablement toute leur vie, élus ou pas réélus, sur nos impôts

  • Non, le principal frein à l’entreprise, c’est le clientélisme électoral. J’ai vécu à l’école des expériences semblables à celle de l’auteur, je comprends. Cependant, quand l’auteur en appelle à « interdire toute propagande politique », il en oublie, non seulement que les professeurs sont aussi des électeurs, mais aussi qu’ils constituent à peu près le seul bloc d’électeurs qui vote de manière homogène et prévisible.

    Le fait que certains professeurs soient communistes ne me gêne pas. Ce qui me gêne, c’est qu’il n’y

    • … c’est qu’il n’y ait pas d’autres professeurs pour présenter le point de vue opposé. Je pense donc que le gros problème, c’est le caractère endogène du recrutement des professeurs. Ouvrons les métiers de l’enseignement à des gens venus d’autres horizons, et au bout d’une vingtaine ou trentaine d’années, les choses changeront petit à petit. C’est le temps qu’il faut pour que les premiers jeunes élèves accèdent à des postes à responsabilité, donc tout sera forcément très lent en matière d’éducation.

  • votre historiette éclaire le dogmatisme des enseignants ; en effet à l’époque que vous relatez nous entendions ces mêmes enseignants affirmer qu’ils n’avaient pas vocation à former des  » producteurs pour l’industrie  » ( comprendre pour les patrons ) et les choses n’ayant fait qu’empirer au fil des ans nous achetons à la Chine dite populaire nos besoins !!!! H16 nous le rappelle : ce pays est foutu !!!!

  • 4 ans dans le privé obligatoire pour les prof, les hauts fonctionnaires (et pas dans des boites du CAC40), les politocards !

  • Je ne remet en aucun cas en cause votre analyse.

    Mais il y a aussi un autre problème : le peu de perspectives et les salaires médiocres proposés dans les secteurs d’avenir ou hautement qualifiés / spécialisés. (Socialisme oblige).

    Il y a presque 40 ans, j’ai été diplôme « ingénieur en traitement du signal » par le « ministère du développement durable ». (J’ai franchement rigolé quand j’ai reçu l’attestation sur un bout de listing informatique).

    Débouché presque nul pour un domaine aussi « inutile » et perspective de salaire en conséquence. Je me suis tourné vers l’informatique : facile, demande importante et bonne rémunération.

    Je le regrette aujourd’hui : je fais du traitement du signal pour des projets personnels et le fun. L’état utilise bien mal les capacités et les vocations, mais ce n’est pas mon problème. J’aurai du émigrer mais c’était moins dans l’air du temps il y a 40 ans et je croyais encore naïvement à la Frrrance.

  • M. Gérard Aschiéri, fondateur du syndicat FSU, principal syndicat de l’Éducation Nationale, a déclaré textuellement :

    « L’Éducation Nationale n’est pas là pour fournir des esclaves au patronat »

    Tout est dit.

  • 79 % des enseignants ont voté Hollande lors de ses présidentielles… no comment

  • Certes, l’éducation nationale n’est pas « adaptée » à la formation de « travailleurs/entrepreneurs ». Mais ces mêmes entreprises, ne sont pas non plus honnêtes.
    Quand il est question de distribuer des dividendes toujours plus importants aux seuls financiers, sans lacher un seul centime de hausse salariale. Pourtant ces propriétaires/actionnaires se contente de percevoir une rente sans participer d’un iota à la production de celle-ci.
    Quand les salaires font tout sauf augmenter (et je ne parle pas de ceux touchés par les dirigeants, ou les cadres supérieurs), mais que le coût de la vie ne cesse d’augmenter (comme l’indice boursier), que font les entreprises ?
    Rien, elles non plus ne sont pas adaptées, ni morales. Quand on fonde une économie globale sur la seule consommation, avec une logique d’assurance (collectivisation des risques, individualisation des profits), pleurer sur les défauts des autres est juste de la lâcheté.
    Que les entreprises paient enfin les salariés correctement (15 € net minimum), sans augmenter les prix des services et produits. Que ces mêmes entreprises soient aussi plus égalitaires. Que ces mêmes entreprises soient plus honnêtes et respectueuses des lois (dissimulation fiscales, oublis comptables, travail non déclaré, stagiaires permanents, confusion de patrimoine, critères d’embauche datant du moyen âge, etc.).
    Oui l’éducation nationale doit évoluer, mais tant que les personnes n’évoluent pas aussi, particulièrement dans les entreprises, rien ne se fera.

    • Bonjour Graph-ix

      votre réponse est-elle un « poisson d’avril » on pourrait le penser, sinon je pense que vos professeurs étaient majoritairement communistes comme le dénonce mon article.
      Le mal français est l’inculture économique de ses citoyens, il vous faudrait quelques heures de cours de rattrapage que je n’ai malheureusement pas le temps de vous proposer.
      je vais tout de même vous répondre succinctement:
      Les dividendes versées aux actionnaires sont le carburant de l’entreprise dans laquelle ils vont investir, sans eux pas de création ni de développement.
      elles sont également une prime de risque qui se doit d’être rémunéré, vous semblez oublier que beaucoup d’investisseurs y ont laissé des plumes.
      Quand au salaire vous faites une erreur de jugement, en effet c’est le salaire brut (qui fait le prix de revient d’un produit) et non le net.
      Ce n’est pas de notre faute si les prélèvements obligatoires sont beaucoup plus élevés que dans d’autre pays et si vous réclamer un taux horaire minimum net à 15 € sachez qu’il serait largement supérieur si nous avions les mêmes charges qu’en Allemagne!
      Alors à vous de voter correctement pour un candidat libéral et vous aurez satisfaction.
      je tiens aussi à vous signaler que je me sens agressé lorsque vous traitez tous les patrons de malhonnêtes, certes il y en a mais c’est une infime minorité.
      Les malhonnêtes sont plus nombreux dans le monde politique qui vous trompe en vous vendant un « produit » gauchiste totalement inadapté.

      C. GOUDRON

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Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

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