Malheureux comme Piketty en Suisse

En économie internationale, la richesse de l’un fait celle de l’autre. Il ne tient qu’aux Européens d’imiter la Suisse en se détournant des leçons de Thomas Piketty.

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Thomas Piketty by Central European University - Credit Daniel Vegel (CC BY-NC-ND 2.0)

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Malheureux comme Piketty en Suisse

Publié le 17 janvier 2020
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Par Ferghane Azihari.
Un article de l’Iref-Europe

Face à Darius Rochebin, l’économiste-star explique le succès européen par la social-démocratie. C’est notamment sur ce constat que Piketty fonde, dans son ouvrage, le raisonnement selon lequel nous ne devrions pas avoir peur de dépasser le capitalisme.

Le raisonnement est le suivant : l’Europe est un continent riche et social-démocrate. Sa richesse ne peut s’expliquer que par la social-démocratie. Thomas Piketty utilise donc la corrélation entre le niveau de prélèvements obligatoires et la richesse qui prévaut dans les social-démocraties européennes pour en déduire une causalité. Problème, partout en Europe, le processus d’enrichissement et de réduction de la pauvreté a précédé l’instauration de l’État-providence (figures 1 et 2)

Figure 1 : taux de pauvreté dans certains pays sélectionnés 
Figure 2 : dépenses sociales dans certains pays sélectionnés (% PIB)

Comment expliquer la prospérité de la Suisse ?

Autre point remarquable, l’économiste botte en touche quand le journaliste suisse lui suggère que la confédération s’est enrichie grâce à la sobriété fiscale. Est-ce parce que le pays est riche qu’il peut se permettre d’être un paradis fiscal ? Ou est-ce parce qu’il est – selon les standards officiels – un paradis fiscal qu’il est devenu riche ?

La figure 4 rappelle qu’il fut un temps où la France et la Suisse avaient un PIB par habitant similaire. Une première divergence apparaît logiquement pendant la Seconde Guerre mondiale. Mais elle ne suffit pas à tout expliquer. L’écart se creuse à partir des années 1980. Or, coïncidence, c’est aussi à ce moment que se creuse un écart important en matière de dépenses publiques (figure 3).

Figure 3 : dépenses publiques en France et en SuisseFigure 4 : PIB par habitant (PPP) en France et en Suisse

La concurrence fiscale en Suisse, l’anti-modèle Piketty ?

La Suisse est donc l’anti-modèle Piketty. Elle ne se contente pas d’avoir une fiscalité faible au regard des standards de l’OCDE. Son système politique repose sur une concurrence fiscale entre cantons et localités, ce qui tend à mettre un frein à la croissance des prélèvements obligatoires dans ce pays. Cette concurrence est attestée par la décentralisation fiscale, que l’on peut traduire en chiffres en examinant la part de la fiscalité globale attribuée aux échelons centraux et locaux (tableau 1).

Comparaison de la part de la fiscalité dévolue aux échelons centraux et locaux en France et en Suisse (2017)

piketty

Note : Cette superposition de trois souverainetés fiscales rend la fiscalité suisse particulièrement difficile à comprendre pour les non-initiés. En 2014, les recettes fiscales des pouvoirs publics selon le modèle SF1 se sont montées à environ 131 milliards de francs, qui se composent comme suit :
– Confédération : 60,6 milliards de francs ;
– Cantons : 43,5 milliards de francs ;
– Communes : 26,8 milliards de francs.

 

La Suisse doit-elle être 20 à 30 % plus pauvre, comme le suggère Piketty ?

À la cinquième minute de l’interview, Thomas Piketty avance de manière péremptoire qu’une Suisse davantage fiscalisée serait 20 à 30 % plus pauvre. Il admet donc qu’un pays qui augmenterait ses prélèvements fiscaux serait moins prospère. Voilà qui devrait rendre les Suisses plus enthousiastes vis-à-vis du modèle socialiste !

Mais que gagneraient les Suisses et les Européens à ce que le pays le plus riche d’Europe le soit beaucoup moins ? Thomas Piketty rejoue ici la théorie du jeu à somme nulle. L’enrichissement de la Suisse se ferait au détriment du reste de l’Europe.

C’est en raison de ce schéma que beaucoup arguent qu’il ne serait pas possible d’exporter le modèle fiscal suisse à l’ensemble du continent européen (alors qu’il a prévalu jusqu’à l’éclatement de la Première Guerre mondiale).

 

L’Europe peut-elle redevenir un paradis fiscal sans porter atteinte à la richesse de la Suisse ?

ll n’est pas pertinent de considérer la concurrence fiscale comme un jeu à somme nulle. Si l’Europe était restée un paradis fiscal, les Suisses auraient bénéficié du fait que leurs partenaires commerciaux seraient plus riches et dotés de plus grandes capacités productives ainsi que de plus grandes capacités d’épargne et d’investissement au bénéfice des industries et des consommateurs helvètes.

Tout comme les épargnants suisses profiteraient de plus d’opportunités d’investissements à l’étranger. En économie internationale, la richesse de l’un fait celle de l’autre. Il ne tient donc qu’aux Européens d’imiter la Suisse en se détournant des leçons de Monsieur Piketty.

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  • « Voilà qui devrait rendre les Suisses plus enthousiastes vis-à-vis du modèle socialiste ! »

    Il y a une idée reçue qui revient souvent et qui veut que toute la population Suisse serait turbo-libérale.

    Mais il faut regarder les résultats des votations, la dette des cantons et discuter avec les gens.

    1/3 de la population soutient en général le modèle socialiste.
    La grande majorité des Suisse Romands veulent plus de socialisme.

    Le meilleur exemple est le canton de Neuchatel qui est en gros une france mignature.

    Les pastèques ont déjà eu une belle victoire aux dernières élection fédérales et soyez assurés que les propositions seront les mêmes qu’en Europe: politique énergétique idiote, marxisme et taxes à gogo.

    Bref, comme le dit souvent un ami Suisse, heureusement qu’il y a les Suisses Allemands pour bien voter.

    • Oui, bien heureusement qu’il y a les Suisses Allemands! Apres avoir vecu en France en Suisse et en Belgique je me posais la question, pourquoi les francophones sont tous plus ou moins socialo communistes? Quelqu’un a une explication? Je suis moi meme anglophone.

    • @machin ….l’un de mes enfants, pas totalement débile chef acheteur chez J.J., s’est installé et a pris la nationalité Suisse …..il y a de nombreuses années.
      Ce que vous décrivez est peut-être votre souhait, mais malheureusement vous affirmez ce que vous »IGNOREZ SUREMENT  » de la réalité.
      Si d’aventure la situation métropolitaine fut en suisse ce qu’elle est depuis deux-ans et demi chez nous il est bien exact qu’une votation eu renvoyé jupiter chez alex et la cougar dans un ephad sinon aux assises.
      Lisez ou relisez le livre « l’utopie de Tomas MOORE  » et vous découvrirez la fadaise de vos affirmations.
      en conclusion identique aux camelots vous affirmez le bon vote, celui ….
      vous m’épuisez par votre bêtise.
      A.EINSTEIN disait : deux choses sont infinie, l’univers ce que je n’ai pas réussit à démontrer et la bêtise humaine! sur la deuxième je n’ai aucune certitude.

    • C’est la vertu de la démocratie directe.
      En votant pour leur propre intérêt sur des lois précises, des tas de non-libéraux aboutissent à une situation libérale. Ces votes massif éliminent les minorités militantes et les corporations comme les syndicats en plus de ralentir la diarrhée législative.
      Les « progressistes » Suisses essayent bien d’imiter ceux des autres pays mais le résultat n’est de très loin pas aussi grave qu’ailleurs, il est même possible que le balancier mondial change de sens avant que la Suisse soit enfoncée trop loin.

    • Le socialisme est le cancer de la société et les métastases ont contaminé tous les pays…

  • ce type est une burne… je ne comprends pas pourquoi on continue a propager son message idiot

    • et moi, je ne comprends pas pourquoi le camp du bien ne l’empêche pas de parler : normalement, on ne doit pas taper sur sa femme, si il tape trop fort, ça peut aboutir à un féminicide…

    • ce n’est pas un économiste mais un idéologue…

    • Noël !
      Tout gratuit et un poney en plus payé par les riches.

    • Mais non. C’est même très malin. Son objectif personnel comme tous est de maximiser son profit. Or, il a certainement bien compris que pour vendre beaucoup de livre il faut qu’il plaise à la majorité. Donc, de son point de vue, il maximise son profit.

  • Bonjour.
    Confondre corrélation et causalité est une érreur de débutant.
    Plus une population est riche, plus ils y a de la ‘laine’ à tondre ;).

    • la social democratie a échoué partout en europe… c’est très clair, meme en suède..
      c’est pourtant pas difficile a observer, l’etat providence ne produit qu’une chose===>>> de la dette

      • Pas besoin d’être une sociale démocratie pour produire de la dette. Les Us en produisent encore davantage, en finançant des baisses d’impôts à crédit.

        • oui mais avec un chomage a 3%

        • Les USA sont une social-démocratie comme les autres, seulement un peu moins violente que les autres candidats au suicide socialiste.

          La politique de baisse des impôts sans baisse des dépenses publiques est une impasse dont Trump ou son successeur devront sortir tôt ou tard, alors que 6 dollars de dette ajoutée ont produit seulement 1 dollar de PIB supplémentaire en 2019. Plus la sortie de l’impasse sera tardive, plus ce sera douloureux pour les USA et le reste du monde. En attendant, sous l’afflux temporaire d’argent gratuit, c’est la fête.

        • et puis c’est un état fédéral…

        • @TIGROU666 Henry Kissinger disait :le dollars est notre monnaie mais votre problème.
          L’autre problème des français est l’ignorance de leur connerie…..inculture, cultivé en serre par tous le politiques les plus corrompus de la terre.

        • les US sont aussi socialistes

      • Pourtant, la Suède est un modèle économique très intéressant.
        Ce pays impose bien moins les forces vives que les USA et même la base fiscale est beaucoup plus large, l’impôt y est moins progressif. Le statut de fonctionnaire n’existe pas et le chèque éducation met en concurrence les écoles. Ils ont bien compris d’où venait l’argent et ce qui engendrait les dérives des « machins » étatisés.
        .
        Les vieux travers socialistes reviennent toutefois et le monde médusé assiste au grand remplacement suicide de leur civilisation.

        • La Suède, c’est 50% de dépenses publiques malgré l’introduction d’une certaine concurrence dedans. Pas de quoi s’enthousiasmer. D’ailleurs, le travers que vous soulignez est le fruit de ce haut niveau de dépenses publiques.

          • J’ai parlé de « modèle économique ». La Suède est 15ème pour la liberté économique malgré les dépenses, la France 72ème. Ils n’ont quasi pas de dette et de chômage grâce à une économie assez libre qui produit beaucoup de richesses et d’emplois.
            Notez que c’est en train de changer, les trois derniers exercices sont fortement négatif, je n’ai pas regardé en détail les causes, mais il semble que l’immigration leur coûte très cher.
            .
            Mais j’aime bien me servir de la Suède pour montrer que les USA ne sont absolument pas un « enfer turbo-libéral » bien au contraire. Malgré une différence de 20% dans les dépenses la Suède est quand même mieux classée pour la liberté économique que les USA.

        • C’est normal : il suffit d’adjoindre à quelque chose l’adjectif « social » pour lui faire commettre un suicide à court ou moyen terme :
          – Le catholicisme social ? Suicide du catholicisme.
          – La démocratie sociale ? Suicide de la démocratie
          – L’économie sociale ? Suicide de l’économie
          Etc.

        • @guillaumep , les pays vertueux sont de confession protestante les autres…..!

      • et aussi la suppression des libertés et la décadence morale!

    • C’était ma première réaction aussi.

      Et si on tond trop court avant l’hiver, et que la brebis en crève, on n’aura plus rien l’année suivante…

  • Quand les abrutis voleront, celui-là se retrouvera en orbite géo-stationnaire…

  • Bah , c’est un économiste a succès ,il n’a pas besoin d’être un bon économiste comme il n’est pas nécessaire d’être un bon ecrivain pour vendre des bouquins ,une pub bien faite suffit.

  • Il est vrai que Thomas Piketty n’a jamais mis les pieds dans la moindre PME ou multinationale.
    Rémunéré par le contribuable depuis le premier jour de sa carrière sans avoir à se préoccuper d’où sort l’argent qui le fait vivre, il ne cache pas son désintérêt pour ce pan vulgaire de sa discipline qu’est la commercialisation de biens ou de services marchands.

  • Les théories faites à partir de corrélations au pif, sans approfondissements sont bidons.
    L’effet cigogne, cf https://www.mercialfred.com/insolite/effet-cigogne
    (j’aime bien les divorces dans le Maine vs la consommation de margarine) ^^

    • merci du lien et il confirme la bêtise ainsi que l’ignorance crasse de gens, ceux qui se sont précipité pour acheter des actions LA française des jeux.

  • Il faut compter sur la réceptivité de tous les gôchos qui sont devenus légions car ils ont compris qu’ils pourraient/pouvaient mettre la main sur l’argent des autres et Piketout a écrit encore et encore dans ce sens.
    La pub de son éditeur (SEUIL) surtout aux USA a fait de lui un auteur à succès (Le capital au XXIe siècle vendu à plus de 2,5 millions d’exemplaires).
    Il dispose aussi de deux fers de lance aux USA en ses confrères enseignants à l’université californienne de Berkeley Emmanuel Saez et Gabriel Zucman. Les médias mettent régulièrement en avant D. Cohen, M. Aglietta ou encore O. Balchard, E. Duflo, A Beassy Queré, JP Fitoussi, J. Pisani-Fery, H Sterdiniack sans oublier la brochette d’Alternatives Economiques des Duval, Chavagneux …
    On n’entend même plus le Nobel Jean Torile. Citez donc des économistes libéraux contemporains en France ayant autant de présence médiatique.

  • Le capitalisme conduit à la prospérité et le socialisme à la pauvreté. Le succès de Picketty montre l’incroyable attrait de la pauvreté.

  • Que ce Piquetout aille vérifier ses thèses au Vénézuela!

  • Je remarque que les populations francophones sont tous plus ou moins socialo communistes. C’est le cas en France, en Wallonie et meme en Suisse. Pourquoi donc? Quelqu’un a une idée?

  • approche macroeconomique de l’économie… pas inutile..mais mortifère en ce qui concerne la liberté..

    en premier lieu pour une personne qui a envie de changer un truc car il pense avoir mis en évidence une relation causale dans une corrélation.. pourquoi vouloir obtenir tel objectif économique..

    par exemple faire en sorte de maximaliser le gdp n’est pas un objectif si indiscutable que cela que cela..

    il faut avoir un but..de nature macroeconomique..

    • L’approche macroéconomique est totalement inutile parce que fausse. Généraliser l’économie c’est comme généraliser le climat, quel est l’intérêt de connaitre le vitesse moyenne du vent ou la température moyenne de la terre, absolument aucun et ne économie c’est la même chose. Son seul intérêt réside dans le manipulations statistique des escrocs au pouvoir et de leur complice genre piketty.

  • « une Suisse plus fiscalisée serait 20 à 30 % plus pauvre. Il admet donc qu’un pays qui augmenterait ses prélèvements fiscaux serait moins prospère. »
    Le socialisme c’est la misère.
    Cela conforte ce bon vieux Winston :
    « Le vice inhérent du capitalisme est une répartition inégale de la richesse. Le vice inhérent du socialisme est une égale répartition de la misère. »

    34% du PIB suisse est constitué de dépenses publiques.
    54% du PIB français est constitué de dépenses publiques.
    (en 2011 sur le graphique 3)
    61.000$ de PIB par habitant en 2011 en Suisse dont 34% soit 20.740$ => 40.260$ par habitant.
    39.500$ de PIB par habitant en 2011 en France soit 21330$, qu’on soustrait à 39.500 => 18.170$ par habitant.
    Le socialisme : c’est la misère.

    • Le socialisme : c’est la misère, en plus d’un belle escroquerie. Affiché 39500$ de PIB/habitant, quand en fait, il n’atteint pas 18200$, environ un SMIC brut pour l’époque.

  • Les commentaires sont fermés.

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