Après le Brexit, le libre-échange renaît au Royaume-Uni

Jusqu’à présent, la Grande-Bretagne a signé 63 nouveaux traités commerciaux, y compris avec l’Union européenne.

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Brexit by Duncan Hull(CC BY 2.0)

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Après le Brexit, le libre-échange renaît au Royaume-Uni

Publié le 2 février 2021
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« Libre et dans le monde » était la Une du Spectator du 23 juin 2016, le jour du référendum du Brexit. La couverture montrait la Grande-Bretagne comme un papillon brillant sortant d’une petite boite à l’effigie de l’Union européenne.

Je mentionne cette Une pour deux raisons.

Première raison

D’abord parce que si j’étais Américain, j’aurais pu facilement avoir eu l’impression que le Brexit était la version britannique du trumpisme – fait de nostalgie, de nataliste et de protectionnisme. Ce point de vue, propagé tant par les opposants que par les supporters de Trump, trouve une expression quasi hystérique dans les pages du New York Times, qui publie régulièrement des articles montrant à quel point la Grande-Bretagne est devenue un enfer raciste.

En fait, tous les libertariens que je connais, à une excentricité près, ont voté pour quitter l’Union européenne. Il y a longtemps que nous l’avons démasqué comme étant un racket dirigiste, corporatiste et autoritaire.

La condition pour que le Royaume-Uni intègre le marché européen était que nous abandonnions le libre échange avec les pays les plus distants – notamment ceux du Commonwealth, comme le Canada et la Jamaïque, qui avaient un accès illimité à nos marchés. Pendant les années 1970, nous avons été obligés d’appliquer les tarifs douaniers communs par étapes et, avec ça, les différentes barrières non douanières conçues pour soutenir les industries continentales liées aux politiciens.

La conséquence du départ de l’Union européenne est qu’il nous est désormais possible de commercer librement avec tous les continents, y compris naturellement avec l’Europe.

Deuxième raison

Elle nous ramène au dessin du papillon. Au moment où j’écris ces lignes, la Grande-Bretagne a signé une série impressionnante de 63 nouveaux accords commerciaux, dont un avec l’Union européenne.

Ce n’était pas dans le script des anti-Brexit. Ceux qui ont mené campagne pour rester dans l’Union pensaient que la Grande-Bretagne serait plus faible et plus introvertie en dehors. Le Premier ministre conservateur Boris Johnson, alors maire de Londres a passé toute la campagne du référendum à évoquer une Grande-Bretagne insulaire et flamboyante. Mais le camp adverse ne l’a jamais cru, convaincu que la seule raison possible de voter la sortie était l’hostilité à l’immigration.

Boris pensait bien ce qu’il a dit. L’année dernière, au musée maritime de Greenwich, il a fait le discours sur le marché libre le plus engagé que j’aie jamais entendu de la part d’un responsable politique. Il voyait le Brexit comme une chance pour le pays, ayant offert au monde Adam Smith et David Ricardo, de retrouver sa vocation mondiale :

L’humanité a besoin d’un gouvernement quelque part qui est au minimum prêt à défendre ouvertement la liberté d’échanger, un pays prêt à enlever ses lunettes de Clark Kent et à sauter dans une cabine téléphonique pour en sortir la cape au vent, tel un champion infatigable du droit des populations de la terre à acheter et à vendre librement.

Quatre semaines après ce discours, le monde s’est confiné pour se protéger du coronavirus. Assez bizarrement, les horreurs prédites par les partisans de l’Union européenne se réalisèrent alors, mais pas pour la raison qu’ils attendaient. La Grande-Bretagne a en effet souffert d’une récession, d’une augmentation du chômage et d’une fermeture des frontières.

Bien que les confinements aient asphyxié l’activité économique et provoqué l’effondrement des échanges commerciaux, il y a toutes les raisons d’être optimiste sur le Brexit.

L’accord passé avec l’Union européenne lui donne ce quelle a toujours voulu – et ce que les opposants ont d’ailleurs toujours considéré comme impossible – c’est-à-dire le libre échange sans l’union politique. Plutôt que d’accepter les règles de l’Union européenne en échange d’un accès préférentiel à son marché, comme le voulait l’ancienne Première ministre conservatrice Theresa May, Johnson a insisté sur une autonomie réglementaire totale.

Cela implique en effet que certaines industries du service feront face à de nouvelles barrières lorsqu’ils vendront à l’Union européenne, mais leurs yeux sont déjà tournés vers des horizons plus lointains. Dans tous les cas, les libre-échangistes comprennent que les barrières font toujours plus de tort au pays (ou à l’union douanière) qui les impose. Il y a une vue mercantiliste, presque pré-moderne, dans la décision de l’Union d’ouvrir ses marchés comme une faveur à des alliés sélectionnés, plutôt que de voir cela comme une stratégie de croissance.

Certains des 62 autres traités commerciaux, confirment les accords existants avec la promesse d’aller bien plus loin lorsque le calendrier le permettra. D’autres comme celui avec le Japon, sont déjà plus aboutis que ce qu’offrait l’UE. Quelques-uns, notamment avec l’Australie et la Nouvelle Zélande, sont nouveaux étant donné que Bruxelles n’avait pas de traités avec ces pays.

La Grande-Bretagne demande également à rejoindre le Partenariat Trans-Pacific – ou CPTPP – Traité que les États-Unis pourraient réintégrer. Certes, le Royaume Uni n’est pas un pays du Pacifique (sauf techniquement grâce à sa souveraineté sur les Iles Pitcairn), mais nous avons des liens exceptionnellement étroits avec nombre de membres existants, tels que l’Australie, Singapour et le Canada. Au même moment, le Royaume Uni négocie avec l’Inde, l’union douanière du Mercosur ainsi que les monarchies du Golfe.

Cependant, les pourparlers les plus importants sont avec les États-Unis, notre partenaire principal et notre plus grand investisseur. Un accord commercial de l’Atlantique-Nord aurait pu se conclure il y a des décennies sans le protectionnisme de l’Union européenne, en particulier dans l’agriculture.

Les électeurs sont rarement enthousiastes pour le libre-échange en particulier pendant cette période, alors que leur psychologie a été affectée par l’épidémie, les rendant plus prudents et repliés sur eux-mêmes. Mais pour les années à venir, la reprise économique sera l’objectif politique suprême. Un accord commercial ambitieux entre la Royaume-Uni et les États-Unis est le moyen le plus évident.

Traduction Contrepoints.

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  • Article très rassurant, je regarde de près ce que devient la Grande Bretagne après le Brexit, pour voir si les prédictions des anti se réalisent (je n’y crois pas, et ces accords en sont un début de preuve)

    • J’espère sincèrement qu’ils vont réussir à créer un « Singapour aux portes de l’Europe »… Ca nous ferait bien les pieds… 🙂

  • Exact, ce texte n’est valable que pour les pays de l’Europe du nord, pour lesquels on se demande ce qu’ils font encore dans cette construction, alors que les autres ont bien besoin de ce garde-fous.

  • Le projet Global Britain est intéressant mais beaucoup moins que le traité Trans pacifique.
    Celui est évidemment avant tout une gigantesque zone de libre échange qui offre de bonnes possibilités aux pays adhérents de commercer librement et prospérer.
    Il est également une façon intelligente d’organiser les pays libres face a l‘émergence de l’impérialisme US et surtout Chinois. C’est une nouvelle alliance de pays non alignés.

    Je voudrais revenir sur l’UE, même si ce n’est pas le sujet principal de l’article – mes excuses aux lecteurs et à M Hannan, un véritable bonheur à lire, comme d’habitude.

    Le bloc économique représentait 34% des échanges mondiaux dans le milieu des années 1980. Cette portion est a moins de 18% à l’heure actuelle.
    Fortress Europe est vraiment devenu un territoire anti business, pro normes, protectionniste et dirigée au niveau national comme supra national par des personnes qui n’ont aucune appétence ou compétence pour le libre-échange. Les conséquences sont absolument désastreuses.
    Prenez l’approche EU sur la vaccination. Si l’objectif d’éviter le chacun pour soi comme précédemment sur les matériels PPE était et est parfaitement louable, l’exécution a été une infamie. L’industrie pharma a été traitée depuis le début comme un ennemi duquel tirer les meilleurs prix est l’objectif principal. Au contraire des US ou UK, ou les normes ont été restreintes, les responsabilités partagées (liability clauses de 2020 inimaginables en temps normal) et ou les investissements ont été co-financés par le contribuable (comme en temps de guerre).
    C’est cette approche qui a été à l’origine de tout le fiasco final.
    La leçon qu’en a apparemment tirée UVL c’est que l’industrie pharma dans son ensemble ne voulait pas exécuter ses ordres, refusant de comprendre qu’entre sortir 10 litres de sérum et produire des centaines de millions de doses, il y a un certain savoir-faire, rare, et de nombreuses difficultés. N’importe qui ayant la moindre expérience industrielle peut le concevoir. Au lieu d’avoir une approche logique et de s’approprier les difficultés rencontrées pour mieux aider à l’effort global, elle a désigné AZ comme bouc émissaire.
    Pire, d’un diffèrent avec une société privée, elle a étendu le conflit au niveau international, en visant évidemment un pays souverain, le RU, mais pas seulement, le Japon et le Canada sont tous deux sur le qui-vive. Elle vient à elle toute seule de dessiner un énorme panneau ‘Don’t do business here’ visible de l’espace, et de violer tous les accords internationaux en vigueur. A la moindre difficulté, le message est, comme d’habitude depuis le traité de Lisbonne, l’UE se passe d’honorer ses engagements et traités, pour mieux sombrer dans l’arbitraire.
    Je ne souhaite pas l’échec du projet européen. Mais à défaut de repenser et reformer drastiquement la structure de pouvoir actuel, à commencer au minimum par rendre UVL responsable de son fiasco, il n’y a aucun avenir.
    Samedi, la CE a dit ne pas divulguer qui a pris la décision de rompre les traités. Elle a dit ne pas avoir à le faire. Hier, la CE a dit que seul le Pape ne se trompe jamais (d’une délicatesse pour la République d’Irlande…). Enfin, hier soir, UVL a nommé son commissaire aux commerce international comme responsable_ méprisable. Je ne sais pas vous mais elle ressemble furieusement quand même à notre folle du Poitou, en version Prusse.
    Que diable fait elle a la tête de 447 millions de personne !!

    J’en viens à ce qui me dérange le plus : pour que ces reformes aient lieu, il faudrait que les européens soient au courant. Or, le peu d’espace médiatique qui est donné à cette affaire fait froid dans le dos, y compris CP.
    Cela fait penser aux troubles en Allemagne lors des célébrations du nouvel an 15/16, à Cologne notamment. De peur d’attiser les haines ethniques, la maire et le chef de la Police ont préférer tenter l’Omerta et la propagande. Leur peur était la meilleure façon d’obtenir ce qu’ils voulaient éviter.
    Ainsi de l’UE, qui est dirigé par excès de précaution avec la peur comme moteur principal.
    Il est essentiel de porter un regard sans concessions, de cesser les mensonges, et de reformer en urgence. On n’en prend pas le chemin, bien au contraire.
    Il est tristement ironique de constater que l’espace européen est de plus en plus insulaire et paranoïaque, coupé du reste du monde.

  • C’est un point de vue très intéressant mais combien sont prêts à y prêter attention quand on sait que les opposants au Brexit appellent « The Telegraph » le daily crap? C’est regrettable mais c’est ainsi.

  • Comment traduit on « wishfull thinking » en français ? Parole verbale ou voeux pieux ? Difficile de croire que ce « little englander » puisse se présenter comme un libéral ?

  • Pour écrire un tel texte, il n’y a qu’une seule explication : Daniel Hannan a dû être menacé sur sa droite lors des dernières élections par un candidat UKIP du parti dirigé par l’inénarable Nigel Farage très populaire dans la Costa geriatrica du sud-est de l’Angleterre.

  • Une autre vision de l’accord dans cet article :
    Brexit : ce que contient l’accord entre le Royaume-Uni et l’UE

    https://www.contrepoints.org/2020/12/28/387487-brexit-ce-que-contient-laccord-entre-le-royaume-uni-et-lue

    • On le connait très bien cet article. Lire les commentaires qui le suivent est aussi instructif…

      Son auteur semble considérer que les britanniques auront les mêmes difficultés et lourdeurs réglementaires et administratives que l’EU (!!) pour gérer ses exportations et importations au prétexte que cela fait longtemps qu’il n’ont plus à gérer cela (lol). Il oublie que l’UK a continué à échanger avec le monde entier dont le Commonwealth de manière privilégiée et que ses échanges avec l’EU étaient déficitaires.
      C’est donc l’EU qui aura plus à souffrir d’une disparition des échanges avec l’UK.
      En outre, l’administration UK est moins lourde et rigide que celle de l’EU. Elle a bcp plus de chance de s’adapter rapidement à la nouveauté car elle, au moins, n’est pas obligé de négocier avec 27 pays pour modifier ses règlements et agir.

      Quand l’auteur de votre article essaie d’effrayer avec la disparition du programme Erasmus, il oublie de préciser que ce sont les étudiants du monde entier qui se précipitent pour étudier dans les facs anglaises. Les étudiants de l’EU que ces facs étaient obligés d’accepter payant 8-9000£ de scolarité annuelle seront remplacés par des étudiants « oversee » (càd tous ceux en dehors des îles britanniques) à 15000-25000£ de scolarité annuelle. C’est sûr que ces facs vont pleurer!

      Quand à la réglementation du travail UK, les anglais feront bien ce qu’ils veulent. Les promesses n’engagent que ceux qui y croient.
      Tout le reste est du même tonneau: faire croire que le brexit sera très difficile pour l’UK.

  • Les commentaires sont fermés.

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