Par Alexandre Massaux.
Dans le cadre de la réforme constitutionnelle russe, les députés de la Douma ont voté un amendement autorisant l’actuel président russe Vladimir Poutine à se représenter pour l’élection présidentielle en 2024. En effet, la Constitution russe actuelle ne permettant d’accomplir que deux mandats consécutifs, la Douma vient de réinitialiser les compteurs. Cette réforme constitutionnelle, tout comme cet amendement ne sont néanmoins pas surprenants et s’inscrivent dans la pratique politique russe.
Un pouvoir poutinien solide en Russie
Vladimir Poutine a construit son appareil administratif et politique en cooptant du personnel à partir de deux sources qui lui sont les plus fidèles à savoir le clan de Saint-Pétersbourg et les Siloviki, deux groupes dont il est lui-même issu. Comme le rappelle Frédéric Pons dans sa biographie sur Poutine, le rôle des services de sécurité est d’autant plus important que les trois-quarts des hauts cadres russes exerçant le pouvoir politique et économique sont issus de ceux-ci.
Aux services de sécurité, s’ajoute la dimension « clanique » du pouvoir en Russie. Le premier cercle de Poutine est au début composé de Saint-Pétersbourgeois : natif de cette ville, c’est aussi là-bas qu’il fera ses premiers pas en politique en tant que conseiller d’Anatoly Sobchak à la mairie de Saint-Pétersbourg dans les années 1990.
Ce cercle saint-pétersbourgeois est, à l’instar de Poutine, composé en bonne partie de juristes, offrant au pouvoir russe une bonne connaissance des mécanismes juridiques. Il n’est ainsi guère surprenant que ce maintien de Vladimir Poutine au pouvoir se fasse à travers une réforme constitutionnelle plutôt que par d’autres méthodes plus radicales comme des coups d’État. Ces derniers ayant joué un rôle non négligeable dans l’histoire de la Russie du XXe siècle comme le montre le coup d’État de Lénine en octobre 1917 ou la tentative ratée en 1991.
Le capitalisme de connivence en Russie : force et faiblesse de Poutine
Les années 1990 vont être marquées par une prise de contrôle des oligarques. Ces derniers, pour beaucoup d’anciens apparatchiks du régime soviétique, et donc les mieux informés, vont prendre le contrôle de la plupart des richesses du pays via des conglomérats et le clientélisme. En 2000, ces structures oligarchiques comptaient pour 60 % du PIB russe. Les anciens dirigeants soviétiques avaient réussi à reprendre le contrôle de l’économie avec la corruption généralisée.
La mise au pas des oligarques par Poutine au début de ses mandats a ainsi été bien accueillie au sein de la population russe et a été un facteur de popularité pour le président russe. Néanmoins, l’utilisation du système oligarchique par Poutine à ses fins personnelles et la persistance de la corruption endémique dans le pays furent aussi sources de contestation et ce tout particulièrement en période de récession économique.
Un étatisme bien ancré en Russie
Conséquence de ce capitalisme de connivence, l’opinion générale des Russes vis-à-vis de l’économie de marché est négative. Selon une étude du Pew Research Center la Russie est le seul pays européen de l’ex-bloc soviétique à désapprouver ce système en majorité : 51% des Russes rejettent en effet l’économie de marché. Cette situation permet à une gouvernance étatiste de reprendre de plus en plus de poids.
La Russie est un pays avec une histoire reposant sur le développement d’un pouvoir central qui a cherché à contrôler un territoire gigantesque. L’admiration connue de Vladimir Poutine pour le Tsar Pierre le Grand, l’un des fondateurs de la Russie impériale, est un des éléments qui explique sa politique. De même, le tournant manqué vers le modèle libéral dans les années 1990 fait que la population russe reste méfiante envers ce modèle de société et se raccroche à un modèle de gouvernance plus étatique. Une dimension sur laquelle joue Poutine et qui explique sa popularité.
Avec une telle situation, il est facile de comprendre que la réforme constitutionnelle russe n’est pas une surprise. Néanmoins, le problème se pose d’un enlisement économique et politique du pays. Et ce d’autant plus que Vladimir Poutine n’a pas toujours eu cette politique : début des années 2000, il a fait preuve d’un pro-occidentalisme important en étant le premier dirigeant à affirmer son soutien au président Bush après les attentats du 11 septembre. De même, à cette époque le président russe possédait des conseillers libéraux comme Andrei Illarionov, désormais membre du think tank libertarien CATO Institute. Plusieurs occasions ont ainsi été manquées.
J’étais sûr qu’il allait se débrouiller pour rester au pouvoir après 20 ans, j’ai gagné. Un dictateur ne se retire jamais!
Vous ne savez absolument pas ce que pensent les Russes et on constate votre dégoût de la démocratie! Mais qu’on donc les français contre ce genre de régime? L’opinion d’un homme d’affaire nous est indifférente, surtout s’il en tire profit. Poutine a déjà provoqué 2 guerres en envahissant la Géorgie et l’Ukraine.
adulé ou détesté , il ne laisse pas indifférent ; et son intelligence ne peut être nié ; et lui n’a pas tergiverser pour fermer ses frontières pour contrer le coronavirus ; il protège son pays , lui ;
En Russie c’est la force qui donne le pouvoir, en France ce sont les atermoiements et la ruse.