Le socialisme, allié objectif de Donald Trump ?

La radicalisation du parti démocrate pourrait reconduire assez facilement le président des États-Unis pour un second mandat.

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Trump, Pentagon leaders honor 9/11 victims By: Chairman of the Joint Chiefs of Staff - CC BY 2.0

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Le socialisme, allié objectif de Donald Trump ?

Publié le 20 juin 2019
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Par Frédéric Mas.

Donald Trump a lancé avant-hier la campagne pour sa réélection au poste de président des États-Unis en 2020. Devant plus de 20 000 partisans à Orlando en Floride, il a enchaîné les provocations et les promesses tout en rappelant le message qui l’a porté pendant l’élection de 2016, « Make America Great Again. » Malgré son image déplorable à l’étranger, l’hostilité d’une grande partie de l’électorat progressiste, des médias comme d’une partie de l’establishment républicain lui-même, Donald Trump pourrait être réélu en 2020 non grâce à son bilan propre, économiquement ambigu, mais par la maladresse de ses adversaires.

La base du parti républicain est acquise à Donald Trump, qui lui fait crédit d’une réforme fiscale révolutionnaire n’ayant pas d’équivalent depuis l’arrivée de Ronald Reagan au pouvoir. En conséquence, Trump n’a pas de concurrents sérieux pour l’instant à l’intérieur de son propre parti, car personne ne veut prendre le risque de s’aliéner la sympathie des militants.

Surenchère à gauche

C’est dans le camp adverse que le soutien à Donald Trump pourrait paradoxalement être le plus fort : après l’élection de 2016, plusieurs figures radicales venant de la gauche du parti démocrate sont devenues centrales. Alexandria Ocasio-Cortez, considérée comme l’étoile montante du parti démocrate, enchaîne les bourdes et les dérapages. Dernièrement, elle a créé le tollé en comparant les camps de rétention pour migrants à des camps de concentration. « Une présidence qui crée des camps de concentration est fasciste », a-t-elle déclaré face aux élus républicains ulcérés.

Le 12 juin dernier, c’est le sénateur du Vermont et candidat à l’investiture démocrate Bernie Sanders qui a déclaré croire aux vertus du « socialisme démocratique », énumérant une liste de droits sociaux qu’il serait à la charge du gouvernement fédéral de garantir. Bien placé dans les sondages à l’investiture du parti démocrate, Bernie Sanders est toutefois talonné par Elisabeth Warren, qui, pour prendre de la distance avec l’ère Obama, s’attaque avec véhémence au Big Business.

Remise en cause du capitalisme libéral

Il y a, au cœur de la crise d’identité démocrate, une remise en cause du capitalisme libéral, lui-même partie intégrante de l’identité américaine. L’élection de Donald Trump en 2016 a révélé l’extrême division et polarisation culturelle du pays. Et la défiance à l’endroit du libre-échange s’est généralisée à droite comme à gauche. Du côté républicain, le protectionnisme est redevenu plausible face à la concurrence jugée déloyale et une immigration accusée de tirer les salaires vers le bas.

Du côté démocrate, ce sont les inégalités sociales et la sclérose d’un establishment politique jugé insuffisamment ouvert à la diversité qui sont devenues prioritaires. L’ancien consensus qui régnait entre démocrates et républicains sur l’alliance entre démocratie représentative et capitalisme libéral est en train de vaciller avec le fractionnement de la société américaine, et cela malgré les bons chiffres de l’économie américaine comme de sa croissance qui booste celle du monde entier.

Le socialisme au sein du parti démocrate

Le socialisme défendu par les leaders du parti démocrate les plus en vue est suffisamment radical dans ses fondements comme dans ses promesses pour mobiliser les électeurs de Donald Trump et démobiliser les électeurs modérés à gauche comme à droite. Bernie Sanders se présente comme un continuateur du New Deal, attirant à lui les louanges des franges anticapitalistes plus extrémistes du parti, mais aussi les électeurs les plus jeunes.

Ce socialisme est populaire dans une fraction de l’électorat progressiste, mais suscite la détestation d’une frange non négligeable d’un électorat qui l’associe naturellement à une idéologie anti-américaine, contraire à ses fondements moraux et politiques valorisant la liberté individuelle et la culture de l’effort, y compris au sein du monde ouvrier acquis aux postures politiques du président sortant. Face à la grande mobilisation des électeurs démocrates contre tout ce que Donald Trump représente, le socialisme défendu par ses leaders pourrait avoir le même effet, mais pour les électeurs républicains : mobiliser les troupes et faire de la réélection du président une nécessité pour revenir à l’Amérique de toujours.

Devant la radicalisation du parti démocrate et l’absence de concurrents sérieux à droite, Donald Trump pourrait donc être assez facilement réélu. Il pourrait toutefois y avoir deux obstacles majeurs à ce possible boulevard. D’abord la candidature centriste de Joe Biden, qui pourrait séduire l’électorat populaire et ouvrier que ses concurrents à l’investiture ont abandonné pour les classes protégées et les minorités. Ensuite Donald Trump lui-même, histrion imprévisible qui alterne les gaffes idiotes et les coups de génie. À ce stade, rien n’est encore gagné.

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  • Pour les Alexandria Ocasio-Cortez et autres Bernie Sanders s’ils sont amoureux/nostalgiques du communisme, ce qui est leur droit, ils peuvent émigrer vers les pays où cette réussite est époustouflante. Pourquoi vouloir imposer un changement radical à l’Amérique alors que ses fondements sont tout autre. Je peux comprendre l’aigreur et la jalousie suscitées chez certains car ils constatent leur insuffisance et leur échec économique, mais le vol légal n’est pas très honorable et duper les électeurs comme c’est le cas en France n’est pas non plus acceptable. S’ils sont attirés par le socialo-communisme, il reste encore quelques enclaves qui résistent et auraient bien besoin de leurs soutiens et compétences à moins que la richesse produite par les autres soit fort utile pour financer leurs errances.

    • ce qui serait interessant c est de savoir pourquoi Sanders ou AOC arrivent a avoir une audience notable et un succes electoral (Bernie Sanders avait reussit a mettre en difficulte Clinton alors qu elle avait le soutien de tout l establishment democrate)

      Pourquoi Bernie Sanders qui a pres de 70 ans est si populaire parmi les jeunes ? imagine t on ici des jeunes faire campagne pour Gaudin ?

      • Beaucoup de raisons mais la mainmise des gauchistes intersectionnels sur le complexe éducation / média / « culture » (Hollywood et réseaux sociaux) est un facteur fort. Les jeunes sont littéralement entourés de signaux gauchiasses.
        Accessoirement endettement et mal-emploi des jeunes diplômés pour cause de diplômes bidons, + immigration tirant les salaires vers le bas pour les non-diplômés (OUI ça profite aux consommateurs, je sais, allez le dire aux gars qui doivent faire 2 boulots pour payer leur loyer.)
        Le génie du gauchisme étant de faire chérir à ces jeunes c..s les causes dont ils lamentent les effets.

    • C’est justement ce que les socialistes font semblant de ne pas comprendre. Ils pourraient très bien vivre et s’épanouir dans une société libérale; mettre leurs biens en commun avec les plus pauvres; monter des associations caritatives et même décroitre comme veulent le faire certains écolos. Et ceci au sein d’un pays capitaliste : rien ne l’empêche.
      En revanche l’inverse n’est pas possible : impossible d’être libre dans le carcan socialiste.
      Le rêve socialiste américain est à portée de main pour ses promoteurs, ils peuvent le mettre en œuvre dans l’Amérique de Trump à l’intérieur même du turbo-capitalisme qui laisse aux gens un plus grand choix quant à la dépense de leurs revenus.
      Visiblement, ce n’est pas ce qu’ils font : contrôler leur propre vie ne leur suffit pas, ils veulent contrôler celles des autres.

      • Contrôler la vie des autres est indispensable aux socialistes pour que leurs lubies économiques et sociétales soient financées… par les autres justement. Cela permet aux élites socialistes de se placer au-dessus et de ne pas avoir à subir directement les conséquences néfastes de leur doctrine.
        Mettre ses biens en commun, décroître, s’investir dans des associations caritatives…etc C’est sympa mais rarement compatible avec le niveau de vie affiché par la plupart de nos « progressistes ». Et voir son niveau de vie baisser alors que celui de ceux qui ne partagent pas vos crédos augmente… cela leur est particulièrement insupportable.

    • « S’ils sont attirés par le socialo-communisme, il reste encore quelques enclaves qui résistent et auraient bien besoin de leurs soutiens et compétences à moins que la richesse produite par les autres soit fort utile pour financer leurs errances. »

      Oui, ils peuvent venir en France !

  • Dans une démocratie qui fonctionne mal, médias vendus, absence de projets rationnels, inculture galopante, C’est la médiocrité de certains qui mets en lumière les autres. Cela n’a rien de spécifique aux USA, La France qui crève doucement, en est le plus terrible exemple.

  •  » Der Sozialismus — als die zu Ende gedachte Tyrannei der Geringsten und Dümmsten, der Oberflächlichen, der Neidischen und der Dreiviertels-Schauspieler — ist in der Tat die Schlussfolgerung der modernen Ideen und ihres latenten Anarchismus: aber in der lauen Luft eines demokratischen Wohlbefindens erschlafft das Vermögen, zu Schlüssen oder gar zum Schluss zu kommen.  »

    Nietzsche, fragments posthumes, 1885

    ( Le socialisme, en tant que pensée menée à terme de la tyrannie des minimalistes et des imbéciles, des superficiels, des jaloux et des acteurs incomplets, est en réalité la finalité des idées modernes et de leur anarchisme latent;
    mais dans l’air tiède du confort démocratique se dissous la possibilité de parvenir à des résultats, et- plus encore- celle d’ atteindre son but. )

  • Les résultats économiques de trump sont ambigu Mr Mas ?
    De facto tous les résultats économiques sont ambigu!
    Vous n’aimez pas Trump, rien ne vous y oblige.
    Mais sa politique économique a des résultats que nous aimerions connaitre en France . Ses actions politiques concernant l’Iran me conviennent ,memes si cela peut contrarier tous les « Chamberlain »…

    • En effet. Ses résultats économiques sont bien plus qu’honorables. S’ils se prolongent jusqu’aux élections, voilà ce qui pourrait le faire gagner.
      Lui, au moins, réussit ce que nos présidents français sont infoutus de faire depuis plus de 40 ans !

    • Il y a quand même des déficits jumeaux et des guerres commerciales qui plombent le bilan par ailleurs positif, et rendent la méthode difficilement transposable ici.

  • 1789 !
    Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
    En 1791, c’est l’élaboration d’une constitution qui a eu une durée de vie très courte.
    1791, c’est aussi la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne… Eh oui, déjà le respect des minorités visibles !

  • Très juste. Il suffit d’acheter un produit aux USA pour constater les taxes qu’il faut payer pour le toucher: 40% de la valeur.
    Les Européens accusent les USA de protectionnisme mais oublient que leurs droits douaniers sont bien plus élevés que les leurs! Alors avant de se plaindre il faudrait se mettre en cause! Ce sont les Européens les protectionnistes, avec la Chine!

  • Bon argumentaire auquel il faut ajouter la probabilité non négligeable que le parti démocrate se divise en plusieurs partis, tellement les opposition internes sont radicales. Mettant en scène des candidats qui se haïssent cordialement, les primaires démocrates promettent d’être dévastatrices.

    On peut aussi observer la gène grandissante de Pelosi qui fait l’impossible pour s’opposer à une procédure d’impeachment tout à fait farfelue à la Chambre qui ruinerait définitivement le peu de crédibilité restant aux démocrates.

    • Ceci dit, l’économie est le talon d’Achille de Trump. Alors que plusieurs indicateurs avancés sont déjà passés au rouge vif, le risque est grand en effet de voir les USA basculer soudainement en stagflation, dans une récession accompagnée d’une inflation non maîtrisée. Si jamais la crise éclate avant les élections, ce sera mis au débit de Trump par les électeurs. La grande inconnue sera alors la politique monétaire de la Fed qui risque fort d’aggraver la crise, comme elle l’a toujours fait dans son histoire.

      Justement, la tentation de Trump de politiser la politique monétaire de la Fed pour l’aider dans sa guerre contre la Chine peut conduire à une opposition ferme de la majorité républicaine du Sénat, qui pourrait y voir l’occasion de s’associer à la majorité démocrate de la Chambre contre Potus. La vengeance du Marécage, en quelque sorte.

  • Un oubli : le plan du Green New Deal. Un truc de AOC, qui ne peut marcher qu’avec une dictature (coucou ?), qui colle parfaitement à l’hystérie médiatique climatique, mais dont le parti démocrate ne veut pas discuter afin d’éviter de montrer les divisions internes.

    • Excellent.
      Pour les cours d' »hystérie médiatique climatique » suivez la flèche : France.
      Que fait-on contre ? car Greta Thunberg est invitée par l’Assemblée nationale en juillet et a été reçue par E. macron en janvier (à chacun sa Leonarda)

  • Que ce soit Donald Trump, Bernie Sanders ou un candidat libéral, ça ne changera rien. Les États-Unis est un pays virtuellement ruiné, avec une monnaie en déliquescence dont la dévaluation sans limite ne sert plus qu’à masquer l’endettement astronomique du pays. Plus personne ne croit aux bons chiffres économiques (à part quelques journalistes du système et leur décalage de 15 ans).

    Tous les signaux réels sont au rouge : la pauvreté explose, la classe moyenne n’existe plus depuis Obama, les vieux travaillent de force jusqu’à 80 ans, les jeunes cumulent deux ou trois emplois sous-payés et les banksters de Wall Streets n’ont plus que la spoliation et le mensonge pour sauver les apparences. Le règne américain touche à sa fin et emmènera dans sa chute une partie de l’occident qui croyait bon lui cirer les chaussures jusque là.

    • Les seuils et taux de pauvreté sont sensiblement les mêmes en France et aux USA, de l’ordre de 1000€ et 13-14%. Les signaux n’y sont donc pas plus au rouge qu’ici, et même moins du fait que les USA bénéficient du « privilège de l’émetteur du dollar », alors que nous…

    • On ne compte plus les ennemis des USA qui ont prophétisé sa chute catastrophique, façon apocalypse. En toute probabilité, comme les autres avant vous, vous irez rejoindre votre Créateur avant de voir vos prédictions réalisées.

    • Mais, les démocrates ont découvert l’arme fatale : la Théorie Moderne de la Monnaie…

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