Par Virginie Pradel.
“Presidential Proclamation on Adjusting Imports of Aluminum into the United States”
Proclamation: https://t.co/aCaMtOUAl0
Remarks: https://t.co/nypErcqFSU pic.twitter.com/rcrkpvChkz— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 8 mars 2018
En augmentant les droits de douane sur l’aluminium et l’acier, Donald Trump s’inscrit dans la continuité de la politique fiscale protectionniste de ses prédécesseurs (Obama, Bush, Clinton, Reagan, etc.).
Depuis plusieurs jours, les voix ne cessent de s’élever pour condamner la décision de Donald Trump d’augmenter les droits de douane sur les importations d’aluminium et d’acier ; cette dernière revenant à pratiquer du « protectionnisme fiscal », autrement dit à surtaxer les produits importés pour protéger une industrie nationale et ses salariés.
Une décision peu surprenante
D’aucuns pointent le risque d’une guerre commerciale entre les États-Unis et le reste du monde ; d’autres rappellent l’inefficience de ce type de politique fiscale et le risque pour les consommateurs américains de subir in fine une hausse corrélative du prix des produits. Et ils ont bien raison ! Mais cette décision de Donald Trump est-elle réellement surprenante ?
À vrai dire nullement, dès lors que le protectionnisme fiscal, par le biais de la hausse des droits de douane, est une vieille stratégie à laquelle on recourait déjà sous l’Antiquité, et qui depuis lors n’a jamais cessé d’exister : elle a d’ailleurs été pratiquée au cours des dernières décennies par la plupart des présidents américains ainsi que par l’Union européenne.
États-Unis : patrie du protectionnisme fiscal
“Presidential Proclamation on Adjusting Imports of Steel into the United States”
Proclamation: https://t.co/hxduwSoElz
Remarks: https://t.co/nypErcqFSU pic.twitter.com/q92FDYZeUl— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 8 mars 2018
L’historien Paul Bairoch a très justement souligné dans son ouvrage Mythe et paradoxes de l’histoire économique que « dans l’histoire, le libre-échange est l’exception et le protectionnisme la règle » ; a fortiori aux États-Unis où est né le protectionnisme fiscal moderne.
Car rappelons que c’est un ancien ministre des Finances américain, Alexander Hamilton, qui exposa le premier dans son célèbre Rapport sur les manufactures publié en 1791, la théorie moderne du protectionnisme fiscal, laquelle met l’accent sur l’idée, déjà présente chez les mercantilistes, que l’industrialisation n’est possible qu’à l’abri d’une protection douanière.
Quatre décennies de protectionnisme fiscal
Selon le rapport du département du commerce américain, la décision de Donald Trump d’augmenter les droits de douane sur les importations d’aluminium et d’acier se place dans la continuité de celle de la quasi-totalité de ses prédécesseurs. Georges W. Bush, William J. Clinton (à trois reprises), George H. W. Bush, Ronald W. Reagan (également à trois reprises), James E. Carter (à deux reprises) et Richard M. Nixon ont ainsi opté pour la hausse des droits de douane, ou alternativement pour le recours aux quotas qui représentent une autre forme de protectionnisme, afin de protéger l’industrie sidérurgique.
Sans oublier Barack Obama qui, en réponse à une requête formulée par l’industrie américaine de l’acier, a également décidé en 2009 d’imposer temporairement une taxe douanière supplémentaire de 35% sur les importations de pneus chinois, toujours pour protéger l’industrie sidérurgique. Rappelons que cette requête était considérée comme un test pour le président, lequel était tiraillé entre sa volonté de sauver des emplois aux États-Unis et sa promotion du libre-échange.
L’UE a aussi recours au protectionnisme fiscal
L’Union européenne n’est pas en reste dans la mesure où elle a également imposé en 2013 des droits de douane supplémentaires d’environ 47 % sur les importations de panneaux solaires par les entreprises chinoises ne respectant pas un prix minimum de vente. L’argument avancé était, là encore, de protéger une industrie, à savoir l’industrie photovoltaïque européenne, contre la concurrence agressive chinoise.
En somme, Donald Trump perpétue une certaine tradition de protectionnisme fiscal américain, et même mondial, que les règles de l’OMC ne sont jamais parvenues à enrayer.
Reste à savoir si la hausse des droits de douane se révélera être une solution opportune pour l’industrie sidérurgique américaine (tout laisse à penser que non…) ; sachant que celle-ci bénéficie déjà d’un sacré coup de pouce depuis la grande réforme fiscale de Donald Trump (le fameux Tax cuts and Jobs Act adopté en 2017 et entré en vigueur en 2018). Cette réforme a en effet sensiblement réduit le taux d’imposition fédéral des entreprises américaines, y compris sidérurgiques, de 35% à 21%, ce qui devrait nécessairement doper leur compétitivité par rapport aux concurrents étrangers.
Protectionniste ?
Lorsque la France taxe l’importation des voitures US à 10% alors que les voitures UE importées aux USA sont taxées à 2,5% ; vous appelez çà comment de la part de l’UE ? Et si Monsieur Trump voulait ré-équilibrer les échanges plus justement ?