L’impôt, c’est le vol (5) : le pessimisme de Pascal Salin

Pascal Salin, économiste libéral, ancien président de la Société du Mont-Pèlerin, clôture notre série sur l’impôt confiscatoire. Sans grand optimisme.

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Pascal Salin (Crédits : Pascal Salin, tous droits réservés)

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L’impôt, c’est le vol (5) : le pessimisme de Pascal Salin

Publié le 26 octobre 2018
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Pascal Salin, après avoir écrit « L’arbitraire fiscal », vous avez parlé, dans vos ouvrages de « tyrannie fiscale« . Notre série consacrée à l’impôt, sur Contrepoints, a abordé le problème de la spoliation légale, au travers de divers portraits. Des individus jetés en prison, poursuivis pour leur combat contre la tyrannie (certains philosophes, comme Philippe Nemo, parlant même « d’inquisition »),… L’évolution de cette tyrannie vous inquiète-t-elle ?

J’ai publié assez récemment La tyrannie fiscale, livre qui a constitué une réédition modifiée d’un livre précédent, L’arbitraire fiscal. Il me semble en effet que la tyrannie et l’arbitraire sont deux caractéristiques fondamentales de la fiscalité. Elle est arbitraire parce qu’elle ne repose pas sur des principes clairs d’éthique ou d’efficacité économique, mais elle résulte des décisions pragmatiques des hommes de l’État qui bénéficient de l’usage de leur monopole de la contrainte légale. Et c’est précisément ce monopole qui rend la fiscalité tyrannique.

Un tyran utilise la contrainte pour s’immiscer dans tous les aspects de la vie des individus. C’est bien ce que fait la fiscalité car elle est, par définition, une atteinte aux droits de propriété et elle modifie profondément les rapports contractuels entre les individus. C’est pourquoi il est totalement justifié de rechercher les moyens de diminuer le plus possible la fiscalité (ce qui est particulièrement vrai pour un pays comme la France qui détient malheureusement dans ce domaine un record mondial).

Il ne me semble pas évident de mesurer exactement l’évolution réelle de l’exercice de la contrainte fiscale par l’État. Mais tous les citoyens savent bien que l’État a des moyens précis et efficaces de punir ceux qui essaient de se protéger de la spoliation fiscale. Et il continue presque constamment à renforcer ses pouvoirs de sanction comme en témoigne d’ailleurs une loi qui vient d’être votée. C’est évidemment pour cela que les citoyens français paient leurs impôts. Ce qui m’inquiète donc le plus, ce n’est pas l’éventuelle évolution des méthodes employées par l’État pour punir les contribuables réticents, mais la croissance continue de la spoliation fiscale qui a été imposée au cours des décennies passées par des gouvernements de droite aussi bien que de gauche et qui continue maintenant sans que l’on puisse voir venir un changement radical dans le futur.  

« Difficile d’être optimiste »

La confiscation de plus de la moitié des avoirs, au détriment d’une classe moyenne asphyxiée, semble être un phénomène inéluctable face auquel les contribuables sont impuissants. Quelle part d’optimisme pouvons-nous espérer, au vu de l’évolution galopante de la fiscalité en France et dans la plupart des pays d’Europe occidentale ?

Il semble que l’opinion publique a tout de même pris conscience du fait que la fiscalité est excessive et qu’elle a des conséquences nuisibles. Mais on peut s’étonner que, malgré tout, il n’y ait pas de révolte fiscale ni surtout de parti politique dont le programme électoral consisterait à promettre une baisse très profonde et très rapide de la fiscalité. Il est donc difficile d’être optimiste. Mais on peut se demander pourquoi il en est ainsi.

Il y a tout d’abord très probablement le fait que les idées libérales sont mal connues et sont très critiquées en France. Il existe un préjugé dominant en faveur de l’interventionnisme étatique. Mais cette situation est aussi le résultat de l’habileté –néfaste – des politiciens. En effet, le système fiscal est construit de manière telle que les citoyens ne connaissent pas exactement le poids de l’impôt qu’ils supportent en fait. Ainsi, on prétend que tel ou tel impôt est payé par  les entreprises, mais il l’est forcément par les individus eux-mêmes. Or, ils ne savent pas ce que serait leur revenu si ces impôts – »payés par les entreprises » – n’existaient pas.

L’impôt sur le revenu est l’un des rares impôts vraiment douloureux car payé par les individus eux-mêmes, ce qui leur permet de ressentir le poids de l’impôt. Mais les gouvernements successifs ont trouvé habile d’exonérer plus de la moitié des contribuables potentiels et de faire reposer la plus grande partie du poids de l’impôt sur une minorité. Ce faisant, ils satisfont un grand nombre d’électeurs et ils prétendent agir pour la « justice sociale » (terme qui est en fait dénué de signification).

Qui pour concurrencer l’État ?

L’État ne peut grandir et prospérer sans l’impôt. Pensez-vous qu’une disruption soit possible ? Que d’autres moyens de financement (volontaires) pourraient rendre plus efficaces les services offerts à la collectivité ? Pensez-vous que les évolutions technologiques, l’intelligence artificielle, l’individualisation des besoins, rendront obsolète, demain, cette tyrannie fiscale ?

Je crains malheureusement que les évolutions technologiques n’aident pas à réduire la tyrannie fiscale. En effet, elles facilitent la mainmise de l’État sur toutes les informations concernant les citoyens, leurs comportements, leurs activités et leurs échanges, ce qui lui permet de prélever des impôts en toutes occasions.

Il est vrai qu’on pourrait imaginer des modes de financement volontaires (si l’État le voulait bien…). On peut ainsi imaginer que pour financer une dépense précise on prenne la décision suivante : un citoyen qui souhaiterait que l’État prenne en charge cette dépense s’engagerait à payer sa part du financement nécessaire, mais à condition qu’une certaine proportion des citoyens s’engage également à payer leurs parts. Cela serait un moyen d’évaluer dans quelle mesure telle ou telle dépense étatique est véritablement désirée.

Mais il y aurait une autre méthode efficace, celle qui permettrait aux producteurs privés de concurrencer l’État dans toutes les activités pour lesquelles il dispose actuellement d’un monopole (imposé par la contrainte). Mais il est évident que l’État n’est pas prêt à accepter une telle situation, lui qui a le droit d’imposer sa volonté aux citoyens.

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  • Une seule solution pour renverser cet état de fait. Drastiquement.
    Faire comme la Suède il y a plusieurs décennies, que les riches s’expatrient.
    Ce n’est pas facile pour eux mais c’est LA solution pour que la France redevienne la France.
    Car nécessité fera loi. Après la cessation de paiement, il faudra bien que le peuple fasse « table rase » de tels et reconstruisent « base zéro », à la russe ou à la suédoise. Le verrai-je de mon vivant ?

    • « Et ils inventèrent l’exit tax. »

      Ca parait pourtant une bonne solution.
      Malheureusement, avant que le mammouth meure, il fera beaucoup beaucoup de dégâts.

    • @pierre Ils sont déjà partis ! Mais la France a (avait) une solide classe moyenne (à laquelle j’appartiens) suffisamment nombreuse pour nourrir nos sangsues. Pour cette classe, quitter la France est faisable mais n’est pas vraiment rentable. Quand cette classe moyenne aura disparu, alors seulement les choses pourront -peut être- changer . Mais j’ai des doutes, nos fonks sont autistes, cramponnés à leurs akissociaux comme des moules à leur bouchot, golum à son Précieux , ils ne lâcheront rien, plutôt mourir…. et nous avec car bien sûr nous serons désignés comme fautifs

  • l’état a le droit d’imposer sa volonté aux citoyens …..certainement pas ; quand les gens votent pour un prétendant au trône , le peuple n’octroie pas ce droit là au futur élu ; c’est l’élu en question qui s’approprie le droit d’imposer sa volonté alors que son rôle c’est d’être au service des citoyens et du pays ; et pas le contraire ;

    • Dans la mesure où il n’est d’autre droit que le droit du plus fort, l’Etat a tous les droits, pour l’instant.

    • Oui pour le fait que le suzerain ne peut imposer sa volonté. Beaucoup moins d’accord pour dire qu’il doit être à notre service. C’est bien le problème justement, « l’Etat, c est là grande fiction… ». Vous connaissez la suite. Tout le monde réclame à l État son petit privilège, sa petite rente, sa petite niche fiscale, ses subventions, la sauvegarde de son emploi, des sous pour le loyer, et même quand personne ne lui demande rien il agit pour le bien de certains aux détriments de tous les autres, et inversement. L État vole le fruit de notre travail, comparez votre super brut à votre net après impôts et taxes.
      L État est un fournisseur monopolistique de services obligatoires. Rien d autre.
      Je ne dis pas que certains de ces services sont inutiles, au contraire.

      D’une maniere générale je n’ai besoin de personne à mon service. Je préfère la collaboration volontaire et consentante avec autrui ( même si rémunéré ), comme tout le monde j espère.
      Non je ne veux pas que l’Etat soit à mon service. Si il m’y oblige c’est une autre histoire.

    • non chaque électeur a un droit de vote souverain…
      Le probleme c’est qu’on ne vote pas pour un projet , mais pour un
      « parti » ou u individu.
      de plus des pans entiers de la gestion de la France échappent au vote des citoyens (qui vote pour le patron de la secu ou de la caf?)
      de fait ces organisation qui grâce au paritarisme gèrent un budget supérieur a celui de l’etat, sans devoir se justifier devant les électeurs.
      La democratie française est très fantaisiste, sa constitution a été élaborée pour de-gaule pendant la guerre d’Algérie, décriée par Mitterrand dans « la paille et le grain » une fois installé il ne l’a pas amendé, bien sur.. on a jamais vu un pouvoir se limiter lui meme

      • Je vous invite à vous renseigner sur le paradoxe de Condorcet, sur celui de Borda et enfin sur le théorème de Arrow.
        Puis vous comprendrez que la démocratie c est la loi du plus fort et que votre bulletin de vote ne vaut pas tripette, pas plus que le mien.

    • En fait on élit depuis un certain temps déjà un administrateur (de l’Etat) qui comme tout bon administrateur cherche à augmenter le bien dont il a la charge. Il nous faudrait en réalité un administrateur (enfin de préférence un chef d’entreprise bien entouré) de la nation.

    • D’où la nécessité que le candidat propose avant son election un programme réaliste et l’exécute à la lettre une fois sur le trône.
      Hélas, si lors de l’élection, c’est l’électeur qui est le maître, une fois celle-ci passée, c’est la technostructure qui décide de tout, souvent à rebours du programme du président. On expliquera pour justifier ces reniements, des informations budgetaires nouvelles, une situation politique ou économique changeante…
      Bref de plus ou moins bonnes raisons qui donnent l’impression à l’électeur qu’il s’est fait gruger et que le suzerain n’en fait qu’à sa tête.

      • Au cours de son mandat l’élu obéit aux consignes de son groupe ou de son parti, il comprend très vite que pour espérer être réélu ou être nommé (à vie) dans un poste bien rémunéré, il y a tout intérêt. Le citoyen qu’il a trahi n’a pas son mot à dire !

  •  » Pourquoi se plaindre des nombreux impôts ?
    Notre paresse nous en prend le double,
    Notre vanité le triple,
    et notre stupidité le quadruple…  »

    Benjamin Franklin , sous le pseudonyme de Mrs. Silence Dogood,

  • Mais il est évident que l’État n’est pas prêt à accepter une telle situation, lui qui a le droit d’imposer sa volonté aux citoyens.

    Il n’a pas le droit, non il le vole. Il impose ainsi sa volonté de ne laisser aucune liberté pour ne pas être remis en cause restant auto-justifié.

  • « Il y a tout d’abord très probablement le fait que les idées libérales sont mal connues et sont très critiquées en France »
    Guère étonnant, au vu de propos aussi caricaturaux sur l’impôt.

    • @Jean ah bon ? ou ça ?

      • Parler de vol ou de tyrannie, par exemple.
        Le discours serait beaucoup plus audible si on évitait de convoquer des termes qui sont une insulte pour les victimes de dictatures ou de cambriolages…
        Signaler que la France prélève trop d’impôts, notamment comparés aux autres pays européens, évoquer le ras le bol fiscal, rappeler l’insécurité juridique liée aux caprices de l’administration fiscale… voilà des choses que tout le monde peut entendre.
        La preuve : tout le monde connait les bonnets rouges. Et ils ont fait plier le gouvernement. Qui connaît Salin et quelle victoire a-t’il remportée ? Il n’a même plus foi en son combat.
        Tout ce qui est excessif est insignifiant.
        La pre

    • Parce que « le consentement à l’impôt » cher à nos politiciens parasites, c’est pas un propos caricatural ?

    • @Jean. Il est temps de comprendre la différence entre la spoliation ( le vol ) et la spoliation légale ( l impôt ). Il n y a aucune caricature, ni insulte aux victimes de vol. ( ce non sequitur que vous nous faites )

  • Le problème est insoluble!
    Ces gens là, qui ont fait des études et sont des professionnels, ont appris que l’ensemble de la richesse créée appartient à l’Etat (qui est, rappelons le une république et non une démocratie), et que eux mêmes sont les gestionnaires de cette richesse. leur rôle consiste à la répartir.
    Aussi, quand vous dites: »l’Etat m’en prend trop », vous êtes dans l’erreur, vous devriez dire: »l’Etat devrait m’en laisser d’avantage ».
    Vous pouvez toujours voter, mais vous élirez un porte parole, qui ne gouvernera pas: il y a toute une classe de hauts fonctionnaires aux postes clés, et ils pensent tous la même chose, qu’ils soient étiquetés à gauche ou à droite. La seule différence, infime, sera dans quelques modifications de cette distribution de richesse, que l’Etat magnanime vous accorde.
    Et vous allez parler de « droit de propriété »! Ce droit n’existe pas, il n’y a qu’un droit d’usus.

  • R.Reagan avait dit: je n’aime pas la TVA! Cela commence par 20%,puis 50% et encore 80% et on finit communistes!

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