Air France : bientôt une compagnie de seconde zone ?

Air France : enkystée par les mouvements sociaux, l’entreprise semble incapable de se réformer.

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Air France : bientôt une compagnie de seconde zone ?

Publié le 19 mai 2018
- A +

Par Adrien Fayard.

Contrairement au sentiment qui règne au sein d’Air France, la compagnie n’est pas à l’abri d’un revers. Si l’investissement de l’État la préserve de la mort clinique, les pertes accumulées au cours des ans pourraient en faire une compagnie de seconde zone.

À Air France, les conflit sociaux s’enchaînent ; les mauvais résultats aussi. Le nombre de passagers transportés par la compagnie a chuté de 8,7 % en avril, en raison de huit jours de grève.
Au total, le mouvement lancé le 22 février a coûté « près de 400 millions d’euros » au groupe, selon la direction. Un montant qui représente plus de 50 % des bénéfices de la compagnie si l’on se base sur les résultats de 2017.

Lundi 7 mai, le titre Air France-KLM signait sa « pire contre-performance du SRD » à la bourse de Paris. Il a en effet perdu 10,15 % après la démission de Jean-Marc Janaillac, dont le projet d’accord salarial a été rejeté à 55,44 % par les personnels.

Ce conflit est loin d’être exceptionnel. L’histoire de la compagnie est jalonnée de grèves dures, ce qui en fait une exception à l’échelle nationale. Dans les autres compagnies aériennes françaises, comme Air Caraïbes, Corsair ou Aigle Azur, les mouvements sociaux restent en effet exceptionnels. Pourquoi ?

Sentiment d’immortalité

Interrogés par La Tribune, les PDG de ces compagnies ont mis en avant la petite taille de leur entreprise, qui permet un « contact plus facile » avec les syndicats et un « meilleur dialogue social ». Ils ont également évoqué la prise en compte par les salariés du risque qu’un conflit lourd pourrait représenter pour l’entreprise. Résultat : l’entreprise est vue comme une entité à protéger, non à détruire. Pascal de Izaguirre, président du directoire de la deuxième compagnie aérienne française, explique :

La préoccupation du personnel de Corsair, c’est la pérennité et le développement de l’entreprise.

De son côté Laurent Magnin, PDG de XL Airways, affirme :

Pour la direction et les syndicats, l’intérêt de l’entreprise prime.

Pour les dirigeants des compagnies françaises, un certain sentiment d’immortalité  chez le personnel et même les dirigeants d’Air France, rend également difficile la quête de compromis. Willie Walsh, directeur général de l’International Airlines Group (IAG) s’inquiète :

Je pense qu’il y a une forte croyance, au sein d’Air France, que le gouvernement français sera toujours là pour intervenir, peu importe ce qu’il se passe, et donc qu[e les employés] n’ont pas besoin de changer. Je pense que c’est de la folie parce qu’Air France est de plus en plus petite et de moins en moins pertinente dans un secteur où la taille est importante.

Vers un retrait de l’État ?

Enkystée par les mouvements sociaux, l’entreprise semble incapable de se réformer. Au point où Jean-Marc Janaillac, le dirigeant poussé vers la sortie par ses salariés, a fini par se ranger à l’avis de son homologue et rival d’IAG, au jour de son départ. L’ex PDG a ajouté, face à l’entreprise :

J’en suis aussi venu à penser que le fait que l’Etat soit au capital renforce un sentiment d’invulnérabilité de la compagnie

Un haut dirigeant du secteur confiera cette observation au magazine Le Point :

Il faut que l’État se retire du dossier le plus rapidement possible. L’État doit vendre ses participations le plus rapidement possible. Tant que l’État restera actionnaire d’Air France, il y aura ce qu’on vient de vivre et ce qu’on va vivre dans les mois à venir.

Mais si l’État y pense, il se garde bien de le dire. Tout juste Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, se contentera d’une mise en garde molle :

L’enjeu c’est la survie de la compagnie, qui risque de disparaître si elle ne fait pas les efforts de compétitivité nécessaires.

Dans les coulisses, c’est une autre histoire. « Il n’y pas de projet à ce stade de baisser la participation de l’État français dans Air France-KLM mais cela ne signifie pas que son niveau actuel est éternel » a déclaré une source du Figaro à l’Élysée.
Mais si l’État venait à réduire sa voilure, les efforts de compétitivité nécessaires suffiraient-ils à sauver la compagnie moribonde ? On en doute. Comme un club de foot qui aurait mal négocié son virage, la compagnie aérienne pourrait bien être reléguée en deuxième division.
C’est la thèse que défendait l’économiste Nicolas Bouzou, au micro de Europe 1 :

Le risque, c’est que Air France devienne une compagnie de deuxième catégorie. Ce qui est en jeu aujourd’hui, ce n’est pas la survie d’Air France à court terme. Ce qui est tout à fait possible en revanche, c’est que la compagnie se fasse racheter par un actionnaire qui n’aura peut-être pas la mansuétude qu’a eu l’État ces dernières années.

Une aubaine pour les compagnies du Golfe qui, à grands coups d’investissement dans les compagnies européennes, veulent dominer le ciel du vieux continent. Et un désastre pour l’image de la France et les partenaires de la compagnie tricolore qui, comme KLM, sont las de faire les frais de gesticulations sociales… typiquement françaises.

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  • Avant de réformer Air-France ,il faudrait réformer l’état.le problème n’est pas les employés d’air France ,ils défendent leur bout de gras de la République mais l’attitude de l’etat incapable de se séparer de ses attributs royaux , Air-France ,SNCF, France Télévisions etc,

  • si AirFrance n’était pas sans cesse renflouée par l’état , donc avec l’argent du contribuable, mais gérée comme une société privée, il y a longtemps que cette « boite » aurait mis la clé sous la porte .
    nos enarques ont une façon bien a eux de gérer une entreprise; ce n’est pas leur argent , sortant de l’ENA ils sont sur la première place du podium question gestion , on commence par le savoir.vivement qu’air France soit rachetée ou disparaisse que ces rigolos et je pèse mes mots ne nous coûtent plus rien .
    voir leur grille de salaire sur le net !

    • @ duglimbule
      Ouais!!! Mais si l’état vend ses actions au plus bas, ça ne fera pas vos affaires de contribuables non plus!

      • Raison de plus pour ne pas attendre qu’elles baissent encore.

        • Autant les aéroports sont en « monopole » physique en leurs lieux et doivent rester (au moins partiellement) sous contrôle de la collectivité, autant il n’y aucune raison, constitutionnelle ou économique, nécessitant que cette compagnie en concurrence intégrale soit possédée, même partiellement, par la collectivité. Elle utilise les mêmes avions que toutes les autres, elle fait des services identiques (voir moins bien) que toutes les autres, et en bonus elle fait la gueule a tout le monde…. Vendons là, avant qu’elle ne vaille définitivement plus rien.

          • @ John Lasser
            Les aéroports resteront évidemment en France, mais leur gérance peut très bien être sous-traitée sous conditions!
            L’état a beaucoup investi dans « air FRANCE », y compris son nom! Si l’état se retire maintenant, il ne récupérera qu’une minime partie de sa mise! Une compagnie, c’est un personnel volant, technique ou administratif, du matériel volant ou au sol et un portefeuille d’escales, de clients fidèles, de conventions bi ou multilatérales, et, sans doute des dettes! Cela ne vaudra jamais que le prix qu’un acheteur acceptera de payer en laissant les dommages collatéraux à charge de la France! Donc, ce n’est vraiment pas encore le bon moment!

            • Cela fait 50 ans que ce n’est pas le bon moment, et ce ne le sera jamais. Tout « investisseur » sérieux sait quand il faut couper ses pertes, pour ne pas sombrer avec le navire… pardon… l’avion 🙂

            • La présence de l’état cautionne toutes les erreurs. Bien sûr, s’il se retire, il y a de bonnes chances que le cours remonte. Donc certains en profiteront pour dire qu’il n’aurait pas dû vendre, mais ce serait ignorer le pourquoi de la remontée. Une solution : vendre au prix du marché mais exclusivement aux contribuables français, leurs droits à acheter étant en proportion de l’impôt payé. Ainsi, les Français ne perdraient rien dans la remontée, s’ils souhaitent en prendre le risque.

    • « mais gérée comme une société privée, il y a longtemps que cette « boite » aurait mis la clé sous la porte . »
      Et pas sûr justement, comme le témoignent les autres compagnies citées dans l’article.

      Le danger d’une fermeture réelle aurait peut être permis aux différents acteurs d’être plus responsables, et d’obtenir de meilleurs résultats pour le bien de tous.

  • Lors de l’entrée au capital de Delta et China Eastern, fin 2017, l’action valait 13 €. Elle en vaut 7 aujourd’hui.
    L’état Français, avec 14. 3 % des actions, un double droit de vote et 63 % des actions chez des « petits actionnaires » est, en 2018, l’actionnaire de référence. Cela change en 2019, où Delta et China Eastern obtiennent également le double droit de vote et, avec chacun 8.8 % des actions, deviennent ensemble l’actionnaire de référence.

  • Bonjour,
    Permettez-moi de m’étonner que vous ayez oublié une question non négligeable, à mon humble avis ::
    LA HAINE DU CLIENT, y compris les meilleurs (« Club des 1000 »).
    D’où, ƒuite colossale des abonnés d’Air Inter dès la ƒusion…..
    Juste un souvenir personnel, PARMI D’AUTRES ::
    Attendu à Athènes pour un congrès, j’arrive à Roissy sans passeport. L’employé Air France ignore que la Carte d’identité suffit.
    Il exige que je signe un engagement de rapatriement à mes ƒrais, autrement dit, plein tariƒ, au cas où je serais reƒoulé par la Police grecque ((mon « Vol Vacances » ne permettant pas une modiƒication de date de retour en France)).
    Problème : Il ƒaut ƒaire cela sur un imprimé spécial. Mais personne ne sait où est rangé ce papier.
    Le temps de le trouver, mon vol est parti……………
    Je suis obligé, pour rejoindre mes collègues, de prendre un nouveau billet, avec escale en Italie, et trois ƒois plus cher ((aller simple)) que l’aller-retour inutilisable.
    Au retour, j’entame une procédure de Réclamation auprès de la Direction commerciale. Ils me répondent que c’est une erreur du personnel d’aéroport, que je pouvais modiƒier la réservation initiale moyennant le paiement d’une pénalité de 25%. Et m’invitent à me présenter pour une régularisation.
    Arrivé sur place, ils exigent que je leur rende le courrier avouant le mauvais traitement subi. NON, Messieurs, gardez le ƒruit du vice, et moi les pièces à conviction.

    • Bonjour

      Même expérience du mépris du personnel naviguant:
      J’ai pris deux fois air France because monopole pour les antilles. Dans l’avion un client demande à l’hôtesse de l’air si on a droit a du vin. L’hôtesse répond sur ton outré: ‘Mais vous êtes en classe économique’ (une merde).
      A la pause, deux hôtesses discutent devant nous et une dit:  » Ah ca fait la deuxième fois que je me tape la classe économique. ca suffit’.
      Le personnel est méprisant et n’a que d’yeux pour la première classe.

      • @ gillib
        C’est ce qui arrive quand on est trop bien rémunéré et qu’on croit faire partie d’une certaine « aristocratie », habillée gratuitement par un dessin de grand couturier, alors que cela n’améliore en rien la qualité du service rendu: la « qualité » Air France n’est pas à la hauteur de ses prétentions insupportables, comme souvent dans le pays d’origine de cette compagnie!

        Alors mieux vaut un vol Ryanair, moins cher, où on en a, au moins, pour son argent, dans une transaction transparente! Le « prestige » prétendu d’Air France ne vaut que poules Français chauvins, pas pour les étrangers qui ne tombent pas dans ce panneau, évidemment!
        Oh! Les pilotes retrouveront bien du boulot ailleurs, sans doute pas au même prix ni dans les mêmes conditions, mais c’est leur choix!

      • Bien d’accord avec vous!!!
        Et dire que ce sont les héritiers de £atécoère, créateur de « £a Ligne » ((‘£’Aéropostale)), de Didier Daurat, de René Couzinet, de Marcel Reine et toute la Bande à Mermoz……….. dont Henri Guillaumet « El Àngel de los Andes » à propos duquel son élève et ami Antoine de Saint-Exupéry déclara dans Terre des Hommes :
        « £e Courage de Guillaumet est un effet de sa Droiture »
        et qui inspira même à Guerlain son parƒum « Vol de Nuit ».
        Toute la grande tradition de l’Aventure à la ƒrançaise, chaleureuse, généreuse, héroïque et modeste : « Après deux, trois, quatre jours de marche, on ne souhaite plus que le sommeil. Je le souhaitais. Mais je me disais : Ma femme, si elle croit que je vis, croit que je marche. Les camarades croient que je marche. ILS ONT TOUS CONFIANCE EN MOI. Et je suis un salaud si je ne marche pas ». — il risqua même sa vie pour retrouver au milieu du Sahara des pilotes Uruguayens tombés aux mains des Maures…..

  • Pour Air France, si rachat il y a, les futurs employeurs géreront sans état d’âme la nouvelle compagnie, leur objectif étant le bon fonctionnement de leur entreprise. Ils n’auront pas le souci de leur ré-élection, qui est la préoccupation essentielle -non avouée- de nos minables qui nous gouvernent, afin de se cramponner au pouvoir.
    Bruno Le Maire n’est que la voix de son « maître », car comme lui, il parle et déplace beaucoup d’air pour un résultat quasi nul, sauf pour nous ponctionner taxes, CSG, et autres impôts… Pourquoi, intervient-il par cette « mis en garde molle » (serait-ce pour enfumer KLM ?), alors que son mutisme est total face à la SNCF, société en faillite ne survivant que par les continuelles subventions étatiques financées par nos impôts !

    • un bémol concernant BLM : l’état ne l’a pas attendu pour augmenter les impôts.
      Laissons-lui encore le bénéfice du doute quant à ses motivations réelles.

  • Air France : bientôt une compagnie de seconde zone ?

    Mais elle l’est déjà, et depuis longtemps….
    Grace à l’état qui ne gère rien, des dirigeants copains-coquins, des pilotes qui pètent plus haut….Un personnel aussi pléthorique que bordélique et convaincu de son inamovibilité….

  • Les commentaires sont fermés.

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Par Michel Albouy.

Quand on est un pilote d’Air France, une compagnie prestigieuse qui porte les couleurs de la République française et qui a fait voler le Concorde, on peut se croire insubmersible et penser que tout continuera comme avant et qu’in fine l’État sera toujours là pour faire face aux petits problèmes comptables d’équilibre d’un compte d’exploitation. C’est bien ce qui est en train de se passer à nouveau avec la crise sanitaire.

 

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Air France disparaitra si elle ne fait pas les efforts de compétitivité.

Dans une autre interview, il ajoutait :

Ceux qui pensent que quoiqu’il arrive, l’État viendra à la rescousse et épongera les pertes se trompent.

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