La recherche sur les cellules souches embryonnaires enfin autorisée

Nouvelle loi relative à la bioéthique autorisant sous certaines conditions la recherche sur les cellules souches embryonnaires : les scientifiques français vont pouvoir développer des recherches dans des domaines porteurs de grands espoirs.

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Bioethique

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La recherche sur les cellules souches embryonnaires enfin autorisée

Publié le 16 août 2013
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Nouvelle loi relative à la bioéthique autorisant sous certaines conditions la recherche sur les cellules souches embryonnaires : les scientifiques français vont pouvoir développer des recherches dans des domaines porteurs de grands espoirs.

Par Roseline Letteron.

Le 1er août 2013, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution le texte modifiant la loi bioéthique du 7 juillet 2011, et autorisant la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires.

La puissance des cellules-souches

À dire vrai, le débat sur la question des cellules-souches est presque aussi ancien que le premier bébé éprouvette, Amandine, née en 1982 d’une fécondation in vitro réalisée par le Docteur René Frydman. La fécondation in vitro est utilisée pour aider les couples qui rencontrent des difficultés de fécondation, mais dont la femme peut, sans difficultés particulières, porter un enfant. On va donc créer un embryon en éprouvette avant de le réimplanter dans l’utérus de la femme du couple demandeur, et c’est elle qui mènera la grossesse à son terme. Sur le plan génétique, toutes les combinaisons sont possibles : l’enfant peut être biologiquement celui du couple demandeur, mais il peut aussi être le résultat d’un don de sperme ou d’ovule, voire d’un double don. Quoi qu’il en soit, cette technique se traduit souvent par la création d’embryons en nombre supérieur par rapport à ceux qui seront effectivement réimplantés. Ces « embryons surnuméraires » sont donc congelés et réutilisés par le couple, s’il désire d’autres enfants. Lorsque le couple renonce à son projet parental, ces embryons font quelquefois l’objet d’un don à un couple infertile. Si tel n’est pas le cas, ils doivent, en principe, être détruits à l’issue d’un délai de cinq ans (art L 2141-4 csp).

Les chercheurs s’intéressent beaucoup à ces embryons qui ont, il convient de le préciser, entre cinq et sept jours. En effet, ils sont composés d’un ensemble de « cellules souches », particulièrement précieuses pour la recherche scientifique. En schématisant quelque peu, on peut définir la « cellule souche » comme une cellule non différenciée qui a pour fonction d’engendrer d’autres cellules. Cette capacité suscite de grands espoirs en matière médicale, notamment pour la thérapie génique. Si les cellules souches ne sont pas tout à fait absentes chez l’adulte, par exemple dans la moelle épinière, elles y sont moins puissantes que chez l’embryon. Les cellules embryonnaires sont « pluripotentes », ce qui signifie qu’elles sont susceptibles de former tous les tissus de l’organisme, sans pour autant aboutir à la formation d’un individu complet. Les chercheurs estiment ainsi que ces cellules embryonnaires devraient permettre de formidable progrès dans le traitement de certaines maladies, comme la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) ou la maladie d’Alzheimer.

Encore faut-il pour cela avoir le droit d’effectuer de telles recherches, et cette autorisation est précisément l’objet de la loi du 6 août 2013.

La fin de l’hypocrisie législative

Ce texte met fin à une certaine hypocrisie de la loi dans ce domaine. La loi de bioéthique du 6 août 2004 posait en effet un principe d’interdiction de la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Mais elle l’accompagnait de la possibilité d’y déroger, « à titre exceptionnel« , avec l’accord du couple concerné, lorsque les recherches envisagées « sont susceptibles de permettre des progrès thérapeutiques majeurs » et qu’aucune méthode alternative ne peut être envisagée, en l’état des connaissances scientifiques. Ce régime dérogatoire ne devait s’exercer que durant cinq années, mais la loi bioéthique du 7 juillet 2011 a maintenu ce statu quo sans susciter un réel débat sur le sujet.

La loi de 2013 inverse totalement le principe. On passe de l’interdiction, sauf exception, à l’autorisation étroitement encadrée. Il ne s’agit évidemment pas d’autoriser n’importe quelle recherche, et le législateur maintient la condition imposée en 2004, selon laquelle seules seront autorisées les recherches qui ne peuvent pas être développées par d’autres moyens. De même, l’accord du couple à l’origine de la création de ces embryons est toujours exigé par la loi. Ces conditions sont contrôlées par l’Agence de la biomédecine qui donne l’autorisation de recherche, en appréciant évidemment les objectifs de la recherche et les compétences de ceux qui l’entreprennent.

Ce régime d’autorisation présente l’avantage de mettre fin à une hypocrisie législative, qui reposait sur la recherche d’un équilibre entre les aspirations légitimes des chercheurs et les réticences des milieux catholiques qui considèrent qu’un embryon de cinq jours est déjà une personne humaine. Mais il s’agit là d’un argumentaire difficilement défendable devant le Conseil constitutionnel : par hypothèse, les embryons sur lesquels ces recherches sont autorisées ne donneront jamais lieu à un projet parental, soit parce que techniquement ils ne peuvent pas être réimplantés, soit parce que le couple ne le souhaite pas. Ils ne deviendront donc jamais des personnes humaines. Le recours s’est donc fondé sur des arguments plus classiques, facilement écartés par le Conseil. Il a ainsi observé que les garanties prévues par la loi lors de la délivrance des autorisations ne portent pas atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne. Elles sont en outre suffisamment claires pour répondre aux exigences de clarté et de lisibilité de la loi.

Débarrassés d’entraves qui n’avaient pas d’autre origine que religieuse, les scientifiques français vont donc pouvoir développer des recherches dans des domaines porteurs de grands espoirs et reprendre la place qui est la leur dans un secteur extrêmement concurrentiel. Il est juste temps, car les chercheurs des autres pays, ont pu, quant à eux, avancer leurs travaux sans être entravés par la loi de leur propre pays et par les préjugés des uns ou des autres.


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  • Madame Letteron, grande bouffeuse de curés notoire, n’oublie de nous rappeler que l’archaïsme de notre loi en la matière venait avant tout des catholiques….

  • ;;; Ce qui est d’ailleurs la vérité.

  • Il m’avait semblé que la recherche sur embryon n’était pas nécessaire car il existe d’autres méthodes qui, elles, ne pausent pas de problèmes éthiques.
    C’est vrai, l’éthique ne fait pas partie de votre billet.

  • Pourquoi « enfin » ?

    Un libéral est attaché à ce que l’Etat assure l’autodéfense des plus faibles.

    Le libéralisme ne tranche pas la question de savoir si un embryon est ou non un être humain.

    Si un embryon est un objet toute recherche est légitime.

    Si l’embryon est un être humain à son premier stade de développement, alors la recherche est illégitime car elle est une agression de la collectivité contre cet être humain.

    C’est le b a ba du jus naturalisme.

    Cela n’a rien de religieux.

  • C’est trop tard, tous les brevets princeps en biotechnologie appartiennent aux américains, et avec leur force de frappe qu’est le capital-risque, ils ont déjà toutes les startups dans ce secteur (et les autres secteurs aussi !). Merci Axel Kahn, apparatchik de science française, trotskyste reconverti au socialisme caviar, chantre de la bien-pensance mielleuse, qui a contribuer avec d’autres agents aux services d’intérêts étrangers à faire perdre à la France son avance scientifique dans ce domaine !

    Les tenants du principe de précaution sont des traîtres à la nation au service des USA. Leur objectif est de ralentir la R&D et l’exploitation commerciale des avancées scientifiques et techniques par la France, afin que les américains aient le temps de posséder tous les brevets princeps des secteurs clés (NTIC, énergie, biotech, nanotech, …).
    Donc la prochaine fois que vous verrez José Bové (ou un Axel Kahn) et ses copains européistes se déchirer la chemise en criant « principe de précaution » et arracher très courageusement les plantes OGM d’un inoffensif étudiant en doctorat au CNRS ou à l’INRA, à la place des plantes OGM de la puissante multinationale Mosanto, j’espère que vous comprendrez qu’ils sabotent délibérément le futur de votre patrie en nous tirant une balle dans le pied ! Cet exemple sur les OGM, vaut pour les cellules souches, vaut pour tout secteur à fort potentiel économique et financière !

  • A priori, surtout la moelle osseuse, pas la moelle épinière!

  • Une fois encore Letteron démontre qu’elle n’a rien à faire sur Contrepoints : il existe des sources de cellules souches non embryonnaires pour effectuer des travaux, de plus il existe maintenant des méthodes pour vitrifier les ovocytes, rendant la création d’embryons surnuméraires inutiles (rappelons qu’il y a plus de 155.000 embryons congelés aujourd’hui en France… une grosse ville comme Aix-en-Provence). La défense des droits du plus faible par l’Etat n’est-il pas un des buts du libéralisme ? L’embryon ne serait alors qu’un objet ? Pourquoi alors un foetus, un enfant ou un homme ne le serait-il pas non plus dans ce cas ? Il existe des méthodes pour éviter ces problèmes éthiques alors que les juristes les mettent en place Mme Letteron !!!!!!!

    L’hypocrite c’est vous !

  • « le législateur maintient la condition imposée en 2004, selon laquelle seules seront autorisées les recherches qui ne peuvent pas être développées par d’autres moyens. »

    Donc en fait la loi ne sert à rien, puisque les alternatives existent…

    Source INSERM

     » La prouesse scientifique récompensée par le prix Nobel de médecine 2012 consiste à prélever pratiquement n’importe quelle cellule chez un adulte et à la reprogrammer génétiquement pour la rendre pluripotente, c’est à dire capable de se multiplier à l’infini et de se différencier en types de cellules qui composent un organisme adulte, exactement comme une cellule souche embryonnaire. Ces cellules sont appelées IPS pour cellules souches pluripotentes induites (« induced pluripotent stem cells »). »

     » Les cellules souches adultes proviennent de tissus qui se renouvellent. On en trouve par exemple dans la moelle osseuse où elles sont à l’origine des cellules sanguines (cellules souches hématopoïétiques), dans l’épiderme (cellules souches kératinocytaires) ou encore dans le tissu adipeux (cellules souches mésenchymateuses). Ces cellules sont présentes en faible quantité et moins faciles à cultiver que les cellules souches embryonnaires. Elles ne peuvent en outre produire que certains types de cellules différenciées, en fonction de leur tissu d’origine.

    Les cellules IPS sont quant à elles identiques aux cellules souches embryonnaires, mais elles sont obtenues par reprogrammation génétique de cellules adultes différenciées. Depuis 2007, des centaines de lignées de cellules IPS ont été obtenues à partir de presque tous les types de cellules adultes capables de se multiplier.  »

     » Les cellules IPS ont les mêmes atouts que les cellules souches embryonnaires humaines : elles prolifèrent à l’infini et peuvent se différencier en tous les types de cellules de l’organisme. Mais elles ont des avantages supplémentaires: elles sont faciles d’accès, par simple biopsie chez l’adulte, et leur utilisation ne pose pas de problème éthique. »

    « De plus, les cellules IPS peuvent provenir de donneurs sélectionnés pour leur patrimoine génétique. Cela permet de cultiver des cellules malades et de modéliser des pathologies pour les étudier. Autre intérêt dans le cadre de la médecine régénérative, il est possible de choisir un donneur compatible avec le receveur à traiter pour éviter un rejet de greffe.  »

    http://www.inserm.fr/thematiques/immunologie-hematologie-pneumologie/dossiers-d-information/les-cellules-pluripotentes-induites-ips

    • Les cellules iPS contiennent une quantité astronomique de mutations génétiques secondaires aux effets inconnus encore. Elles sont intéressantes pour des études in vitro, mais beaucoup trop dangereuses pour être transplantés dans un organisme (homme ou animal) dans le cadre d’une thérapie cellulaire. Rien ne remplacera les cellules souches embryonnaires.

  • Une hypocrisie législative donne suite à une autre hypocrisie législative clientéliste. On sait pertinemment qu’il n’est pas utile ni nécessaire de travailler sur les cellules embryonnaires dites « pluripotentes » particulièrement depuis les découvertes du Professeur Shinya Yamanaka qui représentent :  » une possibilité qui ne reste pas sans poser de questions éthiques et sociétales … »
    Il suffit d’ailleurs de se poser honnêtement les questions que vous avancez :
    Un libéral est attaché à ce que l’Etat assure l’autodéfense des plus faibles.
    Le libéralisme ne tranche pas la question de savoir si un embryon est ou non un être humain. [ce qui est peut-être dommage … de quels géniteurs vient en effet cet embryon ? ]
    Si un embryon est un objet [ce qui n’est pas le cas] toute recherche est légitime.
    Si l’embryon est un être humain à son premier stade de développement, alors la recherche est illégitime car elle est une agression de la collectivité contre cet être humain. [raisonnement adapté]
    C’est le b a ba en jurisprudence naturaliste.

    • Il y a d’ailleurs un bon argumentaire chez Pc … Shinya Yamanaka préconise « de nouvelles recherches pour éviter un mauvais usages des cellules … »

  • mieux vaut lire un tel tissu d’arguties amorales qu’être aveugle.

    depuis plus plus de 20 ans que l’autorisation de recherches sur les cellules souches embryonnaires existent dans certains pays « avancés », aucun résultat n’a été obtenu !

    Bref, à part faire de l’anticatholicisme primaire avec des arguments éculés (comme celui du « projet parental »), cet article n’apporte rien.

    Quant au conseil constitutionnel, il démontre de plus en plus que nous ne sommes pas dans un état de droit, mais d’arrangements.

    • L’anti-catholicisme est à la mode en ce moment chez les bobos. Un problème ? C’est de la faute aux cathos…. En ce moment, la grande mode, c’est de raser les églises piquées par les collectivités en 1905. C’est si fun…

      • Euh, si vous voulez récupérer les 2 mochetés entretenues par ma commune à grands frais (c’est à dire en me faisant les poches), ce sera avec grand plaisir. Evidemment, vous en assurerez l’entretien intégral sur vos propres deniers.

        • faut voir. ce genre de bâtiment est spacieux et généralement idéalement placé.

          • @philipullus : il est rare que les églises soient de horreurs, mais vous avez sans doute raison, et ce d’autant plus que les non-catholiques n’ont pas à payer leur entretien. Le seul hic dans l’histoire, c’est que notre Etat laïc a confisqué les biens en question pour ceux datant d’avant 1905 afin d’affaiblir l’Eglise. Qu’il assume donc ses responsabilités et les entretienne comme il a lui même prévu dans la loi dont il est à l’origine ! PS : Au passage, je n’aime pas le sport, je ne vois pas pourquoi mes impôts devraient financer des salles de sport ou subventionner des clubs sportifs. Votre raisonnement est donc stupide.

  • la loi precedente prevoyait la destruction de ces cellules.Peut-etre pourrait on s’interroger sur la souffrance,donc l’apparition de la conscience dans ces embryons ou amas cellulaires à potentiel humain.Il y a certainement plus d’avancee scientifique à faire sur ce sujet

  • Les commentaires sont fermés.

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