Pourquoi l’Espagne devrait-elle demander l’aide de l’Europe ?

La “psychologie des marchés” qui a permis aux taux d’intérêt de baisser n’incitera pas l’Espagne à demander l’aide de l’Europe, soumise à des conditions très fortes d’austérité.

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Pourquoi l’Espagne devrait-elle demander l’aide de l’Europe ?

Publié le 16 septembre 2012
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La “psychologie des marchés” qui a permis aux taux d’intérêt de baisser n’incitera pas l’Espagne à demander l’aide de l’Europe, soumise à des conditions très fortes d’austérité.

Par Charles Sannat.

Depuis l’annonce que la BCE, dirigée par son Gouverneur Mario Draghi, achèterait de manière illimitée les obligations des États européens en difficulté, les taux d’emprunt de l’Espagne ont fortement baissé. Logique. La nouvelle stratégie de la BCE, éloigne pour les investisseurs le spectre d’un éventuel défaut de l’Espagne. Le risque de faillite s’éloigne.

Il est très intéressant de s’arrêter quelques secondes sur ce point. Les investisseurs sont réputés avoir un comportement rationnel. Par conséquent logiquement si le risque de banqueroute augmente, le prix du prêt consenti, augmente. Cette augmentation du prix, s’exprime à travers la hausse des taux d’intérêt. Simple.

Dès que le risque disparaît ou diminue, le prix se réajuste pour prendre en compte cette nouvelle réalité. À ce moment les taux baissent pour refléter aussi justement que possible la donne du moment.

Nous sommes dans ce moment

Il faut bien comprendre ce que l’on appelle pompeusement la « psychologie » des marchés. Jusqu’à présent, ce sont les dettes européennes qui ont été attaquées par les marchés.

Pourtant lorsque l’on regarde la situation, les États-Unis avec 103% de dette/PIB sont plus endettés que nous. Le Japon avec 250% de dette/PIB est plus endetté que nous. Idem pour le Royaume-Uni.

Alors pourquoi sommes-nous attaqués ?

Tous les autres pays cités, utilisent leur « planche à billets », leurs banques centrales, pour garantir aux investisseurs qu’il n’y aura pas de défaut de paiement. Ils utilisent la création monétaire pour garantir les dettes. Néanmoins, ces États ne garantissent pas la valeur à terme de ces obligations. En effet, plus la création monétaire sera importante pour garantir ces dettes, moins ces dettes auront de « pouvoir d’achat » à terme, puisque la valeur de la monnaie va baisser. Mais il n’y aura pas de faillite.

C’est cette stratégie que l’Europe s’interdisait jusqu’à présent, pour sauvegarder la « valeur » de sa monnaie l’euro.

Mario Draghi vient de rompre avec cette orthodoxie monétaire

Enfin en partie car, le rachat illimité d’obligations, s’accompagne d’une obligation illimitée à l’austérité. La question qui vient dès lors à l’esprit est, est-ce que cette obligation de conditions est indispensable ? La réponse est non. Car la psychologie des marchés a déjà permis aux taux d’intérêt de baisser sans que la BCE n’ait justement besoin d’acheter lesdites obligations. Dès lors le statu quo sur les taux n’incitera pas l’Espagne à demander l’aide de l’Europe, soumise à des conditionnalités très fortes d’austérité. Les Espagnols n’ont pas forcément envie de se lancer dans une politique de rigueur à la grecque, car au bout du chemin c’est bien cela qui les attend. Auront-ils le choix ? Non. Mais en réalité personne n’aura le choix.

Il y a trois grandes façons de payer ses dettes. La première c’est de gagner plus. En termes macro économiques c’est la croissance. Il n’y en a pas, et il n’y en aura pas. La deuxième c’est de ne pas payer ses dettes. En termes macro économiques c’est le défaut de paiement. La troisième solution c’est de rembourser en monnaie de singe. En termes macro économiques c’est l’inflation.

Ces deux dernières solutions seront forcément douloureuses. Il n’y a aucune bonne façon de sortir de l’ornière dans laquelle nous sommes tombés volontairement. Il n’y a pas d’argent gratuit. Il ne peut pas y avoir de croissance à crédit. La création de richesse ne ment pas. Quand on la fait mentir par de la création monétaire injustifiée à travers de la dette excessive, cela génère une crise économique majeure.

Il va falloir assainir l’économie, ce que nous refusons obstinément depuis 2007. Personne ne veut de récession. Au risque de choquer, économiquement, les récessions sont saines, car elles permettent de purger les excès et de repartir sur des bases saines. Alors tout le monde à travers la planète, poursuit une politique de création monétaire « illimitée ».

Winston Churchill disait lors des accords de Munich : « Vous avez voulu éviter la guerre au prix du déshonneur. Vous avez le déshonneur et vous aurez la guerre. » On pourrait dire à nos hommes politiques : « Vous avez voulu éviter la récession au prix de la création monétaire et de l’inflation. Vous aurez la récession et l’inflation ».

On ne joue pas impunément avec la monnaie.

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