Le rapport Draghi oublie l’essentiel

Le rapport Draghi propose 170 propositions autour du thème de l’accroissement de l’innovation , l’harmonisation juridique , le développement,
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Le rapport Draghi oublie l’essentiel

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 6 novembre 2024
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Le rapport commandé par la commission européenne de Bruxelles  à Enrico Letta publié en avril 2024 sur l’avenir du marché unique ne devrait donc pas suffire,  puisque cette même institution a commandé à l’ancien président de la  Banque Centrale Européenne Mario Draghi un rapport sur la compétitivité remis à la présidente de la commission Ursula Von der Leyen en octobre 2024.

Un rapport décevant

Le texte propose 170 propositions autour du thème de l’accroissement de l’innovation, l’harmonisation juridique, le développement de l’intelligence artificielle, la transition écologique, la souveraineté stratégique et la simplification administrative.

Il s’enroule autour de  trois axes principaux afin d’une part  d’obtenir une croissance « durable » , d’autre part de combler le retard technologique de l’Europe et d’ avoir un plan  commun pour la « décarbonation », enfin renforcer la sécurité et réduire les dépendances .

Malgré le prestige dont jouit , du moins dans le milieu des bureaucrates et des technocrates , Mario Draghi , il est fort à parier , même en étant dénué de tout don de prophétie , que ce rapport rejoindra l’immense , longue et pathétique cohorte des rapports qui ont nécessité  un déploiement important en capital humain et en argent pour ultimement rejoindre le caveau , déjà abondant au niveau bruxellois,  des volumes et rapports dont la vocation est de n’en avoir aucune .

Le rapport en question est en effet une suite de banalités , de portes ouvertes dans lequel  des évidences succèdent à des vérités que chacun peut constater sans qu’il soit besoin de mobiliser hommes,  argent et imprimante.

Si c’était pour arriver à de telles conclusions Chat GPT , même  dans sa version primitive, aurait fait l’affaire.

Qu’il soit nécessaire d’innover , de s’interroger sur le millefeuille bureaucratique,  ou encore que des normes soient communes pour économiser des coûts de transactions et d’informations,  ainsi qu’être en pointe dans l’intelligence artificielle , l’éducation , ou l’état de santé d’une population , ou encore le maillage en moyens d’informations ,  ne nécessite nullement la mobilisation de bons esprits pour aboutir à un rapport , certes copieux , mais bien plus sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif.

Ce n’est pas un catalogue de La Redoute écrit par Monsieur Prudhomme dont a besoin l’ Europe dans la concurrence et compétition face aux deux autres blocs aujourd’hui dominants , c’est-à-dire d’une part l’Amérique du Nord , d’autre part la Chine et les pays qui l’entourent, mais d’une réflexion sur les raisons et les principes qui expliquent  le déclin relatif du continent européen , et à l’inverse le succès toujours renouvelé de l’Amérique du Nord et l’émergence spectaculaire du continent asiatique , enfin débarrassé de la planification impérative pour accéder aux résultats spectaculaires généré  à tout coup par le respect des disciplines du marché.

Les vraies questions

Plutôt que des banalités , même correctement ciselées,  à propos des institutions européennes ou de la politique de la concurrence , de l’innovation,  et des nouvelles technologies , il eût été  bien plus intéressant de s’interroger à propos des trois principes et fondements  qui , toujours et partout ,  assurent  la réussite. Dit autrement quel est le déficit de l’Europe à propos d’une part de la ( les ) libertés, d’autre part de la mise en Å“uvre de la responsabilité , et enfin de la possibilité  pour la propriété tant entrepreneuriale qu’individuelle de pouvoir se déployer et s’épanouir  , afin également que sur le marché des fonds prêtables l’appariement entre les capacités d’épargne des uns et les désirs d’investissement des autres s’accordent pour se concentrer sur des projets entrepreneuriaux dont on attend un supplément de richesses , et non pas dictés par ce que les bureaucrates imaginent être les souhaits des « citoyens – consommateurs » de l’Europe.

L’Europe refuse de faire un choix clair entre un pari sur les vertus de la liberté, la responsabilité, la propriété et une économie mixte , certes appuyée sur le fonctionnement des marchés fidèle à l’esprit du Traité de Rome, mais constellée , puis gangrené désormais en tous domaines ,  d’une réglementation foisonnante, afin de pouvoir « piloter » le destin économique de l’Europe. Ce refus de clairement choisir entre  la liberté et le dirigisme provoque des dysfonctionnements . La raison de ces interventions siégerait dans la lutte contre les défaillances du marché . Cela a pour résultat réel de surtout accumuler des défaillances étatiques, bureaucratiques, technocratiques  . Le refus d’accepter l’idée de la dichotomie des systèmes est le talon d’Achille de la gouvernance européenne depuis les quarante dernières années. Le marché a ses propres logiques et sa propre cohérence. Il en est de même des politiques  interventionnistes. Mais on ne saurait imaginer une solution neutre,  équilibrée, médiane  qui consisterait , dans un jeu d’équilibre impossible à mener, à puiser  dans chacun des systèmes ce qui semble le meilleur.

L’importance des institutions

Plutôt que d’imaginer une nouvelle véritable usine à gaz avec des centaines de mesures qui s’empileront  d’avec les autres sans que  les premières jamais ne disparaissent , il aurait sans doute été plus judicieux de se poser la seule question qui compte finalement. Cette interrogation est la suivante : quelles sont les facteurs , les fondements , les principes , les politiques qui expliquent  l’éclatante réussite des deux autres ensembles d’un monde dit tripolaire.

La réponse est évidemment dans les institutions, comme affirmé depuis Adam Smith  jusqu’à Douglass North et récemment confirmé de façon très convaincante par  les trois titulaires couronnés du prix Nobel d’économie le 14 octobre 2024  .

Monsieur Draghi qu’y a-t-il de nouveau sous le soleil ? Bien peu de choses en réalité depuis les économistes classiques. Les bonnes institutions font les bonnes incitations ,  qui provoquent  les bons comportements , à leur tour transformés en actions  efficaces.

Quelles sont les bonnes institutions ? En la matière nul n’est besoin de faire preuve d’originalité. Partout où l’on met du marché , le système des prix,  des contrats libres, du droit , de la liberté d’entreprendre , du libre-échange , la possibilité d’avoir du profit , mais aussi et encore de faire évidemment faillite si on a proposé des choix erronés  au consommateur , des marchés de capitaux libres, la libre circulation et confrontation des idées afin de favoriser l’émergence des préconisations les plus solides, de la concurrence, de la propriété, un Etat fort , mais borné à ses fonctions régaliennes , une fiscalité raisonnable, équitable, juste , compréhensible , les résultats sont à la hauteur des espérances. La preuve par l’Europe de 1820 aux années 1960 . Comment être certain que la liste précédente soit la bonne ? Il faut et il suffit de constater  les résultats lorsque le système d’institutions et d’incitations  a pris le contre-pied total des préconisations ci-dessus. Car , par valeur d’exemplarité fort utile , nous connaissons les catastrophes  des économies planifiées et gouvernées de manière centralisée , outre les persécutions et indignités quotidiennes infligées aux populations  .

En économie, dans l’ordre social , dans nos choix quotidiens ce sont les principes qui comptent. Les modalités seront trouvées  souvent aisément , quelquefois péniblement par le libre jeu de l’ordre spontané déployé par nos imaginations créatrices qui comblent le fossé entre le monde réel d’aujourd’hui et celui de demain.

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  • Ce rapport rappelle les phrases creuses de notre président comme “nous devons repenser ça” ou “nous devons reconsidérer ci”.
    Il n’est pas besoin d’être un Nobel d’économie pour comprendre qu’un marché, c’est un ensemble de fournisseurs qui vendent à des acheteurs.
    Qu’a fait l’UE du marché automobile ? Elle oblige les constructeurs à fabriquer des véhicules électriques dont les clients ne veulent pas.
    C’est tellement nullissime qu’on se demande bien pourquoi notre premier ministre affiche l’ambition que 15% de notre parc automobile soit électrique en 2030. Nous en sommes actuellement à 2% et la tendance n’est pas spécialement favorable à cette ambition gouvernementale.
    On peut faire toutes les pubs qu’on veut, nous laver le cerveau avec le délire écologiste, ignorer le résultat des élections européennes, mais c’est toujours le consommateur qui a le dernier mot.

  • Bien sûr, mais nous sommes -heureusement- en démocratie, et en l état actuel des choses, le choix libéral n’est pas majoritaire. Il n’y a d’ailleurs qu’à regarder notre spectre politique. Il nous faut attendre la chute (inévitable) de nos institutions par la faillite pour que l’alternative libérale puisse s’imposer (et même je n’en suis pas sûre tant nous sommes conditionnés par notre formation (économique , historique) à tout attendre d’un homme providentiel et d’un Etat fort ) . Bref le libéralisme n’est pas encore pour demain.

    • Si l’antidémocratisme était majoritaire ça ne le rendrait pas démocratique.
      Je simplifie mais dans le cadre de cette réflexion le libéralisme serait le libre exercice de ces moyens de décision, la démocratie la distribution de ces moyens, la république la publication des espaces d’application (enjeux, participants, négociations, résultats, opérations, périmètres d’autorité, surveillance…). Aujourd’hui les postures majoritaires ne sont ni libérales ni démocratiques.. et on est sur du 50/50 sur la question républicaine (et dans l’offre politicienne, ce sont les antirépublicains qui revendiquent le plus l’appellation de républicain) ; pour autant les attitudes et les affects me semblent plus que jamais libéraux et démocratiques, et nous nous sentons tous, globalement, élites comprises, déchirés quand ce n’est pas trahis. Nous sommes tous en train de nous rigidifier, et même si on voulait individuellement adopter une posture libérale, je ne suis pas certain qu’on en soit véritablement capable, et ce ne serait sans doute qu’un jeu de dupe avec soi-même. Consciemment et rationnellement, il n’y a pas grand monde qui attend un homme providentiel, c’est plutôt de l’ordre du réflexe.. je crois.

    • Le problème vient déjà du fait que la France na jamais été une démocratie mais une république oligarchique du style de la Rome antique! Les citoyens n’ont que le droit de voter, bien conditionnés par les media de gauche. Puis de la fermer, les élus faisant ce qui leur plait et ne tenant aucun compte du fait qu’ils sont les représentants du peuple!

      • L’industrie médiatique traditionnelle n’est pas particulièrement de gauche, non. Elle défend un statu quo dans la répartition des rapports de force, et même plus que jamais puisqu’elle n’a plus aucune légitimité technique, et de là économique et organisationnelle : elle n’existe plus que parce qu’il y a une autorité de régulation qui lui défend un secteur économique, et même qui assure une monétisation de son activité, mais pour des intérêts particuliers identifiables. On peut parler de soviétisme, ce que je comprends pouvoir être confondu avec l’idée de gauche, mais ce n’est pas la même chose en fait et la confusion est erronée (être de droite en URSS, c’était être soviétique).

  • La question fiscale me semble prépondérante et symptomatique des blocages de l’UE. Parler de “une” fiscalité juste, compréhensible… etc. ne me semble pas répondre au besoin de prise en compte des diversités sociologiques et économiques réelles, et cet universalisme erroné participe plutôt à renforcer les approches impérialistes (dont seule l’Allemagne aurait aujourd’hui les moyens, mais le souci est que tous les pays ont la leur propre quand-même, considérant notamment que leur fiscalité est forcément la meilleure puisqu’elle fait historiquement sens localement) qui ne peuvent pas du tout déboucher sur les qualités listées ici.
    Il est nécessaire de définir des critères de convergence économique sans empêcher les spécificités fiscales. Alors je sais bien que je manque de connaissance et d’inventivité (croire que ce ne serait pas nécessaire et que son bon sens et son conformisme suffiraient, est une erreur et déboucherait notamment sur la centralisation très justement repoussée ici) mais j’ai l’impression qu’un mécanisme visant à l’équilibre des balances commerciales sur les échanges internes à l’UE permettrait d’y pacifier l’économie sans en passer par la destructuration des organisations locales, sans exiger une fiscalité impériale.

  • Draghi et Macron même format. Petits fonctionnaires au cerveau étriqué, ne connaissant strictement rien à l’économie, mais persuadés de tout savoir! Ce n’est pas pour rien que la France et l’Europe sombrent dans la récession économique. Les entreprises françaises font faillite sans que cela interpelle nos politiciens débiles qui n’ont rien trouvé de mieux que de les assommer avec des impôts et taxes supplémentaires pour boucher les trous de leur gabegie!

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