La démocratie, nécessaire mais pas suffisante

Ce n’est pas la source mais les limitations du pouvoir qui l’empêchent d’être arbitraire

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La démocratie, nécessaire mais pas suffisante

Publié le 22 mars 2011
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Que feriez-vous si la majorité des Français devait décider, lors d’un vote régulier, de priver nos concitoyens d’origine nord-africaine de leurs droits civiques, de les exproprier, de les expulser et d’exterminer ceux qui refusent ? Le peuple souverain ne se serait-il pas exprimé ? Sa décision serait-elle démocratiquement contestable ? Non n’est-ce pas ?

Le cas s’est déjà présenté : qui peut ignorer que le national-socialiste Hitler est arrivé au pouvoir par la voie des urnes et que rien de ce qu’il n’a entrepris, y compris les pires horreurs, n’était « illégal » ? Une démocratie, le gouvernement du peuple – ou plus précisément de sa majorité – a accouché d’un monstre totalitaire, un gouvernement omnipotent, d’un État total et, finalement, d’une guerre totale.

Moi je désobéirais – et nous serions sans doute nombreux à le faire. Je refuserais de toutes mes forces cette décision du peuple souverain et m’élèverais contre son application. Et pourtant je suis démocrate et je crois, comme Winston Churchill, que la démocratie est la pire forme de gouvernement à l’exclusion de toutes les autres.

Hayek disait que ce n’est pas la source mais les limitations du pouvoir qui l’empêchent d’être arbitraire. La démocratie, à elle seule, n’est pas suffisante. Nous avons besoin de plus: nous avons besoin d’une démocratie avec des garde-fous qui interdisent à l’État, expression de la majorité, d’attenter à nos libertés les plus fondamentales. Les fondateurs de notre République avaient pleinement conscience de cette nécessité absolue et nous avaient dotés, avec la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, d’un tel dispositif.

Les idéologies extrêmes et liberticides prolifèrent – des nationaux-socialistes du Front National, aux socialistes du Front de Gauche en passant par les étatistes de l’UMP, du PS, du Modem et de Debout la République. Les français accusent l’économie de marché et la mondialisation d’être responsables de nos maux et – terrible ironie – demandent encore plus d’État pour les protéger. On entend parler de protectionnisme : qui se souvient que c’est précisément les politiques protectionnistes d’avant-guerre qui ont précipité l’Europe dans le bain de sang de la seconde guerre mondiale ? On accuse les étrangers, les capitalistes, les paradis fiscaux et, d’une manière générale, ces autres qui font de si bons boucs émissaires à jeter en pâture à une opinion publique déchainée. Faut-il que l’histoire ne nous ait rien appris ? On surveille internet, on limite la liberté d’expression, on demande des aides à l’État, on met la presse au pas… Les temps de crise sont des périodes dangereuses, propices au son des bottes.

Plus que jamais le « gouvernement omnipotent » de Mises [1] et « la route de la servitude » [2] de Hayek nous alertent sur les dangers totalitaires qui se cachent derrières ces politiques. Plus que jamais nous avons besoin de liberté, d’une véritable et authentique liberté au sens premier du terme : la démocratie et un État limité.

Notes :

[1] Ludwig von Mises, Omnipotent Government: The Rise of Total State and Total War (1944).
[2] Friedrich August von Hayek, The Road to Serfdom (1944).

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  • je suggère pour votre titre : MA démocratie à MOI

    en quoi votre pensée et vos idéaux sont-ils supérieurs à ceux de la majorité des français ?!
    Comment peut on se dire démocrate et dans la phrase qui suit dire qu’on ne respectera pas le choix du peuple ?
    en quoi vous pensez ‘mieux’ que les autres ?

    Je suis pour la peine de mort. l’Etat est contre. Qu est ce que je fais ?
    si je suis votre raisonnement, demain je vais tuer le 1er pédophile que je rencontre.

    Et pour justifier le fait qu’on n’écoute pas le peuple, on nous ressort Hitler et les Nazis.
    grandioze

    Si les résultats des élections ne vous conviennent pas, faites comme moi, quittez le pays. Mais ne demandez à la majorité de vous laisser faire comme vous le souhaitez.

    Oh, et comme destination, je vois que vous aimez l Afrique du nord, je vous conseille l’Algérie, une démocratie avec tout plein de « garde fou » comme vous dîtes ! plein de contre pouvoir à ces idiots de ‘citoyens’ qui votent pas comme il faut.

    • Romain vous faites dans l’absolutisme démocratique. La démocratie a été mise en place comme un système parmi d’autres pour que les libertés fondamentales et les droits naturels soient respectés. N’oubliez pas cela, la démocratie n’est pas le but, c’est un moyen -et celui qui a le moins mal marché en général-.
      Pour cela que tous les pays se dotent d’une constitution ou de textes d’engagement où pas seulement on rappelle le fonctionnement de l’Etat et du système démocratique, mais avant tout cela on rappelle (de manière vague et imparfaite certe) les droits et les libertés de chaque individu. Et l’affirmation de ces droits priment sur les bêtises qui peuvent sortir du suffrage universel ou du vote de nos représentants.

      Cette idée, oui, est supérieure, je crois qu’en principe tout le monde est d’accord quand on rappelle que nous avons des droits. Si une décision ne nous plait pas, je crois que l’on a encore le droit d’exprimer son mécontentement et de militer pour son abrogation, personne n’a parlé de tuer je crois qu’il n’est pas utile de rappeler que tuer va à l’encontre des droits les plus fondamentaux, donc stop à l’homme de paille. Quant à la désobéïssance, si vous pouvez vous le permettre pas moi, mais bien des fois des lois ne s’appliquent pas c’était donc qu’elles étaient inutiles, stupides et n’avaient pas le l’accord du peuple.
      L’émigration est une possibilité, une forme de contestation, une manière de dire raz-le-bol et de se soulager, mais bien peu de monde peut se le permettre.

      Que doit-on faire si on ne peut émigrer et si on n’a pas le droit non plus de ne pas être d’accord avec la majorité? Se taire? Elle est belle la démocratie à la Romain, en tout cas je n’aimerais pas y vivre et préfère 1000 fois celle de Georges Kaplan. Ta démocratie consiste à abrutir l’individu qui doit se plier

      • l’idiot du village va essayer de répondre:

        Ce que l’auteur écrit…

        « Moi je désobéirais – et nous serions sans doute nombreux à le faire. Je refuserais de toutes mes forces cette décision du peuple souverain et m’élèverais contre son application. Et pourtant je suis démocrate »

        …est purement choquant !

        Vous voulez qu’il y ait des droits fondamentaux inviolables que même le peuple ne puisse pas revenir dessus.
        Et qui décide de ce qui est inviolable ? Et là, badaboom, on retombe dans la situation où l’Etat pense pour le peuple, Je pensais bêtement (encore une fois) que l’Etat c’était le peuple, et pas 20 mecs ‘tout là haut’ qui décident ce qui est bon et ce qui est mal ! Des hommes de vertu certainement…

        Votre vision part du principe que l’Homme est profondément débile. Et que des personnes éclairées doivent penser pour lui, lui mettre des limites.
        un peu comme des gosses dans une cour de récré: « t’es gentil tu vas jouer mais tu passes pas la barrière ».

        Je considère que votre façon de voir, c’est de l’asservissement d’une majorité par une minorité !

  • romain,

    La démocratie et la légitimité du pouvoir c’est l’excuse qu’ont avancé les cadres nazis à Nuremberg. Effectivement, on peut choisir de fuir, on peut aussi choisir de se battre pour ses idées ou on peut choisir d’obéir. Mais ce planquer derrière « le choix du peuple » pour justifier l’injustifiable c’est – au mieux – de la lâcheté.

    Tu ne cede malis sed contra audentior ito.

    • Que je sache, être fonctionnaire n’a rien d’un droit de l’Homme, d’une liberté fondamentale (nonobstant le 21-2), alors il est où, le problème ?

      • Et donc, la conclusion logique, c’est qu’il est interdit à un citoyen d’être fonctionnaire (par contre, il peut être magistrat). Rien de grave, des endroits très fréquentables ont déjà fonctionné comme ça.

  • Très bon article. Cependant pour aller plus loin, interrogeons nous sur le meilleur moyen de garantir le droit naturel des individus.
    Personnellement, je suis plutôt d’avis que c’est le rôle d’une constitution, une bonne constitution ayant pour objectif de garantir les libertés individuelles et les droits fondamentaux, et d’organiser des contre-pouvoirs forts pour limiter la capacité de nuisance des gouvernants (vision pas très française, puisque pour les politiciens de notre charmant pays, une constitution a pour vocation de permettre de gouverner « efficacement »).
    Cependant, on m’a déjà reproché d’avoir une vision naïve sur ce point, et qu’après tout, la constitution américaine est systématiquement violée (en même temps, elle a tout de même empêché les US de sombrer dans le totalitarisme, notamment sous Roosevelt). Dans cette optique là, le droit de porter des armes n’est il pas le meilleur moyen de maintenir un contre-pouvoir face au monopole de la violence légal de l’état si celui-ci en abuse? Personnellement, je n’aime pas trop cette idée et beaucoup de dérives sont possibles (coups d’état, développement de groupuscule fascistes…).
    Qu’en pensez vous?

    • Mon avis est que jamais les 3 pouvoirs ont été séparés dans un aucun pays:

      Par exemple, aux Etats-Unis, au sein du législatif, le sénat et la chambre des représentants sont souvent du même bord politique, aucun ne contre-balance l’autre. En période de cohabitation, l’exécutif -le président- a un droit de véto mais il serait mal vu de l’utiliser ou il peut chercher à négocier avec le parti adverse, tu acceptes ma loi et j’accepte la tienne, chercher à séduire la chambre des représentants pour approuver sa proposition de loi. D’autre part, l’administration fédérale et locale a pris un pouvoir démesurée.

      En France, le pouvoir législatif est inexistant face au pouvoir exécutif. Les deux élections ont lieu au même moment tous les 5 ans, les élections législatives ne sont là que pour donner les instruments nécessaires au président pour appliquer son programme. L’assemblée nationale est une chambre d’enregistrement, le premier ministre un adjoint, et le sénat aux mains des baronnies locales. Quant au pouvoir judiciaire il est entièrement dépendant des deux autres.

      En Grande-Bretagne ou en Espagne, le chef de l’Etat (le monarque) n’a pas de rôle décisif, son rôle direct a été délégitimé puisque non-élu, il s’en tient à un rôle de représentation et non de contre-pouvoir. Le gouvernement est issu du parlement dans lequel il est majoritaire, la chambre des lords et le sénat en Espagne n’ont pas de rôle majeur. Bref le parlement est une chambre d’enregistrement, il était censé contrôler le gouvernement c’est lui qui est manipulé. Si un parti n’a pas la majorité absolue, commence le bal des hypocrites et la dictature des partis. Les élections ont lieu beaucoup trop régulièrement, ce qui incite à l’inflation de promesses électorales.

      Il faut revoir tout ça, lire Hayek à ce propos.

      • Tocqueville l’avait déjà remarqué : le peuple est le pouvoir ultime, quand c’est lui qui détient le pouvoir il n’y a aucun contre-pouvoir capable de s’opposer à lui. Pour que l’ensemble marche sans que le peuple écrase tout ce qui dépasse, il faut que le peuple soit uni sur l’essentiel (ultra-minimal : les frontières extérieures, un respect mutuel, le socle « droits de l’Homme » ; et c’est à peu près tout) et divisé à mort sur tout le reste (y compris langue, religion etc.). La suisse se rapproche bien de ça ; on peut éventuellement ajouter les USA, voire la GB.

    • C’est pas mal en apparence, mais si les élus vivent entièrement de leurs électeurs ou de leurs sponsors, la corruption, le conflit d’intérêt et le lobbying deviendront endémiques.

      • Bien sûr que ça sera pire, regarde les pays du tiers-monde, on a encore du chemin pour que le niveau de corruption atteigne le leur 🙂
        D’autre part, voter les lois qui arrangent les lobbys qui en échange paient une somme, rien ne porte pas à croire que les politiciens travailleront enfin pour l’intérêt général mais bien au contraire pour des intérêts particuliers (associations, capitalisme d’Etat, syndicats etc..), il en résultera une dictature des minorités et une inflation législative.
        Ensuite, si les hommes politiques ne touchent rien pour leurs responsabilités d’élus, il y a fort à parier qu’ils chercheront davantage que maintenant à toucher des intérêts en nature, lors des appels d’offres sur les marchés publics notamment, ce qui accélérera la gabegie actuelle.

      • Parce que le 19ème siècle était un autre contexte, la social-démocratie bien moins avancée, la même chose aujourd’hui on est foutu. Un politicien qui touche de syndicats en échange lui accordera davantage de prébendes, le système de non-rémunération va accélérer la subventionnite.
        Note que je ne dis pas que le système actuel est parfait, loin de là, mais jene vois pas comment par magie leur supprimer la rémunération va réduire la diarrhée législative.

        Et même, la politique deviendrait un négoce rentable, les vermines qui nous gouvernent actuellement n’iraient absolument pas s’occuper de leurs affaires mais profiteraient de cette ouverture pour s’enrichir davantage. Demain la SNCF t’accorde 100.000 euros/mois pour empêcher de libéraliser le marché+ un bonus en cas de réussite, ben t’es le client de la SNCF tu l’as dans les fesses, car toi tu n’as pas assez d’argent pour faire la même chose, bref la loi irait dans le sens des plus influents, plus ou autant qu’actuellement. La politique cesserait de devenir un rôle de représentation mais deviendrait un business rentable, et ce, sur le dos de ceux qui ne sont pas organisés (note que c’est déjà le cas actuellement mais ce serait pire).

      • Bon c’est à voir pour la non-rémunération.
        Pour le reste, tous ces mécanismes peuvent aider, de même que la démocratie directe, un pouvoir judiciaire élu parmi des juges compétents et non nommé par l’exécutif etc…Et +1 pour l’inélégibilité des fonctionnaires

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