Retraites : la psychologie des Français est-elle en train de changer ?

Alors que 84 % des Français soutiennent désormais la capitalisation pour financer leurs retraites, une tendance surprenante émerge chez la jeunesse. Loïc Rousselle explore la perspicacité des jeunes manifestants contre la réforme des retraites, et leur quête d’équité intergénérationnelle.

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Retraites : la psychologie des Français est-elle en train de changer ?

Publié le 8 septembre 2023
- A +

84 % des Français sont désormais favorables à la capitalisation pour financer leurs retraites !

Et cette tendance est particulièrement marquée chez les jeunes… Ces mêmes jeunes qui étaient très nombreux dans les cortèges de manifestants opposés à la réforme des retraites.

Ce constat factuel peut sembler paradoxal au premier abord… La préoccupation pour la retraite n’est- elle pas une question déplacée pour ces jeunes gens ? Manifester contre la réforme, n’est-ce pas un soutien implicite à la répartition ? Leur présence massive dans les manifestations contre la réforme a souvent été mal interprétée par les médias, ou analysée comme un refus de s’engager pleinement dans le monde du travail.

 

Nos jeunes sont-ils devenus fainéants ?

Non, les jeunes Français qui entrent sur le marché du travail, et qui sont opposés à la réforme des retraites ne sont pas des fainéants. Ils sont lucides tout simplement. Ils ont parfaitement conscience que l’on va leur demander de verser tout de suite des cotisations très importantes pour fournir des pensions aux retraités actuels, alors qu’ils n’auront pas droit aux mêmes pensions quand leur tour viendra… Pour des raisons démographiques évidentes.

Le refus des jeunes d’accepter la réforme des retraites proposée par le gouvernemet de monsieur Macron est une question d’égalité dans le temps, d’équité intergénérationnelle.

En 1959, il y avait 0,24 retraité par cotisant contre 0,73 aujourd’hui… Et ce déséquilibre ne fera que s’accentuer.

Le système actuel est intenable, et les jeunes le savent.

Leur participation aux manifestations contre la réforme des retraites n’était absolument pas un soutien au système actuel basé à 100 % sur la répartition, ou un désintérêt pour le travail, mais bien une volonté de changer le système actuel, comme le démontre ce sondage.

Qui peut leur donner tort ?

Personne de bonne foi assurément : quand en 1959 les dépenses de retraites représentaient 5 % du PIB, en 2020 elles sont montées à 15,9 % du PIB !

Ces dépenses sont essentiellement prélevées sur le travail… Des jeunes justement.

 

La psychologie de la foule est en train de changer

L’information modifie lentement la psychologie de la foule française.

Les comparaisons entre les différents systèmes de retraites et leurs coûts respectifs à l’intérieur de l’UE sont, à l’ère d’internet, faciles à obtenir pour les jeunes Français.

Les excellentes performances en matière de retraites des pays ordolibéraux sont désormais bien connues : les Pays-Bas consacrent 12,8 % de leur PIB pour leurs retraites, le Danemark 12,9 %, l’Allemagne 12,6 %… Alors que la France dépense 15,9 % soit 3 % du PIB en plus.

C’est une différence considérable de coût, sans que le service rendu soit meilleur.

En 1895, dans son ouvrage majeur Psychologie des foules, Gustave Le Bon nous dit :

S’il faut longtemps aux idées pour s’établir dans l’âme des foules, un temps non moins considérable leur est nécéssaire pour en sortir. Aussi les foules sont-elles toujours, au point de vue des idées, en retard de plusieurs générations sur les savants et les philosophes. Tous les hommes d’État savent aujourd’hui ce que contiennent d’erroné les idées fondamentales citées à l’instant, mais leur influence étant très puissante encore, ils sont obligés de gouverner suivant des principes à la vérité desquels ils ont cessés de croire.

La psychologie de la foule évolue très lentement, et quand elle le fait, ces évolutions perdurent pendant plusieurs générations.

Aucun politicien ne peut gouverner contre la psychologie de la foule. Tous les professionnels de la politique le savent.

Nous sommes actuellement en train de vivre un mouvement souterrain mais puissant de modification de la psychologie de la foule. Ce mouvement, qui affecte de nombreux États providence, peut être résumé par une formule lapidaire : la perte de confiance dans l’État.

Ou plutôt, le déplacement de la confiance des services publics vers les services privés.

Le chiffre de 84 % de la population ne faisant plus confiance à la seule répartition (et donc à l’État) est éloquent… Un autre indice de la perte de confiance des Français dans le service public est visible dans une étude montrant la perte quasi totale de confiance dans les médias publics. Seuls 18 % des Français ont encore confiance dans les médias du service public.

Les signaux faibles sont partout.

La lente modification de la psychologie de la foule est bien engagée désormais… Pour Gustave Le Bon, ce type de mouvements est durable, et entraîne systématiquement l’adaptation des politiques, car c’est elle qui commande aux politiques, et non l’inverse.

Il est donc très probable que le système de retraite des Français évolue prochainement ainsi que, plus généralement, tout le modèle français d’État providence, pour se rapprocher des systèmes des pays ordolibéraux qui nous entourent.

Le changement actuellement constaté est très prometteur, et constitue une excellente nouvelle pour nos libertés.

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  • Excellente citation de G Lebon…!

  • Mais n’est-ce donc pas la mission des politiques, des intellectuels et des medias d’informer, d’instruire le peuple, d’expliquer la réalité des choses pour éviter à la société de se fracasser sur le mur de la réalité ?
    Ce serait un devoir moral, bien sûr, mais comme on a sorti la moralité de la boite à outils politique et qu’on est en démocratie élective, les politiques préfèrent flatter le peuple dans le sens du poil pour préserver leur job. Et ça le peuple l’a compris aussi, les politiques ne sont pas au service du peuple mais se servent. C’est comme ça que l’on détruit la confiance.
    Et pour la reconstruire, il va falloir renouer avec les mots que l’on s’interdit depuis quelques décennies par idéologie (certains diraient par orgueil), qui ont tous été ringardisés, qui sont devenus tabous et qui nous manquent cruellement pour agir, car ils font partie de la réalité humaine: courage, sincérité, vertu, jugement.
    On a jeté le bébé avec l’eau du bain. On déboulonné les valeurs de la civilisation gréco-latine et judéo-chrétienne qui nous a fait ce que nous sommes en même temps que les institutions religieuses corrompues qui opéraient en connivence totale avec les pouvoirs politiques d’alors.
    Il est temps de ramasser les morceaux philosophiques.

  • Les 84 % de Français favorables à la capitalisation ?? Dans l’article de BFM, c’est ça :
    « Les Français ne se sont pas prononcés dans ce sondage sur l’éventuelle transformation du régime actuel des retraites en système par capitalisation. Mais ils montrent un fort intérêt à épargner eux-mêmes pour leurs vieux jours. »
    Non, les jeunes ne manifestaient pas pour la capitalisation mais bien pour que Maman Etat étende un peu plus son voile protecteur.
    Non, il n’y a pas de signaux faibles indiquant que les Français comprendraient l’économie !

    Aviez-vous fumé avant de rédiger cet article ?

  • Qui empêche les jeunes de capitaliser actuellement pour augmenter leur retraite de base?
    dans ces 84 %..combien seront invalides ou décédés avant 65 ans? ?.je sais bien que dans les médias, on nous montrent toujours des « seniors », en pleine forme, le cheveux grisonnant, la dame ayant des allure d’adolescente…Les gens n’ont plus confiance dans ces médias là, on comprends pourquoi…
    Etre retraité ce n’est pas seulement être jeune sans travailler et avec une bonne retraite, c’est aussi être VIEUX: malade, parfois ayant du mal a marcher, voyant mal…etc…
    Combien de vieux donnerait tout ce qu’ils possèdent simplement pour retrouver la vitalité de leur jeunesse?
    L’argent pour faire tuer des jeunes Russes et Ukrainiens, on en trouve…si demain il faut renflouer un fond de pensions qui fait faillite, ou une banque, l’ETAT en trouvera….la solidarité ce n’est uniquement un problème d’argent…c’est un choix de civilisation…

    -1
    • Qui empêche les jeunes de capitaliser en vue d’augmenter leur retraite ? Le fisc, évidemment. Pour que la capitalisation soit intéressante, il faudrait qu’elle soit défiscalisée. La rente offerte par la capitalisation est réduite de plus de 35% par les impositions diverses pendant la constitution du patrimoine s’il est financier, de plus encore s’il est immobilier, sans compter que la retraite sera encore imposée à environ 17% en moyenne si ça n’empire pas d’ici-là. S’y ajoute la réglementation qui rend quasi-impossible la diversification internationale souhaitable, augmentant ainsi les risques à un niveau inacceptable. Enfin, la capacité d’épargne est obérée par les cotisations à la répartition à des niveaux inégalés ailleurs.

      • C’est d’autant plus bête que la défiscalisation (en échange de l’abandon de droits à répartition) serait la voie la plus simple pour apporter une importante composante capitalisation dans les retraites, et qu’elle pourrait se faire sans réduire les recettes de l’Etat (et même en augmentant les revenus des citoyens). La question des pactes tontiniers est également intéressante, une tontine permettrait sans doute de ramener à zéro les frais d’une retraite par capitalisation, voire d’en accroître le rendement. Il est surtout incompréhensible qu’aucun candidat ne propose une telle voie pour sortir de la question des retraites. Sont-ils tous attachés au monopole étatique sur les retraites, quoi qu’il en coûte ?

    • @serguei « qui empêche les jeunes ? » : mais les impôts stratosphériques. A quoi il faut ajouter un immobilier cher et que peu de jeunes peuvent espérer acquérir vu les prix et les taux . A quoi il faut ajouter des hausses de salaires ridicules . Avez vous la moindre idée de la situation des jeunes? Et du pourquoi certains jettent l éponge ? Alors vous dites « ils ont la jeunesse » , mais cette jeunesse vous l avez eue aussi , est ce tout ce que vous avez trouvé comme excuse pour les tondre ?

      • Evidemment ! et, en principe, tout retraité en est passé par là : Grosses difficultés pour acheter la première résidence, première voiture et mobilier, parce que littéralement plumés par le fisc. Puis, suer sang et eau pour tenter de progresser niveau salaires (ou autre revenu courant), tout en jonglant avec les mutations géographiques, les bonnes écoles à payer pour les enfants, les ainés à soutenir, l’obsolescence des biens courants et l’envie de prendre l’air en vacances de temps en temps ; en 3ième partie de parcours, lutter avec acharnement contre les pourris – escrocs qui grenouillent dans l’immobilier et font monter les prix de façon stratosphérique + les premiers ennuis de santé coûteux ( les escrocs aussi du système médical), et toujours le fisc à l’affut et aux trousses pour vous dépouiller de  » tout ce qui dépasse » et +. Et, en 4ième partie de parcours , juste avant le grand déclassement du retraité qui n’est ni bronzé, ni super-actif, ni en pleine forme, ni gai et joyeux à N -1 avant de garder (et +) les petits-enfants, l’adaptation et sécurisation  » sauve qui peut » du sweet-home final et son véhicule support ( voire les aides et auxilliares de vie) tout en gérant la disparition-déconfiture de la génération précédente qui ne vous a laissé, en guise de  » patrimoine familial » à partager, qu’une maison usée dont l’agent immobilier-escroc à l’affût vous dira qu’elle est pourrie, une bibliothèque, quelques photos, vaisselle et linge bons à jeter ( faute de place aussi : trop tard pour tout ..)°
        Et vivent les croisières en méditerranée, pour les inconscients simplets qui ne perdent rien pour attendre !

  • « Alors que la France dépense 15,9 % soit 3 % du PIB en plus.
    C’est une différence considérable de coût, sans que le service rendu soit meilleur. »
    Ben si ! Vu de l’actif. Il part en retraite plus tôt…
    Au risque de casser l’ambiance, le soutien à la capitalisation n’est pas franc, ni total.
    Il est la conséquence de la succession des réformes de retraite. Qui démontre que le système n’est plus viable.
    Ce sont ces piqûres de rappel qui font évoluer la psychologie de notre foule.
    Pas le fait que le pouvoir en parle. Le fait que le pouvoir agisse.
    L’on se dirige vers la capitalisation. C’est une très bonne chose. Mais pour beaucoup, c’est sans enthousiasme, sinon à contre-coeur.
    « La resignation allège tous les maux sans remède » (Horace)

  • La retraite par capitalisation serait une folie en France. Dès qu’un gouvernement aurait besoin d’argent, il puiserait dedans par la création de nouveaux impôts. Je rappelle que l’assurance vie était exempte d’impôt jusque dans les années 90. De même, les loyers subissent désormais la CSG alors que les locataires l’ont déjà payé sur leur salaire.

    • Mais il faut bien reconnaître que la répartition seule est un vrai système de Ponzi. La capitalisation est le seul levier de lissage des variations démographiques. La solution ne peut-être que dans un savant mélange des deux. Sur un autre axe de décision il y a aussi d’autres options: un système unifié, ou segmenté par profession ou par région, ou individuel ? Toutes les options doivent être sur la table et bien sûr en évitant les positions de monopoles pour éviter les risques d’abus de position dominante. Chacun devrait pouvoir se constituer librement un panier-retraite où chaque offre de service retraite serait en concurrence non-biaisée avec les autres.

      • Pour pouvoir repousser les griffes du rapace, il est impératif que capital et droits chiffrés à répartition soient attribués explicitement dès la cotisation sur un compte personnel pour chaque individu, et que ce compte soit entièrement défiscalisé. Toute fiscalisation ultérieure apparaîtrait ainsi pour ce qu’elle est : un vol. Ca n’est pas du tout la même chose pour un gouvernement d’aller se servir dans une caisse collective de retraite par capitalisation, ou dans le compte personnel dont le cotisant a contemplé pendant des années la croissance et la rente future chiffrée. Ensuite, le cotisant doit avoir le libre choix des systèmes de gestion de ses fonds, du plus individuel type PEA actuel au plus collectif type répartition, et de la répartition entre eux. Pour la gestion collective capitalisation, je propose une possibilité de « ligue de compétition des fonds de pension », où n’importe quel gestionnaire pourrait s’inscrire du moment qu’il présente les garanties de réassurance exigées, et où les fonds seraient attribués en priorité aux plus performants et aux plus petits, un peu comme la NBA.
        Pendant la période de transition, seule une partie des cotisations serait attribuée au compte de chacun, le reste servant à la survie de la part répartition non choisie antérieure à la réforme.

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