Impôts : quelque chose de pourri au Royaume de Norvège ?

Dans un contexte de hausses fiscales et d’un virage politique à gauche, de riches Norvégiens quittent leur pays pour la Suisse.

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Impôts : quelque chose de pourri au Royaume de Norvège ?

Publié le 30 juin 2023
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Le journal Le Monde du 23 juin cite le départ vers la Suisse de 33 gros contribuables norvégiens.

De nouvelles hausses d’impôt ainsi que les déclarations virulentes de plusieurs passionorias travaillistes, mais surtout « rouges », ont mis le feu au poudres : la Norvège va-t-elle « chasser ses riches », comme le rêvent, chez nous, une partie de la gauche ? Comparaison n’est sans doute pas raison car on va le voir : la Norvège est bien différente de la France, tout au moins jusqu’à présent.

Après l’élection législative de septembre 2022, la droite norvégienne a perdu sa majorité. En octobre dernier, ce renversement politique a débouché sur la formation d’un gouvernement minoritaire, fruit d’une coalition hétéroclite allant de l’extrême gauche au centre. Le nouveau Premier ministre Jonas Store, qui gère cette coalition, a succédé à Jens Stoltenberg à la tête du Parti travailliste en 2014.

 

Un pays riche et méconnu

La Norvège est un royaume de contrastes : pays le plus septentrional de notre sous-continent, son grand territoire (385 000 km², soit à peu près trois quarts de la France métropolitaine), est peu peuplé (5,5 millions d’habitants) ; son espace maritime est stratégique à plusieurs titres : d’une grande richesse minérale, on y produit du gaz et du pétrole de qualité ; c’est aussi une ressource halieutique qu’exploite -en quasi-monopole- une flotte de pêche très active et une aquaculture intensive, très compétitive : qui ne connait pas le saumon sauvage de Norvège ?

Vide d’habitants, ou presque, la vaste montagne norvégienne est truffée d’installations hydro-électriques, discrètes mais efficaces, et très modernes ; son réseau de distribution est interconnecté avec toute la Scandinavie, et même avec l’Europe du Nord. Qu’elle soit électrique ou pétrolière, l’énergie est au cœur de la richesse norvégienne qui n’est pas mince.

 

En Europe, dans la mesure du strict nécessaire

Politiquement circonspecte, la Norvège s’est soigneusement tenue à l’écart depuis 1956 des machins européens auxquels elle ne participe que timidement, et lorsqu’elle y trouve son intérêt, un peu comme a su le faire jusqu’à présent la Confédération helvétique : associée à l’espace européen, sans être membre de notre union politique.

Last but not least : frontalière de la Russie au grand nord de l’Europe, la Norvège est surtout un pion-maître de l’Alliance atlantique car ses eaux territoriales et son espace maritime sont un passage imposé que doit emprunter la flotte russe pour voguer vers l’Atlantique et manifester sa présence sur les mers libres. Les stratèges américains n’ont jamais négligé ce détail.

C’est pourquoi Jens Stoltenberg, Premier ministre travailliste de Norvège entre 2002 et 2014, fut choisi comme secrétaire général de l’OTAN, fonction qu’il assume encore jusqu’en octobre 2023 avant de prendre ensuite la présidence du gigantesque fonds souverain norvégien.

 

Un pays riche, une population très à l’aise, et pourtant…

Parlons un peu de la richesse norvégienne.

Avec plus de 100 000 euros de produit national par habitant (moitié moins pour la France qui est douze fois plus peuplée) la Norvège est l’un des trois pays les plus riches d’Europe, presque du monde, quasi à égalité de la Suisse et de ses 8,5 millions de citoyens.

Ces chiffres font rêver bien d’autres Européens, et pourtant : pourquoi les Norvégiens les plus aisés décident-ils de quitter leur pays ? Pour payer moins d’impôts ? Pas si sûr !

D’abord parce que l’impôt suisse n’est pas nul, au contraire. Les taux d’imposition helvétiques (qui varient d’ailleurs beaucoup d’un canton à l’autre) sont rarement indolores, notamment dans les grandes villes. Mais, au contraire de la France, et semble-t-il, de la Norvège d’aujourd’hui, la très grande majorité des Suisses savent à quoi servent leurs impôts dans leur vie quotidienne : villes saines et propres, montagnes et campagnes soignées ; services et transports ponctuels et entretenus ; police et armée équipées, bien entraînées, hopitaux accueillants et bien organisés, etc.

 

Une exception suisse ?

S’il y a une exception suisse qui marque ses habitants, ce n’est donc pas l’absence d’impôts, mais ce à quoi il sert et, surtout, l’état d’esprit qui anime ceux qui l’établissent, le percoivent et le gèrent : le contribuable n’est jamais méprisé. Il est au contraire d’autant plus respecté qu’il contribue à entretenir la communauté au sein de laquelle il vit. Ni dépit, ni jalousie de la richesse du prochain. Le poids de la fiscalité reste raisonnable eu égard à ce qu’elle produit. Et il y règne une rare et remarquable concorde sociale que trop de nos pays d’Europe ont oublié depuis longtemps.

Ce sont cette concorde, ce climat fiscal serein qui expliquent surtout l’attractivité helvétique, et non l’absence ou l’inocuité d’un impôt qui n’est jamais absent du ciel suisse, au contraire.

Ainsi, au fil des décennies, cette sérénité, promise et durable, continue d’attirer vers Lugano, Bâle, Zurich, Lausanne ou Genève ces « riches » migrants qui y prennent racine avec la certitude qu’ils y vivront au calme, qu’ils échapperont à la vindicte haineuse que semble réveiller ces temps-ci la haine fiscale des gauchistes norvégiens à l’égard de leurs riches concitoyens qu’ils accablent de sarcasmes, comme l’explique innocemment l’article du Monde évoqué plus haut.

 

Le gâteau public norvégien : un capitalisme mondialiste

Quelques mots enfin sur ce riche gâteau norvégien, qui est si bien fourni : ordonnée par un planisme socialisé depuis très longtemps, l’exploitation des richesses et du potentiel de son territoire terrestre et maritime, n’a, jusqu’à présent du moins, pas été gâchée par un État-providence impécunieux : c’est l’un des rares exemples -avec Singapour, peut-être ?- d’un capitalisme d’État prévoyant.

Créé en 1990 comme une tire-lire nationale, ce fonds devait financer à long terme la retraite des Norvégiens, et contribuer au budget de l’État ; c’est bien ce qu’il a fait jusqu’à tout récemment, en proportion à peu près égales.

Géré par la Banque centrale du royaume, cet organisme public est le plus important des fonds souverains actuels. C’est aussi un parfait paradoxe puisque le patrimoine et les revenus de ce fonds constituent un projet purement capitaliste. Les retraites confortables des citoyens de la plus parfaite des social-démocraties contemporaines, sont administrées par un fonds public qui gère, en parfait rentier, un gigantesque portefeuille d’actions, d’obligations et de produits dérivés subtils, un projet caractéristique de la finance moderne la plus caricaturale : tous ces titres sont achetés ou vendus sur toutes les bourses mondiales, ces achats et ventes participant beaucoup à l’équilibre ou au déséquilibre du marché financier mondial.

 

Conclusion, sans doute temporaire

La situation norvégienne témoigne du double langage qui caractérise l’économie politique actuelle, surtout au nord de l’Europe : la Norvège est un pays vraiment riche, développé à l’extrême, qui jouit d’une rente pétrolière gérée par des moyens d’État. Ce pays à première vue équilibré et calme, trébuche sur ses propres contradictions à l’occasion d’une élection ordinaire.

Pays de tradition profondément socialiste, habité par de purs rentiers, il tombe dans la caricature : une partie des élus stigmatise brutalement ses « riches », les accable de tous les maux alors que, comme beaucoup d’autres Scandinaves, leurs entreprises ont su, au fil du temps, innover, investir et conquérir les marchés mondiaux : Alfred Nobel, inventeur de la dynamite ; le danois Maersk, plus grand armateur mondial ; les Suédois Ikea, entreprise familiale, ou Ericsson, le dernier équipementier télécom compétitif d’Europe ; et, pour la Norvège d’aujourd’hui, Aker SAA au Norvégien Kjell Rokke, qui s’est récemment replié sur la Suisse…

Souvenons-nous du monologue d’Hamlet : « Somethng is rotten in the Kingdom of Denmark » ! En est-il ainsi du royaume de Norvège aujourd’hui ? Veillons au grain…

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  • N’oublions jamais qu’un parti politique n’existe que s’il a des adhérents et surtout des électeurs. Et les électeurs de la gauches sont des pauvres envieux et jaloux, totalement manipulés et incapables d’analyser leur environnement et l’avenir de leurs enfants. Donc plus il y a de pauvres, plus la gauche gagne les élections, plus elle fabrique des pauvres. La gauche danoise connaît parfaitement cette musique qu’elle doit jouer pour se faire réélire.

    • Je croyais qu’il n’y avait pas de pauvres dans ce pays?

      • Troll idiotique. Personne n’a dit cela.

      • Au niveau de ce pays, il ne s’agit pas de pauvres, mais tout simplement de moins riches, jalousie et envie….et manipulation à la Melanchon….
        Donc il faut prendre l’argent des riches, même si on n’en a pas besoin…

      • @suqirrel la pauvreté est un concept tout à fait relatif .Le gauchiste ne regarde et convoite que la maison de son voisin. Elle ne se résume d’ailleurs pas à des devises . Tout Européen est ainsi fort de son passeport, lequel lui ouvre les portes de bien des pays, et son réseau d’ambassades le suit et son pays au besoin , vient le chercher ou tout au moins cherche à savoir ce qui lui est arrivé s’il ne revient pas au bercail . Les africains ont coutume de dire « les blancs sont comptés » , aucun africain ne l’est, et les frontières sont pour eux des obstacles à franchir , nos insouciants « backpakers » occidentaux parcourent ainsi le monde , croyant vivre une expérience immersive . Chiche qu’ils rendent leur passeport ?

  • L’article me laisse sur ma faim. Il n’y a aucun détail sur la fiscalité en Norvège et son évolution récente, ce qui empêche d’apprécier le propos de l’article. Par exemple l’auteur nous dit qu’en Suisse l’impôt est accepté parce que bien utilisé, laissant entendre que ce n’est pas le cas en Norvège alors qu’il écrit par ailleurs que le pays est bien géré !! Néanmoins à la teneur de l’article, j’ai le sentiment que le problème de la fuite des riches pour la Suisse en Norvège serait le résultat de la vindicte gauchiste et de son discours culpabilisant.
    La différence entre la Norvège et la Suisse se situerait avant tout sur l’idée d’impôt punitif ou non pour les riches. J’en déduis que le plus important c’est le message derrière l’impôt.

    • J’ai une amie norvégienne qui était très dépitée de voir la flambée des prix de l’électricité juste pour s’aligner sur les prix européens alors que le pays est un énorme producteur hydroélectrique. Ca fait longtemps que je ne suis pas allé à Oslo, mais je crois comprendre que ça n’a plus rien à voir avec ce que je connaissais vu les restrictions écolo. La Norvège semble changer beaucoup plus que la Suisse, et je ne suis pas sûr que les Norvégiens comprennent pourquoi.

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