Selon le média russe Kommersant, la Turquie aurait signé un contrat avec la Russie pour la fourniture du deuxième régiment de systèmes de missiles antiaériens S-400. Celui-ci prévoirait en outre la localisation de la production de composants individuels. Une coopération aussi bien commerciale que technique.
Ankara, quant à elle, nie l’existence d’un tel contrat, arguant que le deuxième régiment était prévu dans le contrat original signé des années auparavant.
Dans tous les cas, la coopération entre la Russie et la Turquie se maintient et montre encore une fois la position singulière de cette dernière.
Une coopération militaro-industrielle qui se maintient avec la Russie… mais aussi l’Ukraine
L’importation de systèmes anti-aériens russes par la Turquie n’est pas nouvelle. Dès 2017, Ankara a acheté des S-400 dont les premiers ont été livrés en 2019, ce qui a provoqué la colère de l’administration Trump qui avait sanctionné des officiels de la défense turque. La crainte de Washington était qu’un échange de technologie soit opéré : que la Turquie donne de détails sur l’avion de l’OTAN.
En effet, la Turquie a traditionnellement les États-Unis comme premier fournisseur d’armement. Ankara compterait 300 avions de chasse américains multirôles F-16. Dès lors, la coopération militaro-industrielle avec Moscou est à la fois une menace pour Washington en termes de concurrence d’industrie de défense, mais aussi un risque en termes de loyauté.
Pourtant, l’industrie de défense turque ne travaille pas seulement avec la Russie. La Turquie a ainsi vendu des drones aériens Bayraktar à l’Ukraine avant et pendant le conflit. Ankara joue ainsi sur tous les tableaux.
La Turquie cherche à soigner sa relation avec Moscou
Depuis le début du conflit, la Turquie soigne ses relations avec la Russie. Bien que faisant partie de l’OTAN, Ankara n’a pas pris de sanctions contre Moscou, une posture qui s’explique par une relation particulière avec Moscou, forgée à la fois par sa dépendance à l’économie russe, mais aussi une vision du monde assez proche des dirigeants des deux pays.
60 % de l’approvisionnement gazier de la Turquie est russe. Si Gazprom reste la principale compagnie en Turquie, d’autres entreprises russes comme Tatneft et Bashneft ont développé des relations avec Tupras le principal raffineur turc. Dans un pays où la majorité du mix énergétique est dépendante d’hydrocarbures importés, le poids de l’énergie russe est primordial. Les relations commerciales d’Ankara envers Moscou sont révélatrices d’une différence de poids : la Russie est le troisième partenaire de la Turquie en matière d’importation, alors qu’elle n’est que huitième en matière d’exportation.
De plus, le tourisme occupe une place importante dans les relations économiques d’Ankara avec Moscou. En 2019, la Turquie aurait accueilli 70 millions de touristes russes (20 % du tourisme en Turquie) générant 5 milliards de dollars de revenus annuels. La population russe est ainsi une manne financière, ce qui explique pourquoi le gouvernement turc pousse les banques turques à mettre en place le moyen de paiement Mir, le réseau russe alternatif à VISA et Mastercard. Les deux derniers systèmes de paiement n’étant plus disponibles pour les citoyens russes suite aux sanctions.
Au-delà des questions économiques, les relations personnelles entre les présidents Poutine et Erdogan jouent aussi dans le rapprochement. Les relations ont parfois été houleuses dans le passé lors de la guerre civile en Syrie, où la Turquie avait abattu par erreur un avion russe en 2015, créant un refroidissement des relations pendant plusieurs mois.
Néanmoins, une vision proche des relations internationales a permis aux deux dirigeants de se rapprocher : Poutine comme Erdogan sont à la tête de deux anciens empires eurasiatiques et affichent une nostalgie de la puissance passée de leur pays.
Dans les deux cas, tous deux vont chercher à gagner de l’influence sur leur étranger proche afin de peser dans les relations internationales, quitte à jouer la carte révisionniste, voire militaire.
Au-delà, de ce langage commun, il y a aussi un besoin beaucoup plus terre à terre de coopérer afin d’éviter des tensions sur certains conflits comme en Syrie.
La Turquie joue la carte des médiateurs en Ukraine
Le fait d’être à la fois dans l’OTAN et d’entretenir de bonnes relations avec les dirigeants russes a permis à Ankara de jouer la carte de médiateur lors du conflit ukrainien. Dès mars 2022, des pourparlers entre l’Ukraine et la Russie ont eu lieu en Turquie. En juillet, c’est aussi ce pays qui a abrité les discussions menant à un accord entre les deux adversaires sur le grain, le tout supervisé par l’ONU.
Bien que membre de l’OTAN, Ankara cherche à montrer une image de neutralité. La Turquie semble ainsi avoir la confiance du président Poutine dont l’un des premiers déplacements depuis le début de la guerre a été pour la Turquie. Quant au président Zelensky, les relations avec son homologue turc sont régulières.
Une position qui met mal à l’aise l’Occident
Le côté électron libre de la Turquie d’Erdogan dérange les Occidentaux. La Turquie géographiquement à la croisée des chemins entre Europe, Asie centrale et Proche-Orient, joue une carte géopolitique très personnelle.
Pour l’OTAN, il serait contre-productif de se débarrasser de la Turquie, car elle est une base avancée au Proche-Orient. Sans compter qu’une exclusion de la Turquie conduirait à une mise sous influence totale du pays par la Russie et la Chine.
La Turquie n’a pas participé à la deuxième guerre mondiale, comme l’Espagne et le Portugal donc pour eux pas d’accord de Bretton Wood, par principe Erdogan n’a aucune obligations vis à vis des USA sauf si l’oncle Sam ouvre son porte monnaies
Erdogan faisant les yeux doux à Poutine, la Turquie a-t-telle encore sa place dans l’OTAN?
Mais Erdogan représente-t-il l’opinion majoritaire en Turquie?
La Turquie a-t-elle encore une chance de redevenir un Etat laïque?
@monstesquieu
aucune Erdogan a liquidé les militaires laïques ainsi que toute opposition
Il y a une place Maïdan à Ankara…? ou à Istanbul…?