L’inversion de la dissuasion nucléaire

Poutine vient d’inverser ce principe en menaçant clairement : tout pays qui cherchera à m’empêcher d’annexer l’Ukraine se verra puni d’une riposte violente comme jamais on a connu…

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explosion atomique credits Pierre J (licence creative commons)

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L’inversion de la dissuasion nucléaire

Publié le 25 février 2022
- A +

« La Russie attaque… Je rigole… » c’est un des commentaires parus au sujet de mon article du 12 février « Plusieurs scénarios pour l’Ukraine. »

Hé bien oui, Poutine l’a fait ce matin du 24 février 22 et il s’en prend à toute l’Ukraine en commençant par détruire les armes de riposte fournies par l’Occident.

Mais, ayant préparé son invasion depuis des mois et jouant sur la naïveté de nos gouvernants européens, il vient de sortir l’arme nucléaire, sans la nommer.

Jusqu’à maintenant la dissuasion nucléaire avait pour but de dire clairement à tout belligérant : si tu m’attaques je répondrais par l’envoi d’une bombe atomique qui te fera plus de mal que tu ne peux m’en faire.

Poutine vient d’inverser ce principe en menaçant clairement : tout pays qui cherchera à m’empêcher d’annexer l’Ukraine se verra puni d’une riposte violente comme jamais on l’a connu… Traduire par l’envoi d’une bombe nucléaire, sachant qu’il dispose d’un stock de plus de 6000 !

Nous ne broncherons pas face à Poutine

Poutine, fin stratège a bien préparé son coup :

Rapatriement d’une grande partie des avoirs non immobiliers… Y compris son yacht.

Augmentation considérable de son stock d’or, ce qui signifie qu’il a préparé son intervention de longue date.

Consultations nombreuses avec Xi Jinping, il est évident qu’il a obtenu son aval vu la timide réaction de celui-ci.

Pour contrer le boycott sur le matériel informatique qui va rapidement se décider il doit avoir eu la garantie d’être fourni par la Chine.

Faute d’une capacité militaire de l’Europe et sachant que les États-Unis ont déjà déclaré qu’ils n’interviendront pas, nous aboierons certes, mais nous n’interviendrons pas.

Suite du conflit

Toutes les mesures de rétorsion que prendrait la France pénaliseront davantage l’Europe, l’Allemagne principalement, que la Russie. Poutine le sait parfaitement lui qui, depuis l’annexion de la Crimée, est devenu plus fort et surtout plus indispensable avec son gaz, son pétrole et même son blé.

Il a en même temps énormément renforcé ses capacités militaires, y compris en cyber attaque.

Nous allons donc rester bien docilement spectateur, regrettant de ne pas avoir développé une armée européenne crédible ce qui encouragera Poutine à continuer sa reconquête d’une partie des territoires de l’ex-URSS.

Dans un deuxième temps, il va donc probablement tester l’OTAN avec l’annexion des pays baltes, car son but est de créer une zone qu’il contrôlera entre la Russie actuelle et l’Europe.

Le plus gros risque sera alors une fuite en avant. C’est alors que l’Europe sera en danger car il va vouloir détruire les armes nucléaires installées en Europe de l’est prétextant un danger absolu pour sa sécurité.

C’est un scénario sombre mais qu’il ne faut pas négliger.

Et la Chine du côté de Poutine

Aucune certitude sur ses intentions mais on s’en rendra compte rapidement, la Chine fera semblant de condamner Poutine. N’existe-t-il pas un pacte secret qui confirmera le scénario que je décrivais dans mon précédant article : la Chine laisse Poutine tester nos réactions et surtout celles des États-Unis.
Elle ne se cache pas de vouloir envahir Taïwan, ce serait pour elle la bonne occasion de mettre sa menace à exécution très prochainement.

Si c’est le cas, les scénarios les plus sombres pour l’avenir de l’Occident sont envisageables, la Chine ne se cachant pas de vouloir démontrer la supériorité de son système sur le nôtre.

Conclusion

Un scénario reste un scénario, mais nous venons de comprendre qu’il faut tous les envisager si nous voulons ne pas être soumis.

À l’Europe, à la France de montrer leur détermination, nos tergiversations sur le réchauffement climatique vont nous paraître dérisoires par rapport à ce nouveau défi.

 

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Créer un compte Tous les commentaires (11)
  • Euh? On savait qu’il préparait quelque chose et on n’a pas préparé de riposte ou au moins de contre mesures propres à décourager ses ambitions impérialistes!
    A quoi sert donc le pognon de dingue que la plupart des pays occidentaux engloutissent dans des services secrets et des moyens d’observation et de surveillance spatiaux? A rien!
    On rédige sans doute de beaux rapports qui partent sommeiller dans des archives poussiéreuses!
    Si nous faisons pareil avec la Chine et Taïwan, l’occident est foutu! Et on peut légitimement douter que les chinois, encouragés par ce fiasco occidental, ne tentent pas leur chance prochainement en profitant du chaos déclenché par Poutine!

    • En même temps les chinois doivent se douter de deux choses :
      – un, l’occident s’en fout un peu de l’Ukraine malgré tous les discours, mais pour Taiwan c’est autre chose (c’est un maillon crucial de l’électronique qui fait notre quotidien).
      – deux, Taïwan c’est pas l’Ukraine niveau militaire… et aller occuper une île montagneuse dotée d’une armée très puissante et bien formée équipée s’attendant à être attaquée depuis longtemps c’est pas franchement une « promenade de santé » même pour l’armée populaire, qui en plus se battra non pas contre « une autre nation » mais contre d’autres chinois… au moins aussi chinois qu’eux, sinon plus !

  • Quand les dominos commencent de tomber……… nul ne sait comment les arrêter!

  • Vous semblez à coté de la plaque:
    Poutine n’a pas brandi la menace nucléaire et il est très peu probable qu’il y ait recours, du moins tant qu’on ne l’attaque pas par ce biais ou de manière massive.

    S’il subit des attaques économiques il peut riposter par des armes économiques. La première réponse serait de couper le gaz a l’Europe. ça l’embêtera un peu économiquement mais l’Europe beaucoup…
    Il peut en sus utiliser sa nouvelle influence pour maniper les cours du pétrole. Un pétrole à >200$ le baril ne lui posera pas de problème mais pour l’Europe si…

    Il peut répondre a des actions de l’otan par ses nouvelles armes très en avance technologiques avec lesquelles il pourrait riposter en coulant quelques portes avions, pulvériser les satellites espions américains, détruire le système GPS, des trucs comme ça qui mettraient un beau bordel en occident sans être une attaque nucléaire.

    Il est très peu probable qu’il n’envahisse les autres pays baltes, car il n’y a aucun intérêt de même que l’intérêt de l’action actuelle n’est pas l’envahissement complet de l’ukraine, il veut juste affirmer la puissance de la Russie et mettre l’arrogance occidentale « au pas » . L’objectif est par ailleurs déjà quasi atteint… Le parapluie de l’otan est factuellement une passoire, c’est juste ce qu’il veut montrer afin d’être respecté par certains voisins en fait beaucoup plus dangereux pour la Russie que l’otan…

    • Voyons, Putin a très explicitement menacé de punition nucléaire toute intervention militaire appuyant la défense ukrainienne.
      La réponse d’un OTAN plus réactif aurait pu être une adoption immédiate de l’Ukraine pour voler à son secours et les choses en seraient restées là: la Russie a besoin d’encore au moins deux ans pour être capable de frappe nucléaire sans trop de risques d’être vitrifiée en retour.
      Ce qui m’étonne dans cette histoire est que Putin n’a pas eu la patience d’attendre que la hiérarchie des forces lui soit favorable compte tenu de la progression apparemment rapide de sa technologie militaire agressive comme défensive.
      Et quand un dictateur aussi fin et rationnel que lui n’est plus capable d’attendre la situation favorable* c’est qu’il sent sa fin prochaine et n’a plus rien à perdre à prendre des risques insensés pour remplir sa mission conquérante quoi qu’il en coûte.
      * (Dans deux ans l’Occident sera exsangue mais lui sera au cimetière?)

      • Vladimir Poutine s’est adressé à ceux «qui tenteraient d’interférer» avec son armée. «Ils doivent savoir, a déclaré le chef du Kremlin, que la réponse de la Russie sera immédiate et conduira à des conséquences que vous n’avez encore jamais connues».
        https://www.lefigaro.fr/international/des-consequences-que-vous-n-avez-encore-jamais-connues-poutine-se-lance-t-il-dans-un-chantage-nucleaire-20220224

        Je n’ai pas l’impression qu’il parle de frappes nucléaires. La suite c’est le journaliste qui invente (comme toujours)

        -1
      • @Mc2 Complement:
        « Ce qui m’étonne dans cette histoire est que Putin n’a pas eu la patience d’attendre que la hiérarchie des forces lui soit favorable »

        Vous répondez vous même au dessus dans votre post, il ne pouvait pas prendre le risque d’attendre que l’ukraine intègre l’otan. Au fond il veut pouvoir humilier l’otan sans avoir de conflit direct avec. Car un conflit avec l’otan pourrait dégénérer.

        De toute façon un bouclier antimissiles n’est pas infaillible, et même s’il a les meilleurs systèmes d’interception à l’heure actuelle, un conflit nucléaire n’est pas envisageable pour personne.

        Par contre les planeurs hypersoniques équipés d’une ogive conventionnelle restent un avantage sérieux. Je doute que les systèmes de défense d’un porte avion puisse stopper ce genre d’engins. Perdre une dizaine de porte avions simultanément serait un camouflet sérieux pour l’otan . C’est ce genre de chose dont il menace, à mon avis.

        • C’est pour cela que j’évoque un délai de deux ans (qui vaut d’ailleurs aussi pour la Chine): le temps nécessaire pour devenir capable de cibler contre toute défense la flotte adverse avec des missiles hypersoniques pilotables.

  • Il n’a pas dit « tout pays qui m’empêchera d’annexer l’Ukraine s’en prendra plein la tête » mais « tout pays qui nuira à nos amis s’en prendra plein la tête »…

    Et il a fait ce qu’il a dit : l’Ukraine a bombardé les civiles russophones des région « autonomes » (et soutenues par la Russie) du Donbass ? Booom, prends ça sur ta tête, Zelensky…

    C’est même pas de la « dissuasion nucléaire » c’est le retour à la bonne vieille guerre d’autrefois : si tu attaques mes amis je te fais la guerre, je t’occupe, je t’humilie et te demande des réparation avant de te laisser pantelant et à moitié détruit… On a fait comme ça en Europe pendant les 1500 dernière années, jusqu’à la seconde guerre mondiale, en fait. Rien de nouveau, d’étonnant ou d’imprévisible, si on regarde les faits et non les bouquins de théorie géopolitique et les interprétation du « Monde Diplo »…

  • « riposte violente comme jamais on l’a connu… Traduire par l’envoi d’une bombe nucléaire »

    Peut-être une erreur de traduction, elle même suggérée par Poutine. Une bombe nucléaire, c’est une menace et une déclaration de guerre sans merci si on l’utilise. Tandis qu’une bonne attaque sur les réseaux informatiques est aussi une riposte violente jamais connues (mais expérimentée…).

    Que fait-on dans ce cas ? Est-on préparé ? Peut-on lui rendre la monnaie de sa pièce. Prend-on la responsabilité de l’escalade ?

    • A noter qu’on n’est même pas capable de gérer la pandémie de Covid.

      Notons bien que la vague épidémique omicron est passée en Europe et aux US alors qu’elle est à son pic en Russie et en Ukraine. Ce qui ne les empêche nullement de faire la guerre !

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Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

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