La bulle immobilière n’éclatera pas, car l’État continue de l’alimenter

Les conditions pour un éclatement de la bulle immobilière actuelle ne sont pas réunies. C’est la faute “aux banques centrales et “aux” États.

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La bulle immobilière n’éclatera pas, car l’État continue de l’alimenter

Publié le 11 février 2022
- A +

Par Vincent Bénard.
Un article de l’IREF Europe.

La remontée des taux d’intérêts initiée par les banques centrales a suscité quelques articles de presse évoquant la possibilité d’un éclatement prochain de la bulle immobilière, laquelle atteint des sommets à Paris et à Lyon, et retrouve de la vigueur en province, comme en témoigne la dernière mise à jour des statistiques officielles du ministère du Logement :

Les conditions d’un éclatement ne sont pas réunies

Mais douchons l’enthousiasme de ceux qui souhaitent un tel éclatement, qui serait socialement bienvenu : il y a peu de chance qu’il se produise.

Ceux qui prédisent un retournement brutal du marché font la même erreur que ceux qui en expliquent la hausse uniquement par des phénomènes jouant sur la demande de logement, et notamment une solvabilité accrue des ménages due aux faibles taux d’intérêts. Ceux-là oublient que pour qu’une bulle se produise, il faut certes que d’une part la demande soit stimulée, mais aussi que d’autre part l’offre ne puisse pas s’y adapter.

Dans notre récent rapport consacré aux ravages économiques et sociaux des politiques anti étalement urbain, nous avons montré qu’en France, la réglementation foncière était le facteur prépondérant empêchant cette adaptation de l’offre de logements à la demande. Ce mécanisme de formation des bulles immobilières conjuguant demande et offre peut être synthétisé par le diagramme ci dessous :

La hausse des taux d’intérêt pourrait réduire la solvabilité de la demande. Mais les craintes inflationnistes, au contraire, risquent d’inciter les épargnants à privilégier plus encore qu’aujourd’hui l’immobilier, réduisant l’impact de cette baisse de solvabilité sur l’appétit d’investissement immobilier.

Et surtout, loin d’être allégées, nos réglementations foncières déjà très malthusiennes vont connaître un nouveau tour de vis via la loi Climat et Résilience d’août 2021.

Entre autres, celle-ci forcera les communes à introduire dans leurs plans locaux d’urbanisme un pourcentage beaucoup plus élevé de territoires interdits d’urbanisation via plusieurs dispositifs aux acronymes barbares tels que la création de PEAN (périmètres de protection d’espaces agricoles et naturels périurbains), de SDAP (stratégies départementales d’aires protégées, pour la biodiversité).

Et surtout, cette loi introduit l’objectif proprement hallucinant d’une division par deux de l’artificialisation des sols d’ici 2030, et d’une ZAN (Zéro Artificialisation Nette) en 2050, et ce quelle que soit l’évolution démographique du pays.

Rappelons que lorsque la première phase d’inflation immobilière a eu lieu en France entre 1998 et 2007, les taux d’intérêt réels étaient encore positifs de 1,5 % en fin de période (cf figure ci-dessous) :

bulle immobilière

Avec un foncier rendu encore plus rare qu’en 2007 du fait de lois toujours plus restrictives, il faudrait donc une hausse des taux nets d’inflation beaucoup plus forte que celles aujourd’hui annoncées par les banques centrales pour ramener les prix du logement rapportés au revenu des ménages au niveau de ceux du siècle dernier.

Donc si cette hausse se poursuit, tout au plus observera-t-on des corrections baissières légères dans les agglomérations les plus fortement touchées par l’inflation immobilière, mais rien qui puisse être qualifié de dégonflement massif ou d’éclatement de la bulle.

Et pourtant, il faudrait qu’elle éclate

C’est regrettable, car rappelons une fois encore que la charge de logement des ménages a augmenté de 60 % depuis les années 1970, absorbant en grande partie leurs gains de pouvoir d’achat (cf figure ci-dessous, source comptes du logement 2020) :

bulle immobilière

Et rappelons également que ce sont les 25 % de ménages les plus pauvres qui ont le plus pâti de cette forte inflation des dépenses d’habitation (source INSEE-IREF) :

bulle immobilière

Les conditions pour un éclatement de la bulle immobilière actuelle ne sont pas réunies, et cela est socialement fort regrettable. C’est la faute des banques centrales et des États.

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  • Les arbres ne montant pas au ciel, la bulle eclatera tot ou tard. Le plus tot serait le mieux afin de limiter les effets deleteres (je pense en particulier aux gens qui seront ruinés car il sont achete a credit un logement qui a perdu plus que ce qu etait leur apport perso -> la vente de celuici ne suffira pas a rembourser le credit)

    L auteur parle ici des restrictions sur la construction mais il oublie une autre source de la bulle : PTZ et Pinel. Subvention etatiques qui reviennent a jeter de l huile sur le feu. J ajoutera aussi les APL qui solvabilisent artificiellement la demande. Sans APL les loyers seront probablement plus bas

    PS: si l auteur evoque les facteurs qui poussent les prix vers le haut, il oublie ceux qui vont pousser vers le bas:
    – la hausse des taux va desolvabiliser les acheteurs (et surtout rendre impossible de s endetter sur 20 ou 30 ans)
    – les boomers (qui sont des gros proprietaires immobiliers) vont bientot devenir vendeur net. Soit car il faudra payer la maison de retraite (je suppose ici qu ils ne vont pas arriver a faire payer le contribuable en etendant les prestations de la secu). Soit car il faudra payer les taxes sur l heritage (comme quoi c est pas un impot a supprimer)
    – la natalite francaise est faible. et une bonne partie des jeunes francais dynamiques quittent le pays. donc la demande SOLVABLE va se tasser

  • « la hausse des taux va désolvabiliser les acheteurs (et surtout rendre impossible de s endetter sur 20 ou 30 ans) »
    L’état peut compenser en permettant les crédits hypothécaires avec remboursement du capital in fine. Voir Suède, Pays-Bas, RU… Avec comme corollaire encore plus d’endettement des ménages, mais une charge mensuelle allégée.

    « les boomers (qui sont des gros proprietaires immobiliers) vont bientot devenir vendeur net. » Je vis dans une petite ville du Sud-Est de la France. 5756 habitants, en baisse depuis 1999 (les enfants grandissent et partent, les anciens meurent). 15% de la population a + de 75 ans. Il y a 72% de propriétaires (essentiellement des maisons). 4301 logements, contre 3611 en 1999 (+690). Nombre de résidences secondaires : 992 en 2008, 1508 en 2020 (+516). Effectivement, les décès et les quelques départs en EHPAD mettent quelques biens sur le marché. Les prix sont en hausse continue depuis les années 90, comme dans toutes les zones tendues et attractives, et les prix resteront élevés. Dans la diagonale du vide, ils continueront à baisser. La moyenne baissera peut-être, mais ce n’est qu’une moyenne.

    « la natalite francaise est faible. et une bonne partie des jeunes francais dynamiques quittent le pays. ». Largement compensé par une immigration incontrôlée.

    _———
    Question : le nouveau DPE et l’interdiction des « passoires énergétiques » à la location risque de faire sortir du marché un bon nombre de logements. Compte tenu du coût des travaux, de la difficulté de monter et suivre le dossier, de l’incertitude de savoir si le DPE va s’améliorer après travaux, bon nombre de petits bailleurs vont revendre.
    1) Cela devrait avoir un impact sur le marché locatif, qui va être encore plus tendu.
    2) Qui va acheter ces biens dévalorisés et inlouables sans lourds travaux ? Des particuliers aventureux, des marchands de biens, des gros groupes immobiliers…?

    • 1) credit hypothecaire: c est pas du tout la direction prise. et les sub-primes ont montre que c etait pas une bonne idee. de toute facon c est reculer pour mieux sauter puisque ca ne resaud absoluement pas le probleme de desolvabilisation des actifs, ca permet juste de reculer l echeance

      2) la population baisse et les prix montent dans votre village. Je suppose que vous etes dans une zone touristique du sud est et que les acheteurs font d une residence principale une residence secondaire. La limite est que ca ne marche que dans quelques endroits touristiques et ca sous entend que les acheteurs (ou heritiers de la personne decede) ont les moyens (et l envie) d avoir une residence secondaire. Pour les moyens, ca va etre de plus en plus complique avec le declin economique de la Framce. En ce qui concerne l envie, personnellement j ai du mal a penser que je vais passer toutes mes vacances au meme endroit pendant 15 ans histoire d amortir cette maison

      3) l immigration: j ai parle de demande SOLVABLE. les migrants africains n ont pas les moyens d acheter quoique ce soit (et encore moins une residence secondaire)

      4) les passoires thermiques: c est sur qu au prix fort personne ne va les acheter. mais si le proprietaire ne peut louer il va devoir vendre moins cher car c est toujours mieux que de faire des pertes (il faut payer les impots et entretenir le bien et on ne peut le louer). a partir d un certain prix vous allez avoir des acheteurs. soit des gens qui vont l occuper eux meme (l interdiction ne joue plus) ou des gens qui auront les poches assez profond pour faire les travaux.
      Je dirait meme que c est un factuer qui va pousser les prix a la baisse car nombre de passoires vont se retourver sur le marché et il n y aura pas tant d acheteur que ca

      • 1) », ca permet juste de reculer l echeance » C’est justement ce qui intéresse les politiques. Après moi le déluge.
        2)c’est tout le littoral français qui est désormais concerné. Le sud-est n’a été que le précurseur. Et compte tenu de l’heliocentrisme naturel, et de l’attrait des côtes, ça devrait se poursuivre. Les fortes augmentations de prix en Normandie et en Bretagne en sont la conséquence. Il n’y a pas que des Français : Suisses, Belges, Allemands… On peut compter aussi sur les expat qui rentrent au pays. Les enfants qui ne veulent ou ne peuvent garder vont revendre. Ça leur fera un sacré apport pour acheter ce qui leur convient, et investir.
        « j ai du mal a penser que je vais passer toutes mes vacances au meme endroit pendant 15 ans » Pareil. Et à vrai dire, certaines de ces RS ne sont jamais occupées. Ça ne semble pas gêner les proprios !
        3) Une partie des immigrants s’enrichit, d’une manière ou d’une autre. Comme tout le monde ensuite, une partie de leur argent part dans l’immobilier.
        4)c’est aussi ce que je pense. Je pense que la majorité des achats sera effectivement le fait de gens achetant leur RP, et pour le reste, des marchands de biens ou promoteurs de petite taille…

        -1
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