Par Jean-Philippe Feldman.
La presse a célébré la cession à la France de plusieurs œuvres de son père, le grand artiste Pablo Picasso par sa fille Maia-Ruyz Picasso, notamment plusieurs peintures. En fait de cession, il s’agit d’une dation en paiement, c’est-à-dire d’un mode exceptionnel qui permet de s’acquitter d’une dette fiscale par le truchement d’œuvres d’art ou d’objets de collection de premier ordre.
Si les affaires de succession sont les plus médiatisées, le recours à la dation en paiement a pu tout aussi bien concerner par exemple l’impôt de solidarité sur la fortune et il permet aujourd’hui entre autres de régler l’impôt forfaitaire immobilier.
Conserver des œuvres sur le sol national
Les zélateurs de l’État n’ont pas manqué de se réjouir d’un mécanisme qui a permis de conserver sur le territoire français des œuvres majeures des plus grands artistes tels Courbet, Fragonard, Monet ou encore Vermeer.
La dation en paiement a d’ailleurs été mise en place à la fin des années 1960 pour permettre de recueillir en nature une partie des grandes successions à venir. À commencer au début des années 1970 par la colossale succession Picasso. Là se trouve l’origine de la création à Paris du musée éponyme.
Le ou les héritiers peuvent ainsi offrir de payer leurs droits par une dation qui doit faire l’objet d’un agrément de la part de l’État au terme d’une minutieuse procédure.
A priori, on ne peut que se féliciter de ce mécanisme. Et pourtant…
Spoliation d’État
Pourtant, le mécanisme de paiement est une chose, la cause du paiement en est une autre. Par définition, une dation en paiement n’existerait pas si l’impôt sur les successions ou l’impôt forfaitaire immobilier n’existait pas. Si ces impôts sont illégitimes, la dation en paiement ne peut être analysée que comme une spoliation organisée par l’Etat.
Et ces impôts sont bien illégitimes en tant qu’ils s’analysent comme des manifestations de l’égalitarisme fiscal et d’une conception coupablement redistributrice de l’impôt. L’un des membres de la famille Picasso rappelait d’ailleurs benoîtement que durant les années 1970, le secrétaire d’État à la Culture était venu « choisir les œuvres dans la succession » avec pour visée la création du musée Picasso (Le Figaro, 20 septembre 2020) !
Si les services du ministère de l’Économie et des Finances avaient enfin consenti à la création de trusts comme dans les pays anglo-saxons, alors même qu’ils la refusent systématiquement pour des raisons bassement fiscales, le secteur de la culture se déprendrait de la mainmise de l’État et la société civile serait autrement plus puissante. Mais, dans le temple de l’étatisme qu’est la France, ce pays où le pouvoir et la culture s’unissent depuis l’Ancien Régime de manière incestueuse, cela relève malheureusement du vœu pieux.
“Si les services du ministère de l’Économie et des Finances avaient enfin consenti à la création de trusts … le secteur de la culture se déprendrait de la mainmise de l’État”
N’est-ce pas justement le but de la manoeuvre? Garder la mainmise de l’état sur absolument tout? Le tout avec la bénédiction d’une vaste majorité de veaux, euh pardon, d’électeurs, qui vous expliqueront que l’état est là pour nous guider, car il sait mieux que nous ce qui est bon pour nous.
J’ai travaillé dans la recherche scientifique avant de changer de voie. Je sais à quel point les chercheurs sont tous devenus spécialistes en recherche… de subventions. Ma fille travaille dans la culture, c’est pareil, tous les projets artistiques sont pensés en fonction de la probabilité d’obtenir telle ou telle subvention. C’est terrible mais on en est là en France. Je ne suis pas sûr qu’un Picasso aujourd’hui choisirait de s’installer à Paris.
Les rois avaient des cabinets de curiosités.. et de gros besoins en tableaux pour décorer les palais. Les hommes d’état français ont pris la suite, pour leur gloire.
Le ministère de la culture ne devrait pas exister.
@gillib surtout qu’il semblerait qu’il n’y ait pas de culture française aux dernières nouvelles
Le Ministère de la Culture a été créé par De Gaulle dans les années 60. Ce qui veut dire qu’il n’y en avait pas, par exemple, sous la IIIe République. Est-ce que la culture française était inexistante à cette époque ?
Au contraire! Il y en avait bien une avant, et qui rayonnait dans le monde entier. Puis on a créé le ministère de la Kulture, et progressivement les artistes et intellectuels se sont spécialisés dans le remplissage de formulaires Cerfa. C’est à ce moment qu’on a cessé d’entendre parler de culture Française.
@alain “Je ne suis pas sûr qu’un Picasso aujourd’hui choisirait de s’installer à Paris” mais si tres certainement, parfait pour l’imposteur qu’il était .
Picasso : payer une imposture par de l’imposture finalement l’équation est homogène . Et dire qu’il y en a qui payent pour aller voir cela …
Un jour une amie -de famille en vue- de ma fille lui dit “Incroyable ce que ma mère a du flair, tout ce qu’elle achète prend de la valeur” , j’ai expliqué a ma fille que sa copine avait un problème avec la causalité car c’est parce que sa mère achetait cette chose que ça prenait de la valeur et pas l’inverse . C’est pareil avec Picasso.
la plupart des gribouillis picassiens ne valant pas grand chose l’état ne récupère rien . . . .
Des ennuis… ?
https://www.fabarte.org/dbfiles/mfile/400/495/FABA_2015_Etude_Claire_Gu_rin.pdf
@ Val et zelectron :
vous vous méprenez sur le concept de valeur …
L’état en acceptant cette dation sans valeur spolie les contribuables des sommes que la famille du barbouilleur aurait du acquitter.
Au début du 20ème siècle, la France c’était 90% du marché mondial de l’art. Aujourd’hui, c’est 5%. Et demain ?
Bien sûr qu’un Picasso s’installerait en France. Tout bon artiste inconnu ou presque s’installe en France pour ses subventions, ses protections sociales, etc. Puis quand il devient célèbre et à bien profité des largesses payées par nos impôts, il part en général en Suisse pour ne pas payer à son tour pour les autres. On citera par exemple A Delon (à qui on fera probablement des funérailles nationales françaises et non suisses), C Aznavour, G Depardieu (donc la fille profite comme le père en son temps des subventions sur les fictions française) … Idem pour les nos grands sportifs qui sont en France pour profiter des installations et subventions mais qui adorent la Suisse dès qu’ils sont célèbres.
À l’époque, Picasso est resté après sa célébrité car les prélèvements sociaux n’atteignaient pas les sommets actuels. Il est vrai qu’il a vécu avant l’arrivée de Mitterrand au pouvoir.
Ce n’est pas la faute de la Suisse si la France est un enfer fiscal.
Ne feriez-vous pas la même chose à la place de ces riches célébrités ?
Elle sont devenues riches et célèbre avec nos subventions. Alors elles peuvent au moins avoir un minimum de reconnaissance.