La BCE, le sauveur en dernier ressort ?

Que l’État agisse en garantissant le financement des entreprises les plus saines mises en difficulté par le confinement se justifie, mais que l’aide soit sans discrimination risque de maintenir en activité des entreprises non viables.

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La BCE, le sauveur en dernier ressort ?

Publié le 4 juin 2020
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Par Nathalie Janson.

Importante réunion de la BCE ce jeudi 4 juin. Il sera question de l’augmentation de l’enveloppe du programme d’assouplissement monétaire – spécial Covid-19 – PEPP. Initialement fixé à 750 milliards d’euros jusqu’à la fin de l’année 2020, il s’avère qu’il ne sera pas suffisant pour tenir cette durée. Le montant serait épuisé dès septembre.

Il est vrai que le rythme des achats peut donner le vertige : 8,5 milliards par jour au pire moment de la pandémie et plus de 200 milliards utilisés sur les mois d’avril et mai. Étant donné l’objectif de ce programme exceptionnel – éviter la dislocation des marchés des dettes souveraines de la zone euro, il est considéré comme primordial de montrer que le BCE met tout en œuvre pour qu’un tel objectif soit assuré sur toute la durée de la crise, ce qui implique de continuer les rachats à la hauteur des ambitions.

La BCE peut-elle acheter sans limite ?

Si l’objectif de la BCE est de contenir les taux des dettes souveraines, elle aurait sans doute mieux fait dès le départ d’annoncer comme la FED une intervention sans limite afin d’éviter les spéculations et tensions sur le sujet. Cette différence s’explique sans doute par la volonté de ne pas brusquer les pays du nord plus réticents à cette idée. Le bilan de la BCE est en marche pour atteindre 50 % du PIB de la zone euro.

Si on regarde le Japon, les marges de manœuvres sont encore significatives puisqu’il atteint 100 % du PIB. Néanmoins, on peut s’interroger sur l’efficacité d’une telle politique d’assouplissement. Le taux de la dette publique était proche de 240 % fin 2019 et les perspectives de croissance y étaient toujours faibles avant la pandémie. La zone euro est en passe de « japonisation » mais est-ce pour autant une bonne nouvelle ?

La Banque centrale peut-elle faire des miracles ?

À lire les déclarations sur l’urgence de tout mettre en œuvre pour sauver les États, on est en droit de se demander si l’action de la Banque centrale peut vraiment sauver l’économie de la pandémie. L’action de la banque centrale ne fait que soutenir la valeur des actifs qu’elle achète dans le cadre de son programme mais qui ne reflète plus leur valeur économique.

Elle crée donc une illusion qui peut nuire à la qualité de la reprise économique future. Si la bourse est souvent accusée de déconnexion avec l’économie réelle, cette fois c’est bien la Banque centrale par son action qui est l’origine de cette déconnexion.

Le rebond général des bourses s’observe aussi bien en Europe qu’aux États-Unis étant donné que les investisseurs sont convaincus – à juste titre – que l’activité économique sera soutenue sans condition par les gouvernements aidés des banques centrales.

Bien sûr on comprend la pression des États pour soutenir l’activité économique. Ce sont eux qui ont forcé l’arrêt de l’activité économique dans la plupart des secteurs au nom de l’intérêt collectif, la pandémie étant un cas d’école d’externalité négative de par la contagiosité du virus. Le coût de la crise économique dans ces conditions incombe aux États.

Néanmoins, dans le cas d’un choc économique externe, toutes les entreprises ne survivent pas. Que l’État agisse en garantissant le financement des entreprises les plus saines mises en difficulté par le confinement se justifie ; mais que l’aide soit sans discrimination risque au contraire de maintenir en activité des entreprises non viables.

C’est en cela que les programmes massifs comme le PEPP de la BCE ont des effets délétères sur l’économie à plus long terme. Ils aident sans discernement, ils biaisent l’évaluation des risques en créant l’illusion que les risques sont contenus.

À force de tordre le cou à la réalité, le réveil n’en sera que plus difficile quand on se rendra compte que la grande illusion ne peut durer éternellement… Attention, la « zombification » des économies est devant nous !

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  • Contrairement aux USA et au Japon, la BCE ne pourra pas augmenter son bilan significativement au-delà de 50% du PIB sans affecter durablement la valeur de l’euro. Passé ce seuil, les pays bien gérés auront plus intérêt à sortir qu’à rester dans l’euro, situation pesant lourdement sur les négociations à venir. L’euro est désormais dans une zone de risque permanent, étant entendu que personne n’ignore qu’il s’agit d’une dette perpétuelle, quand bien même elle serait à taux nul, puisque les pays du Club Med sont incapables de rembourser le premier cent de la montagne de capitaux empruntés par monétisation.

    La BCE n’a déjà plus aucune marge de manœuvre. Elle tient fermement son bazooka mais elle n’a plus de roquette. La besace à munitions est vide.

    Il n’y a plus de sauveur en dernier ressort dans la zone euro. Au premier accroc sérieux, ce sera la débandade financière, à moins que les pays mal gérés ne se réforment avant. La mutualisation des dettes est à ce titre un très mauvais signal envoyé puisqu’elle prouve l’absence de volonté de réforme, l’aveuglement persistant des politiciens malgré l’urgence.

    • Logiquement, les états du nord vont mettre la pression sur le sud justement pour qu’ils se réforment façon Grèce. Ca va se traduire niveau commissaires européens, et direction 4ème Reich.

      • « Le 4e Reich est un rêve voué à l’échec. Les bases d’un vrai nouveau monde, c’est le 5e Reich ! »

      • N’inversez pas les choses: les cigales du sud veulent continuer à manger le lard des fourmis du nord.
        La Grèce à l’état illibéral et corrompu qui avait engraissé jusqu’à la morbidité avec l’argent « gratuit » de l’Europe du Nord était surtout mal parce que le flot sans concession s’est tari et qu’elle n’avait, comme tous les états non-libéraux qu’une économie dysfonctionnelle.
        .
        La France, pas plus que la Grèce n’aura d’obligation de réforme, mais si ce pays doté de l’état le plus gros au monde ne voulait plus honorer ses dettes, il lui manquerait instantanément 250 milliards d’euros par année. C’est le montant ahurissant des dépenses en trop et donc des emprunts qui se font sur le dos des travailleurs.

  • « Si on regarde le Japon… »

    Non, vous ne pouvez pas faire.
    D’un côté un seul état, une seule nation culturellement homogène et travailleuse avec une dette endogène qui va s’éteindre gentiment avec la démographie.
    De l’autre, l’Europe et ses 27 économies et cultures totalement dissemblables dotés d’une monnaie commune absurde et de pays déjà totalement en faillites avant même la crise du Covid.

    • Il ne s’agit pas de sauver les économies qui nonr pas besoin de l’Etat pour se remettre d’aplomb mais les États nationaux socialistes PIGS augmentés du Macronistan.

    • le japon est déjà mort mai il ne le sait pas, cette une économie zombie qui ne survie que par injection monétaire constante. La dette continue d’augmenter et la population diminue de 1 millions par an. Quand l’état japonais ne pourra plus remboursé soit il y aura une crise majeure (meilleure option) soit on aura une situation style venezuela qui perdurera pendant des années. De toute manière la conséquences sera que l’on reviendra au niveau de vie normal et ça fera mal.

      • Le Japon est très libéral est très productif alors que le Venezuela est un shithole rouge et pauvre en train de sombrer.
        La dette est endogène, détenue par des Japonais (institutions et privés) et aussi pour moitié par le même organisme qui émet la monnaie japonaise: la banque nationale.
        Et pour finir, ils sont quand même 126 millions et de fortes politiques de dénatalité ont été menées durant des décennies.
        Ils vont décroitre gentiment jusqu’à un niveau raisonnable et comme ils sont intelligents disciplinés et travailleurs, je ne me fais aucun soucis pour eux.

        • Plutôt d’accord avec vous, mais deux points interrogent :
          – par quel processus voyez-vous la dette japonaise s’éteindre gentiment ?
          – en quoi une dette endogène est-elle un atout / un défaut ?

          A noter : la dette européenne est elle aussi relativement endogène, essentiellement détenue entre Européens, notamment par le réseau des banques centrales.

          • Pour la première question vous y répondez plus bas, pour la seconde l’Europe n’est pas une nation, il n’y a pas de communauté d’intérêts et encore moins de responsabilité.
            Les dettes tombent dans le cas de la tragédie des biens communs.

        • Le fait que la dette soit majoritairement détenue par les japonais eux-mêmes est une bonne nouvelle d’un point de vue de la confiance extérieure, mais en cas de banqueroute, cela revient tout de même à plumer ses propres citoyens.
          Dans tous les cas, pas de solution miracle.

        • je doute que la dénatalité soit sans douleur… à suivre comme la Chine (l’Espagne et l’Italie entre autre).

          • Question PIB global, la baisse de la population est effectivement un problème pour l’Etat qui dépend de la masse des taxes. Mais ce n’est pas un problème pour la population qui n’est intéressée que par le PIB par habitant. Tant que ce ratio progresse, la population se moque éperdument des variations de la démographie. Par exemple, après les grandes épidémies du XIVe siècle, la population survivante s’est retrouvée à la tête d’un patrimoine par tête qui avait pratiquement doublé. C’est une des explications de la renaissance du XVe siècle, presque miraculeuse, qui s’est ensuite généralisée au XVIe (avec l’effet des richesses venant d’Amérique du Sud).

            En France actuellement, la démographie se maintient grâce au soutien de l’immigration mais le PIB par habitant net de taxes stagne dangereusement depuis plus de deux décennies. Cette situation qui alimente le sentiment de déclassement sème les graines de la révolte.

  • Lorsqu’on nomme un français c’est ce qui arrive, car même de droite ce sont des communistes sans aucune connaissance économique ni intelligence!

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