La CFDT va-t-elle lâcher le gouvernement sur la réforme des retraites ?

Un lâchage de la CFDT sonnerait comme l’hallali pour un projet que tout le monde reconnaît comme mal ficelé, et préparé de façon désordonnée.

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Laurent Berger by OECD(CC BY-NC 2.0)

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La CFDT va-t-elle lâcher le gouvernement sur la réforme des retraites ?

Publié le 10 février 2020
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Par Eric Verhaeghe.

La CFDT, en la personne de Laurent Berger, a lancé les premiers signaux de son lâchage du gouvernement dans la réforme des retraites. Pour Emmanuel Macron et Édouard Philippe, la situation pourrait devenir très compliquée. L’hypothèse d’une hostilité de la CFDT à son projet rendrait difficile l’adoption du texte, alors que les défections du groupe parlementaire en Marche sont par ailleurs quotidiennes.

Cette semaine, la CFDT a multiplié les signaux négatifs sur la réforme des retraites. Laurent Berger, le secrétaire général du syndicat, a déclaré sur BFM que le gouvernement pourrait « planter » la réforme s’il ne respectait pas les lignes rouges qu’il lui a posée. De l’inconvénient d’être enfermé dans un huis clos avec un syndicat réformiste…

La CFDT prête à lâcher le gouvernement

Devant Jean-Jacques Bourdin, Laurent Berger a pris soin d’affirmer qu’il ne lançait pas d’ultimatum. Mais ses phrases y ressemblaient furieusement. D’une part, Laurent Berger souhaite des avancées sur la pénibilité, vieux cheval de bataille de la CFDT, qui n’est autre qu’un permis délivré aux entreprises pour « casser » les salariés prématurément en échange d’un départ anticipé à la retraite. D’autre part, la CFDT repousse toujours l’idée d’un âge-pivot, qui ne manquera pas de constituer un sujet de fâcherie avec le gouvernement.

« C’est au regard de tout ça que la CFDT, à la fin, se positionnera et dira ce qu’elle pense de cette réforme », a indiqué Laurent Berger. Interrogé sur la possibilité d’appeler à la grève, il a répondu que la CFDT « ne se refuse aucune modalité d’action ».

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Autrement dit, en cas de désaccord profond entre le gouvernement et la CFDT, cette dernière n’hésitera pas à appeler à la grève.

On n’en est pas encore là, selon Laurent Berger, mais l’avertissement est clair et sans ambiguïté.

Chronique d’un lâchage annoncé

La position de Laurent Berger est compréhensible, mais elle lève le voile sur le fossé qui s’est creusé entre les psycho-rigides de Matignon et le reste du pays. Alors que la retraite par points permet en principe de délivrer de tout âge légal de départ à la retraite, l’entourage direct du Premier ministre (son directeur de cabinet, et son directeur adjoint) a multiplié les embûches sur le passage de cette réforme pour imposer l’arbitrage final de l’âge-pivot qui a mis les syndicats dans la rue.

Or, à ce stade, ni Édouard Philippe ni Emmanuel Macron ne semblent avoir repris le contrôle de la situation, et on voit mal quel changement majeur interviendrait dans cette confrontation brute entre les technocrates qui conçoivent la réforme et les partenaires sociaux qui sont supposés la signer.

La CFDT demandera-t-elle une hausse des cotisations ?

À coup sûr, lors de la conférence de financement, la CFDT demandera une compensation symbolique pour l’incontournable mise en place d’un âge-pivot. Cette compensation passera probablement par une hausse des cotisations, au moins salariales, et peut-être patronales. Le gouvernement sera alors sommé d’imposer aux entreprises un contre-coup financier à une réforme dont il n’était pas demandeur.

Les nuages s’amoncèlent

Problème : pour l’instant, seul le MEDEF a affiché un soutien sans faille à cette réforme. Les autres partenaires du gouvernement ont tous demandé soit un retrait de la réforme, soit des modifications en profondeur. Le Conseil d’État lui-même a formulé de lourdes réserves sur le texte, annonciatrices de futures annulations lors des contentieux qui surviendront inévitablement.

Dans ces conditions, un lâchage de la CFDT sonnerait comme l’hallali pour un projet que tout le monde reconnaît comme mal ficelé, et préparé de façon désordonnée. Même si le groupe LREM l’adoptait sans coup férir, la défaite serait profonde face à l’opinion, et compliquerait singulièrement la suite du quinquennat.

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  • c’est qui qui gère l’etat ? les syndicats ou les gens qu’on a élus
    faudrait etre clairs , çà nous évitera le déplacement vers le bureau de vote

  • Le problème c’est que LREM peut faire passer son projet de retraite tout pourri, ils s’en foutent, il n’y a personne en face en 2022… Pays de m…

  • En décembre 3/4 de la réforme était en voie de passer. L’entêtement sur l’âge pivot a rebattu les cartes or il n’est pas facile de jouer une nouvelle partie avec un adversaire humilié. A suivre ce passionnant feuilleton dont j’imagine une chute décevante.

  • Chiche !
    Et Macron ne termine pas son mandat

  • Que le débat est confus ! Personne n’y comprend rien.
    La vérité est que, dès l’origine, le problème est mal posé. Cela ne date pas de la réforme proposée par la CFDT ou par M. Delevoye, mais la faute de la CFDT et de M. Delevoye est de ne pas y avoir remédié.
    Le problème est mal posé, parce qu’on veut poursuivre, avec le même outil, deux objectifs dont les logiques sont différentes (la solidarité et la capitalisation de droits), et cela se traduit par une ambigüité du statut des cotisations de retraite : ces cotisations sont-elle un impôt ? Ou une épargne obligatoire ?
    En fait, elles sont plus ou moins les deux à la fois ; et la conséquence est que chacun s’emmêle en raisonnant tantôt dans une logique, tantôt dans une autre.
    =====
    La solution est de séparer les problèmes et de créer deux dispositifs indépendants : l’un pour la solidarité, l’autre pour la capitalisation de droits.
    – la solidarité (pour assurer à tous un même socle minimum de revenu) doit être financée par l’impôt (un impôt assis sur tous les revenus et pas seulement sur les revenus des salariés).
    – la capitalisation de droits (pour assurer aux imprévoyants –que nous sommes tous– le maintien de leur niveau de vie d’activité) doit se faire par une épargne obligatoire (une épargne gérée en toute clarté sous la forme d’un compte en euros rémunéré, c’est-à-dire d’un prêt explicite à l’Etat, un prêt qui sera remboursé le moment venu au titulaire, soit sous la forme d’un capital, soit sous la forme d’une pension mensuelle).
    ====

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