La révolution digitale va-t-elle détruire le monde ?

Faut-il craindre la révolution technologique qui vient ?

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La révolution digitale va-t-elle détruire le monde ?

Publié le 22 août 2019
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Par Frédéric Mas.

Le progrès technologique a cessé de susciter l’enthousiasme populaire en Occident. À l’ère des fake news relayées par les réseaux sociaux, de l’écologisme radical, du complotisme et de la panique morale tribale sur les campus, il est même devenu l’un des sujets d’inquiétude préféré des éditorialistes. La révolution numérique s’accélère, et charrie avec elle son lot de transformations sociales, économiques et politiques dont les implications ne sont pas nécessairement perçues comme satisfaisantes.

Dans le domaine de l’information, l’accroissement sans précédent des données a fait exploser les fake news. Pour l’économiste Pierre Bentata, le triomphe des algorithmes a participé à la formation de ces « bulles de filtres » qui enferment les citoyens dans leurs pratiques de consommation de l’information : l’intelligence artificielle sélectionne les données qui peuvent intéresser le consommateur, et exclut de son champ tout le reste.

Une telle réorganisation du monde médiatique favorise de facto la formation des théories complotistes tout comme la pérennisation du style de pensée paranoïaque. Pire encore, le phénomène se prête à la manipulation politique : le pouvoir chinois cherche par exemple à orienter l’information sur le net pour discréditer l’action des démocrates révoltés à Hong Kong.

Algorithmes et automation

Avec le règne des algorithmes se posent de nouveaux problèmes liés à l’automation. L’explosion du Big data ne fait pas que révolutionner les marchés en réduisant radicalement le coût de l’information1, il va transformer l’ensemble des institutions politiques et légales.

Quand la voiture autonome se déplacera sur les routes de France, qui sera responsable en cas d’accident ? Celui qui possède la voiture ou celui qui l’a programmée pour rouler ? La question n’est pas anodine, les constructeurs pourraient réfléchir à deux fois avant de s’engager dans la production de tels véhicules si leur responsabilité juridique est engagée.

Plus anxiogène encore, le perfectionnement de l’intelligence artificielle pourrait signer la fin de la liberté individuelle. C’est en tout cas ce que soutient l’essayiste Yuval Noah Harari dans son livre Homo Deus. La capacité prédictive des algorithmes éliminerait le libre-arbitre et transférerait la responsabilité des actions des hommes aux machines, ce qui, pour l’auteur, serait une excellente nouvelle.

Davantage de régulation n’est pas la solution

Face à ces menaces technologiques, la tentation est grande de vouloir tout arrêter ou de demander au régulateur d’intervenir pour encadrer les pratiques jugées potentiellement dangereuses. Mais les remèdes pourraient être pire que les maux. Plutôt que de demander davantage d’intervention publique pour combattre les fake news, Pierre Bentata préconise l’éducation : la culture scientifique et l’apprentissage des bases de la rationalité pourraient atténuer l’effet de filtrage de l’information.

Si l’automation transforme le droit et dilue la responsabilité individuelle, le législateur devra également réfléchir en termes d’incitations économiques afin de ne pas décourager l’innovation de marché. Enfin, la fin de la liberté, tout comme les différents scénarios catastrophe liés à l’Intelligence artificielle générale, pourrait reposer sur une vision exagérément dystopique du règne des algorithmes.

La Chine pourrait nous donner un avant-goût de la société de surveillance que la technologie pourrait créer demain. Il est donc grand temps d’inventer le contre-modèle libéral du futur pour l’éviter.

  1. Viktor Mayer-Schonberger et Thomas Range, Reinventing Capitalism in the Age of Big Data, John Murray, 2018.
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  • Toute nouveauté a des côtés positifs et d’autres négatifs. Favoriser les premiers et éviter les seconds est possible.
    Mais en effet, la solution réside dans un haut niveau d’éducation. On n’en prend pas le chemin.

  • Le digital est parfaitement incompatible avec la responsabilisation individuelle. Je serais ravi si vous me trouviez des contre-exemples.

    • çà dépend dans le digital il y a ceux qui savent , et ceux qui utilisent
      il y a beaucoup plus de gens pour en parler que de gens pour savoir comment çà marche et quelles peuvent etre les perspectives , l’abêtissement des masses est désormais indolore
      allons y donc a fond les manettes

      • Je pense avoir écrit suffisamment de programmes informatiques de traitement de données pour savoir comment ça marche… Et oui, l’abêtissement des masses qui se fient paresseusement à ce que le programme conclut des données est indolore, hélas !

  • la revolution digitale va rendre le monde plus con surtout.. pas besoin de savoir il faut juste appuyer là..
    Plus le peuple est con , plus c’est facile a diriger.. allons y donc pour les presse boutons vivant dans des clapiers le telephone a la main pour commander sa bouffe aux usines

    • Le problème ne vient pas du peuple mais des couches les plus instruites, les bobos New Age, qui rejettent la science et la raison au profit d’idéologies débiles!

  • « Il est donc grand temps d’inventer le contre-modèle libéral du futur pour l’éviter. »

    Et après l’invention, on passe à l’implémentation. Et comment fait-on face à « la route de la soie », par exemple ? Il faudrait alors résoudre ce conflit entre défense de la liberté et maximisation du gain pour le consommateur !

    Protectionnisme ?

    • Etes-vous sûr que les deux, maximisation du gain et défense de la liberté, ne soient pas les deux aspects parfaitement réconciliables d’un même système ?

  • La voiture autonome est la deuxième erreur industrielle après celle de Ford ( la voiture pour tous). C’est le transport en commun qui est à développer et pour les tout petits trajets le vélo et la marche à pied pour de devenir l’homo immobilis.

    • Donnez-moi des transports en commun au pied de ma maison, propres, confortables, disponibles, rapides, pas chers au trajet (mais payés par l’utilisateur,) avec un haut niveau de sécurité et de civilité, à l’heure et sans grève, sans vacances scolaires, avec de la place pour trimbaler mes courses / affaires, et la possibilité d’effectuer des connexions rapides aussi bien pour un trajet court que long, et je serai d’accord avec vous.
      Oh non, je viens de vous décrire les avantages de la « première erreur industrielle ».

  • Je pense que E.MAS ne vit pas dans le monde de Monsieur tout le monde. Quand il dit que pour faire face aux menaces technologiques il faut l’apprentissage de la rationalité et le développement de la culture scientifique, il est loin du « petit peuple ». En fait il donne le pouvoir à ceux qui ont la capacité à acquérir ces bases. Et comme par hasard cela reste l’élite.

    • Tout le monde est en mesure de le faire grâce à internet, il suffit de le vouloir!

    • @yann a marre
      le petit peuple est con.. i ne veut pas étudier .. il prefere faire le con avec les copains en classe .. resultat il a un job de merde et fait chier la société.?

      • Et ceux qui n’ont pas internet, ça ne vous vient pas à l’idée, vous vivez dans le monde de F.MAS, en dehors des réalités ou bien vous avez du mépris pour qui n’est pas conforme à ce que vous pensez.

      • Votre mépris est au niveau de votre suffisance. Qu’il y ait des gens « du bas » qui ne soient pas d’un niveau très élevé, je veux bien. Mais pour nombre d’entre eux leur milieu social (moyens matériels) ne les a pas favorisés. Votre raisonnement est celui d’un nanti puant.

    • La capacité à acquérir ces bases est bien plus répandue qu’on ne l’imagine. La motivation, la volonté manquent en revanche facilement. Et surtout, l’éducation et l’enseignement vont de moins en moins dans ce sens. Je me souviens qu’en 68, on refusait l’enseignement « pilule », que c’était une des causes du mouvement. Un mouvement qui a échoué, manifestement…

  • « Quand la voiture autonome se déplacera sur les routes de France, qui sera responsable en cas d’accident ? Celui qui possède la voiture ou celui qui l’a programmée pour rouler ? La question n’est pas anodine, les constructeurs pourraient réfléchir à deux fois avant de s’engager dans la production de tels véhicules si leur responsabilité juridique est engagée. »

    En outre, en fonction de la solution qui sera apporté par le VA au fameux « dilemme du tramway », les particuliers risquent fort de ne pas se précipiter à l’achat.
    Qui en effet pourrait vouloir se procurer un engin susceptible de le précipiter dans le décor pour sauver une bande de gosses qui surgit devant le véhicule ?

  • Toutes les évolutions technologiques majeures ont suscité des peurs. Rien de nouveau avec le numérique. Il est d’ailleurs bien normal que l’être humain se pose mille questions sur l’influence que pourra avoir une avancée technologique sur sa vie et sur l’organisation de la société. De là à fantasmer et à ne voir que les aspects négatifs, il n’y a qu’un pas, vite franchi par de nombreux essayistes. Quoi de plus vendeurs qu’un signal d’alarme ?
    Il faut savoir raison garder et prendre le numérique pour ce qu’il est : une technologie nouvelle qui nous aidera à traiter les processus répétitifs de pensée, mais qui ne disposera pas la libre créativité humaine.
    F. Mas a raison d’insister sur l’éducation. Une bonne maîtrise des outils informatiques conduit à les traiter pour ce qu’ils sont : des esclaves techniques bien utiles. Actuellement, il faudrait en particulier alerter les individus sur le caractère totalement négatif des réseaux sociaux (Facebook, Twitter, etc.). Il faut apprendre à la jeunesse que leur objectif est de capter de l’information pour l’utiliser commercialement, voire politiquement. Il faut donc leur en donner très peu et se passer d’eux si possible.
    Mais les réseaux sociaux ne sont qu’un tout petit aspect du numérique, même s’ils sont très populaires.

  • « Il est donc grand temps d’inventer le contre-modèle libéral du futur pour l’éviter. » Mais il existe déjà : c’est l’absence de modèle pour qu’émerge naturellement la solution. Encore faut-il parvenir à tenir les politiciens à l’écart pour limiter leur potentiel de nuisance. Modèle politique simple : Etat régalien minimal.

    Concernant la voiture autonome, c’est justement en engageant la responsabilité juridique des constructeurs qu’ils fourniront le meilleur produit au meilleur prix. Sans responsabilité individuelle, il n’y a plus de régulation possible.

  • Ce qui est sûr c’est que ça détruit des emplois et que ça facilite la cybercriminalité.

  • @La petite bête

    « Le digital qui détruirait le monde? »
    Revenons un instant aux réalités :
    Les robots n’utilisent des données que pour faire de la reconnaissance,mais ne pourront jamais INVENTER quoi que ce soit et être au NIVEAU de l’intelligence humaine !

    http://www.strategies.fr/actualites/marques/4027180W/-l-intelligence-artificielle-n-existe-pas-luc-julia.html

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