Le sel, énième danger selon l’OMS

Le nouveau combat de l’OMS : le sel. Va-t-il devenir l’ennemi public numéro un ?

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Le sel, énième danger selon l’OMS

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 23 juillet 2018
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Par Brice Gloux.

Dans un rapport paru en juin dernier, l’OMS donne quelques préconisations dans la prévention et la lutte contre les maladies non transmissibles.

Outre les mesures visant les réductions de la consommation d’alcool et de tabac (sans surprise via l’augmentation de taxes, de législation, ou d’interdiction), ou encore la lutte contre la sédentarité, l’organisation se fait aussi le devoir de lutter contre la mauvaise alimentation. Enfin… Si le titre évoque la malbouffe, les 4 pistes annoncées ciblent exclusivement le sel1. Focus.

Selon l’OMS, les maladies non transmissibles « appelées également maladies chroniques, tendent à être de longue durée, et résultent d’une association de facteurs génétiques, physiologiques, environnementaux et comportementaux. Les principaux types de maladies non transmissibles sont les maladies cardiovasculaires (accidents vasculaires cardiaques ou cérébraux), les cancers, les maladies respiratoires chroniques (comme la broncho-pneumopathie chronique obstructive ou l’asthme) et le diabète ».

Ces maladies étant responsables, toujours selon l’OMS, de 71 % des décès chaque année dans le monde, l’organisation s’est donc fait le devoir de baisser cette mortalité, et d’améliorer la prise en charge de ces maladies, en élaborant en 2013 un plan d’action mondial pour la lutte contre les maladies non transmissibles. Ce rapport proposait dans un premier temps une feuille de route traçant les objectifs des gouvernements sur la période de 2013 à 2020 ; puis en 2015, les objectifs de développement durable adopté par l’ONU établissaient l’Agenda 2030, dans lequel les gouvernements se sont engagés à réduire d’un tiers les décès liés aux maladies non transmissibles.

Pourtant, dès l’introduction de son rapport du 1er juin, l’OMS reconnaît que le manque d’investissement et d’intervention met à mal la réalisation de cet objectif, « qui aura d’énormes conséquences pour tous les pays, que ça soit au niveau sanitaire, mais aussi économique et sociétal ».

Il faut donc renforcer les recommandations, et intensifier les actions politiques, et ce au plus haut niveau. Cela peut faire penser à la campagne de prévention prescrite par les autorités publiques, les  fameux « Plans Nationaux Nutrition et Santé », PNNS pour les intimes. Si le plan ne fonctionne pas, renforçons ce plan, cela fonctionnera beaucoup mieux. Ou pas.

Parmi ces recommandations, l’OMS en spécifie 4 pour diminuer la mauvaise alimentation.

Après l’alcool et le tabac, l’ennemi, aujourd’hui, c’est le sel.

Et plusieurs industriels italiens ont déjà élevé la voix, notamment contre la dernière mesure, qui, à l’instar des paquets de cigarettes, les inciterait fortement à spécifier sur leur emballage que le sel tue. On pourra aussi s’attarder sur la demande de propagande incitant les déviants à réduire leur consommation de sel afin que chacun observe la zone recommandée.

L’OMS se fait donc le parangon de ce que devrait être la norme en matière de quantité de sel ingéré. Pourquoi cibler spécifiquement le sel ?

J’ai dressé un tableau présentant les 20 pays ayant la plus forte consommation de sel dans le monde, en y intégrant leur position dans le classement du taux d’attaques cardiaques.

Si on observe effectivement que parmi les 14 pays ayant la plus forte consommation de sel, on retrouve les pays enregistrant les plus haut taux de décès liés à une attaque cardiaque (en rouge), on note cependant aussi que plusieurs pays dans ce même tableau ont un taux de décès beaucoup plus faible : la Corée du Sud étant un exemple frappant, puisqu’elle présente le taux de décès le plus faible du monde malgré une dixième place dans la consommation de sel. J’aurais pu aussi évoquer Singapour, ou encore le Japon classé 15e consommateur de sel, et qui se retrouve juste avant la Corée du Sud en termes de décès.

Mon propos n’est pas de considérer le sel, à partir de ces données, comme dénué de danger. Je m’interroge néanmoins sur ces recommandations qui visent ni plus ni moins à diaboliser un élément fondamental (exactement comme le gras ou le cholestérol, alors que des études récentes démontrent le contraire), sous couvert de l’objectif d’une meilleure santé.

Pour aider le législateur et autres gourous ministres de la Santé, l’OMS a concocté un petit guide technique, le programme SHAKE, « conçu pour aider les États membres à élaborer, déployer et suivre des stratégies de réduction de la consommation de sel afin de leur permettre de réduire l’apport en sel dans la population. »

Dès l’introduction, le ton est donné.

La consommation excessive de sel est associée à différents risques sanitaires, qui sont chaque année à l’origine de millions de décès prématurés. On estime, par exemple, que l’hypertension artérielle fait 9,4 millions de morts par an (1). À l’échelle mondiale, en effet, la consommation de sel est beaucoup trop élevée. Tant les pays développés que ceux en développement doivent endiguer la menace que le sel représente pour la santé publique.

Visiblement, le sel est un ennemi public. Trop de sel = trop de tension = trop de morts. Imparable.

Mais non. De la même manière que pour les maladies cardiovasculaires, j’ai repris le tableau des pays à plus forte consommation de sel et leur position dans le classement des décès liés à l’hypertension.

Si on observe que deux pays (en rouge) sont placés assez haut en nombre de décès liés à l’hypertension, plus de la moitié des pays à forte consommation de sel ont un taux de décès liés à l’hypertension très faible. Le Japon, à la 15e place a le plus faible taux de décès liés à l’hypertension. Certains objecteront qu’il est possible que la prise en charge précoce des patients hypertendus au Japon évite leur décès, et en effet, depuis 1960, diverses campagnes de prévention vont dans ce sens.

Néanmoins, des pays comme la Thaïlande ou la Corée du Sud n’ont pas de telles politiques de santé, et présentent pourtant des taux de décès assez bas (lire cet article qui montre que les Coréens gros consommateurs de sel sont ceux ayant le moins d’attaques cardiaques, ou d’hypertension.)

Cette différence de taux de décès liés à l’hypertension entre les pays les plus consommateurs de sel interroge encore davantage sur l’intérêt d’un immense plan de campagne mondiale de diabolisation subventionnée contre le sel. Une recommandation unique pour l’ensemble des pays du globe ? Il y a maintenant 20 ans, Gary Taubes s’interrogeait déjà sur le sujet.

Si l’excès de tout produit conduit à l’apparition de troubles (« Tout est poison, rien n’est poison : c’est la dose qui fait le poison »), pointer un élément en particulier, qui plus est sans une analyse complète du régime alimentaire et du profil des individus, peut conduire à un sous-apport en sel tout aussi néfaste pour la santé.

Diverses études attestent qu’un faible taux de sodium peut être mortel.

Cette étude de 2014 montre que plus le taux de sodium consommé est faible, plus le risque de maladies cardiovasculaires augmente (cf tableau ci-dessous). Ou cette étude de 2016 qui montre là aussi que les régimes à faible teneur en sel augmentent significativement le risque de troubles cardiaques chez certains.

On note que l’OMS préconise une consommation de 5 g de sel (comprendre chlorure de sodium), soit 2,3 g de sodium par jour. Je vous laisse le soin d’observer sur ce graphique que le risque de mortalité s’élève à 1,4/1,5 si ces recommandations sont respectées. Risque non atteint par la consommation de 12 g de sodium.

Je le répète une nouvelle fois. Il ne s’agit pas de ne pas se préoccuper de la quantité de sel consommée, mais davantage de la propagande des messages de santé financés… par vos deniers (campagne du ministère de la Santé, taxes répercutées sur les prix des produits devant se soumettre à la norme étatique).

Notre organisme est en mesure de gérer un excès de sodium par l’intermédiaire des reins qui vont l’éliminer. Cet article démontre que, même en cas de condition extrême, le corps est en mesure d’excréter, non sans risque, le surplus de sodium. À l’instar des chameaux dans le désert, l’organisme placé en situation extrême (régime très salé, sans eau) est capable de produire sa propre eau pour excréter le surplus de sodium, en détruisant ou les muscles, ou le gras. Cet autre article suggère que même une quantité énorme de sodium peut être excrétée en totalité.

Si le corps sait s’adapter à un régime élevé en sel, il s’accommode beaucoup moins bien d’un régime hyposodé. La recapture du sodium nécessite là encore l’intervention des reins, ou plutôt des glandes surrénales, qui vont produire l’aldostérone pour conserver ce sel, mais au détriment du potassium. Or un faible taux de potassium a des conséquences directes sur les muscles, les os, et le cœur. De plus, la production d’aldostérone s’accompagnera d’une production de cortisol, et d’adrénaline, deux hormones du stress.

Aussi, l’activation de ce système rénine-angiotensine-aldostérone peut avoir un effet sur la résistance à l’insuline, l’hormone régulant la glycémie. Cette résistance, se produisant en sept jours chez des individus sains, conduit à un blocage de l’entrée du sucre dans les cellules d’un patient diabétique.

Il paraît ainsi douteux, voire absurde que l’OMS et tous les gouvernements préconisent la diminution de la consommation de sel, et en même temps continuent à recommander un apport de 40 à 55 % de glucides dans l’apport énergétique total.

L’argument fataliste de l’augmentation liée au vieillissement est faux : chez les enfants la prévalence était de 9,6 nouveaux cas pour 100 000 en 1997, elle est passée de 18 pour 100 000 sur la période 2013-2015. Et cela continuera tant que ces institutions ne se remettront pas en question.

Notre santé ne se réduit pas à une simple pincée de sel en plus ou en moins. Dans le domaine de  la nutrition, chaque jour apporte son lot de nouvelles découvertes sur le fonctionnement du corps. Si la science avance, il n’en est pas de même pour les institutions souhaitant garantir la santé de tous.

  1. Ici sel s’entend comme sodium (NA+).
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  • C’est un constat imparable bien salé.

  • Si la science avance, il n’en est pas de même pour les institutions souhaitant garantir la santé de tous.

    Elles préfèrent faire leurs choux gras avec des études bidons ou mal interprétées. Cela ne manque pas de sel.
    Et surtout pas assez de sel => diabète … Qui l’eut cru ! On est cuit…

  • je vais de ce pas enlever la pierre de sel mise dans l’étable des vaches et des chèvres…..elles risquent de porter plainte.

  • Certaines études comparent la dangerosité du glyphosate à celle du sel. La réponse de l’OMS est de déclarer ce dernier dangereux?

  • il y aura toujours une cause de décès… ma question est..à quelle augmentation d’espérance de vie peut on s’attendre en réduisant le sel d’une certaine façon?
    si il faut se faire ch..ier toute sa vie à contrôler les apports en lisant toutes les étiquettes pour au final gagner 8 mois d esperance de vie…zut.

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