Par Bill Wirtz.
En réalité, c’est l’Union européenne qui a ouvert les hostilités dans la « guerre commerciale » en pratiquant un protectionnisme déguisé.
L’Union européenne dit riposter aux nouvelles taxes douanières américaines sur l’acier et l’aluminium imposées par l’administration de Donald Trump. Après une première dérogation, le président américain semble maintenant plus déterminé à poursuivre sa tentative de protéger les industries américaines.
Grâce à un droit de douane de 25 % sur l’acier et à un droit de douane de 10% sur l’aluminium, Trump entend protéger les producteurs américains de la concurrence étrangère et conserver des emplois aux États-Unis. Cela reste fidèle à la ligne générale de Trump, notamment sa taxation sur les avions de série C du constructeur canadien Bombardier (des avions partiellement produits au Royaume-Uni) et aux taxes sur les panneaux solaires et les machines à laver importés.
L’Union européenne a récemment annoncé des représailles contre ces droits d’importation. Elle a intenté une procédure devant l’OMC et veut contrer les mesures américaines en instaurant des taxes douanières sur les vêtements, les véhicules à moteur, le jus d’orange ou les cigarettes de provenance américaine.
L’Union européenne ne parvient pas à dépasser le mercantilisme de Donald Trump. Pourtant, avant son élection et durant ses premiers mois au pouvoir, les politiciens européens soutenaient le libre-échange. Là où Trump voulait moins de libre-échange, l’Europe a répondu par plus de coopération économique. En juillet 2017, nous avons vu des titres comme « L’UE et le Japon scellent un accord de libre-échange comme réponse à Trump. »
« Bien que certains disent que le temps de l’isolationnisme et de la désintégration revient, nous démontrons que ce n’est pas le cas », a déclaré le président du Conseil européen Donald Tusk lors d’une conférence de presse avec le Premier ministre japonais Shinzo Abe.
Plus tard, cependant, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a complètement renversé ce retour aux principes économiques. Dans une citation désormais légendaire, Juncker a déclaré à Hambourg :
Alors maintenant, nous allons également imposer des taxes sur les importations. Il s’agit, fondamentalement, d’un processus stupide, le fait que nous devions faire cela. Mais nous devons le faire. Nous allons maintenant imposer des taxes sur les Harley Davidson, sur les jeans Levis, sur le bourbon. Nous pouvons aussi agir stupidement. Nous devons aussi être aussi stupides.
L’épisode s’est terminé par une exemption d’un mois concédée par Trump à l’Union européenne. Ce délai est maintenant expiré et aucun accord n’a été conclu.
À Bruxelles, les législateurs sont en désaccord, alors que Washington ne semble pas y voir une priorité de négociation. Même Donald Trump ne semble pas impressionné par les menaces venant de l’UE. Contrairement à la dernière fois, nous n’avons pas été exposés aux tweets sur les voitures allemandes, mais nous avons reçu une réaction à la décision de l’UE de lancer un appel à l’OMC :
Les sournoises barrières de l’Union européenne
Les médias diffusent que l’Union européenne est désormais obligée de « répondre » à une guerre commerciale initiée par les États-Unis. Mais Donald Trump a-t-il raison de dire que les produits américains sont traités injustement en Europe ? La réponse est : oui, absolument.
Voici des exemples de taxes imposées par les États-Unis sur un certain nombre de biens (chiffres tirés de la Commission du commerce international des Etats-Unis) :
- Voiture diesel : 2,5 %
- T-shirt : 16,5 %
- Parapluies : sans taxes douanières
- Huile d’olives : 5 cents/kilo (5 $/100 kg)
- Biscuits : sans taxes douanières
- Cigarettes : 1,05 $/kg + 2,3 %
- Sucre de canne : 1,24 $/tonne
- Jus d’orange : 7,85 $/100 litres
Voici les taxes de la Commission européenne pour un certain nombre de biens (chiffres tirés de la Commission européenne) :
- Voiture diesel : 16 %
- T-shirt : 8 %
- Parapluies : 4,7 %
- Huile d’olives : 134 €/100 kg (156 $/100 kg)
- Biscuits : 9 % EA (taxe additionnelle agriculture), 24,2 % ADSZ (taxe additionnelle sur le sucre)
- Cigarettes : 57,6 %
- Sucre de canne : 4,6 €/100 kg (5,37 $/100 kg, 53,7 $/tonne)
- Jus d’orange : 12,2 %
Cette sélection aléatoire montre que l’Union européenne taxe déjà fortement les importations en provenance des États-Unis.
La preuve par le jus d’orange
En fait, alors que l’UE menace d’introduire des droits sur les produits qu’elle n’a pas encore taxés (comme le bourbon), elle veut également augmenter les taxes sur des choses comme le jus d’orange, qui sont déjà lourdement pénalisées. Aux taxes s’ajoutent des barrières non-tarifaires : la réglementation de la qualité des aliments ainsi que d’autres normes de sécurité et enfin les subventions agricoles.
Pour exporter vers l’Union européenne ou l’un de ses membres associés, un producteur de jus d’orange américain doit se conformer à la directive 2001/112 / CE du Conseil de l’Union européenne sur les jus de fruits (amendée en 2009 et 2012 pour renforcer les exigences sur l’étiquetage et le contenu des jus). Cette directive décrit par le menu les modalités de contrôle sanitaire (législation alimentaire, pesticides), de contrôle phytosanitaire, et fixe les normes de commercialisation.
Notre producteur est obligé de tout savoir sur le règlement (CE) numéro 852/2004 relatif à l’hygiène des denrées alimentaires, ainsi que le règlement (CE) numéro 2073/2005 concernant les critères microbiologiques applicables aux denrées alimentaires et le règlement (CE) numéro 466/2001 du 8 mars 2001 fixant des teneurs maximales pour certains contaminants dans les denrées alimentaires.
En réalité, incapable de comprendre tous ces règlements lui-même, il paie des intermédiaires pour l’aider à se rendre conforme. S’il ne respecte pas ces réglementations, les distributeurs vont abandonner ses produits car selon le droit de l’UE, l’importateur est responsable des produits importés.
En plus de cela, il devra payer un droit d’importation de 12,2 %.
Après avoir respecté toutes ces règles, il sera ensuite en concurrence sur un marché européen dans lequel les producteurs espagnols de jus d’orange reçoivent des subventions agricoles (qui représentent 40 % du budget annuel de l’UE) et peuvent donc vendre beaucoup moins cher.
Les barrières non-tarifaires ont autant d’importance que les barrières tarifaires, même si elles sont plus difficiles à mesurer. Comment l’Union européenne prétend-elle soutenir le libre-échange en tant que valeur, avec ces restrictions ?
Une guerre commerciale dont le consommateur fera les frais
Le président Trump exagère lorsqu’il affirme qu’il existe de fait un droit de douane de 100%, mais il n’a pas tort de dénoncer le double jeu de l’UE. Alors que l’Union européenne est pour le libre-échange à l’intérieur de ses propres frontières, c’est un bloc protectionniste pour quiconque souhaite commercer avec elle.
L’Europe est le plus grand partenaire commercial des États-Unis. Le commerce des biens et services des États-Unis avec l’UE a totalisé près de 1 100 Md$ en 2016. Les exportations se montaient à 501 Md$ ; les importations ont totalisé 592 Md$.
Ce sont les consommateurs qui font les frais de cette guerre. Ce sont les consommateurs qui paient les droits de douane et les augmentations de prix des producteurs locaux protégés de la concurrence internationale.
Bien sûr, pointer du doigt « qui a commencé » la guerre commerciale ne résout pas le problème fondamental. Ni Bruxelles, ni Trump ne soutiennent des relations commerciales transparentes. Une réaction de l’Union européenne allant dans l’intérêt de tous ses ressortissants serait réduire les droits de douane sur les importations américaines. Cela signifierait que la valeur du libre-échange en Europe prime, peu importe que Trump utilise le mercantilisme à des fins politiques.
S’il y a une guerre commerciale, ce devrait être celle consistant à voir qui peut le plus abaisser ses barrières tarifaires.
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Pour plus d’informations, c’est ici.
L’auteur cite les réglementations sur les produits alimentaires mais, si j’ai bien compris, c’est un vrai chemin de croix pour les entreprises du domaine pharmaceutique Françaises qui veulent vendre aux US en matière de réglementations…
Pour les constructeurs d’avions, il me semble également que ce n’est pas facile…
Bref, le libre échange n’est pas pour demain…
Les compagnies américaines ont plein d’Airbus, alors arrêtez de dire n’importe quoi.
Le problème est bien que nos media passent leur temps à mentir et désinformer leurs lecteurs, comme l’histoire des enfants vient de le démontrer!
Comme par hasard, vous ne répondez pas concernant le domaine de la santé.
Et, pour avoir bosser avec (contre ?) l’US-FDA, ils font du protectionnisme à 100 %. Là où le marché européen est bien plus ouvert.
Premier exemple : déjà, rien que pour avoir le droit de leur parler, il faut avoir un représentant américain (ou green card holder) … Et, bien sûr, cela marchera beaucoup mieux si c’est une entreprise américaine du secteur.
Je ne parle pas des fromages, etc.
Cet article est du foutage du gueule qui prend quelques exemples bien choisis pour essayer de faire croire que les USA ne sont pas fondamentalement protectionnisme. Une blague pour quiconque a déjà bossé sur la question.
1. L’amérique rackette avec son « droit » les entreprises non américaines
2. L’amérique espionne les entreprise pour leur faire échouer des contrats
3. Vous analyser les produits où les droits de douane européen sont les plus fort, mais regardez aussi les endroits où les droits de douane américains sont les plus fort
4. Les USA font du protectionnisme (small business act ect…)
Article qui lutte contre les fake news diffusés quotidiennement par nos médias. Merci.
La comparaison par sondage (statistique) a toute sa valeur, néanmoins, je souhaiterais savoir s’il existe des études exhaustives sur les droits de douane pratiqués à gauche et à droite de l’atlantique ?
Cette comparaison ne vaut rien. 8 exemples bidons sélectionnés on ne sait comment.
Sinon, on en parle des normes américaines qui interdisent de vendre du fromage français ?
Il a sans doute raison, les freins aux échanges peuvent être très sournois via la réglementation et les subventions. Pour clarifier les débats, il serait bon d’avoir des chiffres globaux : produit intérieur, total des importation, total des exportations, total des droits de douane. Les chiffres globaux sont bien plus significatifs que quelques cas spécifiques. Même si le libre échange n’est pas total (il peut y avoir des secteurs vraiment stratégiques à préserver et il faut aussi se préserver d’un transitoire brutal si un pays se live du jour au lendemain à un dumping éhonté), un bon objectif pourrait être que le ratio entre les droits de douane et le PIB reste très bas.
Article intéressant parce qu’argumenté et surtout » chiffré » .
Trop de journalistes et autres experts en économie nous inondent de considérations diverses et variées pour étayer leurs crédos sans s’appuyer sur les comparaisons chiffrées . Il est vrai que la politique s ‘ accommode mal des chiffres .Gênant ?
Les barrières non-tarifaires sont largement aussi importantes aux Etats-Unis. De plus, ceux-ci ferment totalement leurs marchés publics, alors qu’ils sont ouverts en Europe. Les tarifs douaniers européens se font dans les règles de l’OMC.
Les marchés publics ne sont pas fermés aux USA. Les gardes côtes ont 100 hélicoptères français Dauphins et l’US Army 350 UH-72A Lakota de Airbus Helicopters. Lorsque on ne sait pas il vaut mieux se taire, sinon on passe pour un charlot.
Les UH-72A sont made in USA via une filiale américaine (Mississippi). Les Dolphin c’est pareil (Texas). Par contre, nos C-130J sont bien made in USA aussi (Georgie).
Et, sinon, il n’y a qu’à voir ce qui s’est passé avec les KC-45 (EADS+NG). Alors, oui, officiellement les appels d’offres sont ouverts. Officieusement, si vous ne faites pas équipe avec une entreprise américaine ou que vous ne produisez pas aux USA : c’est même pas la peine. Et, quand bien même (cf. KC-45), cela n’assure rien face au 100% US.
Votre mauvaise foi est donc assez incroyable.
D Trump vient de prendre une décision, mettre les tarifs douaniers de l’acier européen à 25 % et de l’aluminium européen à 10 %..
visant a relocaliser ses usines.
L’Union européenne avec Macron, a en effet, préparé des contre-mesures qui viseraient:
– le bourbon du Kentucky,( ceux qui aiment cette boisson paieront un peu plus cher ou se mettront au whiskies)
– les sodas (? coca cola a 5 usines en france et 1200 commerciaux)
– les motos Harley-Davidson,(combien de ces motos en france par rapport au parc des 2 roues de +de 125cc?)
-les jeans Levi’s (Le jean Levi Strauss, n’est plus fabriqué en Occident. depuis 2003, et a annoncé hier la fermeture de ses deux dernières usines en Europe de l’Ouest. Elles coûtaient deux fois plus cher que ses sites en Pologne, en Hongrie et en Turquie.)
l- les autos américaines (elles ne sont pas très représentatives dans le parc Français )
– le beurre de cacahuète etc..etc
en voila des mesures de rétorsion efficaces !
Emmanuel Macron a appelé, à « refonder les règles de l’Organisation mondiale du commerce ». Les États-Unis ont, en effet, entamé un travail de sape visant à bloquer le renouvellement successif des juges de l’organe d’appel de l’OMC. À noter que cette attitude n’est pas attribuable au seul président Trump. Le blocage progressif de l’OMC a débuté sous l’administration Obama.
Si une entreprise européenne est victime de sanctions aux États-Unis, les entreprises américaines de la filière concernée ou ses concurrentes directes pourraient se voir pareillement sanctionnées sur le territoire européen. Œil pour œil, dent pour dent. Une possibilité qui n’existe pas, et qui accroîtrait les délocalisations.
Les entreprises américaines emploient plus de 442.000 salariés en France et génèrent 2 millions d’emplois indirects, selon la Chambre de Commerce Américaine (AmCham).
j’ai travaillé un temps dans une grande entreprise française avant Trump , ou pour commercialiser librement nos produits aux USA nous avions du nous implanter sur le territoire us en créant des unités de fabrication donc des emplois !
J’achète beaucoup sur ebay et quand je reçois un achat des USA les droits de douane sont salés: 70 euros pour 180 de valeur, soit 39%.
@virgile
tout a fait et ça ne date pas uniquement de l’arrivée de l’arrivée de D Trump. c’est lié au type de produit car la taxe d’exportation est variable suivant les produits.
mais la 39% c’est du salé !
Merci contrepoints, j’ai enfin ma réponse sur l’équilibre entre les taxes USA vers UE et inversement.
Encore une mauvaise explication et un manque d’investigation de nos chers médias…
Pourtant, qu’on aime ou pas Trump, son action est d’un coup plus justifiée, contrairement à ce qu’on veut bien nous faire croire.
Après pour les conséquences… Bah c’est la vie comme on dit, on va forcément trinquer un peu plus à cause justement de mauvaises analyses (volontaires) de nos dirigeants…
Je vois qu’on se bat entre nous pour savoir qui est le plus protectionnistes entre les E.U et l’Europe. J’ai pas d’avis pour le coup, mais ils le sont tout deux assurément.
Et ça c est mal.
Je suis globalement d’accord. On n’est pas moins protectionniste, par les taxes douanières, que les States.
Mais la taxe ne fait pas tout, il y a aussi du protectionnisme « technique ». Prenons l’exemple des véhicules diesel : en apparence, le véhicule diesel ne subit presque aucune contrainte. Mais c’est faux. Car les normes d’homologation américaines, notamment sur les rejets de NOx, sont quasi impossibles à tenir pour un véhicule diesel lambda, car le seuil en Amérique, est fixé au même niveau que l’essence, alors qu’il est 3 fois supérieur en Europe.
Il est un peu surprenant que l’auteur ne fasse pas même mention des règlementations et complications en tout genre dont sont très souvent hérissés les états eux-mêmes, les états formant la confédération américaine.
« Technically speaking », ce ne sont pas des droits de douane, mais quiconque a eu à s’y frotter saura de quoi je parle…
@Virgile: Hélico/Dauphins: la commande était une compensation pour un autre marché, les AWACS je crois.
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Certificitation aéronautique: Les règles aux US et en Europe sont similaires, pour la bonne est simple raison que ca profite aussi bien à Boeing qu’à Airbus.
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Acier: l’info date déjà mais connaissant une personne proche travaillant dans l’acier, celui-ci m’avait tjs dit que l’industrie de l’acier était très en retard technologiquement aux US par faute d’investissement et absolument pas compétitive, d’où le besoin de droits de douane. Seul problème, les constructeurs automobiles US en patissent probablement, car les carrosseries utilisent parfois des aciers très spécifiques, éventuellement seulement dispo en Europe, on parle pas d’acier pour pieds de table.