Le trou toujours plus profond de la dette noire

Le dernier chiffre du déficit pourrait faire croire à une amélioration des finances publiques. En réalité, la progression du « hors bilan » ou « dette noire » est très inquiétante.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Le trou toujours plus profond de la dette noire

Publié le 5 avril 2018
- A +

Par Simone Wapler.

L’heure est au satisfecit. Les médias s’enthousiasment sur le très modeste déficit de la France : 2,6% du PIB.

« Déficit budgétaire limité », « dans les clous européens », « sous les 3% pour la première fois depuis 2007 ». Nos finances publiques baignent dans le beurre, à entendre certains médias.

D’autres, comme Le Figaro ou Les Échos sont plus réservés. Le premier parle d’ « amélioration en trompe l’oeil ». Le second parle de la « pression fiscale record ».

[related-post id=302134 mode=ModeLarge]

Les chiffres ont effectivement de quoi refroidir : l’État français dépense toujours plus d’année en année ; le moindre déficit n’est dû qu’à plus d’impôt et un peu plus de croissance, ce qui augmente les recettes fiscales. Le taux de prélèvement obligatoire monte à 45,4% du PIB et les dépenses publiques représentent 56,5% du PIB.

La dette atteint 97% du PIB. En 2018, les intérêts devraient coûter 42,1 Md€ et l’Agence France Trésor a prévu d’emprunter 195 Md€ : le déficit et ce qui est nécessaire pour rouler les emprunts arrivant à échéance en s’endettant à nouveau. Cette cavalerie a été jusque là facile car les taux d’intérêt baissaient régulièrement. Cette période s’achève.

Une fois que vous avez tout cela en tête, la messe n’est pas encore dite. Il faut évoquer la « dette noire », encore qualifiée de « hors bilan ».

Un abîme de 4 070 milliards d’euros

Le dernier rapport de la Cour des comptes sur le sujet date de 2013. Seuls quelques rares observateurs s’intéressent à cette obscure comptabilité. L’énarque économiste Jean-Yves Archer en fait partie.

Lorsque des parents acceptent de se porter caution pour les loyers à venir d’un de leurs enfants, ils ne déboursent rien mais souscrivent une obligation de faire. En cas de défaillance, ils seront appelés en garantie.

Pour une entreprise ou pour l’État, le même principe existe et se nomme engagements hors-bilan.

Ce terme comptable qui figure obligatoirement dans un tableau récapitulatif dans les comptes annuels concerne les garanties de passif accordées, les opérations de crédit-bail, etc. Jean-Yves Archer

La dette noire représente des dépenses déjà prévues, l’ensemble des engagements futurs de l’État français et ses cautions qui ne s’activeraient qu’en cas de défaillance.

En 2016, le montant du hors bilan était d’environ 3 200 Md€. En 2017, il représente selon Jean-Yves Archer 4 070 Md€. D’où vient cette croissance explosive ? Pour le comprendre, il faut détailler ce vaste fourre-tout.

La retraite des agents publics, poids lourd de la dette noire

Les fonctionnaires d’État perçoivent une retraite ponctionnée directement sur le budget de l’État. Les futures pensions des agents en exercice sont donc un engagement de l’État. Il y en a pour 2 150 Md€.

Pas rassurant quand on sait que le nombre de fonctionnaire augmente. Vous comprenez aussi pourquoi les tentatives d’aligner le régime des fonctionnaires sur celui du secteur privé sont toujours vite enterrées.

Signalons que l’OCDE conteste notre présentation de la compatibilité publique sur ce point et souhaiterait que la dette de la France intègre ce poste. Ce qui ferait que notre ratio dette sur PIB doublerait, passant en gros à 200%… Pas certain, dans ces conditions, qu’on s’arrache toujours les émissions de dettes françaises.

Reste 1 920 milliards d’euros.

Des indices ? Entendez-vous ces bruits de trains ? Vous souvenez-vous de Dexia ou du Crédit Lyonnais ? Voyez-vous ces fumerolles au-dessus d’Areva et d’EDF ?…

Pour plus d’informations, c’est ici

Voir les commentaires (7)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (7)
  • Cela permet au bon peuple de croire au père noël, ce n’est pas visible (trou noir!) mais quelque part il faudra payer d’une manière ou d’une autre.

  • La France a bien une tête de Théo. On ne viendra pas pleurer. On savait.

  • Bel article. Une dénonciation de l’inconséquence et de l’imposture qui va impacter notre devenir…Pauvre France!

  • « Les futures pensions des agents en exercice sont donc un engagement de l’État. Il y en a pour 2 150 Md€. »
    Comment cette somme est calculée ?
    Prévision d’espérance de vie moyenne à la retraite * nombre de fonctionnaires ? Sur quelle base, uniquement les fonctionnaires actuels ?

    • @Axs
      Il y a 5.450.000 fonctionnaires en activité en France, dont 2.398.000 fonctionnaires d’Etat. Ces fonctionnaires ont droit à une retraite. Sachant qu’il y a parmi eux des hauts fonctionnaires très bien rémunérés qui auront donc une très belle retraite, tout comme les sénateurs, les députés, (à 1500€ mensuels pour un mandat de 5 ans) et autres anciens chefs d’Etat, vous avez les 2150 mds€.

      • edit :
        2150Mds€ qui représentent à 100Mds près, la dette officielle de la France et ne seront de toute façon pas suffisants, même en triplant le SMIC, et les taxes qu’il rapporte.

      • Dette officielle de 2218Mds€ et dette hors bilan de 4070Mds€, soit 6288Mds€. Ce qui représente 93850,74€ par habitant. Une paille, c’est mon argent de poche ! 🙂 (c’est ce que j’aurais touché au total dans 11 ans). Ca correspond à 5 ans de salaire brut au smic, et plus de 6 ans et demi en net. Tripler le SMIC ne suffira pas.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Un article de l'IREF.

En janvier dernier, dans un entretien accordé au Journal du Dimanche, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, annonçait la fin du « quoi qu’il en coûte ».

L’examen parlementaire en cours des projets de loi de finances de fin de gestion pour 2023, et de loi de finances pour 2024 montrent à l’inverse que, loin d’être fini, le « quoi qu’il en coûte » se poursuit. Et ce en dépit d’un goulet d’étranglement appelé à se resserrer du fait de l’aggravation de la charge de la dette dans les prochai... Poursuivre la lecture

Un article de l'IREF.

En 2022, pour alimenter un fonds pour le climat et la transformation énergétique  – KTF – de 212 milliards d’euros, le gouvernement allemand avait puisé à due concurrence dans les réserves non utilisées d’un autre compte, constitué en 2021 pour contribuer à l’amortissement de l’impact du coronavirus. Mais celui-ci avait bénéficié d’une suspension des règles du « frein à l’endettement », en raison de la pandémie. Ce qui ne pouvait plus être le cas du fonds KTF.

La CDU/CSU, les conservateurs dans l’opposition... Poursuivre la lecture

gouvernement électricité carburants taxes remaniement Bruno Le Maire
1
Sauvegarder cet article

Un article de l'IREF

La dette publique française a dépassé le seuil de 3000 milliards d'euros.

Elle a atteint 3013,4 milliards d’euros le 31 mars 2023, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).

Le gouvernement voudrait réduire le déficit public de 4,9 % en 2023 à 4,4 % dans le budget 2024. Mais le défi est considérable, alors qu’en août 2023 les taux d’emprunt de l’État français à dix ans ont dépassé le seuil de 3,25 %.

Selon les prévisions de Bercy, la charge annuelle de la det... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles