Le prélèvement à la source va détruire des emplois

Le prélèvement à la source devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2019. Pour les entrepreneurs, l’effet risque pourtant d’être destructeur.

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Le prélèvement à la source va détruire des emplois

Publié le 31 janvier 2018
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Par Éric Verhaeghe.

C’est en me renseignant en Belgique sur les possibles créations d’entreprise (puisque Tripalio que j’ai fondée envisage de s’exporter), que j’ai compris le mécanisme. Le conseiller que j’interrogeais m’expliquait qu’une entreprise de recherche et de développement peut bénéficier d’une « exonération du précompte » mais pas des cotisations de sécurité sociale sur ses recrutements. Je lui fais répéter la phrase : mais qu’est-ce que le précompte ? C’est l’avance sur l’impôt sur le revenu payée par les salariés.

Ahhhh ! c’est donc ça le lézard caché du prélèvement à la source : un renchérissement du coût du travail à hauteur de l’impôt payé par le salarié pour tout nouveau recrutement ! Mais on ne nous l’avait pas dit !

Le prélèvement à la source tue la création d’entreprises

Lorsqu’un entrepreneur créera une entreprise, à partir du 1er janvier 2019, il devra faire l’avance de l’impôt payé par le salarié qu’il entend recruter.

Officiellement, bien entendu, cet impôt viendra en déduction du salaire proposé dans l’annonce. Mais pratiquement, si les Belges en sont venus à pratiquer des exonérations de « précompte », c’est bien parce qu’il existe un effet induit qui ne dit pas son nom : peu à peu, l’impôt est intégré, par le salarié, au calcul de sa rémunération.

Prenons un exemple simple : un entrepreneur crée une entreprise et promet un salaire de 1.500 euros nets… Jusqu’ici, il intégrait les cotisations salariales pour estimer son offre en brut. Désormais, il devra intégrer l’impôt mensuel payé par le salarié.

Si les cotisations salariales ont en partie disparu, ce n’est pas le cas des cotisations patronales. Celles-ci devront désormais être ajustées au volume global que le salarié demandera pour atteindre le net promis par l’employeur.

Bref, le coût du travail va sacrément augmenter. L’effet du prélèvement à la source sera inflationniste à un moment où la reprise pourrait avoir lieu.

Le prélèvement à la source et son inutile complexité

Rappelons que le prélèvement à la source ne dispensera pas d’une déclaration annuelle de revenus. Si cette mesure reporte sur les entreprises la charge de la collecte, elle ne simplifie la vie de personne.

La mesure a justifié 26 pages de Journal Officiel en son temps. Toute cette complexité pour rien.

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  • …comment est-ce possible?
    L’impôt sur le revenu est déduit du salaire net…
    Donc s’il fait l’avance de cet impôt à l’état, c’est l’employé qui percevra moins… non?
    Ça devient kafkaïen…

    • Oui a priori c’est l’employé qui percevra moins, c’est le principe même du prélèvement à la source. Mais l’employé ne va pas apprécier du tout… l’employeur va expliquer que c’est pareil car l’employé devra payer son impôt sur le revenu tôt ou tard, mais l’effet va être désastreux. Ce n’est pas du tout pareil de percevoir 100 à la fin du mois (même en sachant qu’on devra payer 10 d’impôt l’an prochain) et de percevoir 90.

      Bref, pour verser le même salaire net, l’employeur devra payer plus.

      • Et les fonctionnaires, seront-ils augmentés ou en grève ?

      • Mouai. Quand on a baissé la TVA sur la restauration, les prix n’ont pas diminué, mais les salaires non plus. Je me demande bien pourquoi, cette fois ci, ça changerait. Il ne faut tout de meme pas prendre les gens pour des imbeciles profonds.

  • Et surtout, le prélèvement à la source est adapté à une « flat tax » (taux identique quelque soit le revenu) mais pas à un impôt progressif.

    • Et aussi le prélèvement à la source est adapté à une imposition individuelle mais pas à un impôt calculé sur les revenus du foyer.

    • En effet. Les conséquences sur les salaires à l’embauche et les demandes d’augmentation pourraient bien être négligeables devant celles sur les salariés existants. De manière remarquable, avec l’effet de la progressivité, des autres revenus et du quotient familial, la hiérarchie des salaires n’aura plus rien à voir avec la hiérarchie des responsabilités, des travaux et des compétences. Les salariés vont déjà voir leur feuille de paie fortement amputée, ce qui est catastrophique pour le moral et la confiance, mais ils verront ou imagineront leurs collègues moins qualifiés et moins travailleurs mais disposant d’une famille nombreuse toucher plus. Insupportable !

    • C’est très exactement ça.

      Une « vraie » réforme efficace est la suivante :
      Salaire brut = total payé par l’employeur (=> fin de l’escroquerie des charges patronales cachées au salarié)
      2 prélèvements obligatoires maximum :
      – L’impot, à taux fixe (flat tax)
      – La/les assurances obligatoires : santé, chomage.

      Le restant constituant le salaire net définitivement acquis au salarié.

      La fiche de paie devient très simple : 4 lignes.

      Voilà une vraie réforme utile et efficace.
      Ils ne la feront jamais.

      • Une vraie réforme fiscale consisterait aussi a cesser tous ces impots d’assiettes et de formes illisibles. L’Etat met en place a un système ou au final tout est collecté sur les entreprises (IS, IS,Charges, TVA, …) .
        Allons donc au bout de l’exercice, et admettons que l’Etat collecte l’intégralité de l’ensemble des impôts uniquement sur les entreprises, constituant de fait une TVA 2.0 (Taxe sur le Volume d’Affaires) . En transformant la totalité des prélèvements obligatoires dans ce modèle , cette TVA 2.0 serait d’un taux de 24 ou 25%. Remplacant l’intégralité de tout ce qui est payé par ailleurs.
        Simplification du modèle, lisibilité, et le focus politique sera ramené a savoir quel est le taux, et quelle est la répartition des services fournis.
        Mais ça, aucun politocard n’en voudra, ça obligerait a être clair 🙂

  • On peut craindre deux effets : un effet déflationniste pour les bas salaires et un effet inflationniste pour les hauts salaires.

    – Les employés sans qualifications ne pourront pas argumenter de compensation pour compenser la part d’IR retenue à la source

    – Les cadres et hauts salaires se baseront sur le net après impôts pour négocier leur embauche

    Bref comme toute solution socialiste, celle-ci va augmenter les fameuses inégalités qu’elle est sensée combattre et écraser encore plus les bas salaires, ce qui permettra aux politiciens de renforcer leurs mensonges habituels sur la faute aux boucs émissaires (l’ultra-turbo-néo-libéralisme, les Illuminatis de la Finance mondiale, la mondialisation, les émigrés, les immigrants, les migrants …)

    cpef

    • surtout qu’il sera très facile d’accuser les entreprises de ne pas jouer le jeu (quel que soit le « jeu » qu’on s’attend à les voir jouer), ce qui sera visible, c’est le montant qui arrive sur le compte à la fin du mois. Donc ça sera nécessairement la faute aux « salauds de patrons » si ce montant baisse (ironiquement, ça le sera aussi pour les fonctionnaires, mais de ce côté on n’en entendra pas parler, ou alors il y aura des aménagements)

  • inutile et complexe ….ils s’en foutent , ce n’est pas eux que ça va emmerder…..

  • En fait, lorsqu’on est mensualisé, ça revient au même (OK, avec un décalage d’un an)… Mais au final, ça ne changera pas grand chose pour le salarié.

    Par contre, c’est vrai que les négociations de salaires vont devoir changer. Prise en compte de l’impôt ou non ? Il y aura des changements de comportement en effet. Mais bon, ça marche dans pleins de pays donc pourquoi pas chez nous ?

    • Parce que chez nous c’est par foyer et que partout ailleurs c’est individuel, par exemple ?

      • Et aussi qu’il n’y a pas 450 niches fiscales qui délivrent des crédits d’impôts qui permettent à certains de vivre (aides à la personne, par exemple) ou alimenter l’économie; au hasard l’immobilier et le Pinel qui finance la plupart des nouvelles constructions. On risque de bien s’amuser lorsque l’on va devoir modifier cette machine infernale.

    • Pourquoi pas chez nous ?
      Simplement parce que le génie français a réussi à prendre le pire des deux mondes.
      – Déclaration de revenus obligatoire
      – Déclaration par foyer et non pas individuelle (merci h16)
      – Taux progressifs, et même pas directement relatifs au salaire perçu par le salarié

    • D’abord, tout le monde n’est pas mensualisé. Ensuite, pour ceux qui sont mensualisés, les deux derniers mois de l’année, plus les autres compléments de fin d’année, sont presque exonérés sauf quand les impôts augmentent considérablement, ce qui met de bonne humeur pour Noël. Mais les négociations collectives deviennent impossibles, et les négociations individuelles surréalistes : impossible de se comparer à autrui, et il vaut mieux épouser son collègue de bureau que se montrer consciencieux, faire un enfant que des heures supplémentaires, etc. On aurait pu penser que l’évidence allait frapper nos dirigeants, et qu’ils seraient passés en même temps à l’imposition individuelle et au taux unique comme dans les pays où ça marche, mais non, pas le moindre signe que les évidences en France ne soient pas molles et incapables de frapper quiconque…

  • Donc pour que le patron calcule le futur I.R de l’employé potentiel, ce dernier devra lui filer encore plus de données personnelles afin de remplir les bonnes cases. Il aura donc connaissance du salaire du conjoint s’il y en a un(e), du nombre d’enfants, de ses revenus annexes… bref tout ce qui relève du privé et qui est (sensé être) confidentiel pour les agents des impôts qui vont être payés à… Bah a quoi en fait ?

    Acutellement pour un salaire net de 1500€
    salaire brut de 1943€
    coût total employeur : 2516€ sans « aides différées »
    2400€ avec « aides différées »
    Il faudra donc ajouer l’I.R aux 2516 (ou aux 2400) pour l’employeur, qu’il faudra donc enlever aux 1943 de l’employé.
    Ce doit être un progrès et une protection du pouvoir d’achat. Non ?

  • Je n’ai sans doute rien compris, mais, pour comparer le prélèvement de l’IR à la source avec un autre prélèvement à la source, à savoir celui de la CSG, je n’ai pas le souvenir que ce dernier ait suscité les questions soulevées ici, ni soulevé les mêmes craintes que le premier.
    Je n’avais, jusqu’ici, pas encore entendu parler de « précompte », et je pense que le patronat aurait pesté contre. L’auteur ne mélangerait-il pas ce qui se fait en Belgique avec ce qui va être fait en France ?

    • La CSG a un taux fixe pour tout le monde, comme pour la TVA.
      Enfin, si on omet la CSG non déductible et la CRDS… car évidement c’était trop simple et trop facile, il fallait que nos génies fiscaux compliquent.

      L’IR n’a pas de taux fixe : il dépend de la totalité des revenus touchés sur une année. Et ne peut donc être réellement déterminé que l’année suivante.
      Donc prélever l’impôt sur les revenus l’année même de ces revenus signifie les prélever en avance, d’où « précompte »…

  • C’est en me renseignant en Belgique sur les possibles créations d’entreprise (puisque Tripalio que j’ai fondée envisage de s’exporter)…

    De s’exporter ou de se délocaliser ?

    Janvier 2018 = URSSAF + Prévoyance et formation + Congés Payés + Retraites + Taxe d’apprentissage + TVA + Greffe du TC pour la déclaration de bénéficiaire effectif (54.42 € le formulaire + 2.58 € pour le travail de vérification du Greffier, un gag…) = TOTAL 24 000 € pour une masse salariale mensuelle d’env 8500 € NET (5 salariés + 1 apprenti) !

    Prévisions d’embauche pour 2018 = 0
    Prévisions pour les années suivantes = 0

    Et pour les TNS, il va se faire comment le prélèvement à la source ?

    PS : J’attends avec impatience la suite du Hold Up en février avec mon RSI (bien que ma rémunération de patron, pour env. 70h/semaine, soit inférieure à celle de mes salariés…

    • @Olivier B
      Bonsoir,
      Votre exemple montre bien que la France n’aime pas les gens qui travaillent, en particulier ceux qui le créent.
      Je suppose que vous n’avez pas été invité à Versailles ni à Davos pour participer aux fêtes du « Choose France ».

      • En effet STF, je n’ai pas été invité.
        Mais uniquement par manque de place dans l’avion.j’imagine.
        En fait, j’envisage désormais de me florenpagnyser.

  • Je ne vois pas la nécessité de faire l’avance des impôts, que ce soit de la part de l’employeur ou de celle du salarié.
    En fin de mois: Charges perçues et versées aux différents racketteurs (URSSAF etc…) et on ajoute « juste » un racketteur de plus non ?
    En FIN de mois.
    Version du « reste à percevoir » au salarié. Seul problème avoir le taux à l’avance…
    Mais cela peut se régulariser rapidement (Toujours plus rapidement que le RSI : 24 mois pour qu’un associé puisse s’affilier !! Remboursements des URSSAF 10 mois après le départ en retraite d’un associé…prélevé néanmoins !)

    • @ Balthazar

      Vous avez bien compris: c’est bien l’état qui percevra plus tôt vos impôts.

      Hélas, ce bénéfice supplémentaire (je doute beaucoup que l’état décide de « perdre » de l’argent pendant l’année « blanche »!) ne se produit qu’une seule fois: le « précompte » peut être comparé (face à l’ancien système), à une avance des impôts à payer. Ce n’est ni bon ni mauvais! Un salarié dépensera forcément moins de la somme que l’impôt lui prenait l’année suivante: avantage ou inconvénient?
      Le vrai pouvoir d’achat est bien le salaire « net de net » ou « en poche » après tout prélèvement!

  • Ma femme en Chine est prélevée a la source, et cela ne pose aucuns problèmes, il n’y a même pas besoin de déclaration a faire, donc moins de fonctionnaires payes par le secteur prive.
    Son employeur doit lui payer 1000, et elle doit payer 200 d’impôts, avec le prélèvement a la source, son employeur lui donne 800 et donne 200 aux impots.
    Absolument aucuns problèmes, même mieux moins de fonctionnaires qui ne crées aucunes richesse.

  • Il faut être vicieux pour préjuger du futur prélèvement à la source français sur la base du précompte belge, usine à gaz s’il en est, assorti para ailleurs de taux d’impositions pharamineux, même comparé à la France: 50% dès qu’on dépasse trois SMIC mensuels de revenu! Le système marche en revanche assez bien en Allemagne (où il doit bien y avoir dix fois moins de rubriques de cotisations sociales, très généralement il y a une retenue pour caisse maladie et une pour les retraites, et basta…ce qui aide et les entreprises et la compréhension des salariés. Et les Français seraient-ils moins intelligents que les Allemands pour ne pas réaliser que ce qu’on leur retient aujourd’hui, c’est ça de moins qu’ils auront à verser au prochain tiers provisionnel et pour ne pas se mélanger les pinceaux entre salaire brut et rémunération réelle?

    • Déjà aujourd’hui, juste les charges, partonales + salariales, je vous garantis que les gens ne réalisent pas

    • Et les Français seraient-ils moins intelligents

      Ils ne réfléchissent pas, ils croient que c’est leur employeur qui paie une partie de leurs cotisations. Et aucun ne s’étonne quand le salarié est malade, son employeur ne reçoit aucune prestation de la SS.

  • ça va avoir un effet négatif evident sur l’emploi

    la paye d’un salarié n’est deja pas facile a gerer pour une pme et il n’est pas rare d’y passer un a deux jours par mois, sans compter la nécéssité de suivre les « nouveautés »

    le recour a un expert comptable est ruineux

    beaucoup d’artisans vont renoncer a embaucher ou passer au « noir »

    • Très clair, un entrepreneur a deux métier … le vrai… et gérer le bordel de l’administration. C’est d’ailleurs volontaire, créer un bordel engendre la création d’emplois pour le gérer…:-)

      • Faux emplois bien sûr, au total, « ce qu’on voit et ce qu’on ne voit pas ». Un défi majeur de l’info, c’est comment faire voir aux gens combien tout le monde en ressort appauvri

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